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Le système des preuves en droit chez Bentham

Michel van de KERCHOVE

Professeur de droit aux Facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles

Introduction

A en croire Etienne Dumont, la théorie des preuves judiciaires « est de toutes les productions de M. Bentham celle qui lui a coûté le plus de travail », à un point tel d’ailleurs qu’il ne parvint pas à achever son œuvre et que « le vaisseau trop chargé n’a pu mettre à la voile »1. Dumont rappelle en effet que Bentham lui-même ne publia qu’un sommaire de son ouvrage, qui correspond sans doute aux quelque 200 pages publiées dans le volume VI de l’édition Bowring sous le titre Introductory view of the rationale of evidence et qui fut, semble-t-il, publié pour la première fois en 1812. Cependant, la partie la plus importante de ses réflexions ne fut publiée qu’en 1827 par J.S. Mill2 et occupe la plus grande partie du volume VI de l’édition Bowring, ainsi que l’ensemble du volume VII, soit environ 1000 pages. C’est dire l’ampleur du travail entrepris par Bentham et l’importance qu’il semblait lui-même lui attribuer. Dans le travail d’édition du Traité des preuves judiciaires, sur lequel je me contenterai de m’appuyer ici, il apparaît cependant que Dumont s’est efforcé, plus que jamais, de synthétiser la pensée de Bentham et de la rendre plus accessible, en omettant surtout la partie critique portant sur la procédure anglaise et en retenant les vues les plus universalisables de l’auteur.

Le but général de l’ouvrage est la construction d’une « logique judiciaire »3 qui se fonderait, non pas sur des certitudes et des règles absolues, mais sur des « principes raisonnés ». Juger apparaît ainsi comme un « art », auquel tant le juge que le public doivent se former.

Toute la trame de l’ouvrage paraît ainsi tissée à partir de l’idée de base qu’il convient de se défier de toute règle absolue en matière de preuve, et de se contenter de directives dont le juge aura à s’inspirer, sous l’œil vigilant du public. « Les logiciens, dit Bentham, ont remplacé les exorcistes et les bourreaux ; et tel homme qui aurait soutenu cent injustices le fer à la main, n’ose pas affronter, en présence du public, les regards d’un juge éclairé. »4 Rien, selon lui, n’est en effet plus dangereux qu’une fausse règle en procédure, et toute règle absolue lui paraît nécessairement affectée de ce danger. En revanche, l’existence d’un public instruit et capable d’apprécier les opérations judiciaires constituera le meilleur frein contre toutes les iniquités et la première des sauvegardes.

Des neuf livres que comprend le Traité des preuves judiciaires, je retiendrai essentiellement trois types de réflexions développées par Bentham : ses considérations les plus générales relatives aux preuves ; sa conception du témoignage qui occupe, chez lui, une place centrale parmi les diférents modes de preuve ; ses réflexions critiques sur le principe d’exclusion en matière de preuve. A titre de conclusions, enfin, je rappellerai brièvement comment il est possible de situer ces réflexions à la fois par rapport à l’évolution du droit anglais et par rapport à un certain nombre de présupposés et de thèmes présents dans l’ensemble de la pensée de Bentham.

I. Considérations générales relatives aux preuves

Dans la perspective utilitariste adoptée par Bentham, l’importance attachée aux preuves ne doit pas nous surprendre. Quelle que soit la perfection des lois « substantives », c’est-à-dire créatrice de droits et d’obligations, celles-ci « ne seraient d’aucun effet », et donc d’aucune utilité si elles n’étaient pas accompagnées d’autres lois qui ont pour objet de « faire accomplir les premières », à savoir les lois de la procédure, que Bentham qualifie de lois « adjectives »5. Or, si l’on s’accorde à la fois sur le fait qu’une procédure est le processus par lequel le juge aboutit à une décision, et sur le fait qu’une décision ne peut être prise que sur base d’un maximum de preuves, il apparaît, selon lui, que « l’art de la procédure » se ramène essentiellement à « l’art d’administrer les preuves »6.

Quant aux buts poursuivis par la procédure, et donc par l’administration des preuves, ils se ramènent, selon Bentham, à un but direct et à trois buts collatéraux.

Le but direct est la droiture dans les décisions, c’est-à-dire leur conformité à la loi. En d’autres termes, ce que Bentham appelle « les deux tables de la loi »7 doivent être en parfaite concordance l’une avec l’autre : la loi adjective n’est bonne qu’autant qu’elle concourt à l’accomplissement, et non pas à la contradiction, de la loi substantive.

Les buts collatéraux consistent dans la célérité, l’économie et l’exemption d’entraves superflues, c’est-à-dire le rejet de tous les inconvénients inhérents, selon lui, à la procédure anglaise de son temps, à savoir les délais, les vexations et les frais. A contrario, même si l’on peut se demander dans quelle mesure il reste toujours fidèle à cette position de principe, Bentham se défend de consacrer la conception classique selon laquelle la procédure aurait aussi pour but collatéral d’assurer la protection de certaines valeurs telles que l’égalité ou la liberté des justiciables.

