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Un cas de possession ritualisée: le ménadisme

Marie-Christine VILLANUEVA PUIG

Anhima, CNRS, Paris

En présentant cet essai sur la possession des femmes par Dionysos sous une forme ritualisée, dans le cadre d’une rencontre dédiée à « la perception des dieux, aux émotions, à la maîtrise rituelle : corps divins, corps humains », je vais m’interroger sur un mode de présence d’une divinité dont une des « spécialités » pour ainsi dire, est l’épidémie au sens grec : elle n’arrête pas de se manifester et ses épiphanies se marquent par une présence corporelle, visuelle et sonore très intense, à l’origine d’émotions fortes, d’expériences bouleversantes1. Elles se traduisent, pour qui en fait l’expérience, par des modifications, tant physiques que mentales, impressionnantes. Par rapport au thème général de cette rencontre, ma contribution n’envisagera pas la présence du divin sous forme de statue ni la problématique extrêmement complexe de ce mode de présence. C’est à un autre type de rapport entre le divin et l’humanité et de perception du dieu par l’homme que je vais m’attacher, plus précisément la possession par Dionysos de ses fidèles à travers le rituel.

Dans un premier temps, je vais examiner les épiphanies dionysiaques, une des formes de présence particulière de ce dieu.

Puis, je m’interrogerai sur le fidèle auquel il se révèle ainsi, un des modes de réception de sa présence si forte consistant dans la possession, dont textes et représentations figurées nous fournissent une approche, chacune marquée par les codes propres à son mode d’expression et à son temps. Aucune de ces sources ne constitue, c’est une évidence, un reportage ou un témoignage direct. Néanmoins, leur convergence, malgré la distance de nature et de temps, ne peut manquer d’être frappante. Devant l’absence totale de documents directs sur les rituels dionysiaques à Athènes durant les périodes archaïque et classique, j’admets l’utilisation, bien entendu, prudente et critique, des textes littéraires et des représentations figurées pour tenter d’approcher le fait rituel, comme l’a si pertinemment proposé R. Osborne2.

Enfin, dans un troisième et dernier point, je voudrais proposer un exemple d’approche de maîtrise rituelle de la possession dionysiaque par la Cité d’Athènes à travers le cas des thyiades d’Athènes, portant le nom delphique des ménades, et attestées par des témoignages littéraires. Elles rejoignaient périodiquement celles de Delphes pour des rites extatiques en l’honneur de Dionysos sur le Parnasse. Il s’agit d’un collège choisi qui « ménadise », sous le contrôle spatial et temporel du rite et au bénéfice de tous.

C’est un fait bien reconnu que Dionysos est le dieu le plus « épidémique » du Panthéon grec. Plutôt que fixé dans quelques grands sanctuaires, il n’en finit pas d’arriver, de se manifester pour se faire reconnaître3. Sa présence peut obéir à l’appel pressant des femmes pour qu’il se manifeste. Il n’est que de rappeler l’hymne des femmes d’Elis transmis par Plutarque4. Elles l’appellent à se manifester sous forme de taureau. Dans les Bacchantes d’Euripide, le chœur des Bacchantes lydiennes l’appellent avec intensité à se manifester comme taureau également5. Elles y ajoutent l’aspect du dragon et du lion renforçant la puissance de la divinité attendue.

Mais dans cette tragédie, document privilégié mais original et à caractère complexe sur l’épiphanie de Dionysos, c’est lui, le dieu, qui parle, dès les premiers vers, de sa présence corporelle affirmée : Hk « me voici, je suis là »6. Il vient à Thèbes pour être reconnu de toute la cité : hrâi « qu’elle le voie »7 et, tout au long de la pièce, l’aspect visuel est largement souligné. De plus, il faut bien noter que Dionysos n’intervient pas dans l’œuvre comme d’ordinaire les dieux dans la tragédie8. Il joue le rôle principal. Il est présenté par le poète comme le dieu qui met lui-même en scène son épiphanie au cours de laquelle il se révèle tant aux protagonistes du drame qu’aux spectateurs dans les gradins (ou encore à nous). Il manifeste sa présence divine à travers le déroulement du jeu tragique, jeu qui est placé précisément sous son patronage : la représentation a lieu lors de ses grandes fêtes civiques. En outre, cette imbrication constante entre le dieu de la religion civique, du culte officiel et celui de la représentation tragique, donc le maître de l’illusion tragique, est soulignée par le dédoublement scénique de Dionysos : sur le theologeîon, il est le dieu épiphanique et sur la scène, il est « l’Etranger » lydien à l’allure féminine. Mais il s’agit du même personnage théâtral, de l’acteur qui porte le même masque « souriant », comme cela est précisé, une ambiguïté de plus par rapport au masque tragique traditionnel. Certes, comme un dieu grec, il est anthropomorphe. Dès le prologue, il affirme lui-même : « j’ai déguisé le dieu sous l’apparence d’un mortel » (morphn ameípsas ek theoû brotsían)9. Son corps n’en est pas moins beau et éblouissant. Il appartient à ces « corps éclatants » des dieux qu’évoquait J.-P. Vernant. Celui que Penthée appelle « l’Etranger », venu de Lydie, se distingue par des traits précis : des boucles blondes, une chevelure parfumée, un teint pâle évoquant la kháris, à la fois la grâce et la séduction, et une composante féminine, encore renforcée par son vêtement féminin. En outre, son regard frappe particulièrement son interlocuteur10.

Du côté des représentations figurées, le jeune dieu gracile, aux formes efféminées est celui que Phidias et son atelier ont représenté au fronton Est du Parthénon, sans doute terminé en 433/211. Il est semi-allongé en position de symposiaste, son himátion étalé sur une peau de panthère posée sur un rocher. Je mentionnerai aussi celui du cratère attique à figures rouges connu comme « vase de Pronomos » à Naples12 daté vers 400, où il préside, aux côtés d’Ariadne, à la célébration d’une victoire au concours de drame satyrique, et celui plus sensuel qui est avec son épouse-amante au centre du thiase extatique de la frise se déroulant autour de la panse du cratère de bronze de Dervéni13 (fig. 1). Une des particularités de l’apparence physique de Dionysos est le changement qui sépare ces images de celles du Dionysos de l’âge archaïque, représenté barbu et d’âge mûr par le Peintre d’Amasis dans le troisième quart du VIe siècle par exemple14. A son aspect séduisant, s’ajoutent dans la tragédie d’Euripide, son attitude toujours en mouvement et bondissante, ainsi que le port d’attributs qui constitue aussi la marque d’appartenance de ses fidèles à leur dieu : la skeu theoû, la « livrée divine », composée du thyrse, de la nébride ou de la pardalide, de la couronne de lierre, et qu’il porte ici lui-même. Les peintres de vases l’ont aussi figuré ainsi. Sur une amphore attique à figures rouges des années 490, le dieu bacchant est bien le dieu des Bacchantes, représenté comme elles15.

