Gilles Deleuze, Marc Haas (éd.), Le cours de Gilles Deleuze : 1979-1987
Lausanne, Eidos Éditions, 2017, 5 vol. (352, 448, 380, 423, 485 p.)
Depuis plusieurs années déjà, la Bibliothèque nationale de France et l’association Siècle Deleuzien avaient mis en ligne, au format audio, les cours du philosophe. Toutefois, et aujourd’hui encore, aucune indexation ne structurait cette énorme matière de 413 heures (sinon les titres et les dates des cours). Retrouver dans un tel ensemble les éléments utiles à une recherche précise était ainsi presque inenvisageable. L’énorme ouvrage établi par Marc Haas comble cette lacune. Les volumes qu’il édite n’offrent pas une simple transcription, mais la transformation de cette matière en un immense dictionnaire. Des cinq volumes, les trois premiers s’intéressent aux Notions, thèmes et concepts, organisés alphabétiquement ; les deux derniers développent chronologiquement Les Philosophes et leur philosophie (vol. 4, De l’Antiquité au XVIIIe siècle ; vol. 5, Du Romantisme à la philosophie contemporaine). L’ensemble compte un millier d’articles. L’éditeur y exploite tantôt littéralement les phrases de Deleuze, tantôt en résume synthétiquement le propos, avec un véritable talent de lexicographe pour la concision et la clarté. Dans tous les cas, une référence à la date du cours et au minutage précis de son déroulement permet de se référer aux paroles mêmes de l’orateur. Notons qu’à cette fin, le site des Éditions Eidos (fondées pour cette publication) met précisément à disposition (gratuitement, comme la BnF et Siècle Deleuzien, mais ici de façon complète et organisée) l’entier de cette documentation sonore. Pour qui aurait préféré pouvoir lire l’entier d’un cours plutôt que certains éléments découpés, certaines transcriptions complètes (qu’on peut espérer complétées dans un avenir proche) y sont également disponible. Cet immense travail offre une formidable porte d’entrée à la pensée de Deleuze, et l’occasion de retrouver cette oralité unique, d’une grande simplicité d’accès, d’une familiarité touchante et d’une clarté indéniable, tranchant, comme on l’a communément remarqué, avec les écrits d’une lecture souvent difficile). Faut-il regretter, à l’heure des humanités numériques, que l’éditeur n’ait pas simplement indexé informatiquement une matière déjà disponible en ligne ? Il y avait là matière à établir une édition critique sonore pour le moins novatrice, plutôt que d’imposer à la parole deleuzienne une classification unique, imprimée et immuable. Toutefois, fidèle en cela à la manière de Deleuze, le découpage fin et riche, ainsi que le système précis de renvois permettent au lecteur de s’orienter aisément « en rhizome » dans ces amples volumes. On salue donc avec enthousiasme cette publication.