En ce qui concerne le modèle général de procédure dont il entend s’inspirer, Bentham oppose résolument aux complications de la procédure anglaise qui incarnent, selon lui, un modèle typiquement « artificiel » ou « technique », un modèle « naturel » de procédure qui, paradoxalement, se trouve davantage à l’honneur dans des temps plus reculés. Bentham souligne d’ailleurs ce paradoxe, en disant que « l’histoire de la jurisprudence est le contraire de celle des autres sciences : dans les sciences, on va toujours en simplifiant les procédés de ses prédécesseurs ; dans la jurisprudence, on va toujours en les compliquant davantage »8. Cependant, l’incarnation de ce « modèle naturel » se retrouve aussi, selon Bentham, à la portée de tout le monde : c’est le modèle « domestique ». Pour lui, en effet, le « tribunal domestique » est le vrai type du tribunal politique et il suit une méthode pour parvenir à la connaissance des faits, dont il conviendrait de s’inspirer au niveau judiciaire.

Bentham précise d’ailleurs cette idée par une réflexion incidente sur l’homme de loi – l’homo juridicus en quelque sorte – qui n’est pas sans intérêt. Il y a en effet, dit-il, en tout homme de loi deux êtres étrangers l’un à l’autre : l’homme naturel et l’homme artificiel. Si l’homme naturel peut être l’ami de la vérité, peut raisonner avec justesse et simplicité et aller à son but par le droit chemin, l’homme artificiel, au contraire, est l’ennemi de la vérité, ne sait raisonner qu’à l’aide de subtilités, de suppositions et de fictions et ne sait arriver à son but que par des détours infinis. Or, suggère Bentham, si, par l’effet d’une sorte de dédoublement de la personnalité, l’homme de loi a recours à une méthode naturelle de raisonnement lorsqu’il est au sein de sa famille, il se réfère à ses maximes et a recours à une méthode artificielle dès qu’il reprend ses « robes de cérémonie » et réintègre le barreau. De cette représentation en quelque sorte schizophrénique, on passe facilement au spectre de la démence, démence « triste et inintelligible », que Bentham associe à l’image d’un « avocat anglais qui voudrait transporter dans la vie commune les fictions, les règles et la logique du barreau »9.

En réalité, ce que Bentham recommande consiste exactement dans l’adoption de la démarche inverse, c’est-à-dire la transposition dans la vie juridique du modèle domestique ou naturel. Les traits essentiels de ce modèle sont les suivants : appeler les parties intéressées à comparaître ; admettre les parties à témoigner en leur propre faveur ; exiger une réponse à toutes les questions, même à leur désavantage ; considérer, sauf exception, le silence comme un aveu ; interroger les parties sur le lieu même ; recueillir une réponse immédiate après chaque question ; n’exclure aucun témoin ; confronter immédiatement les témoins qui se contredisent ; dégager des conclusions promptes. Les seules différences que Bentham aperçoit entre le rôle du juge et celui d’un père sont celle d’une plus grande complexité de l’Etat par rapport à la famille et celle des responsabilités publiques qui reviennent au juge différences qui commandent des précautions qui ne sont pas nécessaires dans le tribunal domestique, mais qui ne remettent pas pour autant en question les traits essentiels du parallélisme.

Enfin, sur base de ces remarques préliminaires, on rappellera la définition extensive que Bentham donne de la preuve en général. C’est, dit-il, « un fait supposé vrai, que l’on considère comme devant servir de motif de crédibilité sur l’existence ou la non-existence d’un autre fait »10. Toute décision sur une preuve procède donc par voie de conclusion : à partir d’un fait, qu’il qualifie de « probatoire », on conclut à l’existence ou à la non-existence d’un autre fait, qu’il qualifie de « principal »11. Dans ce sens large, dira Bentham, les questions de preuve traversent notre vie quotidienne, jusqu’à affecter la vie animale, et nous amènent à exercer l’art de prouver, comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, même si c’est dans la pratique des tribunaux que cet art apparaît de la manière la plus saillante et avec son maximum d’importance.

II. Le témoignage, mode de preuve par excellence

Si Bentham consacre un certain nombre de réflexions aux différents modes de preuve traditionnellement consacrés en droit, ainsi qu’à leurs différentes classifications possibles, il semble possible de privilégier l’étude du témoignage, pour au moins deux raisons. La première est que Bentham en donne une définition extrêmement large qui englobe non seulement les informations fournies par les parties intéressées elles-mêmes (« parties déposantes »), au même titre que celles émanant des tiers (« témoins externes »)12, mais encore, à la limite, tout mode de preuve quelconque13, y compris la preuve par écrit14 et les présomptions15. La deuxième raison, cependant, est que, même si on se limite au « témoignage par les personnes », comme le fait parfois aussi Bentham, ce mode de preuve semble posséder par excellence les caractères du « modèle naturel » auquel il adhère. Ceci paraît tout à la fois expliquer les développements relativement longs que Bentham consacre au témoignage au sens strict par rapport aux autres modes de preuve et justifier la place privilégiée que je lui réserverai ici.

Parmi les différentes questions abordées par Bentham en rapport avec le témoignage, on se contentera d’en évoquer deux : celle de sa force probante et celle des garanties dont il convient de l’entourer.