Fig. 1 : Cratère de Dervéni, Thessalonique, Musée archéologique B1 : Dionysos et Ariadne (panse, détail), d’après Barr-Sharrar 2008, pl. 5.

L’intensité de son regard, l’importance du contact visuel et du face à face que rend si bien l’expression que lui prête Euripide à l’adresse de Penthée : horô horônta « il me voyait, je le voyais »16 sont frappants. Dès les représentations attiques les plus anciennes du dieu, l’importance de son visage, à l’allure de masque aux grands yeux écarquillés qui fixent le spectateur, est mise en valeur, sur le cratère François17 par exemple des années 565. Dans la frise figurant le cortège des divinités rendant visite aux jeunes époux Thétis et Pélée, il est le seul représenté le visage de face, comme sortant du champ de la procession, pour fixer et interpeller le spectateur. D’ailleurs, l’image du dieu-masque existe sur une série de représentations18. Cet aspect de Dionysos comme dieu au masque ne constitue nullement une fantaisie due à l’imagination des peintres. Le masque, le próspon, que, selon le témoignage de Pausanias19, les pêcheurs de Méthymna de Lesbos trouvent dans leur filet, et qui les frappe par son double aspect à la fois divin et étrange, se réfère bien à Dionysos dont, à la suite du prodige, ils établissent le culte.

Cette importance du face à face dans le dionysisme comporte donc une expression rituelle, évoquée par une série de vases connue sous le nom de Corpus des Lénéennes20. Un bon exemple de cette imagerie est fourni par un lécythe attique à figures noires des années 490-480 à New York21 : au centre, le pilier habillé et surmonté du masque du dieu autour duquel des femmes s’activent. Sur un stamnos à figures rouges plus récent, daté vers 450 (fig. 2)22, le rituel se déroule autour du masque plus reconnaissable car il est vu de face, non pour les suivantes du dieu comme sur l’exemple précédent, mais pour le spectateur auquel s’adresse le peintre de vases. Le rituel comporte la musique (marquée par la présence de l’aulós) et surtout le maniement du vin. Les évolutions féminines, d’ordinaire sages autour du masque, peuvent, plus rarement, comporter la capture de l’animal destiné au sacrifice dionysiaque, le déchirement à mains nues : le diasparagmós. Sur un lécythe de petite taille provenant d’Eleusis23, la scène, au rendu médiocre, présente une image rare : le pilier au masque est entouré de figures féminines à la danse vive et un jeune animal bondit derrière le pilier. L’allusion à la chasse et au déchirement de l’animal capturé est donc présente.

Fig. 2 : Stamnos attique à figures rouges, Boston MFA 90 155 : célébration du dieumasque (déroulé de la panse), d’après Kaltsas & Shapiro 2009, p. 273, fig. 3b.

Je voudrais revenir aux épiphanies dionysiaques. Il faut noter qu’elles s’accompagnent fréquemment de prodiges, de thaúmata de l’ordre de la lumière ou du bruit : une lumière étrange, une lueur mirage marquent la présence de Dionysos devant Penthée dans les Bacchantes24. Son nom Brómios, « le bruyant » exprime le vacarme qui l’accompagne, et qui peut être suivi d’un silence, aussi absolu qu’inquiétant25.

La parousie du dieu, qu’elle soit appelée ou subie, est accompagnée de miracles évoquant l’âge d’or : la terre laisse sourdre le lait, les thyrses distillent le miel. Quand ils touchent le sol, ils en font surgir l’eau et le vin26. Mais, plus fréquemment, l’épiphanie est accompagnée d’une « série noire » de prodiges. Le même lait et le même vin coulent du palais des Minyades, accompagnés du lierre qui envahit leurs métiers à tisser, lorsque les jeunes filles refusent de les quitter pour honorer Dionysos, et elles sont frappées de terreur27. Les secousses telluriques, la terre qui tremble et le palais royal qui vacille puis s’écroule lorsque Penthée refuse d’accueillir le dieu constituent un thème déjà présent dans les Edoniens d’Eschyle, qui traitent du refus du roi thrace Lycurgue d’accueillir Dionysos : dès l’arrivée du dieu, la « demeure (du souverain) est prise d’enthousiasme et les toitures sont saisies du délire bacchique »28.

Donc, l’épiphanie de Dionysos est accompagnée d’une présence physique très forte. Lueur et son, ainsi que des prodiges ambivalents, selon l’attitude de ceux auxquels le dieu se manifeste, leur manière de réagir vis-à-vis de la possession. C’est à ceux-ci, ou plutôt à celles-ci, les “candidates” à la possession, à leurs réactions et à la manière dont le dieu s’empare d’elles que je vais m’intéresser maintenant.

Nous avons vu Dionysos, au début des Bacchantes, se manifester pour être reconnu de la Cité de Thèbes tout entière qui doit apprendre à connaître la bacchanale29. Cependant, dans ce phénomène, les femmes ont un rôle particulier puisque ce sont les Thébaines que le dieu a envoyées de force sur le Cithéron. La tragédie compte bien deux Bacchants : Cadmos et Tirésias. Néanmoins, la possession par Dionysos jusqu’au paroxysme s’y trouve réservée aux femmes. Ce qui ne signifie pas qu’ailleurs des Bacchants extatiques ne soient évoqués pour la période classique. Ainsi, l’aventure de Skylès rapportée par Hérodote30. L’épisode se situe loin d’Athènes, à Borysthène dans la région de Mer Noire. Le roi Skylès éprouve le désir d’être initié au culte de Dionysos Baccheîos. Il s’agit donc d’un désir personnel et d’une initiative individuelle. Les Scythes reprochent aux Grecs, selon l’auteur de l’Enquête, de s’abandonner aux transports bacchiques (bakkheúein) et n’admettent pas qu’un dieu incite les hommes (ánthrpoi) à délirer (maínesthai). La remarque me paraît digne d’intérêt puisque la possession jusqu’au délire par une divinité est considérée comme un fait grec. Il y a là un type de limite entre Grecs et Barbares intéressant à explorer31. Le roi est épié avec son thiase en proie à Bákkhos, dénoncé, et un soulèvement aboutit à son renversement, puis à sa mise à mort. En dehors de l’attestation de ce Bacchant possédé par Dionysos, dont l’attitude est caractérisée par les deux verbes bakkheúein et maínesthai, le reproche fait aux Grecs par les Scythes : un dieu ne peut inciter les hommes à délirer sous son emprise, me semble devoir être rapproché du tópos athénien qui en constitue comme la réplique inversée : « boire comme un Scythe » ou « ivre comme un Scythe ».

