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Bentham et Dumont

Cyprian BLAMIRES

Research Fellow, Bentham Project, University College, London

I.

Avant 1802, Jeremy Bentham n’était pas très connu en Angleterre. Il avait soulevé quelques remous vingt-cinq ans plus tôt, avec son Fragment on Government1, qu’on avait quelque peu discuté pendant quelques mois en 1776, à cause de sa critique du célèbre Blackstone et à cause de l’anonymat de son auteur ; on s’était interrogé sur l’identité d’un écrivain qui osait entrer en controverse avec un personnage aussi éminent. Une fois le nom de l’auteur révélé, personne n’y songea plus, car c’était un inconnu, et le nom de Jeremy Bentham, à cette époque-là, ne disait rien à personne. Quelques années plus tard, le Defense of Usury2 avait attiré quelques remarques, car cette fois Bentham avait osé critiquer – pas trop sévèrement – le grand Adam Smith. A ce moment-là l’écrivain anglais n’était pas tout à fait inconnu à Paris, où deux traductions de cette brochure ont paru3. Et puis, en pleine Révolution, un troisième ouvrage, le Panopticon4, a aussi été traduit en français, cette fois par Etienne Dumont lui-même, et Bentham a même été élu citoyen français en 1792. Mais aucun de ses ouvrages n’avait donné un exposé du système utilitaire tel qu’il avait été conçu par Bentham. Ce système, il en avait déjà posé les fondements dans An Introduction to the Principles of Morals and Legislation ; cet ouvrage, bien qu’imprimé en 1780, ne fut publié qu’en 1789, mais à ce moment-là personne ne s’en est occupé, et aucune recension n’en a paru.

C’est dire qu’en 1801, époque où Bentham avait déjà plus de cinquante ans, il n’y avait, pour le grand public, aucun lien entre le nom de Bentham et son système utilitaire. Il avait accumulé depuis longtemps toute une masse de manuscrits mais pour la plupart ils reposaient dans son grenier, poussiéreux, à moitié oubliés.

Ce fut Dumont qui changea tout cela.

Ses premiers travaux sur ces manuscrits ont duré de 17925 à 1802. Et le livre qui a tout changé pour lui et pour Bentham, le grand livre où l’on trouve, tiré de ces manuscrits, tout un exposé de la pensée de Bentham, furent ses Traités de législation civile et pénale6. Dans les trois tomes de cet ouvrage se trouva la première présentation publique de l’utilitarisme benthamien comme système, ce qui attira l’attention du grand public.

Les résultats de cette publication furent impressionnants. La langue française gardait encore une certaine supériorité dans le monde (quoique assez amoindrie, comme l’a remarqué André Jardin dans son Histoire du Libéralisme Politique)7. En plus, Dumont avait un style agréable, il savait écrire. Cette première exposition des principes de ce qui allait devenir « l’utilitarisme » fut vendue à des milliers d’exemplaires partout dans le monde8.

Et n’oublions pas l’importance du livre de Dumont en Angleterre même. C’est un phénomène qui échappe peut-être aux lecteurs hors du domaine anglo-saxon. Tout d’abord, cet ouvrage de Dumont a fait l’objet d’une notice étendue dans l’Edinburgh Review en 18049 : c’est la première fois qu’un article dans une revue de langue anglaise a fait connaître au grand public le système utilitaire de Bentham, et fait voir Bentham comme créateur de ce système. En deuxième lieu, les Anglais eux-mêmes achetaient ce livre, comme étant la meilleure introduction générale à la pensée de Bentham. Le célèbre John Stuart Mill, dans son autobiographie, nous raconte que c’est cet ouvrage que son père lui a donné pour le familiariser avec la doctrine du maître10.

Mais l’importance de Dumont pour Bentham ne se limite pas à l’histoire de la dissémination de la doctrine. Il y a une présence de Dumont dans toute l’histoire de l’œuvre de Bentham. Dumont est toujours là au centre de l’univers utilitariste, puisque dans certains cas, sur certaines questions, la version qu’il a composée représente tout ce qui a survécu jusqu’à nos jours de la pensée de Bentham ; en effet, certains manuscrits originaux de Bentham ont tout simplement disparu. Un exemple très frappant est celui de la « Tactique des Assemblées Délibérantes ». Les manuscrits à la base de cet écrit, qui a été publié en 1816 dans le premier tome de la Tactique des Assemblées Législatives11, ne sont plus trouvables, il ne nous en reste qu’un tout petit fragment et quelques pages imprimés. A part cela, nous n’avons que la traduction anglaise de Dumont faite par Richard Smith pour l’édition des œuvres de Bentham éditée par John Bowring12. Et pourtant, le petit fragment manuscrit qui nous reste suffit à nous montrer que Dumont a beaucoup changé le texte de Bentham qu’il avait sous la main. Pour la nouvelle édition de la « Tactique », qui sortira dans le cadre des Collected Works, et qui a été éditée par Michael James et moi-même, nous serons obligés de reproduire la traduction de Smith, avec l’addition du fragment manuscrit dont j’ai parlé.

Voilà des raisons pour s’interroger un peu sur la mentalité, le back-ground, le développement intellectuel de Dumont, et sur ses rapports avec le grand penseur anglais.

II.

