Éditorial
Le Comité de rédaction de la Revue de théologie et de philosophie commémore, avec le présent numéro, le 100e anniversaire de la publication du célèbre commentaire sur l’épître aux Romains de Karl Barth (Der Römerbrief, Berne, Bäschlin, 1919). Un demi-siècle après le décès du grand théologien bâlois († 10 décembre 1968), son œuvre ne cesse d’être lue et travaillée dans de nombreux pays, les thèses continuent d’affluer. Comment expliquer cette longévité ? Sans doute d’abord en raison de la puissance de cette pensée théologique, qui renouvela sur bien des points la tradition protestante et, plus spécifiquement, réformée. Mais également en raison d’une relative perte de vitesse d’un certain libéralisme théologique, en tout cas dans le monde anglophone, alors que des jeunes théologiens issus du monde évangélique, eux, trouvent dans l’œuvre de Barth des passerelles qui leur permettent d’élargir certaines perspectives théologiques qui sont de véritables obstacles à l’interprétation de l’Évangile comme bonne nouvelle pour le monde. Par rapport aux clivages qui traversent le protestantisme contemporain, Barth, pour sa part, revendique la liberté de retenir ce qu’il y a de bon, à gauche (du côté de la tradition libérale) comme à droite (du côté des conceptions « orthodoxes »). Un bref texte inédit, prononcé au Sanatorium universitaire suisse de Leysin le 15 septembre 1943, texte avec lequel s’ouvre le présent dossier, le montre bien. Dans cette conférence, intitulée « Réalité, possibilité, nécessité de la connaissance chrétienne », Barth indique la voie à suivre, selon lui, pour dépasser les clivages de la théologie protestante moderne, en tenant ensemble les éléments de valeur présents dans les deux tendances qui s’opposent.
Le présent numéro contient, en second lieu, une étude publiée d’abord en anglais par Alexandra Pârvan et Bruce McCormack sur la question de l’immuabilité, de l’impassibilité et de la souffrance de Dieu. Ce texte montre une manière de prolonger les intuitions de Barth dans la réflexion théologique contemporaine. Spécialiste de l’œuvre d’Augustin d’Hippone, Alexandra Pârvan est chercheuse à l’Université de Piteşti, en Roumanie. Bruce McCormack, pour sa part, figure parmi les meilleurs interprètes de l’œuvre de Barth.
Guilhen Antier, professeur de théologie systématique à l’Institut protestant de théologie (Montpellier), propose une réflexion fort stimulante, inspirée en partie par Kierkegaard, sur Barth, la grâce et le sérieux, en lien avec la prédication chrétienne.
Andrew Hay, un jeune théologien américain, docteur de l’Université de Saint Andrews (Écosse), se penche quant à lui sur le commentaire de Barth de la Première épître aux Corinthiens, Die Auferstehung der Toten. Eine akademische Vorlesung über I Kor 15 (1923), en se concentrant sur les deux premiers chapitres de cette épître.
Enfin, Christophe Chalamet étudie l’amitié quelque peu conflictuelle (en tout cas à certains moments) entre Karl Barth et son contemporain Auguste Lemaître (1887-1970), qui enseigna la dogmatique à la Faculté de théologie de l’Université de Genève pendant près de quarante ans, formant plusieurs générations de pasteurs.
Le Comité de rédaction espère que ce numéro vous intéressera. Merci de votre soutien et bonne lecture !
Le Comité de rédaction Août 2019