Dans une vision traditionnelle et un peu schématique, qui mériterait sans doute d’être au moins légèrement nuancée, pour les hommes, l’accès à Dionysos se fait par le vin, le vin mesuré du sumpósion, et pour les femmes par le ménadisme, la transe où le vin n’intervient pas32. La répartition des rôles dans le dionysisme entre masculin et féminin constitue un point d’une très grande importance. Choisir aujourd’hui de parler de « ménadisme », sans en nier toute forme d’existence dans la réalité cultuelle, est d’une grande complexité et non dénué de risques. Le ménadisme, chez Euripide comme dans les représentations figurées, est, comme son nom l’indique, affaire de femmes, comme si était réservé au féminin un rôle d’intermédiaire privilégié entre le dieu et l’humanité.

Dans le cas de l’acceptation de Dionysos par les femmes, il existe comme une préparation à la rencontre paroxystique dans l’extase de la possession. Les femmes doivent tout quitter et, loin de l’oîkos et des métiers à tisser, gagner la montagne écartée, le Cithéron dans les Bacchantes. Il leur faut encore revêtir la skeu theoû, la livrée du dieu. Lorsque le messager rapporte à Penthée les événements qui se sont déroulés sur la montagne, dont il vient d’être le témoin, les notations visuelles sont très nombreuses dans son récit. Les Thébaines portent le thyrse et la peau de faon bien ajustée sur leur tunique. Elles ont les cheveux libres. Dans ce monde à part, règne une familiarité entre elles et le monde animal : ells ne redoutent pas les serpents33 et nourissent de petits animaux même sauvages34.

Ce sont des éléments dont nous connaissons aussi certains par la peinture de vases, avec certes quelques variantes, mais surtout des ressemblances. Il ne s’agit nullement de vouloir illustrer le texte d’Euripide par des images de vases. Les représentations du Peintre de Kléophradès, du Peintre de Brygos ou de Makron, qui montrent les ménades les plus proches de celles de la tragédie d’Euripide, datent des années 500-480, presque un siècle avant l’œuvre théâtrale écrite dans les dernières années de la vie du poète mort en 406, et créée à Athènes peu après, sans doute en 405, dans une trilogie qui remporta le premier prix35. On ne peut pas non plus envisager que ces artisans aient influencé le poète. Comme le remarque si justement P. Vidal-Naquet, les Athéniens ne connaissaient pas les vases vieux de cent ans. Cette manière de collectionner est notre façon à nous d’écrire l’histoire de l’art grec « que nous connaissons infiniment mieux que les Grecs eux-mêmes »36. En outre, les vases bien conservés, ceux qui constituent le fonds des collections de nos grands musées et que nous regardons et commentons le plus volontiers, avaient quitté Athènes peu après leur fabrication pour orner souvent les tombes, en particulier étrusques, de riches clients étrangers et amateurs, qui nous les ont conservés37. Nous ne pouvons néanmoins nous empêcher de rapprocher les motifs fournis par l’une et l’autre tradition, sans pour autant évoquer l’influence de l’une sur l’autre.

La mise en condition préparatoire à l’extase par l’abandon du quotidien trouve son illustration dans un skyphos, daté vers 490-48038 (fig. 3). La ménade revêtue de la skeu theoû et cheveux libres, les mains cachées dans l’extrémité de son khitn qui ne peuvent tenir le thyrse, tandis que sa compagne, sur l’autre face du vase, le possède, est ployée en avant, en proie à la danse extatique à l’entrée d’une grotte matérialisée par deux rochers. Une amphore, attribuée au Peintre de Kléophradès et datée vers 49039, réunit autour de Dionysos différents types de ménades avec leurs attributs : l’une, aux cheveux libres couronnés de lierre porte thyrse et nébride ; une autre manie un serpent. J’insiste sur la proximité entre l’image et le texte euripidéen qui ne peuvent néanmoins s’être influencés ni dans un sens ni dans l’autre. C’est autrement, selon mon hypothèse, que s’expliquent ces points communs.

Fig. 3 : Skyphos attique à f.r., New York MMA 29 131 4 : ménade dansant à l’entrée d’une grotte, d’après Charbonneaux, Martin & Villard 1968, fig. 397.

Avant d’y revenir, je poursuis ce rapide parcours parmi les représentations figurées par un groupe de vases évoquant les rapports très complexes des ménades avec le monde animal. Sur une amphore à col à figures rouges du milieu du Ve siècle40 (fig. 4), la ménade bien caractérisée comme telle par la couronne de lierre, la peau de bête et le thyrse, brandit un serpent, tout en jouant avec un faon qui saute vers elle, tel un animal domestique. Le monde animal, sauvage et familier, l’entoure sans marque d’effroi chez aucun partenaire. Une oenochoé à figures noires des années 500 dans une collection californienne41 réunit les mêmes figures dans une autre atmosphère. Même si on retrouve la présence du faon, le mouvement violent de la ménade de gauche, accompagné de celui de sa chevelure, la présence du serpent et de la panthère, animal dangereux porté dans les bras, introduisent dans un monde plus ambigu. Enfin, à l’intérieur d’une coupe à figures rouges fragmentaire du Louvre datée des années 480 (fig. 5)42, jeune femme séduisante, portant tous ses attributs ménadiques, avance vivement en tenant un faon sur ses épaules. Le sort de celui-ci semble clair : il est destiné à la violence du diasparagmós.

Fig. 4 : Amphore attique à figures rouges, Bruxelles, Musée du Cinquantenaire R 555 : ménade et faon, d’après Durand & Frontisi-Ducroux 1982, p. 245, fig. 7.

Fig. 5 : Coupe fragmentaire attique à figures rouges, Paris, Musée du Louvre G 160 : ménade extatique (photo M. et P. Chuzeville, avec laimable autorisation du Département des AGER).

Euripide confie au chœur des Bacchantes lydiennes de la tragédie l’expression du bonheur exalté de l’expérience ménadique à son paroxysme. La parodos, cela a été noté43, revêt l’aspect d’un hymne à caractère liturgique. Le chant exprime la béatitude. Le terme utilisé est mákar44 c’est-à-dire « fortuné comme les dieux », terme utilisé dans le vocabulaire initiatique. Il désigne ici le bonheur de la bacchanale en son point culminant, lorsque la ménade accède à cet état visionnaire du face à face avec le dieu. Sous l’habit marquant l’appartenance à Dionysos, dans les solitudes écartées et sous la conduite du dieu Bacchant, grâce à la course, à la danse bondissante et fièvreuse rythmée par l’aulós et le túmpanon, elle parvient à la capture de l’animal vivant et à l’hmophágion « au délice de la chair crue dévorée vive »45. Ce point culminant de l’extase, frappant pour nous par la violence de l’action, est suivi par l’épuisement qui fait s’écrouler la bacchante au sol46. Le moment est qualifié par l’adjectif hdús47 qui évoque la douceur et qui sera repris par hdoména, autre expression du bonheur de la bacchante48 avec l’image de la pouliche bondissante. Cette conclusion de la parodos n’est pas sans rappeler la ménade de Makron dans le médaillon de la coupe du Louvre (fig. 5)49.

