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Les reformulations : des formes méta-énonciatives par excellence

Spécificités et introducteurs

Blandine PENNEC1

1. Introduction

Face aux problèmes de délimitation de la catégorie des reformulations, c’est la question de leur caractérisation qui se pose. De façon commune, le terme de « reformulation » se comprend comme le retour d’un énonciateur sur une première formulation, afin de la moduler. Il s’agit d’un phénomène qui « dans le même temps qu’il pose un dit nouveau, re-dit un propos antérieur » (Le Bot, Schuwer, Richard 2008 : 11). Le terme « reformulation » est précisément révélateur de cette ambivalence : en effet, le préfixe « re- » peut dénoter l’itération, mais le terme « formulation » implique une opération de nomination ou de désignation d’un référent qui s’avère forcément unique et distinctive. Dans certains cas, le segment reformulé est censé améliorer la production initiale. C’est ce qui fait dire à Clinquart (1996 : 152) que « l’utilisation des reformulations permet un discours plus ou moins élaboré, et c’est à ce titre que l’on peut dire qu’elles sont les témoins d’une certaine maîtrise du locuteur à manier la langue […] ». Authier-Revuz (1995 : 616) parle quant à elle de « work in progress » de la nomination. Moirand (1994 : 1-2) souligne de son côté la fonction interactive de la reformulation. En effet, selon l’auteur, « elle manifeste, au niveau pragmatique, une adaptation nécessaire du discours à ses destinataires ». La reformulation permettrait donc – dans certaines situations de communication tout au moins – de faire progresser la compréhension mutuelle.

Reformuler consiste en tout cas à élaborer une formulation seconde, à partir d’une formulation première. D’un point de vue énonciatif, un premier segment S1 sert de source à l’élaboration d’un second segment S2, qui module le premier (sur le plan de la forme ou du contenu). La lecture d’un tel lien leur fait rétrospectivement acquérir le statut de segment source(s) et de segment reformulé (R). Au-delà de cette caractérisation formelle, se pose toutefois la question de leur caractérisation discursive. En effet, lorsque l’on se penche sur la catégorie des reformulations du point de vue de ses manifestations, il apparaît qu’elle peut regrouper des phénomènes assez divers. Dès lors, nous nous demanderons ce qui en constitue le dénominateur commun, légitimant le regroupement de phénomènes en apparence si hétérogènes sous une seule et même étiquette. Le cadre utilisé pour cette étude tâchera de relier les plans énonciatif et discursif. Nous nous baserons sur des exemples authentiques2 en anglais et en proposerons une traduction en français, tout en nous gardant de considérer que les deux langues fonctionnent de façon strictement similaire ; des mécanismes parallèles peuvent néanmoins être observés. L’étude présentera tout d’abord les facteurs d’hétérogénéité caractérisant la catégorie des reformulations, pour ensuite proposer une description énonciativo-discursive traduisant, au-delà de leurs spécificités, les points communs de ces phénomènes. Ce sont ensuite les introducteurs de reformulations qui seront examinés, afin de comprendre comment ils participent de la structuration interne de ces phénomènes, et dans quelle mesure ils en orientent l’interprétation.

2. Constat d’hétérogénéité

Reformuler, c’est formuler / exprimer de nouveau ou autrement, selon le CNRLT (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales)3. On fournit donc, en un point du discours, un segment destiné à s’inscrire, non pas dans la continuité syntagmatique du précédent, mais sur le même axe paradigmatique. D’où son statut de réélaboration, et non de simple prolongement de ce qui précède. Cette caractéristique leur vaut, chez Charolles (1985 : 109), l’appartenance à la catégorie des actes de composition textuelle, par contraste avec celle des actes de constitution textuelle. En effet, les actes de constitution textuelle assurent la cohérence du texte tout au long de sa progression. Ils s’effectuent par le biais d’opérations de détermination seconde (telles que la pronominalisation de troisième personne, ou encore l’emploi d’un article défini) qui permettent à l’énonciateur de reprendre un élément du contexte gauche. Les actes de composition textuelle permettent, pour leur part, d’assurer l’organisation du texte. Ils se réalisent sous forme d’opérations telles que la reformulation, la répétition, l’accentuation, la justification, le fait d’expliquer ou de compléter ses propos. Ces opérations permettent d’agencer les éléments d’un texte, et en favorisent ainsi la compréhension.

Cela étant, la catégorie des reformulations, bien qu’évoquée de façon monolithique lorsqu’il s’agit d’effectuer des classements d’actes textuels, regroupe en réalité des configurations très différentes, non seulement du point de vue formel, mais également du point de vue des fonctions pragmatiques associées. Elle peut tout d’abord regrouper des micro-reformulations, lorsque l’on reformule un segment seulement de l’énoncé pris comme source, ou encore des macro-reformulations, lorsque l’on reformule des phrases entières. La micro-reformulation est illustrée en (1)4 :

(1) Most serious diseases were thought to arise from “miasmas”, in other words, vapours or smells (in some theories, fine clouds of sticky atoms) which affected the balance of “humours” in the body. (Daily Telegraph, 1985-94, BNC)

(1’) La plupart des maladies graves étaient considérées comme provenant de « miasmes », en d’autres termes, de vapeurs ou d’odeurs (dans certaines théories, de fins nuages d’atomes poisseux) qui affectaient l’équilibre des « humeurs » dans le corps.

