Revue de Théologie et de Philosophie

Bibliographie

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Sylvie Anne Goldberg (dir.), Histoire juive de la France

Paris, Albin Michel, 2023, 1 085 p.

Jean BOREL

Histoire

Les cent-cinquante historiens et spécialistes de l’histoire juive de la France qui ont conçu et collaboré à cet important ouvrage sous la direction de Sylvie Anne Goldberg pouvaient-ils se douter qu’il paraîtrait en pleine récurrence de manifestations antisémites non seulement en France, mais dans beaucoup de pays du monde ? Évidemment pas !

Il arrive donc à point nommé pour faire à nouveau comprendre à tous ceux qui voudront bien s’y intéresser, comme on n’avait pas encore su le faire de manière si complète, le rôle et l’importance que la communauté juive dans son ensemble a eue sur le sol français, depuis l’époque des Gaules romaines. La longue histoire de la présence juive peut ainsi se diviser en trois grandes parties, la première allant des origines à l’Ancien Régime, la seconde de l’Ancien Régime à la Révolution, et la troisième, de la Révolution à la République.

Cette fascinante histoire a été souvent considérée sous un double angle trop contrasté. Celui d’abord d’une contribution active des communautés juives à la vie du pays dans tous ses aspects politiques, économiques, sociaux, intellectuels et artistiques ; et celui, inverse, des réactions que ces mêmes communautés ont suscitées tout au long de cette même histoire, par des récits « ghettoïsés », dans lesquels ils figuraient non pas en tant que sujets actifs et créatifs, mais essentiellement comme des objets passifs de discriminations, de persécutions, d’expulsions, d’émancipation, d’intégration, voire d’extermination.

La perspective de ce volume collectif se veut différente. Comme l’exprime Jean Mouttapa dans l’avant-propos de l’éditeur, « l’aventure projetée résidait en un mot : “interculturalité”. Pour en finir avec une certaine invisibilité du fait juif dans le grand récit national (en dehors des quatre incontournables que sont les persécutions médiévales, l’émancipation, l’affaire Dreyfus et la Shoah). Pour en finir aussi avec l’absence non moins problématique d’une synthèse sur le rôle qu’a pu jouer la France dans l’histoire des Juifs, et même dans celle du judaïsme comme religion. Il s’agissait, en bref, de montrer que l’histoire de France et l’histoire des Juifs avaient de tout temps été indissociables ».

Le résultat est remarquable et fait désormais de cette somme la référence obligée pour toute recherche ultérieure, comme pour tout complément qu’on pourrait un jour souhaiter. Car il est bien évident que des choix ont dû être opérés, que tous les noms ne pouvaient pas non plus être cités, car « il ne s’agissait nullement de tenter un inventaire d’individus ou de personnalités juives ».

Les documents et les illustrations qui accompagnent le texte des diverses contributions sont d’un intérêt exceptionnel, et ont nécessité d’innombrables recherches d’archives. La vaste bibliographie est consultable sur internet par QR code qu’il faut scanner avec un téléphone portable. Un index des noms de lieux et de personnes sont dressés en fin de volume et constituent deux précieuses sources de référence pour la consultation.