Le chant abonde en notations très précises. La danse extatique qui permet d’atteindre à l’état paroxystique de la transe se marque par le corps cambré, la tête rejetée en arrière et la nuque renversée, la chevelure dénouée qui participe au mouvement. Autant d’éléments représentés par les artistes. Telle cette ménade d’une amphore du Peintre de Kléophradès, tête rejetée en arrière, bouche entrouverte et pupille déplacée50. La ménade de Scopas, créée vers 355 et connue par des répliques romaines51, est célébrée par plusieurs textes antiques pour cette exceptionnelle expressivité justement52, notamment dans cette épigramme de l’Anthologie Grecque, qui se situe bien au cœur de notre problématique : « Qui est-ce ? Une Bacchante ? Qui l’a sculptée ? Scopas. Qui l’a envoûtée, Bákkhos ou Scopas ? Scopas »53.

La frise principale de la panse du cratère de Dervéni réunit, autour du couple divin, des Bacchantes présentant divers types extatiques. Or B. Barr Sharrar, l’auteur de la récente publication du vase54, voit le modèle de ces figures dans des créations athéniennes de la fin du Ve siècle, donc contemporaines de la tragédie d’Euripide. Certes, le poète a composé cette œuvre, sa dernière, à Pella, mais il y aurait, dans cette origine proposée des figures dionysiaques du cratère, un argument de plus pour le caractère athénien de la tragédie du poète, même si on a parfois mis en avant, pour expliquer certains de ses traits dionysiaques, sauvages et exotiques, l’environnement géographique macédonien55.

Fig. 6 : Cratère de Dervéni, Thessalonique, Musée archéologique B1 : deux ménades après la transe (panse, détail), d’après Barr-Sharrar 2008, pl. 6.

Quelques-uns de ces types ménadiques du cratère, appartenant à la frise principale au repoussé, ou aux statuettes en ronde bosse fixées sur l’épaule du vase, pourraient donc être inspirés de figures attiques et proches d’Euripide dans le temps, mais aussi dans l’expression de l’extase dionysiaque féminine, comme cette jeune femme épuisée par le tournoiement qui s’effondre dans les bras de sa compagne (fig. 6). Or le chœur des Bacchantes lydiennes de la tragédie ne célèbre-t-il pas cette douce fatigue, cet épuisement qui fait s’écrouler la suivante du dieu56. Les peintres de vases ont également illustré ce moment : un couple de ménades représenté vers 425, sur un lécythe perdu, autrefois à Berlin, comporte une jeune femme dans l’épuisement qui suit la transe. Effondrée sur les genoux de sa compagne, elle a lâché son thyrse57 (fig. 7). Une des statuettes du cratère de Dervéni montre également la suivante du dieu après la transe : épuisée, le corps abandonné, la tête penchée en avant (fig. 8), tandis que son pendant sur l’épaule du vase est un satyre endormi, mais dont l’abandon est du domaine de l’ivresse, indiquée par la présence d’une outre de vin sur laquelle il s’appuie58.

Fig. 7 : Lécythe attique à figures rouges, autrefois Berlin F 2471 : Dionysos et ménades, après la transe, d’après Schlesier & Schwarzmeier 2008, p. 31, fig. 2.

Fig. 8 : Cratère de Dervéni, Thessalonique, Musée archéologique B1 : ménade endormie (statuette fixée sur l’épaule), d’après Barr-Sharrar 2008, pl. 14.

Fig. 9 : Cratère de Dervéni, Thessalonique, Musée archéologique B1 : deux ménades, avant le diasparagmós (panse, détail), d’après Barr-Sharrar 2008, pl. 8.

Le chœur d’Euripide célèbre l’omophagie comme le moment paroxystique de la possession. Cette dévoration de chair crue n’a pas, à ma connaissance, de parallèle en image. Il est vrai que d’une manière générale, les figures des vases peuvent être représentées en train de boire, mais non de manger59. Cependant, le moment précédant l’omophagie, celui de la victime capturée pour être déchirée et dévorée, est lui représenté. Sur la panse du cratère de bronze, sous le regard du couple divin, deux femmes emportent dans leur danse effrénée un animal renversé ; elles s’éloignent l’une de l’autre et tirent celui qu’on peut nommer la victime, chacune dans un sens opposé (fig. 9). Le diasparagmós n’est pas loin, peut-être l’omophagie non plus. Dans le thiase réuni sur le même cratère, une autre ménade entraîne dans sa danse vive un enfant en équilibre sur ses épaules (fig. 10). Rien de maternel dans ce geste qui se situe plutôt dans un contexte de rapt. Comme il a été rappelé pour commencer, le premier pas vers la pratique ménadique est l’abandon du quotidien, du foyer et des tâches qui y sont attachées. D’ailleurs, le messager de la tragédie euripidéenne, lorsqu’il rapporte au roi les événements du Cithéron, fait allusion à la folie que déclanche chez les Thébaines, ménades malgré elles, la découverte d’une présence masculine à leurs rites. La première de cette série de violences consiste précisément dans l’enlèvement d’enfants, sans que leur destin soit spécifié, mais dans un contexte de déchaînement60.

Fig. 10 : Cratère de Dervéni, Thessalonique, Musée archéologique B1 : une ménade portant un enfant sur l’épaule (panse, détail), d’après Barr-Sharrar 2008, p. 123, fig. 108.

Un autre exemple de juxtaposition de l’expression de l’extase, du diasparagmós annoncé et de l’enlèvement d’un enfant se trouve sur le couvercle d’une pyxis attique des années 410-40061 (fig. 11). En présence de Dionysos, le thiase se déchaîne. Deux ménades se sont emparées d’un animal qu’elles tiennent renversé, prêt à être déchiré. Une autre a enlevé un enfant qu’elle tient par une jambe, tête renversée en équilibre sur ses épaules.

Fig. 11 : Pyxis attique à figures rouges, Londres, British Museum E 775 : ménades extatiques autour de Dionysos (couvercle), d’après Carpenter 1997, pl. 45 a.