En (1), il apparaît qu’un syntagme seulement est reformulé : le syntagme miasmas, qui est reformulé en vapours or smells. Ce type de micro-reformulations permet généralement d’améliorer la nomination, ou encore de favoriser la compréhension des termes employés.

Contrastant avec le cas de la micro-reformulation, celui de la macro-reformulation est illustré en (2) :

(2) For at times it can seem as if we stand at the interface of two incommensurable modes of thinking, each of which, we know, has the capacity to constitute itself as reality and the other as its dream or myth. Each, in other words, seems possessed of a drug-like power to re-orchestrate our mental outlook. (FLOB J23193)

(2’) Car parfois, il peut nous sembler être à la frontière de deux incommensurables modes de pensée, chacun d’entre eux, nous le savons, ayant la capacité de se poser en tant que réalité et l’autre en tant que rêve ou mythe. Autrement dit, chacun d’entre eux semble doté d’un pouvoir assimilable à celui d’une drogue : celui de réorchestrer nos regards mentaux5.

En (2), c’est l’ensemble du contenu de la première phrase qui se trouve reformulé pour donner lieu à la seconde. Cette dernière est accompagnée du connecteur in other words, en position post-initiale. D’un point de vue pragmatique, ce type de reformulation est davantage associé à une fonction de cohésion textuelle.

Tandis que ces reformulations se présentent comme immédiates, autrement dit sont effectuées directement à la suite du segment source, il s’avère que la reformulation peut également s’opérer de façon différée. Dans ce cas, une distance textuelle sépare le segment source et le segment reformulé :

(3) Victor was prime Bear, Bear absolute.

I know I haven’t explained just what a bear is, and it’s not an easy thing to define.

There have always been tubby men, but I can’t think they ever formed a little self-conscious tribe before […]

So Victor was an absolute bear. He had pale skin, heavy eyebrows and a startlingly dark beard, full but trimmed. (FLOB F 2142)

(3’) Victor était l’Ours par excellence.

Je sais que je n’ai pas expliqué ce que j’entends par « Ours », et ce n’est pas une chose simple à définir […]

Victor était donc absolument Ours. Il avait une peau claire, de lourds sourcils et une effrayante barbe noire, dense mais taillée.

Le segment reformulé peut être compris comme une reformulation du segment source, en raison d’une reprise de termes lexicaux (Bear, absolute) ainsi qu’à l’équivalence globale de leurs contenus. Comme so signale une anaphore (et renvoie de ce fait à un dit antérieur), il peut être interprété en tant qu’introducteur de cette reformulation différée. Ce type de reformulation intervient non plus au niveau local (ce qui était le cas des reformulations immédiates), mais au niveau de l’organisation générale du texte. Il permet de structurer le discours en reprenant, après une digression ou un développement, une idée considérée comme directrice. Nous sommes donc très loin d’une reformulation favorisant la nomination et / ou la compréhension.

Une autre ligne de partage au sein des reformulations distingue d’une part les auto-reformulations, autrement dit les reformulations, par un énonciateur, de ses propres propos, et d’autre part les hétéro-reformulations (pour reprendre une expression empruntée à De Gaulmyn 1987), c’est-à-dire les reformulations, par l’énonciateur, des propos du co-énonciateur. Les premières sont illustrées dans tous les exemples ci-dessus, et les secondes en (4).

(4) L1 : You read the Clerk’s Tale you mean ?

L2 : Mm. yes but that was also… this is rather in the mists of Antiquity

L1 : In other words you can’t remember very much about it. (LLC03-31a514800A)

(4’) L1 : Donc tu as déjà lu « The Clerk’s Tale » ?

L2 : Oui mais c’était… c’était il y a bien longtemps.

L1 : Autrement dit, tu ne t’en souviens pas bien.

Cette fois, et contrairement à ce qui se produisait précédemment, la reformulation n’est pas produite par un seul et même locuteur. On voit en effet que L1 reformule ici les propos de L2, afin de traduire les implications de la réponse fournie par ce dernier. Ce type d’hétéro-reformulation favorise une co-construction du sens.

De façon plus notable encore, les reformulations regroupent tout aussi bien des paraphrases que des reformulations paraphrastiques, ou encore des reformulations non paraphrastiques. Les paraphrases, tout d’abord, constituent des cas de reformulations présentant des segments équivalents par leur contenu, comme en (5) par exemple.

(5)“She’s busy. She’s got a lot of things to do”. (H. Pinter-Betrayal)

(5’) Elle est occupée. Elle a beaucoup de choses à faire.

