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Frédéric Lelong, Descartes

Paris, Les Belles Lettres (Figures du savoir), 2018, 259 p.

Lauréline GRANDJEAN

René Descartes fait certainement partie des philosophes les plus étudiés. Les commentaires de son œuvre abondent. Dans son ouvrage, Frédéric Lelong, docteur en philosophie et agrégé de philosophie, se donne l’ambitieux objectif de revenir à la pensée originale de Descartes. Cela ne peut se faire, selon lui, qu’en acceptant toute la complexité de cette pensée. La complexité de la pensée de Descartes est due à deux mouvements opposés : la liberté dont dispose le moi de mettre à distance ses objets de pensée et le plaisir qu’éprouve le moi à ressentir son incarnation corporelle. Tout au long de son analyse, l’A. insiste sur le second mouvement, trop souvent négligé selon lui. C’est un Descartes appréciant l’escrime et l’équitation, un « philosophe-gentilhomme » (p. 15), un homme éprouvant le « plaisir de l’union entre l’âme et le corps » (p. 16) qui nous est décrit. La « joie de l’incarnation » (p. 213) est primordiale dans cet exposé. L’A. l’affirme dans sa conclusion : « L’union de l’âme et du corps qui définit notre humanité n’est pas en principe une déchéance tragique » (p. 212). La sensibilité humaniste de Descartes est relevée dans sa « confiance audacieuse dans nos capacités » (p. 31). Celle-ci viendrait d’une conjonction propre à la pensée cartésienne : premièrement la « bonne nature » donnée aux hommes par Dieu, secondement la mise à l’écart du thème du péché originel – thèse qui attirera par la suite les critiques de Leibniz. Néanmoins, tempérant la place de l’humanisme dans la pensée cartésienne, l’A. énonce sa principale tâche comme étant celle de « clarifier le réalisme cartésien, [de] le soustraire notamment au risque de relativisme anthropologique » (p. 31). S’attelant à l’explication de champs d’étude aussi importants que ceux de sa théorie de la connaissance, de son ontologie, de sa physique mécaniste, de sa philosophie de l’esprit, de la question de Dieu ou encore de sa pensée morale, l’A. livre un large et clair exposé de la philosophie de Descartes. On appréciera en outre les réflexions conclusives de l’A. sur la réception phénoménologique contemporaine du cartésianisme (Husserl, Heidegger, Merleau-Ponty, Levinas, Marion, Henry), ainsi que sur sa réception dans la philosophie contemporaine de l’esprit (Searle, Putnam, Ryle, Damasio, Russell).