Le sacrifice dionysiaque dans son aspect paroxystique et contraire à l’ordre grec est donc inquiétant parce que, même si dans le cas du ménadisme accepté où il est célébré comme le moment suprême de félicité, la frontière est ténue dans la perte du contrôle de soi sous l’effet de la possession dionysiaque entre le bonheur exaltant et la violence qui fait peur. Quand la possession est imposée comme un châtiment, elle conduit au meurtre sauvage : Agavé et Lycurgue, se trompant de victime, tuent leur propre fils. Ainsi une hydrie attique à figures rouges datée vers 42062 (fig. 12) réunit, en présence du couple divin des époux-amants protégé par Eros, une scène complexe de transe et de violence meurtrière, peut-être une sorte de contamination entre les punitions des deux theómakhoi, Penthée et Lycurgue. Une ménade déchaînée tient d’une main la moitié d’un animal déchiré et de l’autre un objet tranchant, une sorte de couteau, normalement étranger au déroulement du diasparagmós « à mains nues »63, mais sans doute un signe iconographique exprimant clairement la violence tant redoutée des femmes possédées.

Fig. 12 : Hydrie attique à figures rouges, Rome, Villa Giulia : extase et violences en présence de Dionysos et d’Ariadne, ménades, Penthée et Lycurgue (?) (détail de la panse et de l’épaule), d’après Bertrand 2005, p. 242, fig. 1.

La suite de ce meurtre sauvage peut être représentée comme une sorte de danse macabre, sur une hydrie à figures rouges du début du Ve siècle par exemple64 : trois jeunes femmes dansent, entraînant dans leur mouvement la tête et les membres du roi Penthée déchiré dans un diasparagmós monstrueux, archétype du « ménadisme noir » et destructeur où l’accent ne porte néanmoins pas sur la violence meurtrière ou l’horreur sanglante, mais où celles-ci sont comme stylisées par l’orchestique.

Cependant, il me semble important de noter que, même dans les cas de possession acceptée et qui conduit au paroxysme du bonheur, qu’évoque la parodos des Bacchantes65, ce moment sublime contient sa part de violence : la traque jusqu’à l’épuisement et la chair crue dévorée66. Manger de la chair crue est une des distinctions fondamentales entre l’homme et l’animal. Sa place dans le dionysisme est tout à fait particulière. En effet, cette manducation situe les « ménades artistiques » dans l’univers de la bestialité ; de plus, un Dionysos msts, « dévoreur de chair crue » est attesté67 ; enfin, une inscription de Milet datant de 276/275 avant notre ère et très largement commentée68 fait référence à une pratique cultuelle de l’omophagie par les Bacchantes de la Cité, le terme mophágion y désigne bien la chair crue dévorée, la difficulté consistant à évaluer le niveau de cette pratique, son degré de sauvagerie.

Un point important à signaler et, sans aucun doute, à approfondir me semble-t-il, est que, dans la religion grecque polythéiste où la pratique sacrificielle se trouve au cœur de la relation entre les hommes et les dieux, s’observe une coïncidence entre pratique sacrificielle exceptionnelle et pratique possessionnelle, problématique délicate mais dont les ménades, justement des femmes « pas comme les autres », sont au cœur69. De plus, même si le refus de ces rites mène à la catastrophe, leur acceptation ne va pas sans risque, sans élément inquiétant et perturbant, puisqu’elle sort du rapport ordinaire entre humain et divin et nécessite l’abandon de soi, la perte de son identité afin que la présence divine se révèle effective dans une expérience émotionnelle très forte70. Cette expérience me conduit à mon troisième et dernier point qui consiste à envisager l’existence d’un tel « ménadisme » ritualisé dans l’Athènes classique.

Un détour par Delphes est nécessaire. Les thyiades constituent sans doute le collège dionysiaque le moins mal connu71. Liées à la place de Dionysos dans le sanctuaire apollinien de Delphes, ces « bondissantes » sont évoquées à plusieurs reprises dans des contextes variés. Il s’agit d’un terme rare, les auteurs, quand ils l’utilisent, insistent en précisant « celles qu’on appelle les thyiades »72, et d’un terme spécifiquement lié à Delphes. Pour l’époque classique, qui nous concerne ici, Dionysos et ses thyiades sont attestés dans le sanctuaire par Sophocle dans l’Antigone. Le chœur s’adresse à Dionysos dans le cadre de l’antre corycien et du Parnasse et évoque « les thyiades dont les danses frénétiques te célèbrent toute la nuit »73. De plus, Pausanias mentionne dans les frontons du temple d’Apollon du IVe siècle : « Artémis, Léto, Apollon et les Muses, le coucher du soleil et Dionysos avec les femmes thyiades »74. Certes, il s’agit de sculptures en mauvais état de conservation, mais le long et patient travail de J. Marcadé et Fr. Croissant ont abouti à leur restitution et à leur publication75. Au centre du fronton Ouest, a été replacé Dionysos citharède, entouré de ses thyiades, des figures plutôt tranquilles malgré leur nom, certaines marquées par le port de la pardalide ou la présence d’une panthère76.

Du point de vue de la pratique cultuelle, Plutarque, bon connaisseur du sanctuaire, doué d’un savoir de ritualiste, ancré dans son expérience de prêtre d’Apollon77, évoque la participation des thyiades à des fêtes delphiques très anciennes comme celle d’ Hros, dont elles connaissent des « formules à mystères », liée à Sémélé et donc à coloration dionysiaque et lors de laquelle elles éveillent le Likníts, l’enfant dieu dans le van, rite rattaché à la présence auprès de l’oracle des restes de Dionysos78. Donc, les thyiades sont des figures liées anciennement au sanctuaire et à la présence de Dionysos dans celui-ci et dont la pratique de l’oribasie pour le célébrer est bien attestée dans la poésie tragique de l’époque classique. Mais il y a bien davantage en ce qui concerne notre intérêt présent et je m’arrêterai sur quatre textes.