On peut lire une équivalence entre ces segments car le prédicat du second (« have got a lot of things to do ») est une définition de celui du premier (« be busy »). L’interprétation d’une paraphrase est donc liée aux seuls contenus propositionnels. La paraphrase est réputée comme étant un cas prototypique de reformulation, ainsi que le rappelle Fuchs (1994 : 89). Comme le montre la linguiste, le procédé fait appel à un jugement métalinguistique d’identification.

Les reformulations prennent aussi la forme de reformulations dites paraphrastiques, selon l’expression de Gülich & Kotschi (1983 : 305), aussi employée par Roulet (1987) et Rossari (1997), autrement dit de reformulations présentant un introducteur signalant l’équivalence, mais sans pour autant que cette dernière soit nécessairement effective, comme en (6) :

(6) Laplace argued that an infinite mind would be capable, in principle, of predicting the whole future course of nature and human history form a knowledge of the present motions of the particles of matter. Our fate, in other words, is written in the atoms. (SEC-dpt 03-011 – Speaker : Robert Fox)

(6’) Laplace prétendait qu’un esprit surpuissant serait capable, en principe, de prédire l’avenir de la nature et de l’histoire humaine à partir de la seule connaissance des mouvements définissant les particules constitutives de la matière. Autrement dit, notre destin est inscrit dans les atomes.

À la différence de l’exemple de paraphrase donné plus haut, l’équivalence (marquée par in other words) ne caractérise pas ici les contenus eux-mêmes. En effet, les informations apportées par les deux phrases diffèrent, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif. La locution prédique néanmoins une équivalence entre ces deux phrases. L’on peut même dire qu’elle impose cette équivalence, en dépit de la réalité des contenus6. La reformulation, qui est ici explicite (en raison de la présence du connecteur), permet en fait de fournir une formulation plus concise, et finalement plus claire, qui sera facilement retenue par le co-énonciateur.

Enfin, l’on peut mettre en lumière des reformulations dites non paraphrastiques, toujours selon l’expression de Roulet (1987) puis Rossari (1997 : 13-23). Il s’agit de reformulations correctives, ou encore permettant d’effectuer une modification de la perspective énonciative elle-même (par le biais de précisions concernant le référent, par exemple), comme en (7) :

(7) There are, of course, history books, or rather sections and chapters in books, which do focus on women. (Frameworks for teaching, 1992, BNC)

(7’) Il y a, bien entendu, des livres d’histoire, ou plutôt des sections et chapitres de livres, qui se concentrent effectivement sur les femmes.

Lors d’une reformulation introduite par or rather, le contenu du segment source peut faire l’objet d’une modification qualitative : le référent évoqué par le second segment se présente comme différent de celui qui est évoqué par le premier – d’où l’étiquette de reformulation non paraphrastique – tout en lui étant lié. La réélaboration fournit ici un contenu plus exact.

Suite à ces observations, les phénomènes regroupés sous l’étiquette de « reformulation » paraissent finalement assez éloignés les uns des autres. Les différences sont particulièrement saillantes concernant les paraphrases, les reformulations paraphrastiques et non paraphrastiques. En effet, dans le premier cas, on dit globalement la même chose ; dans le second, on peut prétendre dire la même chose tout s’éloignant en fait du premier contenu ; dans le troisième, on dit véritablement autre chose. Ces phénomènes semblent, de fait, assez hétérogènes. Ainsi, face à cette question de l’unité de la catégorie des reformulations, c’est la question de leur caractérisation énonciativo-discursive qui se pose. Y-a-t-il, au juste, des paramètres légitimant le regroupement de tels phénomènes ?

3. Caractérisation énonciativo-discursive des phénomènes de reformulation

En dépit des diverses sous-catégories mises en lumière, nous pouvons considérer l’ensemble des reformulations comme des formes spécifiques relevant de la méta-énonciation, autrement dit du domaine de l’énonciation qui se prend elle-même comme objet7. Plus précisément, au sein de ce champ – assez vaste – de la méta-énonciation, les reformulations peuvent être considérées comme des formes de réajustement du discours : l’énonciateur module en effet une partie de sa production discursive, suite à un processus d’auto-évaluation de cette dernière. Contrairement à d’autres formes méta-énonciatives qui se situent dans le prolongement syntagmatique du segment précédent (un commentaire parenthétique par exemple), la particularité des réajustements du discours tient à ce que ce type de phénomènes propose, du point de vue interprétatif, un retour paradigmatique sur le segment source. Précisons bien qu’en faisant appel à cette catégorie des réajustements, il ne s’agit pas pour nous de créer une catégorie concurrente à celle des reformulations ; il s’agit en revanche de mettre en évidence un dénominateur commun permettant de souligner leur unité, au-delà de mouvements discursifs paraissant parfois opposés (dans le cas des reformulations paraphrastiques et non paraphrastiques notamment).