A. Force probante

Afin de déterminer la force probante d’un témoignage, Bentham propose de constituer une sorte de « thermomètre » susceptible de la mesurer. Partant d’une force moyenne qui est celle du témoignage d’un individu pris au hasard dans la classe moyenne, d’une intelligence commune et d’une probité ordinaire, il considère, par rapport à cet étalon de mesure, comme étant de force supérieure le témoignage dont la valeur s’élève au-dessus de cette moyenne, et de force inférieure le témoignage dont la valeur tombe en-dessous de cette moyenne. La force supérieure d’un témoignage dépendra à la fois de sa source (témoin appartenant à une classe supérieure), du nombre de témoins (leurs forces s’additionnant en cas de concordance et se soustrayant en cas d’opposition) et de l’addition éventuelle d’autres modes de preuve. La force inférieure d’un témoignage, par contre, dépendra à la fois de sa source (imperfection des qualités intellectuelles ou morales du témoin) et de sa forme (omission de l’une des garanties qui doivent, comme on le verra, entourer le témoignage).

Il apparaît également que les degrés différents d’intensité d’un témoignage peuvent s’exprimer mathématiquement, en termes de probabilité, à partir d’une échelle divisée en 10 degrés. L’échelle aurait un côté positif sur lequel on inscrirait les degrés de persuasion positive et un côté négatif sur lequel on inscrirait les degrés de persuasion négative. Le point 0 représenterait l’absence de toute force persuasive. Par ailleurs, chaque témoin devrait être appelé à préciser, d’une part, s’il croit que le fait existe, n’existe pas ou s’il n’a aucune opinion à ce sujet, et, d’autre part, quel est le degré – entre 0 et 10 – qui correspond le mieux à sa persuasion.

Le degré global de persuasion qui se dégagera de la réunion de plusieurs témoignages résultera dès lors de l’addition ou de la soustraction des degrés relatifs à chacun d’entre eux, modulé par l’appréciation que le juge pourra porter éventuellement sur la qualité supérieure, inférieure ou moyenne des témoins. Considérant que la justice ne demande pas moins de précision que la chimie16, Bentham estime pouvoir ainsi ateindre, sinon une exactitude absolue, tout au moins un degré d’exactitude supérieur à tout ce qu’on a pu observer jusqu’à présent.

B. Garanties

Pour Bentham, le témoignage doit posséder trois qualités : l’exactitude, c’est-à-dire ne contenir que la vérité, la complétude, c’est-à-dire contenir toute la vérité (la première qualité étant cependant plus importante à ses yeux que la deuxième), et l’absence de confusion.

Pour posséder de telles qualités, le témoignage doit, selon Bentham, s’entourer d’un certain nombre de garanties ou de « sûretés », dont les unes sont qualifiées d’« internes », au sens où elles sont intrinsèques au témoignage, et les autres d’« externes », au sens où elles agiront de l’extérieur sur le témoin.

Les garanties internes consistent dans le fait qu’il soit « responsif », c’est-à-dire obtenu par des questions adressées au témoin ; « particularisé », c’est-à-dire individualisé quant à l’auteur et à la nature du fait et circonstancié quant aux temps, au lieu, aux moyens et aux motifs ; « distinct », c’est-à-dire dépourvu d’équivoque dans l’expression ; « réfléchi », c’est-à-dire exposé sans précipitation ; « imprémédité », c’est-à-dire formulé sans délai excessif susceptible d’encourager le déguisement ; « non suggéré d’une manière indue », c’est-à-dire non suscité sur une voie destinée à tromper le juge ; « aidé par des suggestions licites », c’est-à-dire soutenu par des questions qui n’ont pour but que d’aider la mémoire.

Quant aux sûretés externes, elles consistent dans un ensemble de moyens dont l’intérêt et la valeur sont d’une importance inégale.

La présence d’une sanction légale constitue un premier moyen nécessaire, lorsqu’il s’agit, selon Bentham, de lutter contre des motifs séducteurs, tels que l’intérêt naturel du témoin produit par les affections et les haines du témoin, et l’intérêt artificiel créé par des dons, des promesses ou des menaces.

La sanction morale, c’est-à-dire la honte découlant du mépris d’autrui a, par ailleurs, l’avantage d’être une peine immédiate qui commence avec le délit, mais l’inconvénient de n’être efficace qu’à l’égard du témoin possédant un degré suffisant de sensibilité morale.

Le recours à l’interrogatoire, de préférence oral, constitue également, aux yeux de Bentham, un moyen indispensable pour rendre le témoignage complet, alors que les deux moyens précédents tendent davantage à le rendre exact.

L’établissement d’un procès-verbal consignant les dépositions orales est également d’une grande utilité dans la plupart des cas.