Né à Genève en 175913, élève de l’Académie, ordonné ministre de l’Eglise Réformée en décembre 1783, Dumont était partisan des Représentants, parti qui a été vaincu par les Négatifs. Au risque de beaucoup trop simplifier une histoire affreusement compliquée, disons que les Représentants, bourgeois industrieux et indépendants de la ville de Genève, voulaient exercer leur droit d’adresser des pétitions au gouvernement ; les Négatifs, qui dominaient dans ce gouvernement, et dont beaucoup étaient des rentiers, membres des anciennes familles gouvernantes de la ville, croyaient avoir le droit de repousser leurs représentations. La position politique de Dumont se fait clairement entendre dans ses sermons14, et il fut vite censuré par le gouvernement (avril 1784)15. Quelques semaines plus tard, il partit pour Saint-Pétersbourg où il devint ministre de l’Eglise Protestante Française. Mais, bientôt, il succomba aux séductions de Lord Landsdowne, qui lui offraient une sinécure en Angleterre, et il s’y installa en janvier 1786. En 1789 il était à Paris, où il vécut les débuts de la Révolution comme collaborateur de Mirabeau jusqu’en 1790, date de son retour en Angleterre16. En 1792, il se rendit à Genève, où il fut élu membre du gouvernement révolutionnaire17. Au mois de mars 1793 il quitta brusquement sa ville natale pour revenir à Londres, où il vécut jusqu’en 1814. Il rentra à Genève à l’époque de la Restauration et y resta jusqu’à sa mort en 1829. Pendant les quinze dernières années de sa vie, il était parmi les chefs de l’opposition libérale dans le Conseil Représentatif.

La rencontre avec Bentham eut lieu en 178818. La conversion ne tarda pas – et l’œuvre de traduction suivit de près. Avant cette rencontre, on aurait pu décrire Dumont ainsi : Genevois de naissance, ministre réformé par vocation et formation, républicain convaincu, partisan des Représentants et rousseauiste fervent.

Etre Genevois – qu’est-ce que cela voulait dire, dans la dernière moitié du XVIIIe siècle ? Je n’ai pas besoin de parler du mythe de Genève comme citadelle de la Réforme, Rome protestante, ville qui garda la flamme de la foi réformée au cœur de l’Europe. Ce mythe a fait partie de l’ambiance genevoise dans laquelle Dumont a grandi et lui-même n’a pas échappé à son influence – il n’a jamais cessé d’être protestant convaincu, homme de la Réforme, foncièrement hostile au Catholicisme. Cependant, il ne faut pas se faire d’illusions : Etienne Dumont est né en 1759, ce qui est très différent de 1559 ou même de 1659. Genève était toujours la citadelle de la Réforme, elle était toujours un lieu de préférence pour les pères qui voulaient élever leurs fils dans les principes de la Réforme ; mais ce n’était plus le protestantisme de Calvin.

Quand Dumont était tout jeune, il y eut un débat européen au sujet du protestantisme genevois. Ce débat trouve son origine dans une visite que d’Alembert avait faite à Genève chez Voltaire. Peu après, d’Alembert écrivit son fameux article sur Genève pour L’Encyclopédie. Le résultat jeta les bons pasteurs de Genève dans une fureur. Car l’auteur avait cru, d’après ses discussions avec eux, que c’étaient de bons philosophes, des disciples d’une religion toute naturelle, et d’un Christ tout humain. Les ministres genevois n’aimaient pas du tout cette image un peu malicieuse. Peut-être était-elle un peu trop proche de la vérité.

III.

De toute façon, les sermons et les lettres du jeune Dumont nous montrent un protestant très différent des Calvinistes d’antan. Son message était à peu près celui-ci : – Oubliez le dogme du péché originel, les hommes ne sont pas des pécheurs ayant besoin du salut, mais des victimes aveuglées par leurs passions, incapables de voir ce qu’il leur faut pour leur propre bonheur. Le prédicateur a le devoir de leur apprendre quels sont les vrais plaisirs, les plaisirs vraiment satisfaisants, et quels sont de l’autre côté les plaisirs vains et trompeurs. Un des thèmes majeurs de la prédication d’Etienne Dumont est celui du rapport entre la vertu et le plaisir. Il y a des plaisirs dans la vertu, dit-il, et il est rationnel d’écouter la voix de ces plaisirs. Pourquoi Dieu aurait-il mis des plaisirs dans le monde, si ce n’était pour nous conduire à Lui ?

Et cependant, malgré son désir de privilégier le plaisir, Dumont semble quand même être un prédicateur assez sévère. Tout comme Rousseau, Dumont critique le théâtre : que cherche-t-on au théâtre, au fond, demande-t-il ? On cherche « des représentations des vertus comme l’intégrité, la fermeté patriotique, l’oubli généreux des offenses, l’amour maternel, l’amitié fidèle ». Mais pourquoi faut-il fréquenter le théâtre pour cela ? Car on peut découvrir toutes ces vertus en soi : « … soyez vous-mêmes ces héros, ces justes », dit-il, « placez dans votre cœur cette vertu dont vous demandez à vos plaisirs de vous tracer l’image, et vous jouirez sans intervalle d’un spectacle si doux… »19

La condamnation du théâtre est lié au thème sous-jacent qui consiste à dire que c’est la façon dont les vices prennent le masque de la vertu qui trompe les gens : l’idée de feindre horrifie complètement Dumont. Et ce thème est aussi lié avec celui de l’individualisme : c’est la société qui encourage le masque et le mensonge, c’est la solitude qui nourrit l’amour de la vérité :

« Heureux selon l’esprit de la religion celui qui s’arrache au tumulte éternel du monde et des affaires, qui ouvre le livre de sa vie, et qui cherche pour se recueillir la solitude et la paix ! La solitude prépare l’âme, dispose la conscience et bannit les images tumultueuses. »20

Le grand danger, pour le vrai croyant, c’est le risque de perdre son identité dans la turbulence et l’agitation de la vie mondaine :

« Enfin, pour dévoiler un secret que chacun cache à tous les autres et qu’on relègue dans les fonds de son cœur, ces sociétés dont notre faiblesse se promet tant d’appuis et d’amusement, ne procurent souvent, que l’étourdissement et la fatigue, et une si longue et si bruyante agitation ne produit qu’une vaine écume. »21

Puis Dumont se plaint de la fausseté de tous ces prétendus amis qui nous offrent leur amitié aux réunions mondaines : ces prétendues amitiés sont comme autant de fausses pièces d’argent. Il attaque le rire même, « signe équivoque de la joie », la plupart du temps c’est un voile qui masque le visage de la tristesse.