Le terme de réajustement (cf. Filippi-Deswelle 2012, ou encore Pennec 2017) a été conçu comme un prolongement discursif du phénomène d’ajustement mis en évidence, dans le cadre de la théorie des opérations énonciatives, par Antoine Culioli (1990, 1999). Il faut noter que le travail d’ajustement s’effectue à un stade notionnel, et donc au cours d’une première phase de construction énonciative. L’ajustement, du point de vue énonciatif, correspond en effet à un travail sur les notions, afin de les délimiter au mieux. Il s’agit d’une « mise en contact de l’énoncé avec le référent selon une relation de conformité aux représentations mentales que s’en fait l’énonciateur » (Filippi-Deswelle, 2012 : 341). L’ajustement s’opère donc de façon privilégiée grâce à des marqueurs permettant à l’énonciateur de se positionner par rapport à ses choix notionnels, soit pour les confirmer, soit pour les relativiser (really, almost, completely, sort of…). Toutefois, les sélections opérées par l’énonciateur ne suscitent pas toujours les représentations souhaitées chez le co-énonciateur, ou même chez l’énonciateur lui-même, lorsque ce dernier évalue sa propre énonciation. Dans de telles circonstances, les énonciateurs peuvent produire des réajustements. Ces derniers sont compris comme un travail second sur un segment discursif, modulé après coup. D’où l’appartenance des reformulations à ce champ de phénomènes méta-énonciatifs. Les réajustements s’effectuent en effet au cours d’une deuxième phase de construction, et interviennent sur le plan discursif pour parfaire l’élaboration préalable. Le réajustement se produit donc « lorsque l’énonciateur se fait non plus producteur mais aussi interprète », selon une formule de Filippi-Deswelle (2012 : 342-343). Les réajustements correspondent ainsi, soit à la prévention, soit à l’élimination de hiatus, ou non-coïncidences du dire.

Divers types de non-coïncidences du dire ont été mis en évidence par Authier-Revuz (1993 : 239-252). Les non-coïncidences du dire qui nous intéressent pour cette étude sont principalement : des non-coïncidences entre les mots et les choses, correspondant à des défauts de nomination ; des non-coïncidences interlocutives, qui concernent le rapport entre les énonciateurs et aux manques d’adéquation entre leurs représentations ; des non-coïncidences des mots à eux-mêmes, en cas de polysémie ou d’homonymie notamment. Le fait de déceler une telle non-coïncidence donne lieu à une modulation du segment source, qui est retravaillé de façon plus ou moins conséquente.

Un certain nombre de réajustements sont donc opérés lorsque de telles non-coïncidences sont soit anticipées, soit décelées après coup par les énonciateurs. L’objectif est de réduire ces manques d’adéquation, afin de mettre le discours en conformité avec les représentations de l’énonciateur, d’une part, et de faire coïncider ces représentations avec celles du co-énonciateur, d’autre part. Les réajustements peuvent plus précisément consister en des précisions, des rectifications, des réélaborations plus ou moins importantes du discours en train de se faire, des surenchères ou minorations apportées à son propos. Ces modulations sont effectuées suite à un regard réflexif porté sur sa production, et sont ainsi produites au cours d’un travail second. Dans tous les cas, il s’agit d’une recherche d’adéquation, de son dire à la réalité, ou (directement) à l’autre. Les réajustements sont donc produits en vertu d’un temps de « lecture-écoute » de son énoncé, pour reprendre une autre expression empruntée à Authier-Revuz (1993). Lors d’une reformulation, le discours conjugue en effet deux plans : celui de la pratique discursive et celui de la représentation de ce discours. L’énonciation se double ainsi d’un commentaire d’elle-même, ce dernier étant compris comme un segment énonciatif n’étant nécessaire, ni à l’économie de l’énoncé, ni à celle du discours. Il s’agit donc d’une énonciation greffée, surajoutée, et se rapportant au segment antérieur. Il y a bel et bien un changement de plan à l’œuvre, ainsi que le précise Richard (2008 : 147) : « en somme, on voit deux énonciations en même temps qu’on perçoit (par une marque de ponctuation à l’écrit ou par un temps d’arrêt à l’oral) un décrochage énonciatif dans le fil du discours ». C’est, selon nous, cet ensemble de caractéristiques méta-énonciatives qui explique le regroupement de catégories en apparence distinctes telles que les paraphrases ou les reformulations paraphrastiques, d’une part, et les reformulations correctives, d’autre part.

Précisons bien par ailleurs que, si les reformulations constituent selon nous des cas de réajustements du discours, l’inverse n’est en revanche pas valable, et les reformulations ne sont que des procédés parmi d’autres permettant le réajustement. Des stratégies complémentaires employant des formes métalangagières (if you’ll pardon the expression, so to speak) ou des phénomènes de distanciation (par le biais de anyway, now, after all) ou encore des constructions jouant un rôle dialogique (it is not that… it is just that…) viennent en situation de communication s’ajouter aux procédés que sont les reformulations, permettant aux locuteurs de réajuster leur discours. La différence majeure entre les reformulations et ces autres procédés de réajustement tient en définitive à une caractéristique majeure des reformulations : le fait que ces dernières sont supposées permettre la substitution du segment source au segment reformulé. L’un comme l’autre segment, même s’ils se suivent linéairement, sont toutefois censés pouvoir occuper une seule et même place sur l’axe paradigmatique ou, du moins, jouer un rôle fonctionnel et discursif équivalent. C’est précisément pour cette raison que Roulet (1987 : 111-140) parle d’effet rétroactif concernant les connecteurs reformulatifs, les faisant contraster avec les connecteurs argumentatifs. L’auteur montre en effet que les introducteurs de reformulation occasionnent un changement de statut hiérarchique systématique vis-à-vis de l’acte de discours antécédent, tandis que les introducteurs d’arguments assignent quant à eux un statut à l’argument introduit, mais sans modifier le statut de l’acte discursif préalable.