Le recours à la publicité, que Bentham considère la plus efficace de toutes les sauvegardes et « l’âme de la justice »17, mérite quelques développements. La publicité présente en effet, selon lui, au moins cinq avantages. Tout d’abord, elle développe les facultés de l’esprit et suscite à la fois la sincérité et l’attention du témoin. Ensuite, elle favorise la production d’autres moyens de preuve, à travers les réactions du public. Elle crée également un « esprit public », en formant l’instruction des individus. Elle assure ensuite la probité des juges, l’audience étant une véritable cour d’appel, agissant sans dépense, sans délai et avec le maximum de probité18. Elle suscite enfin la confiance et l’appui de l’opinion publique, à laquelle Bentham attache une importance essentielle. En effet, même si une justice secrète était bien administrée, on n’y gagnerait rien : « l’intégrité serait dans le cœur des juges, l’injustice serait peinte sur leur front ». Or, selon Bentham, « le principal usage de la justice réelle est de produire la justice apparente » et, en l’absence de publicité, précisément, « il n’y aurait que la réelle, dont l’utilité est bornée ; il n’y aurait pas l’apparente, dont l’utilité est universelle »19. Par ailleurs, Bentham combat vigoureusement deux objections classiques à la publicité. La première est que « la partie du public capable de juger est très petite, comparativement à celle qui ne l’est pas ». A cette objection, Bentham répond qu’en écartant le public de l’exercice de la justice, on s’enferme dans « un cercle aussi vicieux en logique qu’en morale », car « ce tribunal populaire, tout inapte qu’il est à juger, n’en juge pas moins »20. Dès lors, il vaut mieux l’inciter à bien juger, plutôt que de multiplier les jugements erronés. De plus, ajoute-t-il, il ne faut surtout pas chercher à empêcher le public de juger car, si « le tribunal du public cesse de juger, c’est lorsqu’il est tombé par un excès d’ignorance ou de découragement dans une indifférence absolue » et « dès que le public dit des jugements : ‘Que m’importe ? il n’y a plus que des maîtres et des esclaves »21. La deuxième objection classique est que le respect des mœurs commanderait dans bien des cas de supprimer la publicité des audiences. Là encore, Bentham, répond que, sauf exceptions, l’objection est peu pertinente car, dit-il, « dès que le temple de la justice est ouvert à tout le monde, il devient une école nationale où les leçons les plus importantes sont enseignées avec un degré de force et d’autorité qu’elles n’ont point ailleurs ». Dans une « scène juridique, l’instruction est aussi facile qu’intéressante » et « les fictions mêmes du théâtre, entourées de tout ce qui peut soutenir l’illusion, sont faibles et fugitives comme des ombres, en comparaison de ces drames réels où l’on voit dans leur triste vérité les effets du crime, l’humiliation des coupables, l’angoisse de ses remords et la catastrophe de son jugement »22.

Enfin, une dernière forme de garantie est examinée, mais avec un œil critique, c’est celle du serment. Bentham considère en effet la pratique du serment comme dangereuse. Elle l’est, selon lui, pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, elle tendrait à créer dans le chef du juge une confiance indue dans une épreuve comparable à celle du fer rouge ou de l’eau bouillante, dont la force ne peut être rationnellement appréciée. Ensuite, elle tend à augmenter la persistance d’un témoin dans son mensonge, en raison de sa crainte de passer pour parjure. Elle a également pour effet de fournir en quelque sorte une prime au parjure, dans la mesure où on subornera plus facilement un témoin jureur qu’un témoin non jureur. Elle suscite, par ailleurs, le mépris de la religion par la multiplication des profanations. Elle favorise les artifices, tels que les réserves mentales et les réticences, en raison du formalisme fréquent du rituel. Elle écarte du témoignage tous ceux qui, pour des motifs religieux, ne se croient pas permis de jurer. Elle a pour effet de dévaloriser toute déclaration non assermentée et d’encourager le mensonge, comme le suggère le précepte biblique « ne jurez point : que votre oui soit oui ». Elle risque enfin de créer des conflits entre la puissance civile et la puissance ecclésiastique, dans la mesure où la validité du serment dépend de critères posés par une autorité « étrangère ».

III. Le problème de l’exclusion de certains modes de preuve

Bentham part de la constatation que les législations existantes ont sans cesse multiplié les cause d’exclusion des preuves, et des témoignages en particulier, en se fondant tour à tour sur des critères tels que l’âge, le sexe, la servitude, la parenté, la religion, la race ou l’intérêt. La conséquence en est, dit-il, que si l’on réunissait tous ces critères, il n’y aurait plus de témoignage admissible en justice.

A cette constatation, Bentham oppose dès lors un principe dont la vérité lui paraît évidente, à savoir que « les témoins sont les yeux et les oreilles de la justice »23, ou encore « la première condition de l’assurance sociale »24 et qu’à chaque cause d’exclusion risque de correspondre la perte d’un moyen de réaliser la justice. « L’exclusion de toute preuve, dit-il en effet, serait l’exclusion de toute justice. »25 En règle générale, le principe d’exclusion est critiquable, aussi bien en raison de ses effets que de sa tendance générale, à savoir l’augmentation de la probabilité de succès pour toutes les causes iniques. Exclure une classe de témoins, c’est permettre toutes les transgressions imaginables en présence d’un témoin de cette classe.

Cette idée générale connaît cependant certaines exceptions, qu’on peut justifier par le fait que l’exclusion, qui est toujours un mal, permet parfois d’éviter un mal supérieur, et en particulier certaines « vexations » spéciales. C’est ainsi que Bentham admet l’exclusion du témoignage lorsqu’il aboutit à des révélations vexatoires pour autrui, alors qu’elles ne présentent qu’un intérêt limité pour la cause. De même admet-il l’exclusion du témoignage du confesseur, en raison du caractère généralement salutaire de cette institution, en tant que frein contre le crime.