« Le cœur content se cherche lui-même et ne se volatilise point : le bonheur ressemble à ces précieuses essences qu’on renferme soigneusement dans le vase qu’elles embaument. L’homme heureux est jaloux de lui-même, il ne se prodigue pas dans le monde et n’aliène pas son Etre. »22

Après des heures passées dans les réunions mondaines, dit Dumont :

« … le dégoût vous poursuit jusqu’au sein de votre famille on y rentre imbu d’un venin de mauvaise humeur, le cœur vide et gonflé, la tête appesantie et fatiguée, on ne sait plus goûter les douceurs d’une retraite domestique, son calme paraît léthargie, on ne prononce plus les noms de père, d’époux, de famille avec cette naïve émotion qui enchante le cœur. »23 Et pourtant, Dumont ne se considère point comme ascète :

« Vous tous qui cherchez le bonheur, ne fuyez pas. Je ne viens point, orateur farouche et mélancolique, imposer la peine et vous séparer de vos plaisirs. »24

N’est-ce pas parler en moraliste assez sévère ? Critique austère, Dumont rejette toute cette vie sociale, cette vie de rencontres cultivées qui constituent l’essence d’une civilisation raffinée. Ce refus, d’ailleurs, il le prescrit non seulement pour une minorité appelée à une vie monastique, mais pour tous les croyants. C’est une austérité qui ne parle pas certes dans les accents du vieux calvinisme, et pourtant elle exige du croyant une sorte d’abnégation sociale. En réalité, l’appel fait par Dumont aux valeurs positives des vrais plaisirs ne fait que cacher une persistance du vieux puritanisme genevois, ressuscité sous une nouvelle forme par Rousseau.

L’âge de Rousseau, dit Dumont dans un écrit consacré au héros de ses jeunes années25, était un âge de licence, un âge de corruption, et Rousseau était le Caton de cet âge. Mais les générations dépravées aiment entendre prêcher une morale sévère, selon le disciple de Bentham.

« Rousseau vit ces mœurs, et c’est dans la lie de Rome qu’il fit entendre la censure de Caton. Son succès n’est pas ce qui m’étonne. Les siècles les plus dépravés sont ceux à qui la forte morale, mêlée de traits satyriques, plaît davantage. »26

Les classes moyennes, qui respectent la vertu, préfèrent cette prédication parce qu’elle vise surtout la corruption des riches, que ces classes détestent. Mais les riches eux-mêmes ne sont pas mécontents des critiques d’un moraliste sévère : « Dans la mollesse qui gagne tout, une voix énergique, une morale austère est une nouveauté qui plaît par le contraste. De vieux débauchés peuvent se plaire à l’image de l’innocence et de la vertu. »27

Mais ce qui a donné à Rousseau une puissance très spéciale, c’est d’une part sa rhétorique :

« Rousseau, qui connaissait son siècle et ses lecteurs, avait soin de tempérer la sévérité de sa morale par les accents les plus doux et les plus passionnés de la tendresse et de l’amour. A l’âpreté d’un Spartiate, il unissait les sentiments voluptueux de l’Arcadie, et le goût d’un Athénien ; jamais la vertu n’avait parlé un langage plus sévère et moins pédantesque. »28

D’autre part, la puissance de la doctrine de Rousseau résidait dans « un certain contraste d’austérité et de mollesse » : « Il semble qu’un des charmes particuliers du style de Rousseau tient à un certain contraste d’austérité et de mollesse, que je ne trouve qu’en lui. Sa morale en général est fière, élevée, dédaigneuse de l’opinion ; il aime mieux Sparte qu’Athènes ; il est rigide, et sa sévérité ne pardonne rien à notre faiblesse ; on le voit même par un fonds de misanthropie, regarder en pitié toutes nos institutions, et regretter les forêts où il pense que les sauvages sont plus heureux que nous le sommes au sein des arts et des plaisirs ; mais au milieu de ce chagrin superbe ou de ce mépris amer qu’il répand sur l’humanité, vous entendez tout à coup retentir les accents les plus doux de la volupté, de la tendresse et de la nature. Cette voix sévère s’amollit, un cœur fier palpite d’amour, le moraliste rigoureux vous montre qu’il ne refuse les vains plaisirs du monde que pour vous les rendre mille fois en jouissances de l’âme. »29

Diriger les hommes exclusivement vers les plaisirs de l’âme, condamner les plaisirs de la civilisation, de la culture, des arts, n’est-ce pas une morale assez Spartiate ?

IV.

Rousseau et Voltaire ont souvent paru comme deux visages de l’âme des Lumières. Voltaire représenterait le côté sceptique, moqueur, frondeur, cynique, frivole ; Rousseau, l’accent beaucoup plus sérieux, ardent, sentimental, larmoyant même. On peut affirmer ainsi que si Dumont était rousseauiste, Bentham, lui, était voltairien. Bentham avait peu de sympathie pour ceux qui prêchaient la doctrine des droits de l’homme. Il n’avait aucun goût pour le vertuisme, ni pour la nature ni pour la solitude, ni pour le style confessionnel. Le philosophe anglais appartenait au XVIIIe siècle de Locke, de Priestley, de Beccaria, d’Helvétius et de Gibbon. Il ne faut pas oublier, en plus, que le premier écrit publié par Bentham a été sa traduction d’un conte de Voltaire, Le Taureau Blanc30. Voilà déjà un contraste assez frappant entre Dumont et Bentham. Mais il y a plus ; la formation de Bentham ne ressembla en rien à celle du Genevois. Le père de Bentham était avocat, lui-même a été destiné pour le droit dès sa jeunesse, il avait une érudition immense dans le domaine du droit – aussi bien qu’une longue expérience de la politique juridique, car il avait passé de longues heures à suivre des procès. Tout cela manquait à Dumont. Dès l’âge de 21 ans, Bentham avait d’ailleurs trouvé son principe fondamental, le principe utilitaire il voulait en poursuivre toutes les conséquences à travers la morale, la jurisprudence, la politique et la vie sociale. Il voulait être le Newton du monde moral. Il avait l’esprit de système, il voulait tout classifier, tout codifier ; pour lui la recherche de la vérité nécessitait une austérité linguistique, une discipline dans l’usage des paroles, une précision qui ne laisserait aucune place aux fleurs de l’éloquence.