Les caractéristiques discursives – et plus précisément la spécificité des reformulations en tant que méta-énonciations – ayant été abordées pour en montrer l’unité, nous allons maintenant revenir à ce qui fait leur foisonnement, et nous pencher sur leurs introducteurs. Ces derniers contribuent à structurer le champ des reformulations, du fait qu’ils en orientent l’interprétation.

4. Les introducteurs de reformulation : entre marqueurs spécifiques et marqueurs polyvalents

Nous avons vu que les reformulations se divisent en trois grandes catégories : les paraphrases, (qui présentent des contenus tout à fait équivalents), les reformulations paraphrastiques (lorsque la forme de l’énoncé est prioritairement retravaillée, ce qui peut malgré tout entraîner certaines modifications de contenu, mais non explicites) et enfin les reformulations non paraphrastiques (lorsque le contenu lui-même est ouvertement modifié).

Le cas de la paraphrase se passe par définition d’introducteur, et ne constituera pas l’objet de cet examen. Ce qui nous intéresse prioritairement ici tient aux introducteurs de reformulations paraphrastiques et non paraphrastiques. L’une comme l’autre catégorie peut en effet se manifester par le biais de différents moyens linguistiques, passant soit par la présence d’un introducteur spécifique de la reformulation, soit d’un introducteur non spécifique, autrement dit d’un marqueur polyvalent. Nous allons les passer en revue successivement, ce qui nous permettra également de mettre en lumière l’existence de points de jonction.

4.1. Cas des reformulations paraphrastiques

4.1.1. Introduction par un marqueur spécifique

La reformulation paraphrastique est censée dire « la même chose, mais en des termes différents ». Sur le plan énonciatif, cette reformulation peut être introduite par des expressions spécifiques. Il s’agit d’expressions signalant explicitement une équivalence entre les segments. On trouve ainsi les connecteurs in other words, that is to say, that is, namely, i.e. (ce dernier figurant à l’écrit, uniquement). Voici un exemple prototypique de reformulation paraphrastique :

(8) For now, all the basic mechanisms are regarded as the product of evolution. That is to say, the child is assumed to have an innate ability to make associations, or to engage in assimilation and accommodation. (FLOB J23195)

(8’) À l’heure actuelle, tous les mécanismes de base sont considérés comme le produit de l’évolution. C’est-à-dire que l’on considère l’enfant comme ayant une capacité innée à établir des associations, ou à se lancer dans des processus d’assimilation et d’accommodation.

Par le biais de that is to say, les segments sont présentés comme équivalents, bien qu’il existe en réalité un écart entre les contenus.

À l’image de cette locution, les marqueurs ou expressions cités plus haut signalent tous explicitement une équivalence entre les segments qui les encadrent, ce pourquoi ils peuvent être qualifiés de spécifiques8. Lorsque l’un de ces marqueurs est employé, il n’est pas nécessaire que les contenus propositionnels présentent une équivalence stricte, car les instructions de l’introducteur suffisent à marquer l’équivalence, orientant ainsi la lecture du co-énonciateur.

4.1.2. Introduction par un marqueur non spécifique

Parallèlement à ces termes ou expressions spécifiques, certains marqueurs peuvent être interprétés comme introduisant des reformulations, alors qu’ils ne sont pas spécifiques de cette opération. Ce phénomène s’observe essentiellement à l’oral, ou encore à l’oral retranscrit. Dans le cas de la reformulation paraphrastique, nous trouvons des marqueurs de discours, tels que you know, you see, I mean, well, des marqueurs de confirmation, comme yes, okay, indeed, des marqueurs de validation, comme so ou encore d’altérité, comme or. Ces introducteurs ne sont pas à même d’imposer à eux seuls la lecture de reformulations, mais ils sont toutefois compatibles avec cette opération, et ils peuvent l’introduire :

(9) What stunned me, though, was that he’d found me after all this time. You know, a sort of big brother sensation. (FLOB F0203)

(9’) Ce qui m’a troublée, en tout cas, c’est qu’il ait réussi à me trouver après tout ce temps. Tu sais, c’est une sensation bizarre, celle d’avoir affaire à Big Brother.

