Revue de Théologie et de Philosophie

Bibliographie

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Raphaëlle Ziadé, L’art des chrétiens d’Orient, De l’Euphrate au Nil

Paris, Citadelles et Mazenod, 2022, 592 p.

Jean BOREL

Histoire de l’art

De tous les arts religieux qui ont enrichi les cultures de l’humanité, l’art des chrétiens d’Orient reste le moins bien connu du grand public. Et tout le monde sait aujourd’hui à quel point ces chrétiens et les communautés auxquelles ils appartiennent sont en danger. L’instabilité, l’insécurité et les guerres qui malmènent le Proche-Orient depuis des décennies, le statut juridique de dhimmis attribué aux minorités religieuses dans les pays de droit musulman, la persécution, les attentats et les exils successifs ainsi que la diversité des églises chrétiennes sont autant de facteurs qui rendent malaisé l’accès à cet art religieux pourtant si ancien.

La vision d’ensemble que propose cet ouvrage est donc vraiment précieuse et originale. De l’Irak à l’Égypte, en passant par la Syrie, le Liban, la Jordanie et la Palestine, le Proche-Orient est marqué par la présence d’églises à l’usage des populations chrétiennes de ces pays, vivant au milieu des autres habitants dans une coexistence qui, bien que devenue fragile et contestée, demeure encore l’un des fondements de cette région.

Raphaëlle Ziadé, docteure en histoire des religions et ancienne élève de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem, professeure à l’École du Louvre et à l’Institut catholique de Paris et conservatrice des collections byzantines du Petit Palais de Paris, retrace ainsi deux millénaires d’histoire d’un art chrétien qui remonte jusqu’aux origines du christianisme, en ayant connu tour à tour les dominations et les influences romaine, byzantine, musulmane et ottomane.

« Le décloisonnement géographique et communautaire de l’ouvrage, dit-elle, a permis de mettre en évidence la dimension civilisationnelle de cette culture chrétienne du Moyen-Orient, au-delà des identités régionales et confessionnelles, sur la longue durée. Nous en avons déployé les formes grâce à une chronologie qui en révèle les permanences comme les évolutions, en nous attachant aux techniques artistiques afin d’obtenir une idée plus précise des phénomènes culturels au-delà des changements politiques ». Et il est remarquable de comprendre que « l’arabisation par la langue des populations chrétiennes n’a jamais effacé les particularismes préexistants ».

L’architecture et les fresques, les mosaïques, les boiseries, les orfèvreries, les enluminures et les manuscrits, les peintures, les icônes et les textiles illustrent de manière tout à fait exemplaire la richesse de ce patrimoine chrétien oriental et la créativité qui en est à la fois la source et la spécificité constante au fil des siècles.