Jean Ogier de Gombauld, Sonnets chrétiens, suivis d’une étude de Jad Hatem, Tonnerre éclatant et bruit d’avoir été
Paris, Orizons, 2020, 96 p.
Instruit dans le catholicisme, mais fidèle au protestantisme et fervent défenseur de la foi chrétienne, bien que discret et méconnu, Jean Ogier de Gombauld (1576-1666) se distingue auprès de ses pairs par ses ouvrages religieux, considérées comme « ce qu’il a fait de meilleur en vers et en prose » (Tallemant des Réaux, cité par J. Hatem, n. 1 p. 48). Ses Sonnets chrétiens témoignent bien entendu de sa propre foi, mais également de celle de ses fréquentations et certainement des nobles qu’il côtoie à la cour, qu’il qualifie volontiers d’hypocrites et qu’il semble vouloir amener sur le chemin de la rédemption (XXXV). Le pécheur est, aux yeux de Gombauld, celui qui ne voit pas, n’entend pas et ne choisit pas Dieu, et dont la volonté finit par plier devant les plaisirs de ce bas monde (VIII). Or le pécheur a, si l’on peut dire, une bonne excuse. Dans ses sonnets, le poète décrit un Dieu invisible, indicible, Tout-Autre. Devant une telle exaltation du Divin, dont il loue la splendeur et la gloire immortelle (III) avec la même ferveur que celle du Psalmiste, Gombauld confesse et rappelle notre nature éternelle de pécheurs. Même si l’homme, momentanément, décide de suivre le Christ, il revient inévitablement au péché. Malgré des aveux de faiblesse parfois très sombres, que l’on retrouve dans plusieurs sonnets, le poète alterne avec des vers plus gais, remplis de louanges et de crainte de Dieu, frappantes et dignes des Psaumes. C’est ce contraste entre l’immensité infinie du Divin et la piètre nature humaine décrite par Gombauld qui a inspiré Jad Hatem dans son étude, constituant la seconde partie de l’ouvrage. Le titre, Tonnerre éclatant et bruit d’avoir été, au premier abord opaque, est inspiré du sonnet IV qui a profondément marqué l’auteur. En effet, le péché ne laisse au poète, « pour tout être, qu’un bruit d’avoir été ». C’est que Gombauld n’est pas avare de ces images saisissantes. On soulignera également le sonnet XXV, qui décrit le « courage » des pécheurs hypocrites décriés par le poète : « Un courage si lâche, et dont la perfidie / Remet incessamment le Sauveur en Croix. » Hatem ajoute à son titre le tonnerre éclatant (VI) que représente la gloire divine aux yeux de Gombauld, et résume ainsi tout le contraste présent dans les sonnets. Son étude se divise en huit parties, dans lesquelles l’auteur invoque et fait dialoguer tour à tour, théologiens, poètes et écrivains tels que Paul, Augustin, Calvin, Baudelaire, Hugo, entre autres, cela de manière judicieuse, puisque certains poèmes, sortis de leur contexte, sont parfois théologiquement difficile à saisir. Ainsi, l’auteur « traduit » Gombauld pour le lecteur et l’oriente, quand la direction à prendre pour comprendre certains vers est incertaine. D’autres œuvres du poète citées par l’auteur aideront également le lecteur, tels que les « Traitez et lettres de Monsieur Gombaud touchant la religion ». Des interprétations différentes de celles de l’auteur pourraient parfois nous venir à l’esprit. Là où Hatem voit l’excès et l’exagération chez Gombauld (p. 63), on pourrait y voir une confession de foi vibrante d’un homme profondément humble et pieux, conscient de sa finitude face à son Créateur éternel. On appréciera les éclairages théologiques nécessaires que l’étude apporte tout en laissant une place à la propre interprétation du lecteur. Il serait toutefois intéressant que d’autres études sur ces poèmes méconnus paraissent, pour nous permettre d’en approfondir encore la théologie.