Dumont, pour sa part, ne semble jamais avoir rêvé d’une telle entreprise. L’ambition de ses jeunes années avait été de suivre la vocation de ministre protestant. Ce qui l’a ouvert à l’univers benthamien, ce qui a préparé la voie pour le message de Bentham c’était sans doute la Révolution de 1789.

Dumont a rencontré la pensée de Bentham dans cette année tumultueuse et révolutionnaire que fut 1789. Il avait fait la connaissance de l’homme lui-même en 1788, et il a reçu l’année suivante une copie de An Introduction to the Principles of Morals and Legislation31. Nous possédons un document fondamental qui révèle les progrès de l’utilitarisme dans la mentalité de Dumont : c’est un petit livre qui n’a jamais été publié en français, seulement dans une traduction anglaise. Son titre anglais est The Groenvelt Letters32 ; le titre du manuscrit français d’où est tiré ce volume est « Lettres sur la Révolution Française »33. L’idée de ce livre est venue de Samuel Romilly, avec qui Dumont était intimement lié. Dumont, ami de Mirabeau puis son collaborateur, a été témoin des événements capitaux du début de la Révolution. Pourquoi ne pas écrire un rapport pour les lecteurs anglais ? demanda Romilly34.

Ce petit livre débute dans un style convenable à un rousseauiste :

« Les hommes frivoles s’accordent volontiers à croire que le caractère français n’est pas propre à la liberté, c’est-à-dire qu’il y aurait une nation qui ne serait pas propre à être bien gouvernée. »35

Plus loin, il y a un portrait merveilleux de Sieyès, portrait digne de Rousseau lui-même :

« L’Abbé Sieyès… on l’appelait le philosophe, parce qu’il préférait les douceurs de l’étude à l’inanité des conversations… Une extrême indépendance, un peu d’humeur et de mauvaise santé ; une indifférence pour s’expliquer avec ceux qui lui faisaient des objections, assez voisins du mépris… Il n’a pas l’écorce douce du pays, mais s’il manque de cette aménité si nécessaire au commerce d’être pleins d’imperfections, il le rachète bien par la force du caractère. C’est une de ces âmes énergiques qui ne savent point se lier aux vices de la société, et qui conçoivent une haine profonde pour des institutions dépravées. De tels hommes aiment naturellement à remonter vers les principes du gouvernement pour comparer ce qu’ils sont devenus avec ce qu’ils étaient et ce qu’ils doivent être… »36

L’accent, le style, le vocabulaire des premières feuilles sont ceux du vertuisme :

« Le danger même en serrant les nœuds de l’association, a je ne sais quelle douceur intime et secrète pour le cœur humain. Un grand objet, des périls nobles, l’honneur, la vertu, le patriotisme raniment des sentiments qui se flétrissent dans une vie commune… »37

Mais vers la fin, les accents benthamiens commencent à se faire entendre. Il y a une puissante déclamation contre la loi naturelle et les droits de l’homme :

« Figurez-vous une grande toile suspendue au milieu d’une Académie de peinture : la figure qu’il faut tracer doit représenter l’homme naturel. Comme il n’y a point de vrai modèle, chacun travaille d’après son imagination ; approuve ou condamne selon ce qu’il appelle son sentiment intérieur, et veut y soumettre tous ses confrères ; mais leur sentiment intérieur n’était pas moins infaillible ni moins despotique, la dispute serait éternelle… »38 Plus loin, nous trouvons un discours où, pour la première fois, apparaît le terme « utilité », dans un contexte de positivisme juridique :

« Le droit naturel est une bonne mine à exploiter pour des professeurs qui veulent causer bien longtemps, mais les hommes qui veulent s’entendre s’accorderont d’abord à rejeter toutes ces expressions vagues et métaphysiques de loi de la Nature et de droit naturel. Le droit, à parler rigoureusement n’existe qu’en vertu de la loi ; il ne précède pas la Société, il en est le produit ;… le seul principe fixe et immuable, c’est l’intérêt général : l’utilité est l’objet suprême qui renferme en soi la loi, la vertu, la vérité, la justice… toutes les autres notions sont obscures par elles-mêmes au lieu que l’utilité générale présente au moins une échelle convenue : en raisonnant sur ce principe, on peut s’entendre, on se rapproche par degrés, on a une expérience commune, on sait bien enfin ce qui cause de la douleur ou du plaisir, on voit aisément si une loi sera favorable au bonheur du plus grand nombre. »39

La source de ces idées ne peut guère être mise en doute. Et ne négligeons point d’observer la raison que donne Dumont pour adopter ce vocabulaire benthamien. C’est qu’il a été dégoûté par les combats féroces entre les factions révolutionnaires : ceux-ci n’avaient aucun critère universel pour les guider, et il faut absolument aux hommes un tel critère, une base commune dans leurs débats sur la politique et la morale. Le principe de l’utilité est facile à comprendre, il nous donne un fondement sûr, une assurance bien fondée, un moyen de parvenir à l’harmonie dans le domaine des opinions. Il y a ainsi une conversion de Dumont à l’époque de la Révolution française : il a abandonné son premier maître, Jean-Jacques Rousseau, pour en suivre un autre, Jeremy Bentham. Qu’en est-il resté de l’austère vertuisme genevois ?