Dans le premier, Pausanias explique qu’il a été instruit par « celles que les Athéniens appellent thyiades » sur un passage d’Homère et précise « les thyiades sont des femmes attiques (gunaîkes) qui fréquentent le Parnasse en compagnie des femmes de Delphes et y célèbrent tous les quatre ans les órgia de Dionysos »79. Il y aurait donc aussi des thyiades athéniennes, qui rejoignent celles de Delphes, pour leurs célébrations sur le Parnasse. Les trois autres textes ont trait, eux, au caractère spécifique de ces rites. Le même Pausanias note : « les sommets du Parnasse sont au dessus des nuages et les thyiades s’y agitent en proie à la manía pour Dionysos et Apollon »80. Il s’agit donc de danses extatiques dans un contexte d’oribasie. Plutarque, dont je rappelle encore la solide culture delphique dans sa composante ritualiste81, rapporte deux faits divers relatifs au sanctuaire qui donnent comme une épaisseur de pratique rituelle véritable à ces expéditions sur le Parnasse. Le premier passage82 évoque ceux qui montent sur le Parnasse pour aider les thyiades, menacées par un vent vigoureux et la neige et qui voient leurs chlamydes devenir comme du bois, de sorte que, si on les étend, elles se cassent. Le rituel a la forme d’un exploit sur la montagne en hiver pour des femmes qui ont parfois besoin d’aide, une confirmation de cette prouesse dont la force du dieu les rend capables. Le second83, peut-être plus important encore pour notre propos, rapporte un événement censé se passer durant la troisième guerre sacrée, au milieu du IVe siècle donc, et largement antérieur à l’auteur qui nous le fait connaître. Selon celui-ci, les thyiades, sous l’influence de la manía, s’égarent de nuit jusqu’à Amphissa (une cité alors ennemie). Epuisées par la fatigue et n’ayant pas retrouvé toute leur raison, elles s’étendent sur l’agorá et s’endorment. Là, les femmes de la ville, craignant pour elles et dans une sorte de mouvement de sympathie spontanée, de solidarité féminine, les rejoignent et prennent soin d’elles. Cet épisode complète les données sur les pratiques des thyiades sur le Parnasse et en révèlent une conception qui comporte, lors de randonnées et de danses sous influence de la manía, des troubles de la personnalité, un état d’inconscience ou d’hypnose qui est cause d’égarement et d’inconséquence vis-à-vis des dangers impliqués par la situation de conflit du moment, puis un temps de prostration et d’épuisement qui les fait sombrer dans le sommeil. Le soin dont les entourent les femmes d’Amphissa permet d’entrevoir une forme de respect dont elles sont l’objet : leur « folie » n’est ni mal vue ni considérée comme contagieuse. La protection dont elles bénéficient constitue un témoignage rare d’une forme de solidarité féminine.

Mais qui sont ces thyiades d’Athènes ? A l’excellente remarque de D. Jaillard : « on ignore presque tout des raisons qui conduisent une femme grecque à se faire ménade »84, je voudrais suggérer, à titre d’hypothèse, – et ce sera ma conclusion – un élément de réponse concernant une possibilité et un cas particulier, celui des thyiades athéniennes. Elles correspondraient à une forme de possession organisée par la Cité et contrôlée par le rituel. Des Athéniennes désignées, une sorte de collège choisi, se réuniraient à date fixe, pour aller rejoindre leurs compagnes de Delphes et faire les ménades, ou plutôt les thyiades sur le Parnasse : une pratique rigoureuse de l’oribasie jusqu’à la perte d’identité pour s’abandonner au dieu et être possédé par lui. Autrement dit, quelques Athéniennes seraient ménades, dans une pratique très encadrée du point de vue de l’espace et du temps par le rituel, mais au bénéfice de la Cité toute entière, sorte d’intermédiaires priviligiées entre elle et le dieu85.

Alors, puisque les exemples réunis dans cet essai, empruntés à la poésie tragique ou aux arts figurés, présentent dans le rendu de la transe extatique ménadique des ressemblances physiques si précises et si frappantes, malgré la distance temporelle et celle du mode d’expression qui les séparent, je proposerais de voir dans cette cohérence des traces d’une réalité vue ou connue par des témoins et à l’origine de l’inspiration des peintres, des sculpteurs ou des poètes qui ne serait pas à chercher uniquement du côté du mythe.

Un groupe précis de ménades athéniennes des temps classiques, celui des thyiades, à propos desquelles une petite série de témoignages semble plus en prise avec des éléments proprement cultuels, permettrait de suggérer que la cité d’Athènes a su organiser le ménadisme, une sorte de transe pour ainsi dire d’ « utilité publique », par la constitution de rituels encadrés dont il serait un exemple. Certes, il est bien connu qu’Athènes n’est pas la Thèbes d’Euripide qui a refusé d’accueillir Dionysos86 ni non plus Rome qui réprime durement les Bacchanales87. Elle a fait une large place à Dionysos, un grand dieu de la Cité. Il y règne en particulier sur l’univers du théâtre et de grandes fêtes en son honneur ponctuent le calendrier religieux athénien. Mais sans doute fait-elle davantage encore88. Ce dieu qui est l’Autre par excellence, Athènes l’accueillerait même dans son aspect le plus troublant, le plus déstabilisant et inquiétant parce qu’il implique la perte momentanée de soi, de son identité pour s’abandonner au dieu et être possédé par lui, une contribution, dont la trace rituelle nous serait exceptionnellement conservée, au point de vue grec selon lequel la sauvagerie est indispensable à l’existence, et un peu de cru nécessaire.

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1 Qu’il me soit permis d’exprimer ma profonde gratitude au Professeur Philippe Borgeaud et à son équipe pour l’accueil qu’ils ont réservé à ma participation aux journées internationales d’étude de l’Université de Genève (24-26 Mars 2011), occasion d’échanges aussi riches que chaleureux, d’où est issu ce texte.

2 Osborne 1997, p. 187 et 196 en particulier ; l’absence de documentation directe sur la ménade rituelle avant l’époque hellénistique a été bien mise en valeur par Henrichs, notamment 1978, p. 123 et 142-143 ; parmi les innombrables tentatives pour appréhender le personnage tragique ou figuré de la ménade, entre ménadisme mythique et rituel voir par exemple Bremmer 1984.

3 Voir notamment Detienne 1990.

4 Plutarque, Questions Grecques 36.

5 Bacchantes 1016.

6 Bacchantes 1.

7 Bacchantes 61.

8 Sur ce point voir Vernant 1985 auquel ce qui suit doit beaucoup.

9 Bacchantes 4.

10 Bacchantes 235-236 et 455-459, même si un problème de texte au vers 236 empêche d’être catégorique sur le caractère précis prêté à ce regard.

11 Londres, British Museum 303 : Holtzmann 2003, p. 121 et 138, fig. 125 et 127 ; Neils 2005, p. 230 et 236-239, p. 236 fig. 84 et p. 239 fig. 87. Dyfri Williams, dans une conférence donnée à Paris, à l’INHA le 28 Novembre 2011 (Revisiting the Parthenon’s East Pediment : Texting the Image, à paraître) a fait valoir de solides arguments pour reconnaître dans cette figure Arès et non Dionysos.

12 Naples, Musée archéologique national 81 673 : ARV2 1336,1 ; Vasi antichi, 2009, p. 84-85 ; Taplin & Wyles 2010.

13 Musée archéologique de Thessalonique inv. B1 : Barr-Sharrar 2008, p. 44-46 propose une date vers 370, plusieurs décennies donc avant la fermeture de la tombe à placer vers 320 au plus tard.

14 Comme c’est le cas sur l’amphore du Cabinet des Médailles n° 222 de la Bibliothèque Nationale de Paris par exemple : ABV 152,25 ; Bothmer 1985, p. 125-129, n° 23 ; ce type iconographique doit être présent à l’esprit quand on examine les statues archaïsantes des divinités dans la peinture de vases (voir la contribution d’Hélène Collard dans le même volume).