En revanche, Bentham n’admet pas l’exclusion du témoignage entre époux ou entre parents et enfants, consacrée par la jurisprudence anglaise. Dans ce cas en effet, la répugnance à témoigner n’est rien en comparaison de la nécessité de découvrir l’auteur d’un crime et il faut détruire la possibilité d’un asile aux criminels « jusque dans l’intérieur de leur maison »26. En outre, ajoute-t-il, le fautx témoignage n’est pas à craindre lorsqu’il est naturel pour le juge de s’en défier. Ici encore, l’exercice du pouvoir judiciaire, sous les regards du public, constituera la meilleure sauvegarde.

Bentham entend également combattre la cause d’exclusion résultant de l’inculpation de soi-même, consacrée par la common law, dont il résulte que l’on ne peut adresser à l’accusé aucune question d’où l’on pourrait tirer la preuve de son délit, de même que l’accusé n’est pas tenu de répondre et que de son silence on ne peut tirer aucune présomption contre lui. Selon Bentham, une telle règle n’a pu se justifier historiquement que comme garantie contre les aveux extorqués par la torture, de même que comme moyen d’adoucir, par la procédure, la tyrannie de la loi. A ces raisons, cependant, il oppose les garanties qu’offre la publicité de la procédure qu’il préconise, de même que la nécessité d’adopter des lois justes par rapport auxquelles la procédure doit apporter son soutien et non son opposition, car le fait d’attendre de la procédure qu’elle adoucisse les lois est, selon lui, le meilleur moyen d’entretenir leur injustice. Bentham retiendra dès lors le témoignage du prévenu contre lui-même et considérera son silence comme synonyme d’un aveu27.

Enfin, Bentham admet paradoxalement le témoignage d’un avocat contre son client, alors qu’il le refuse dans le cas de la confession. Il justifie cependant son attitude, en soulignant la différence des deux situations. En effet, dans le cas du confident religieux, il n’y a aucun intérêt de sa part au succès du crime. Dans le cas de l’homme de loi, au contraire, nous avons afaire, selon lui, à une personne qui prête indifféremment son concours à des causes justes ou injustes, et qui met ses connaissances au service des criminels et de la mauvaise foi. Il n’est donc rien d’autre qu’un « complice du délit après le fait », « indifférent au bien et au mal », prêt à faire de sa dextérité « l’usage le plus nuisible à la communauté »28. Sur base d’une telle conception du rôle de la défense, on comprend assez facilement que Bentham refuse l’exclusion d’un tel témoignage, avec le risque cependant, comme l’observe Dumont en note, de supprimer entièrement la défense29.

Au rejet de ces différentes causes traditonnelles d’exclusion s’ajoute encore celui des infirmités intellectuelles, de la présence d’un intérêt dans la cause, de l’improbité, de l’opinion religieuse du témoin.

Enfin, Bentham refuse également d’exclure les preuves portant sur des faits dont on soulèverait l’improbabilité, voire l’impossibilité. Pour le justifier, Bentham commence par rejeter la notion d’impossible, en considérant qu’impossible ne peut signifier qu’improbable au plus haut degré30. Le caractère impossible d’un fait est, en effet, généralement fondé sur sa contrariété au cours de la nature, c’est-à-dire sur sa violation des lois communes de la nature. Or, dit Bentham, les lois de la nature ne font qu’exprimer l’état des connaissances humaines à un moment déterminé, relativement aux successions causales qu’on a pu observer dans les phénomènes physiques. Il n’existe dès lors aucun fait dont on puisse dire d’avance que tous les hommes le regarderont comme incroyable. A cet égard, Bentham relève avec beaucoup de clairvoyance que l’accord éventuellement universel sur le fait que deux et deux font quatre – que l’on peut qualifier d’analytique – ne se rapporte à aucun fait positif, mais seulement à la signification des termes. L’absence de désaccord touchant cette proposition reflète donc simplement le fait qu’on ne peut admettre un mot dans deux sens qui seraient contradictoires. Par contre, il n’existe aucune proposition empirique qui soit absolument à l’abri de toute controverse. L’argument tiré de l’impossible ou de l’improbable a donc, selon Bentham, la nature d’une preuve « circonstancielle » – un « contre-témoignage général » – qu’on entend opposer au fait dont l’existence est affirmée par quelqu’un. Mais ce type de preuve peut, à son tour, être combattu par des « contre-témoignages spéciaux » ou suppositions « infirmatives ». Aussi extraordinaire que soit un fait, il doit toujours être possible d’admettre la preuve de son existence.

Quant au problème de l’exclusion de certaines preuves, la conclusion de Bentham est triple : il ne faut exclure « aucune preuve, aucun témoignage par la seule crainte d’être trompé » ; il faut généralement substituer un principe de suspicion à un principe d’exclusion ; il convient, enfin, d’établir un registre officiel répertoriant les causes dans lesquelles une preuve d’un genre suspect aurait été admise, afin de soumettre à un contrôle continuel les résultats obtenus sur cette base.

Conclusions

Du point de vue du droit positif, la théorie des preuves de Bentham s’inscrit très largement en rupture par rapport aux règles élaborées en Angleterre, dans une perspective de plus en plus rigide, vers la moitié du XVIIIe siècle31. A cet égard, son plaidoyer en faveur de procédures plus « naturelles » qu’« artificielles » constitue sans doute, comme le suggère Hart, une « démystification » extrêmement saine de la prétendue complexité nécessaire de la procédure, complexité qui devait sans doute davantage profiter aux avocats qu’aux justiciables, comme le suggère Bentham lui-même32.