A mon avis, on peut parler, non d’une morale austère chez Bentham, mais d’une austérité linguistique. C’est-à-dire que selon Bentham, pour refaire le système social il faut tout d’abord refaire le langage. Et pour refaire le langage, il faut une discipline et une sévérité suivie. Il s’agit de remplacer tous les mots qui portent déjà implicitement en eux l’approbation ou l’improbation. Des mots comme « usure », « chasteté », « piété », qui contiennent déjà un jugement moral basé sur des principes autres qu’utilitaires. Il faut aussi remplacer tous les mots qui ne représentent que des fictions inutiles40. Il faut construire son argument sévèrement, en refusant tout emploi d’ornement, de métaphore, de moyens rhétoriques. A la fin de la première section du premier chapitre de An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, Bentham s’accuse d’être tombé lui-même dans la métaphore et la déclamation :

« But enough of metaphor and declamation : it is not by such means that moral science is to be improved. »41 Il me semble qu’on peut parler légitimement d’une austérité verbale, linguistique, comme caractérisant le discours de Bentham. Selon mon hypothèse, Dumont, tout en abandonnant cette vieille austérité morale genevoise et rousseauiste, aurait satisfait à ses instincts d’ascète, en transposant l’idée de l’austérité dans le domaine du langage, dans le domaine de la parole. Mais, paradoxalement, – et j’y reviendrai plus tard – il s’est fait prédicateur éloquent de cette austérité : en somme, le prédicateur éloquent de l’anti-éloquence.

V.

Pour expliquer mon hypothèse, je vais commencer par un article écrit par Dumont en 1804, mais jamais publié42. Cet article est une réponse à une critique des Traités de Législation Civile et Pénale, critique dont j’ai parlé. C’est un article de substance qui marqua le premier moment où on a pris conscience de l’utilitarisme comme système de pensée benthamien. Je ne sais pas où Dumont espérait faire publier sa réponse à cette critique ; elle semble être restée inédite. Mais on trouve une référence à cet article dans la correspondance de Dumont peu avant sa mort. Le 5 mars 1829, Jean-Baptiste Say lui écrivit pour lui dire qu’il était sur le point de terminer le sixième et dernier tome de son Cours d’Economie Politique43. Say voulait conclure ce dernier tome par une exposition brève et lucide de la doctrine de l’utilité, doctrine dont il se voyait un apôtre. Il pensait que Dumont ferait un tel essai beaucoup mieux que lui. Dumont dit en réponse qu’il avait déjà dans ses papiers cet article inédit écrit pour réfuter la critique de Jeffrey, article qui lui semblait être à peu près ce que Say désirait. Dans une lettre du 10 août 1829, Say a approuvé la suggestion44, mais il semble que Dumont a voulu soumettre le texte de son article, vieux de vingt-cinq années, à une révision, et comme Say ne voulait pas retarder la date de publication de son ouvrage45, l’essai est resté encore inédit à la mort de son auteur.

Que dit Dumont dans cet article ? Tout d’abord, il soutient que la législation est maintenant une question technique, une question qui requiert des connaissances spécialisées. Le bon vieux sens commun, l’appel aux lois de la nature ou à la tradition ne suffisent plus dans ce domaine. C’est dire que, pour juger la philosophie de Bentham, il faut des connaissances juridiques poussées46. Francis Jeffrey, par contre, avait soutenu dans son article que les dilemmes juridiques sont susceptibles de trouver des réponses basées sur les sentiments naturels et la loi de la conscience. Mais, dit Dumont, les sentiments naturels et la loi de la nature existent dans le monde depuis la Création ; ont-ils résolu les dilemmes du droit ou même amélioré la société en aucune façon ? Pas du tout. Et c’est parce que tout le monde s’est satisfait de déclamations, de galimatias. Autrement dit, on n’a pas pris l’habitude de s’interroger sur les termes qu’on emploie. Le défenseur du principe de l’utilité, lui, a formé des idées claires et distinctes sur la signification du vocabulaire du droit et de la morale47.

Un critique comme Jeffrey, dit Dumont, refuse d’étudier le droit comme science. Il veut considérer les ouvrages juridiques du point de vue d’un amateur, d’un dilettante ayant des connaissances superficielles – un gentleman amateur. « La plupart n’aiment point les formes scientifiques ; les lecteurs frivoles se dégoûtent dès qu’ils aperçoivent un attirail de définitions, de classifications, de méthode. »48 Mais la réalité moderne, selon Dumont, c’est que celui qui veut parler de la législation doit se soumettre à une discipline sévère. Il doit étudier tout ce qu’ont dit sur la question les auteurs des générations passées, pour savoir les comparer à Bentham et en mesurer les différences. « Un amateur pourrait-il rendre justice aux travaux de Linné et de Lavoisier, s’il ignorait l’état de confusion d’où le premier a tiré l’histoire naturelle et le second la chimie ? Le jugement des ouvrages de Linné, de Lavoisier ou de Bentham n’appartient point à un littérateur, pour juger le dernier il fallait un jurisconsulte philosophe, au-dessus des préjugés de sa profession et de son cercle particulier. »49

Notons que Dumont ne vise pas ici que Jeffrey lui-même : en fait il attaque toute une tradition de discussion « amateur » sur la législation, il condamne en même temps une cohorte d’écrivains éminents :

« On conçoit bien que les classifications et les distinctions lui ont paru trop pédantesques et très arides : il n’y en a point dans Télémaque ni dans Numa Pompilius, il n’y en a point dans l’Abbé Mably ni dans Filangieri, il n’y en a point dans cinq cents volumes déclamatoires de législation que l’autre siècle a enfantés et qui ont été absorbés dans le gouffre de l’oubli, comme c’est le sort de tous les ouvrages déclamatoires après qu’ils ont été vantés dans les journaux et dans quelques sociétés littéraires. »50

Nous voyons que le péché, comme le vise Dumont dans son débat avec Jeffrey, ce n’est plus le fait de se perdre dans une vie mondaine, dans la vie bruyante des salons ; le péché, c’est l’habitude d’être frivole et déclamatoire dans le domaine linguistique. Le péché, c’est être littérateur plutôt que scientifique. Le vrai étudiant de la législation se soumet à une sévère discipline linguistique, la discipline des formes scientifiques, de la classification, de la codification, d’où toute éloquence, toute déclamation est exclue.