Un rapport d’équivalence peut ici être lu entre les segments qui encadrent you know (what stunned me, though, was that he found me…, d’une part, et a Big Brother sensation, d’autre part). L’expression you know peut alors être interprétée comme l’introducteur de cette reformulation paraphrastique mais, si tel est le cas, c’est bien en vertu de cette équivalence globale des contenus. Ce sont finalement eux qui déclenchent une interprétation en termes de reformulation. Dans d’autres cas de figure, la même expression serait comprise comme un simple marqueur de discours.

Il ressort de ces observations que, dans les cas d’emploi de marqueurs non spécifiques, il est nécessaire, pour identifier une reformulation, que les contenus présentent par eux-mêmes une équivalence pouvant être perçue aisément.

4.2. Cas des reformulations non paraphrastiques

4.2.1. Introduction par un marqueur spécifique

Rappelons que les reformulations non paraphrastiques sont des reformulations présentant une modification du contenu propositionnel. Deux grands cas de figure se présentent : ceux dans lesquels on condense le propos (sous forme de synthèse ou de réexamen) et ceux dans lesquels on opère une rectification. Les reformulations non paraphrastiques peuvent, elles aussi, être introduites par des marqueurs spécifiques. Elles ont en commun le fait d’annoncer un changement de perspective énonciative dans le second segment (cf. Rossari 1990 : 348). Divers introducteurs caractérisent ces reformulations, et leur confèrent corrélativement leurs spécificités. On trouve notamment des marqueurs de synthèse (on the whole, altogether, all in all, when all is said and done, ou encore all things considered).

Parallèlement, il existe des marqueurs de rectification. Ces opérations peuvent notamment s’effectuer par le truchement d’une alternative préférentielle. Si des marqueurs non spécifiques sont fréquemment employés, comme nous allons le voir plus bas, la séquence or rather constitue quant à elle une séquence marquant spécifiquement cette opération :

(10) We have no idea of how this will all end ; or rather, how it will continue in its effects over several decades […] (Marxism Today, 1985, BNC)

(10’) Nous n’avons aucune idée de comment cela va se terminer ; ou plutôt, comment ses effets vont continuer à se manifester durant plusieurs décennies.

Avec ce type d’introducteur on franchit un degré supplémentaire dans le domaine de la reformulation non paraphrastique, car il ne s’agit plus uniquement de ramener des contenus à une formulation résultante (ce qui impliquait déjà un changement de perspective énonciative), mais c’est une modification plus importante du contenu qui est à l’œuvre, car il se voit rectifié. Le réajustement opéré implique donc une plus grande distance entre les contenus du segment source et du segment reformulé, sachant que le second peut – interprétativement, du moins – se substituer au premier.

4.2.2. Introduction par un marqueur non spécifique

Les reformulations non paraphrastiques peuvent elles aussi être introduites par des marqueurs polyvalents, autrement dit des marqueurs non spécifiques. On retrouve le marqueur d’altérité or, à côté duquel on peut inscrire le marqueur de discours well notamment, ou encore I mean. Ce qui est finalement remarquable, c’est que des marqueurs non spécifiques communs puissent introduire des reformulations paraphrastiques (comme nous l’avons signalé plus haut) ainsi que des reformulations non paraphrastiques. Comment l’interprétation de ces dernières est-elle rendue possible ?

(11) Now he was himself again. Or almost himself. For he would never again be wholly as he was. (Chung Kuo : The white mountain, D. Wingrove, 1991, BNC)

(11’) Maintenant, il était de nouveau lui-même. Ou presque lui-même. Car il ne serait jamais plus complètement comme il était auparavant.

Premièrement, le segment introduit par or peut être interprété comme élaboré à partir du segment précédent. En outre, ces contenus ne peuvent réellement coexister. D’où la lecture d’une reformulation non paraphrastique. Le réajustement opéré consiste, plus précisément, en une légère correction du premier segment. La perception de ce réajustement dépend essentiellement des contenus eux-mêmes, et non de l’introducteur, qui peut quant à lui se prêter à la lecture de plusieurs opérations, et notamment de reformulations paraphrastiques comme non paraphrastiques.

Suite à ces observations liées aux reformulations et à leurs modalités introductives, il apparaît qu’elles peuvent être présentées sous l’angle d’un gradient, concernant la prise en compte des contenus propositionnels : elle est d’autant moins forte que le marqueur est spécialisé, et vice versa. De fait :

– dans les cas d’emploi d’expressions spécifiques, la lecture d’une reformulation s’impose, quels que soient les contenus propositionnels ;

– dans les cas d’emploi de marqueurs non spécifiques de la reformulation, l’interprétation de la reformulation (et de sa nature) dépend des contenus propositionnels des segments,

– en l’absence de marqueur, les contenus propositionnels doivent présenter eux-mêmes un rapport de réélaboration qui soit manifeste.

Ceci étant, nous proposons d’effectuer un bilan sous forme de tableau. Ce dernier met en évidence l’existence du gradient évoqué concernant la prise en compte des contenus propositionnels (d’autant moins forte que le marqueur est spécifique). Ce principe se vérifie pour les deux grands types de reformulations : paraphrastique et non paraphrastique.