A ce titre, il semble que sa critique ait eu une influence – immédiate ou lointaine – importante sur le droit anglais. En effet, plusieurs règles excluant différentes catégories de témoins furent abrogées successivement en 1843, en 1851, en 1853 et en 1898, sur base des suggestions faites par Bentham33. Son influence paraît également avoir été à l’origine de plusieurs réformes relatives à l’admissibilité de témoignages non assortis de serment, en 1869 et en 188834. Par ailleurs, la substitution, préconisée par Bentham, d’un principe de suspicion au principe d’exclusion de nombreuses preuves, semble avoir été partiellement consacrée en 193835. Enfin, Hart considère que le rapport déposé en 1972 par la Commission de révision du Code pénal en Angleterre consacre très largement les propositions faites par Bentham en ce qui concerne les preuves par ouï-dire, le privilège interdisant toute inculpation de soi-même et le fameux droit de l’inculpé à se taire, sans qu’on puisse en tirer aucun argument contre lui. Sur ces différents points, les propositions de la Commission battent en effet très largement en brèche les principes traditionnellement consacrés par le droit anglais36. Quant à l’influence de Bentham sur le droit continental des preuves, elle paraît moins évidente, d’autant plus que la plupart de ses propositions tendent davantage à se rapprocher du droit continental que de s’en écarter.

Quels sont, par ailleurs, les rapports qu’on peut établir entre la théorie des preuves de Bentham et les autres thèmes essentiels développés dans le reste de son œuvre ?

Les rapports avec l’utilitarisme, tout d’abord, paraissent relativement clairs. Sa conception des preuves possède en effet un caractère utilitariste, tant d’un point de vue négatif que positif.

D’une manière négative, cette conception se manifeste dans la volonté de Bentham de ne se laisser guider ni par les intérêts « séducteurs », et en particulier les intérêts des hommes de loi, ni par les passions, ni par les principes humanistes. Ces principes, Hart les a résumés dans ce que Bentham appelle, d’une part, « la raison de la vieille femme » (old woman’s reason) et, d’autre part, « la raison du chasseur de renard » (fox hunter’s reason)37. Le premier principe réside dans l’idée qu’il est inhumain d’amener l’inculpé à contribuer à établir sa propre culpabilité. Le deuxième principe réside dans l’idée qu’il faut placer l’accusateur et l’accusé dans une situation d’égalité approximative, même si c’est au détriment de la possibilité de condamner le coupable, de la même façon qu’il serait inéquitable pour des gentlemen de chasser un renard sans lui donner une chance raisonnable de s’échapper38.

D’une manière positive, par ailleurs, sa conception utilitariste se traduit par une vision purement utilitariste de la procédure et de l’art de prouver, en rapport avec son but direct qui est de donner « plein effet » aux lois. Bentham est cependant bien conscient de ce que cette conception n’est réellement utilitariste que dans la mesure où les lois elles-mêmes sont rationnellement élaborées, c’est-à-dire elles-mêmes utiles, et cela à la différence des lois de son temps qui, étant imparfaites, nécessitent un correctif judiciaire qui ne peut être réalisé que par le biais de la procédure.

Sur ce point, cependant, on peut se demander si Bentham n’est pas moins utilitariste qu’il ne l’affirme.

En matière pénale, à tout le moins, si le but utilitariste de la loi est essentiellement préventif, et non rétributif, on peut se demander, comme la pratique courante semble l’illustrer, si ce but préventif ne commande pas de favoriser une procédure sélective d’application des lois, assurant la répression de certaines catégories de délinquant seulement – par exemple les plus « dangereux » – et de ne pas poursuivre les autres. C’est, semble-t-il, en effet au nom de l’utilitarisme que ce processus de sélection se développe généralement39. L’utilisation, au contraire, d’une procédure susceptible de manifester la « vérité » de toute infraction quelconque à la loi afin d’en obtenir la répression effective, manifeste plutôt une conception très « rétributive » – et, à la limite, purement kantienne – de la loi pénale, qui se fonde davantage sur des considérations de justice et d’égalité.

A cela, il faut encore ajouter que l’utilitarisme admet également la prise en considération de certains buts « collatéraux » ou « secondaires » que Bentham associe, comme on l’a rappelé, à l’élimination des délais, des vexations et des frais. Or, selon lui, la prise en considération de ces éléments, dans un calcul de type coûts-bénéfices, peut justifier, dans certains cas, des entorses à la pure recherche de la vérité et de la stricte application des lois. Néanmoins, on peut faire remarquer combien un tel calcul est lui-même aléatoire et traduit des jugements de valeur discutables. A travers la notion de « vexation », par exemple, se profilent des atteintes à des valeurs telles que la liberté individuelle, que Bentham considère généralement comme d’une importance moindre que le souci d’éviter l’impunité d’un coupable ou le sentiment d’injustice que ressentirait l’innocent ou la victime au cas où la vérité ne triompherait pas. Par contre, comme on l’a rappelé, la vexation qui découlerait de la violation du secret de la confession est considérée comme d’une importance supérieure. De même, on constate qu’en matière pénale, Bentham justife la présomption d’innocence par le fait que l’inconvénient résultant de la condamnation d’un innocent l’emporte largement sur l’inconvénient résultant de l’impunité de l’auteur réel d’un crime, faisant ainsi coïncider les sentiments d’humanité avec la voie de la raison, alors qu’en matière civile, Bentham consacre le principe inverse selon lequel la présomption doit être en faveur du demandeur et au préjudice du défendeur40. Il apparaît clairement, dans chacun des cas, que les critères permettant de résoudre de telles pondérations ne sont pas eux-mêmes de nature strictement utilitariste et font appel à d’autres valeurs que l’utilité.