Ainsi la défense de Dumont contre la critique de Jeffrey, c’est la défense d’une logique sérieuse, technique, disciplinée, contre une pensée frivole, amateur, belle-lettriste. L’ancien prédicateur, l’ancien rousseauiste, nie la valeur de l’éloquence, de la passion, des sentiments naturels ; c’est sa nouvelle ascèse. Lisez son attaque sur la façon dont Jeffrey exploite les ressources de l’éloquence :

« Intéressé à bien saisir les objections du critique, j’aurais voulu les trouver énoncées clairement et formant autant de propositions séparées et distinctes. Malheureusement il a préféré une manière plus brillante… »51

Parmi les critiques de Jeffrey contre Bentham on trouve celle-ci : le principe de l’utilité est dangereux, car il persuade les gens d’abandonner les croyances morales traditionnelles, croyances auxquelles on devrait adhérer implicitement52. A cet argument, voici la réponse de Dumont : « C’est ici la proposition principale du critique : il a rassemblé toutes ses forces pour porter le dernier coup au principe de l’utilité : les moyens oratoires ont été mis en œuvre ; il est le chevalier de la Morale, de la bonne vieille morale, il fait entendre qu’elle est attaquée, du moins qu’elle est en danger. Je ne serai point son rival en rhétorique : je vais examiner ses raisons, autant que je puis les découvrir, sous les ornements dont il les a revêtus. »53

C’est dire que la vraie science se refuse toute indulgence verbale ; l’ornement, l’éloquence, le luxe des paroles – voilà la source de l’illusion, voilà l’ennemi. Ce n’est plus la vie mondaine, ce n’est plus la vie agitée des salons, les déceptions du théâtre, qui égarent les gens ; c’est la métaphore, l’analogie, la langue figurée, l’imagination.

Le mot qui décrit l’ennemi, dans cette perspective, c’est le mot « déclamation ». Ce mot « déclamation », me semble-t-il, exprime trois idées très fondamentales dans la pensée de Bentham, trois aspects de cette austérité dont j’ai parlé. La déclamation, c’est d’abord l’emploi de la métaphore et de tous les outils de l’éloquence – langue imagée, etc. Autrement dit, il ne s’agit pas d’un mauvais emploi des outils de l’orateur, mais de tout emploi de tels outils. Et puis dans le contexte benthamien, cette idée de déclamation a une autre dimension : il s’agit de l’habitude d’employer les termes passionnés, « c’est-à-dire, de ces expressions qui emportent par elles-mêmes approbation ou improbation : disposant secrètement le lecteur à se ranger du parti de l’écrivain par sympathie, ou par crainte »54. En troisième lieu, la déclamation signifie l’habitude de formuler des propositions qui ne sont pas fondées sur des arguments empiriques. La déclamation, c’est tout argument qu’on ne peut pas justifier à partir de l’empirisme. Mais je prends l’idée de déclamation ici dans la première de ces trois acceptions, et je suggère qu’il y a un parallèle entre ce refus de l’éloquence, de cette austérité de la parole, et l’austérité morale du jeune prédicateur Dumont, du rousseauiste fervent qui avait critiqué les conventions sociales et les charmes factices de la vie mondaine.

VI.

Comment Dumont, prédicateur de vocation et de formation, a-t-il pu se plier à cette discipline si contraire à la prédication ? Il me semble que, paradoxalement, il s’est fait le prédicateur éloquent de l’anti-éloquence. Et je veux illustrer cette proposition en examinant quelques passages de « Bentham » dans la version de Dumont.

Dans le livre le plus célèbre de Dumont, les Traités de Législation Civile et Pénale, la première partie du premier tome constitue une version des treize premiers chapitres de An Introduction to the Principles of Morals and Legislation de Bentham. Dans son deuxième chapitre, Bentham discute les deux principes qui, selon lui, sont le plus généralement suivis au préjudice du principe du plus grand bonheur du plus grand nombre : le principe de sympathie/ antipathie et le principe ascétique. Il s’agit dans ce chapitre du principe ascétique. Dans sa version, Dumont commence avec le troisième paragraphe de Bentham :

« By the principle of asceticism I mean that principle, which, like the principle of utility, approves or disapproves of any action, according to the tendency which it appears to have to augment or diminish the happiness of the party whose interest is in question, but in an inverse manner ; approving of actions insofar as they tend to diminish his happiness ; disapproving of them insofar as they tend to augment it. »55

Le style est nu, le vocabulaire précis et discipliné reflète le message. Comparez la version de Dumont : du principe de l’ascétisme il dit :

« Ce principe est précisément le rival, l’antagoniste de celui que nous venons d’exposer. Ceux qui le suivent ont horreur des plaisirs. Tout ce qui flatte les sens leur paraît odieux ou criminel. Ils fondent la morale sur les privations, et la vertu sur le renoncement à soi-même. »56

Le vocabulaire de Dumont est tout en termes énergiques – « l’antagoniste », « le rival », « odieux », « criminel », « ont horreur ».