Tableau 1. Paramètres intervenant dans l’identification d’une reformulation

5. Liens entre les différentes sous-catégories de reformulation et points de bascule

Dans la lignée des observations précédentes, il apparaît également que, dans les cas d’emploi d’introducteurs non spécifiques, on observe des points de bascule très rapide entre reformulation paraphrastique et non paraphrastique, car des marqueurs communs peuvent introduire l’une comme l’autre catégorie de reformulations. Ce sont alors les contenus propositionnels qui sont déterminants pour l’interprétation. Ceci se manifeste notamment en anglais dans le cas des marqueurs or, well, ou encore I mean. Nous allons prendre ici le cas du marqueur or afin de bien illustrer ce phénomène.

La conjonction de coordination or est un exemple prototypique de marqueur polyfonctionnel. Il donne lieu, en contexte, à des effets de sens variés, et peut, par exemple, introduire des alternatives inclusives ou exclusives, ou encore des approximations. Il peut aussi, notamment, être employé en tant qu’introducteur de reformulation, que cette dernière soit paraphrastique ou non paraphrastique. L’interprétation s’effectue alors en fonction des segments reliés, comme on peut le voir dans les exemples ci-dessous.

– Introduction de reformulations paraphrastiques :

(12) Biomarkers collected at single points of time therefore can not tell the whole story of how disease occurs in an individual. For that, one must look to the “exposome”, or the compilation of exposures experienced over an individual’s lifetime. (Characterizing Exposomes, K.S. Betts, 2012, COCA)

(12’) Les biomarqueurs collectés à des moments précis ne peuvent donc pas raconter toute l’histoire de l’apparition d’une maladie au sein d’un individu. À cette fin, l’on doit rechercher l’« exposome », ou l’ensemble des expositions qui se produisent au sein de la vie d’un individu.

Le second segment permet ici de traduire, dans des termes plus accessibles, le contenu du premier segment qui est constitué d’un terme technique. La conjonction or, bien que non spécifique de cette opération, est alors interprétable comme l’introducteur d’une reformulation paraphrastique.

Voici un autre exemple du même ordre :

(13) The conductor, or Maestro, as he likes to be called, rolled up to the rehearsal at least an hour late. (Cité par Blakemore, 2007)

(13’) Le chef d’orchestre, ou Maestro, comme il aime à être appelé, a conduit la répétition avec au moins une heure de retard.

Le second segment permet ici d’évoquer le même référent que le premier, mais sous une forme différente. On a affaire à une reformulation présentant une équivalence entre les contenus reliés, sachant que or s’avère compatible avec l’interprétation d’une reformulation paraphrastique. Mais le même introducteur, à savoir or, peut également relier des contenus mutuellement exclusifs, comme c’est le cas dans les exemples ci-dessous.

– Introduction de reformulations non paraphrastiques :

(14) He would call me very early, at six or seven in the morning, so I could give him a report on what had happened the previous night, which was pretty much pointless, because nothing ever happened, or almost nothing : maybe some call or other from Rome or Paris, simple cases from people who weren’t really sick but who wanted to make the most of the travel insurance they had bought in Santiago. (COCA, 2014, Long Distance, A. Zambra)

(14’) Il m’appelait très tôt, à six ou sept heures du matin, afin que je lui fasse un rapport de ce qui s’était passé la nuit précédente, ce qui était absolument inutile, puisque rien ne se produisait jamais, ou presque rien : peut-être un appel ou un autre depuis Rome ou Paris, des cas basiques de gens qui n’étaient pas vraiment malades mais voulaient retirer le maximum de l’assurance voyage qu’ils avaient souscrite à Santiago.

Le second segment permet ici de corriger le premier, almost nothing étant manifestement plus précis et plus adéquat aux yeux de l’énonciateur. La reformulation est alors interprétée comme corrective, autrement dit non paraphrastique.

(15) Corfu. Very hot. Rather noisy. There seemed to be a number of people there I knew. Or might have known. (cité par Lapaire J.R. et Rotgé W., Linguistique et grammaire de l’anglais, p. 319)

(15’) Il faisait très chaud dans cette ville, et c’était plutôt bruyant. Il semblait qu’il se trouvait là une foule de gens que j’avais un jour connu. Ou que j’aurais pu connaître.

Cette fois encore, le second segment vient moduler le premier afin de le nuancer. Ce n’est pas un équivalent qui est fourni, mais une retouche qui est effectuée. L’introducteur or s’avère compatible avec ce changement de perspective énonciative, en raison d’une valeur fondamentale assez large : or marque en effet une altérité, qui peut s’appliquer soit à la forme, soit au fond, selon les configurations d’accueil.

Il apparaît donc que le marqueur or peut bel et bien introduire des reformulations paraphrastiques comme non paraphrastiques, le seul paramètre déterminant pour l’interprétation tenant aux contenus propositionnels, et aux liens qu’ils entretiennent.