Quoi qu’il en soit, la prise en considération, ne fût-ce que partielle, d’autres buts que la recherche de la vérité, introduit une brèche importante dans le système proposé par Bentham. Elle montre, d’une part, les limites inhérentes à la critique de la procédure classique, aux termes de laquelle il lui reproche d’« avoir certainement tout autre vue que la recherche de la vérité »41. Elle révèle également les limites inhérentes à ses propres principes, lorsqu’il affirme que « le juge n’est que l’ami de la vérité et des lois »42.

Quant aux rapprochements qu’on peut établir avec les autres thèmes majeurs de sa pensée, je me contenterai de les évoquer brièvement.

On remarquera tout d’abord que la substitution d’une procédure naturelle à une procédure technique cadre parfaitement avec le rêve plus vaste d’une organisation sociale à la fois plus simple, plus transparente, plus efficace et plus économique43.

Ce rêve de transparence se manifeste en particulier dans le thème récurrent de la publicité qui occupe ici encore une place centrale, dans le sens où la publicité de l’administration des preuves suscite, dans un mouvement fondamentalement circulaire, à la fois une participation du public, une instruction du public, un contrôle du public et une adhésion du public.

A ces différentes fonctions de la publicité, que Bentham associe étroitement à un régime politique représentatif, correspondent encore, semble-t-il, des prolongements intéressants en termes de réflexion sur autant de dimensions différentes de la démocratie44, notamment en ce qu’elle s’opposerait à un certain type de justice secrète et à une bureaucratie de type opaque.

En ce qui concerne, par ailleurs, la place du droit dans les différents systèmes de contrôle social, on retrouve, en matière de preuves, des lignes de réflexions intéressantes sur l’apport spécifique de la sanction légale du faux témoignage par rapport aux sanctions naturelles, morales et religieuses, mais en même temps sur la profonde dépendance du droit par rapport à ces différentes sanctions dont il ne pourrait se passer. Les réflexions de Bentham sur la confession notamment confirment très largement cette idée.

Au niveau des incitants à la production des preuves, on retrouve également certaines thèses générales de Bentham relatives à l’équilibre nécessaire à établir entre des peines et des récompenses et le danger qu’il y aurait à n’utiliser que les unes ou les autres.

Des réflexions sur le thème du langage apparaissent également de manière incidente dans toute leur importance45. L’ordre social nouveau prôné par Bentham passe en effet manifestement par l’ordonnancement des mots, par la grammaire, par les classifications, par la logique. Bentham ne dit-il pas, d’ailleurs en ce sens, que « les logiciens ont remplacé les exorcistes et les bourreaux »46 ? Même si l’affirmation se veut rassurante, elle doit néanmoins nous alerter en termes de parenté et de filiation des uns par rapport aux autres. Il rappelle en effet notamment cette vérité élémentaire que « les mots sont les seuls instruments dont le législateur puisse se servir… comme l’artisan (se sert) des outils de sa profession »47. En revanche, malgré l’ambivalence liée à son rêve de transparence, son souci de précision et de démystification se veut profondément libérateur, dans la mesure, dit-il, où « les termes impropres sont des chaînes qui lient les hommes à des pratiques déraisonnables » et où « tout terme impropre est un nuage qui cache la nature des choses et met un obstacle souvent invincible à la recherche de la vérité »48.

A égale distance du scepticisme et du dogmatisme, on soulignera également au passage la conception probabiliste de la vérité et de la science à laquelle Bentham adhère et qu’il consacre notamment en matière de preuve.

Enfin, on peut observer que le thème de la temporalité, central dans la pensée de Bentham49, n’est pas non plus absent de sa théorie des preuves, dans la mesure où l’importance du facteur temps apparaît notamment dans le besoin de célérité qu’il érige en but collatéral de la procédure. Le caractère fugitif de nombreuses preuves est également souligné et requiert des procédés spécifiques de conservation, parmi lesquels l’écriture occupe évidemment une place essentielle. De ce point de vue, une certaine forme de permanence, pour lui, est certainement synonyme de civilisation. Enfin, l’idée qu’il développa de créer des tribunaux qui siègeraient de manière permanente, paraît clairement dépasser la simple volonté de recueillir des preuves fugitives. Il s’agit en effet essentiellement, pour lui, de manifester à l’égard des « ennemis de l’ordre public » que les tribunaux n’accordent aucune « trêve »50 et qu’il n’existe ainsi, pour reprendre l’expression de J. Carbonnier, pas le moindre « temps de non-droit »51, pas plus qu’il ne peut exister d’espace de non-droit, comme l’illustre par exemple l’idée que la famille elle-même ne peut fournir un asile au criminel. Nécessairement transparent, le contrôle social doit en effet être également coextensif à la vie sociale dans toute son étendue, aussi bien spatiale que temporelle.