Les deux écrivains continuent en considérant les deux types d’hommes qui sont habituellement attirés par le principe ascétique. Cette fois, les expressions de Bentham ont un peu plus d’énergie : la passion dominante de l’homme religieux, c’est la peur :

« … fear, the offspring of superstitious fancy : the fear of future punishment at the hands of a splenetic and revengeful Deity. »57

Ici, les termes « splenetic » et « vengeful » donnent un peu de couleur à la phrase, mais le vocabulaire de Dumont est de nouveau beaucoup plus énergique, les termes sont, dirais-je, « déclamatoires » dans le sens benthamien :

« Les dévots, ascétiques sont des insensés, tourmentés de vaines terreurs. L’homme n’est à leurs yeux qu’un être dégénéré qui doit se punir sans cesse du crime de sa naissance, et ne distraire jamais sa pensée de ce gouffre éternel de misères ouvert sous ses pas. Cependant, les martyrs de ces opinions folles ont aussi un fonds d’espérances… ces pieux atrabilaires se flattent bien que chaque instant de peine volontaire ici-bas leur vaudra un siècle de bonheur dans une autre vie. »58

Bentham ne prend de tels accents que dans une note où il parle ironiquement des moines d’autrefois qui se tourmentaient pour gagner une récompense éternelle. Mais le ton de cette note, c’est plutôt celui du persiflage voltairien que celui du sérieux genevois59. S’il se sert d’un tel langage, c’est pour s’en moquer.

Dans le chapitre suivant, Dumont discute le principe de sympathie et d’antipathie, autre grand rival du principe du plus grand bonheur. Dans ce chapitre il se demande si l’écrivain qui encourage les antipathies de ses lecteurs ne sera pas beaucoup plus populaire que celui qui veut éviter de les inciter. Encore une fois, c’est le style « déclamatoire » : « Heureux pour lui-même, heureux l’écrivain qui se livre aux deux faux principes : à lui appartient le champ de l’éloquence, l’emploi des figures, la véhémence du style, les expressions exagérées, et toute la nomenclature vulgaire des passions. Toutes ses opinions sont des dogmes, des vérités éternelles, immuables, inébranlables comme Dieu et comme la nature. Il exerce en écrivant le pouvoir d’un despote… »60

Rien de tout cela dans Bentham. Ce passage est un modèle du paradoxe dumontien. Le Genevois déclame éloquemment contre l’éloquence. Le contenu, le message de Dumont, c’est qu’éloquence et fausseté sont des compagnons inséparables : le moyen qu’il emploie pourtant, c’est la déclamation.

VII.

Il ne faut pas croire, bien sûr, que le procédé de Dumont soit inconscient. Voilà ce qu’il dit de sa philosophie de traducteur :

« Il me parut que la méthode rigoureusement philosophique, propre à un petit nombre d’esprits exercés, n’étoit pas nécessaire pour le public ; que tous les raisonnements pouvoient se traduire en langue vulgaire ; qu’il falloit éclaircir les propositions abstraites par des exemples, faire présumer les résultats pour entretenir l’intérêt, et se rapprocher de la méthode familière du discours. Ces avances qu’on a faites à la paresse des lecteurs ne nuisent pas aux intérêts de la vérité. »61

Ce qu’il entendait faire, c’est utiliser la « langue vulgaire », « éclaircir les propositions abstraites par des exemples », « se rapprocher de la méthode familière du discours ». Ce n’étaient que des concessions faites à « la paresse des lecteurs » sans nuire « aux intérêts de la vérité ». Et cependant ne faudrait-il pas poser la question – langue vulgaire ou « déclamation » ? Autrement dit, est-ce qu’on peut, légitimement prêcher la doctrine benthamienne d’une façon éloquente ?

Bibliographie

Sources manuscrites

Papiers Dumont, Bibliothèque Publique et Universitaire, Genève.

Sources imprimées

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Panoptique. Mémoire sur un nouveau principe pour construire des maisons d’inspection, et nommément des maisons de force, par Jérémie Bentham, Paris, 1791.

Traités de Législation Civile et Pénale… par M. Jérémie Bentham, jurisconsulte anglois. Publiés en François par Et. Dumont, de Genève, d’après les manuscrits confiés par l’auteur, 2 tomes, Paris et Genève, 1802.

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Périodiques

Bibliothèque Britannique, rebaptisée Bibliothèque Universelle en 1816.

The Edinburgh Review.

____________

1 Bentham, J., A Fragment on Government, Londres, 1776.

2 Bentham, J., Defence of Usury, Londres, 1787.

3 Apologie de l’Usure, rédigée en Forme de Lettres, adressées à un Ami… traduit de l’Anglois de Jérémie Bentham, Paris, 1790. – Lettres sur la Liberté du Taux de l’Intérêt de l’Argent par Jérémie Bentham, traduites de l’Anglais par E. Dumont, Paris, 1790.

4 Version originale : Panopticon : or, the Inspection-House, Dublin et Londres, 1791. Version française : Panoptique. Mémoire sur un nouveau principe pour construire des maisons d’inspection, et nommément des maisons de force, par Jérémie Bentham, Paris, 1791.

5 Voir Bentham à Dumont, 16 août 1792, dans Taylor Milne, A., (ed.) The Correspondence of Jeremy Bentham, vol. iv, Londres, 1981, (The Collected Works of Jeremy Bentham) pp. 385-386.

6 Traités de législation civile et pénale, précédés de Principes généraux de Législation, et d’une Vue d’un Corps complet de Droit, terminés par un Essai sur l’influence des Temps et des Lieux relativement aux Lois. Par M. Jérémie Bentham, jurisconsulte anglois. Publiés en François par Et. Dumont, de Genève, d’après les manuscrits confiés par l’auteur, 2 tomes, Paris et Genève, 1802.