6. Conclusion

L’unité des phénomènes de reformulation, malgré leurs réalisations hétérogènes, semble préservée dès lors que l’on considère ces phénomènes comme des procédés méta-énonciatifs, et plus précisément en tant que formes de réajustement de discours. Autrement dit, il s’agit de phénomènes relevant d’un regard réflexif sur sa production, et plus exactement de formes permettant un retour paradigmatique sur un segment déjà énoncé, ou en cours d’énonciation.

Par ailleurs, l’étude a montré que la reformulation paraphrastique et la reformulation non paraphrastique (ou corrective) peuvent l’une et l’autre être introduites par des marqueurs spécifiques, ou encore des marqueurs non spécifiques. Ce qui est notable c’est que la prise en compte des contenus propositionnels s’avère inversement proportionnelle au degré de spécificité du marqueur. En outre, reformulations paraphrastiques et non paraphrastiques présentent des points de jonction dans les cas d’emploi de certains marqueurs non spécifiques, et notamment lors de l’emploi de or par exemple (mais aussi well, ou I mean). On peut ainsi basculer rapidement de l’une à l’autre reformulation, et ce sont en définitive les contenus qui sont déterminants. Or, quant à lui, marque essentiellement une alternative, comprise sur un plan méta-énonciatif. Le basculement rapide de l’une à l’autre interprétation peut à première vue sembler curieux, car ces deux types de réajustements sont a priori antithétiques. Mais ce n’est qu’un paradoxe apparent. En effet :

– lors d’une reformulation paraphrastique, la caractérisation formelle du référent est modifiée ; c’est donc un réajustement relatif à la façon de dire qui est prioritairement en jeu ;

– lors d’une reformulation non paraphrastique, c’est le référent qui est cette fois modulé et recatégorisé ; c’est ainsi un réajustement portant sur le dit9 qui est effectué.

On comprend donc plus aisément que l’on puisse passer rapidement de l’une à l’autre catégorie de réajustements, et que la nature de la reformulation à l’œuvre puisse être perçue différemment selon les types de segments reliés.

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1 Université Toulouse II, Cultures Anglo-Saxonnes (EA 801).

2 Les corpus utilisés pour cette étude sont le BNC (British National Corpus), le COCA (Corpus of Contemporary American English), le corpus FLOB (Freiburg Lancaster-Oslo Bergen Corpus), le LLC (London Lund Corpus) ainsi que le SEC (Spoken English Corpus), tous étant des corpus d’anglais moderne, écrit et oral pour les premiers et oral uniquement pour les deux derniers.

3 Le CNRLT est un portail créé par le CNRS en 2005 et accessible à l’adresse suivante : http: /  / www.cnrtl.fr / 

4 Les segments intéressés par la reformulation sont en italique.

5 Tous nos remerciements vont à Catherine Fuchs pour sa précieuse remarque concernant la différence de place réservée à l’introducteur de reformulation lorsque l’on compare l’anglais et le français. Tandis que la langue anglaise s’accommode volontiers d’une position post-initiale au sein du segment reformulé, il est plus naturel en français de trouver l’introducteur en position initiale dans ce même segment.

6 Du fait que les contenus ne sont pas effectivement équivalents, il serait envisageable de questionner l’appartenance d’une telle configuration à la catégorie des reformulations paraphrastiques. Nous considérons quant à nous qu’un introducteur de reformulation tel que in other words, signalant l’équivalence, est un signal interprétatif fort. Il conduit le co-énonciateur à interpréter une équivalence globale, même si cette dernière n’est pas effective au niveau des contenus. Une telle caractéristique a également été mise en évidence par Rossai (1997 : 14). En l’occurrence, la locution in other words signale une intention globale de traduire le premier propos en des termes différents, sans changement radical de perspective énonciative, mais en respectant au contraire une forme de continuité.

7 La méta-énonciation correspond elle-même à une sous-catégorie du métalangage, autrement dit du langage qui se prend lui-même comme objet. J. Rey-Debove (1978 : 2) pose que « dans le concret, une langue donnée L1 enferme un sous-système de L1 qui lui permet de parler de L1 »

8 Du fait que de tels marqueurs peuvent introduire des contenus non équivalents, certains auteurs remettent en question leur statut d’introducteur spécifique de la reformulation paraphrastique, considérant plutôt qu’ils sont polyvalents. Quant à nous, nous préférons maintenir leur statut d’introducteur spécifique, afin de bien les distinguer d’autres marqueurs polyvalents tels que well, or, you know par exemple. En effet, ces derniers peuvent être utilisés à des fins tout autres que reformulatives, et il nous importe donc de bien souligner cette différence fondamentale. S’ajoute à cela une raison déjà évoquée plus haut, à savoir le fait que nous considérons les introducteurs de reformulations comme des signaux interprétatifs majeurs, prépondérants – en raison de leurs instructions sémantico-pragmatiques – sur les contenus eux-mêmes.

9 Cf. Ducrot (1984) pour une réflexion plus approfondie sur la distinction entre le dire et le dit.