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1 E. Dumont, Préface au Traité des preuves judiciaires, in Œuvres de J. Bentham, juriste anglais, éd. par E. Dumont, t. II, Bruxelles, 1829, p. 241.

2 Cf. G.W. Keeton et O.R. Marshall, « Bentham’s influence on the law of evidence », in Jeremy Bentham and the law. A symposium, Londres, 1948, p. 90.

3 E. Dumont, op. cit., p. 242.

4 J. Bentham, Traité des preuves judiciaires, in Œuvres de J. Bentham, jurisconsulte anglais, op. cit., p. 256.

5 J. Bentham, op. cit., p. 245.

6 Ibid., p. 246.

7 Ibid.

8 Ibid., pp. 247-248.

9 Ibid., p. 248.

10 Ibid., p. 249.

11 Ibid.

12 J. Bentham, op. cit., p. 296 : « Le nom de témoin peut donc être appliqué aux parties elles-mêmes intéressées dans la cause, aussi bien qu’à tous ceux à qui on le donne plus communément… On peut désigner le témoin étranger à la cause par le nom de témoin externe ; et celui qui un intérêt immédiat, par le nom de partie déposante. »

13 Cf. J. Bentham, op. cit., p. 253 : « les neuf divisions principales (des modes de preuve) font connaître toute la matière du témoignage. ». Il ajoute encore en note : « ce qu’on appelle en anglais evidence. »

14 Cf. J. Bentham, op. cit., p. 252 : « Le témoignage produit dans une cause étant un écrit qui n’a pas été fait pour cette cause…, on peut l’appeler preuve par écriture casuelle… Le témoignage produit dans une cause étant un écrit authentique…, on peut l’appeler preuve préconstituée. »

15 Cf. J. Bentham, op. cit., p. 253 où il vise non seulement le « témoignage par les personnes », mais encore le « témoignage par les choses ».

16 J. Bentham, op. cit., p. 271.

17 J. Bentham, op. cit., p. 287.

18 Cf. J. Bentham, op. cit., p. 288 : « il y a un appel continuel de son tribunal à celui de l’opinion publique. »

19 J. Bentham, op. cit., p. 288.

20 J. Bentham, op. cit., p. 290.

21 Ibid.

22 Ibid.

23 J. Bentham, op. cit., p. 379.

24 Ibid., p. 385.

25 Ibid., p. 380.

26 Ibid., p. 388.

27 J. Bentham, op. cit., p. 451.

28 Ibid., p. 392.

29 Ibid., p. 393.

30 Ibid., p. 401.

31 Cf. G.M. Keeton et O.R. Marshall, op. cit., p. 79.

32 H.L.A. Hart, « La démystification du droit », in Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, sous la direction de Ph. Gérard, F. Ost et M. van de Kerchove, Bruxelles, 1987, p. 104.

33 G.M. Keeton et O.R. Marshall, op. cit., pp. 83 et 94.

34 Ibid., p. 88.

35 Ibid., p. 100.

36 Cf. H.L.A. Hart, op. cit., pp. 110 et suiv.

37 J. Bentham, The rationale of judicial evidence, in The works of Jeremy Bentham, éd. Bowring, Edinburgh, 1838-1843, t. VII, p. 445, cité par H.L.A. Hart, op. cit., p. 114.

38 H.L.A. Hart, op. cit., p. 114.

39 A cet égard, cf.notamment M. van de Kerchove, « Les lois pénales sont-elles faites pour être appliquées ? Réflexions sur les phénomènes de dissociation entre la validité formelle et l’effectivité des normes juridiques », in Droit et pouvoir, t. I, La validité, Etudes publiées sous la direction de F. Rigaux et G. Haarscher par P. Vassart, Bruxelles, 1987, pp. 331 et suiv.

40 J. Bentham, op. cit., p. 360.

41 Ibid., p. 285.

42 Ibid., p. 391.

43 A cet égard, cf. notamment Ph. Gérard, « Droit et pouvoir dans la pensée de J. Bentham », in Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, op. cit., pp. 119 et suiv.

44 A cet égard, cf. notamment H. Dumont, J. Bentham, premier théoricien de la démocratie libérale ? Réflexions sur le principe de majorité, ibid., pp. 489 et suiv.

45 Sur la conception générale du langage chez Bentham dans ses rapports avec le droit, cf. notamment M. El Shakankiri, « Analyse du langage et droit chez quelques juristes anglo-américains de Bentham à Hart », in Archives de philosophie du droit, t. XV, 1970, pp. 113 et suiv. ; A. Strowel, « Analyse et utilitarisme dans les pensées juridiques de Bentham et de Hart », in Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, op. cit., pp. 301 et suiv.

46 J. Bentham, op. cit., p. 256.

47 Ibid., p. 428.

48 Ibid., p. 296.

49 Cf. notamment F. Ost, « Codification et temporalité dans la pensée de J. Bentham », in Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, op. cit., pp. 163 et suiv.

50 J. Bentham, op. cit., p. 426.

51 J. Carbonnier, Flexible droit. Textes pour une sociologie du droit sans rigueur, Paris, 1969.