15 Munich 8732 : ARV2 182,6 : Peintre de Kléophradès ; Wünsche 2008, n° 89 et p. 328-329.

16 Bacchantes 470.

17 Florence, Musée archéologique national 4209 : ABV 76,1 ; Torelli 2007, fig. p. 101.

18 Voir par ex. l’amphore à figures noires Berlin, Antikensammlung F 3997 du cercle du Peintre d’Antiménès : ABV 275,8 ; Schlesier & Schwarzmaier 2008, p. 132 et 156, n° 4 et d’une manière générale Frontisi-Ducroux 1991.

19 Pausanias X, 19, 3 ; ce texte fait l’objet d’une analyse Casevitz & FrontiSi-Ducroux 1989 et FrontiSi-ducroux 1991, p. 193-201.

20 En raison de l’attribution de ce rituel à la fête des Lénéennes par Frickenhaus 1912 qui le premier réunit un corpus de 29 vases autour de la représentation de l’idolemasque. Le dossier a été enrichi et étudié par Frontisi-Ducroux 1991 et eadeM dans Bravo 1997, qui trace l’historique de la recherche et propose une lecture différente du schéma ; voir aussi Bérard & Bron 1990 et 1991, Halm-Tisserant 1991 et Pierce 1998 ; à noter de La Genière 1987 qui avait proposé une imagerie inspirée de célébrations locales à destination du client occidental.

21 Lécythe attique à figures noires Athènes, Musée Archéologique National 12395 : Paralipomena 280 : manière du Peintre de Haimon ; Kaltsas & Shapiro 2009, p. 277, n° 125.

22 Stamnos attribué au Peintre de la Villa Giulia, Boston MFA 90 155 ; Kaltsas & Shapiro 2009, p. 272-273, fig. 3 a et b.

23 Eleusis 2409 : ABV 504,18 ; Frontisi-Ducroux 1991, L 37 et fig. 9.

24 Bacchantes 624, 631, 1082-1083.

25 Bacchantes 1084-1085.

26 Bacchantes 704-707, 710-711 ; Platon, Ion 534, évoque les Bacchantes en état d’extase qui puisent miel et lait des fleuves ; on peut noter que dans l’impressionnante procession organisée par Ptolémée Philadelphe à Alexandrie entre 279 et 270 et rapportée par Callixène de Rhodes (apud Athénée V, 196-203), un char portait une grotte artificielle d’où jaillissaient deux sources de vin et de lait ; sur cette procession en général, voir le commentaire par Rice 1983.

27 Le mythe de résistance des filles de Minyas à Dionysos et des conséquences de ce refus est rapporté avec des divergences par Ovide, Métamorphoses IV 1-54, 389-415 ; Plutarque, Questions Grecques 38 ; Elien, Histoires variées III, 42 ; Antoninus Liberalis, Métamorphoses X.

28 Eschyle, TrGFr III F 28 ; cf. fr. 76 (éd. Ramelli 2009) ; à noter qu’il ne s’agit pas, lors de cet épisode, que l’on a tendance à placer au début de l’œuvre, d’un châtiment mais de la bacchanale qui accompagne la manifestation divine et qui entraîne tout, même le palais royal ; l’image peut être prémonitoire de la chute finale, en tout cas, elle peut avoir inspirer Euripide qui évoque la demeure royale sous l’emprise de la « bacchanale noire » et destructrice ; sur la Lycurgie d’Eschyle, tétralogie dionysiaque à laquelle appartiennent les Edoniens et sa parenté avec les Bacchantes d’Euripide, voir notamment West 1990, p. 26-50 et Jouan 1992.

29 Bacchantes 39-40.

30 Hérodote IV, 79.

31 Voir dans le même volume les observations de Corinne Bonnet et Adeline Grand-Clément « Quand les statues divines se meuvent et (s’) émeuvent – entre Grecs et Barbares ».

32 Clairement affirmé par exemple par Henrichs 1982, p. 140-147, qui distingue dans l’approche du dieu « wine » et « ritual maenadism » ; à propos d’une consommation, sage et hors transe, du vin par les femmes dans le cadre du culte de Dionysos, voir Villanueva Puig [à paraître].

33 Bacchantes 698.

34 Bacchantes 699-700 ; ce dernier aspect de la familiarité entre ménades et monde animal n’est pas représenté par les peintres de vases attiques, cf. Carpenter 1997, p. 114.

35 Roux 1970, p. 3-4.

36 Vidal-Naquet 2002, p. 38.

37 Les fouilles nous les ont livrés souvent en bon état ; de plus, le goût des XVIIIe et XIXe siècle, époque de très nombreuses découvertes, n’hésitait pas non plus à restaurer les éventuels manques pour obtenir des objets d’art signes de culture et de richesse, d’appartenance à l’élite.

38 New York, MMA 29 131 4 : ARV2 381,176 : Peintre de Brygos.

39 Munich 2344 : ARV2 182,6 ; Schlesier & Schwarzmaier 2008, fig. 6, 8.

40 Bruxelles R 255 : ARV2 670, 4 : CVA 2, pl. 17,1 ; Carpenter 1997, p. 114-115 et pl. 44A.

41 ABV 426,18 ; Haana & Amyx 1989, n° 21.

42 Louvre G 160 : ARV 2 478, 312 : Makron ; Villanueva 2009, p. 19.

43 Festugière 1956, p. 66-68 et 73-75 ; une étude de larrière-plan rituel de la parodos par J.-L. Durand et D. Jaillard est annoncée par Jaillard 2007a, p. 67, n. 30.

44 Bacchantes 73.

45 Bacchantes 139 ; l’omophagie dionysiaque n’est pas, à ma connaissance, représentée sur les vases peints, voir infra note 59 ; cependant des polémistes chrétiens comme Arnobe évoquent avec horreur les bouches des adeptes des Bacchanalia d’où ruisselle le sang des victimes (voir notamment Jeanmaire 1951, p. 254-255).

46 Bacchantes 136 ; le texte est difficile et diversement interprété quant à la personnalité qui tombe au sol, mais je suivrai Dodds 1960, p. 87, Lacroix 1976, p. 147-148 et Seaford 1996, p. 164 qui y voient la ménade chasseresse, tombant inconsciente quand le dieu la possède et non Dionysos lui-même comme cela a été proposé.

47 Bacchantes 135 ; l’emploi au masculin de l’adjectif a été interprété comme désignant le dieu, Dionysos étant caractérisé traditionnellement comme dieu de la douceur (Roux 1972, p. 290 ; Romilly 1963 et 1979). Cependant la structure de l’épode rend le lien très probable entre l’expression de cette douceur et l’expérience de la bacchante qui goûte au paroxysme de l’extase, voir supra note 46 les interprétations dans ce sens, que je suivrai. Dans ce cas, Dionysos est qualifié de hdús ;” dans le sens où il procure le bonheur à ses fidèles, le terme et un certain nombre de ses dérivés exprimant d’ailleurs, dans le déroulement de la tragédie, le bonheur du fidèle (voir par ex. infra note 48).