7 Jardin, A., Histoire du Libéralisme Politique, Paris, 1985, p. 194 : « Les émigrés étaient partis en exil persuadés que la suprématie française dans le domaine de la littérature, des arts, de la vie en société, était admise de toute l’Europe. Ils eurent la surprise de constater que ce vernis de civilisation française, qui existait vingt-cinq ans plus tôt, s’était partout écaillé. Au théâtre, le public préférait aux tragédies de Voltaire les drames du vieux Shakespeare ou du jeune Schiller. »

8 Voir : Blamires, C., « Etienne Dumont : Genevan Apostle of Utility », Utilitas, 1990, II, n° 1, p. 65 ; et Neal, J., Principles of Legislation from the manuscripts of Jeremy Bentham, by M. Dumont, Boston, 1830, pp. 10-11.

9 The Edinburgh Review, 1804, VII, pp. 1-26.

10 Mill, J.S., Autobiography, in Autobiography and Literary Essays, ed. Robson, J.M., et Stillinger, J., Toronto, 1981 (Collected Works of John Stuart Mill, vol. i), i. 67.

11 Tactique des Assemblées Législatives, suivie d’un Traité des sophismes politiques ; ouvrage extrait des manuscrits de M. Jérémie Bentham, Jurisconsulte Anglois, par Et. Dumont, Membre du Conseil Représentatif du Canton de Genève, 2 tomes, Genève et Paris, 1816, i. 1-266.

12 Bowring, J., The Works of Jeremy Bentham, 11 vol., Edimbourg et Londres, 1838-1843, ii. 299-373.

13 La seule étude biographique de la vie de Dumont est : Martin, J., Etienne Dumont 1759-1829. L’ami de Mirabeau, le voyageur, le patriote genevois, Neuchâtel, 1942. Voir aussi : Bénétruy, J., L’Atelier de Mirabeau. Quatre Proscrits Genevois dans la Tourmente Révolutionnaire, Genève, 1962.

14 Bibliothèque Publique et Universitaire de Genève, ms. Dumont 31.

15 Martin, op. cit., pp. 12-13.

16 Bentham à Dumont, 3 mai 1790, dans The Correspondence of Jeremy Bentham, iv. p. 126. Pour cette période de la vie de Dumont, voir aussi Bénétruy, op. cit.

17 Voir Peter, M., Genève et la Révolution. Les Comités Provisoires (1792-1794), Genève, 1921.

18 Blount, C., « Bentham, Dumont, and Mirabeau », University of Birmingham Historical Journal, 1952, III, n° 2, p. 157.

19 Ms. Dumont 31, f. ix.

20 Op. cit., f. xxxii.

21 Op. cit., f. xlviii.

22 Op. cit., f. xlix.

23 Op. cit., f. l.

24 Op. cit., f. xlvii.

25 Cet écrit fut publié après sa mort, en deux parties : voir « Observations sur le caractère et les écrits de Rousseau », Bibliothèque Universelle, mars 1836, pp. 3-11 ; et « Observations sur le style de J.-J. Rousseau », Bibliothèque Universelle, avril, 1836, pp. 298-313.

26 Bibliothèque Universelle, mars 1836, p. 7.

27 Op. cit., p. 8.

28 Ibid.

29 Bibliothèque Universelle, avril 1836, p. 310.

30 The White Bull, on Oriental History : Translated from an Original Syrian MS. Communicated by Mr Voltaire. With Notes and a Preface, in which Several Bloody Transactions are brought to light. Also a Choice Precedent in Crown Law, Londres, 1774.

31 Bibliothèque Britannique, 1797, V, (section littérature), p. 156.

32 Henry Frederic Groenvelt, Letters containing an account of the late Revolution in France, and observations on the Constitution, Laws, Manners, and Institutions of the English ; written during the author’s residence at Paris, Versailles, and London, in the years 1789 et 1790. Translated from the German, Londres, 1792.

33 Ms. Dumont 35.

34 Pour une première mention de cet ouvrage, dont le héros allait au début s’appeler Khurkerburger pour se métamorphoser enfin en Groenvelt, voir Dumont à Romilly, 19-20 septembre 1790, in ms. Dumont 17 f. xliv.

35 Ms. Dumont 35, f. ii.

36 Op. cit., f. xix.

37 Op. cit., f. lxiv.

38 Op. cit., f. xcviii.

39 Op. cit., f. ci.

40 Voir Bentham’s Theory of Fictions, with an introduction by C.K. Ogden, Londres, 1932, et la contribution de J. Bouveresse dans le présent ouvrage.

41 Burns, J.H., et Hart, H.L.A., (eds.), An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, Londres, 1970 (The Collected Works of Jeremy Bentham), p. 11.

42 Ms. Dumont 55.

43 Say J.-B., Cours Complet d’Economie Politique, 6 tomes, Paris, 1829 ; voir ms. Dumont 77, f. 5.

44 Ms. Dumont 77, f. 7.

45 Op. cit., 77, f. 9.

46 Ms. Dumont 55, ff. cxvi, cxxxviii.

47 Op. cit., ff. civ, cvi.

48 Op. cit., f. cxxxvi.

49 Op. cit., f. cxxxviii.

50 Loc. cit.

51 Op. cit., f. cvi.

52 The Edinburgh Review, 1804, VII, pp. 13-15.

53 Ms. Dumont 55, f. xcix.

54 Op. cit., f. cvi.

55 An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, ch. 2, p. 17.

56 Traités de Législation Civile et Pénale, 3e éd., revue et corrigée, 3 vol., Paris, 1830, i, 7.

57 An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, ch. 2, p. 18.

58 Traités, i, 8.

59 An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, ch. 2, p. 17, note a.

60 Traités, i, 23.

61 Bibliothèque britannique (Littérature), 1797, V, p. 158.