Dans le clair et malicieux regard de Vladimir Jankélévitch se cachait un esprit d’une vivacité légendaire. Il suffisait d’entendre sa voix frémissante et rapide pour être à jamais marqué d’une présence humaine incomparable. Courage et loyauté sont les deux premiers mots qui montent spontanément à l’esprit à la rencontre de son nom. Homme de tous les combats dignes d’être menés, moraliste et ardent défenseur des minorités opprimées, Jankélévitch fut chaque fois l’homme d’une seule et même parole, sans dédoublement possible.

Les 28 collaborateurs de ce magnifique Cahier de l’Herne qui honore sa mémoire s’accordent à décliner sur tous les tons non seulement la profondeur et la diversité d’une œuvre sans cesse en alerte et en mouvement, mais la détermination avec laquelle Jankélévitch a toujours condamné les abus de pouvoir et les totalitarismes quels qu’ils soient, et les discriminations de tous ordres parce que les crimes racistes visent l’idée propre d’humanité héritée des Lumières. L’exigence morale rejoignait chez lui la clairvoyance politique. « Tout le monde a des droits, sauf moi », disait-il. Pour lui amour et volonté de justice ne faisaient qu’un.

C’est cette voix unique et forte qu’il s’agit de réentendre aujourd’hui plus que jamais.