Le Mépris

Homère vu par Godard

Patrizia Lombardo

Résumé

La critique homérique pose un problème étemel en littérature : l’emprunt. Cette question est fondatrice pour le cinéma et centrale pour Le Mépris de Godard, car ce film se veut conçu « d’après un roman d’Alberto Moravia » et se compose autour de l’adaptation cinématographique de l’Odyssée. Les questions esthétiques les plus générales sont abordées, en mettant en relation le monde antique et le monde moderne, le poème d’Homère et le cinéma lui-même, car dans le film on assiste au drame de quelques personnages ainsi qu’au tournage de quelques scènes de l’Odyssée. Une réflexion sur le Mépris dans la perspective de cet « Hommage à Gabriel Germain » permet une lecture de ce « classique » des années soixante qui souligne ce que Godard lui-même a défini : son caractère aristotélicien. La tragédie contemporaine de l’incommunicabilité et de l’incompréhension entre un homme et une femme se conjugue à une véritable recherche d’Homère qui juxtapose de différentes interprétations de l’Odyssée et de Pénélope, proposées par le metteur en scène (Fritz Lang) et par le producteur Jérémie Prokosch qui engage Paul (interprété par Michel Piccoli) pour écrire le scénario de l’Odyssée. Comme dans la vision d’Aristote, ce qui compte pour Godard est l’architecture du drame, la cohérence de ses éléments, la compénétration de la technique et des contenus, la qualité du sujet et l’exigence d’action. Mais surtout, comme les récits, la musique, la peinture, le théâtre selon Aristote, le cinéma incorpore au degré maximum la tendance humaine à représenter et à jouir de la représentation. Ainsi, dans le film de Godard, au moment même se déroulent les vicissitudes humaines les plus tragiques, Fritz Lang continue son tournage de l’Odyssée.
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