48 Bacchantes 166-169.

49 Voir supra note 42.

50 Voir supra note 39 et pour la figure précise Arias & Hirmer 1962, fig. 124.

51 La réplique considérée en général comme la plus fidèle est celle de Dresde, Albertinum 133 ; Rolley 1999, p. 273, fig. 276.

52 Réunis notamment par Muller-Dufeu 2002, p. 469-471, n° 1352-1356 ; le n° 1353 (Anthologie Grecque IX, 774) évoque la ménade de Scopas comme khimairophónos « tueuse de chevreau ».

53 Anthologie grecque XVI, 60 (trad. Aubreton 1980, p. 104) ; Muller-Dufeu 2002, p. 469, n° 1352.

54 Barr-Sharrar 2008, p. 44 et chapitre 7, p. 115-158, spécialement p. 116-117.

55 Il a été souligné maintes fois l’aspect déconcertant, à l’intérieur de l’œuvre d’Euripide, parcourue d’éléments sophistes ou impies, critiques en tout cas à l’égard des dieux de la mythologie, du souffle de religiosité, de la dimension sacrée qui semblent émaner de cette dernière œuvre. Conversion du vieux poète à la fin de sa vie ? Ce serait sans doute aussi simpliste qu’inexact. Mais on a aussi mis en avant le renouveau d’inspiration qu’a pu favorisé chez lui l’expérience macédonienne : la grandeur d’un paysage favorable à l’émotion religieuse et au sentiment du divin et sans doute le contact avec une ferveur et un enthousiasme voués à Dionysos, dans son aspect exalté de dieu du Pangée ; ces points sont évoqués de manière claire et nuancée notamment par Roux 1970, p. 7-10 ; n’oublions pas que la plus ancienne ménade historique attestée, aux pratiques enthousiastes et terrifiantes considérées comme originaires de Thrace, Olympias, la mère d’Alexandre, nous situe certes un peu plus tard mais dans ces contrées (Plutarque, Alexandre 2, 5). Mais il ne faut pas pour autant négliger (voir Segal 1982, p. 3) l’ancrage profond de la pièce dans la vie intellectuelle, artistique et religieuse de l’Athènes de la fin du Ve siècle, ni la proposition, pertinente à mon sens, de Versnel 1990, dans sa perspective de lecture historique de la tragédie, de considérer son Dionysos « exotique » comme « hellénistique avant la lettre » (p. 186) et en rapport avec l’expérience athénienne de l’introduction de nouveaux dieux dans la Cité.

56 Voir supra note 46.

57 Lécythe attique à figures rouges perdu, autrefois Berlin F 2471 : ARV2 1247,1 : attribué au P. d’Erétrie ; Carpenter 1997, pl. 40 a.

58 Barr-Sharrar 2008, pl. 15 ; voir aussi supra note 32.

59 Voir supra note 45 ; à noter cependant l’image rare d’une des cavales anthropophages de Diomède, sur une coupe attique à figures noires de Psiax, datée vers 510-500, au Musée de l’Ermitage de Saint Pétersbourg 9290 : une tête et deux bras humains sortent de sa bouche : ABV 294,22 ; Brinkmann & Koch-Brinkmann 2003, p. 134, fig. 17, 5-6 ; certes il s’agit d’une figure animale, dévoreuse d’humain, mais chevaline c’est-à-dire des plus nobles et des plus proches de l’homme : « Ainsi se nourissent les fauves, non les chevaux » remarque Héraclès qui va être confronté à ces monstres (Euripide, Alceste 478).

60 Bacchantes 754 ; Oranje 1984, p. 73 propose d’y voir diasparagmós et omophagie ; Schlesier 1993, fait figurer le meurtre d’enfant parmi les contextes où interviennent les ménades comme modèles tragiques ; les scènes d’enlèvement d’enfants par les ménades « infanticides » sont réunies et interprétées comme pouvant éventuellement faire allusion à des pratiques rituelles par Halm-Tisserant 1998 ; pour d’autres significations proposées de ces représentations, voir Provenzale 1999 et Villanueva 2005, p. 228-229.

61 Londres, British Museum E 775 : ARV2 1328,92 : Peintre de Meidias ; Carpenter 1997, pl. 45 a.

62 Rome, Villa Giulia : ARV2 134,3 : attribuée au Peintre du Louvre G. 433 ; Cultrera 1938 ; Farnoux 1992, pl. 158, n° 12 ; Villanueva 2005, p. 228-229 et p. 242, fig. 2 ; les deux theómakhoi étaient réunis sur un tableau dont le sujet était « Penthée et Lycurgue subissant le châtiment pour avoir outragé Dionysos » dans le sanctuaire de Dionysos à Athènes, à proximité du théâtre, selon le témoignage de Pausanias I, 20, 3.

63 Bacchantes 736.

64 Hydrie attique à figures rouges Berlin 1966 18 : Groupe des Pionniers ; Schlesier & Schwarzmaier 2008, p. 104, fig. 7 et p. 174, n° 24.

65 Voir supra notes 43-48.

66 Bacchantes 136-140.

67 Il aurait reçu un sacrifice humain avant la bataille de Salamine : Plutarque, Thémistocle 13 et est évoqué sous cet épithète dans un hymne (Anthologie Grecque IX, 524).

68 Voir spécialement Jaccottet 2003, p. 138-139 et p. 251-253, n° 150, avec la bibliographie antérieure.

69 Voir les remarques conclusives de Jaillard 2007a, p. 76 qui ouvre cette perspective de recherche.

70 Très finement analysée par Jaccottet 2003, p. 138-139 « Vocabulaire mystérique et réalité cultuelle ».

71 Voir notamment Villanueva 1986 où sont réunies, traduites et commentées les sources littéraires les concernant ; Jaillard 2007a leur consacre un développement dans son rapprochement entre pythies et bacchantes.

72 Par exemple Plutarque, Les vertues des femmes 13.

73 Sophocle, Antigone 1146-1152.

74 Pausanias X, 19, 4 qui indique en outre les auteurs des sculptures : Praxias et Androsthénès. Voir la restitution d’ensemble et les figures de Dionysos et d’une thyiade dans Croissant 2003, pl. 86 et 87.

75 Croissant & Marcadé 1972 ; Marcadé 1977 ; croissant 2003.

76 Voir la restitution d’ensemble et les figures de Dionysos et d’une thyiade dans Croissant 2003, pl. 86 et 87.

77 A propos de la valeur historique du témoignage de Plutarque et notamment de sa connaissance particulière du sanctuaire de Delphes, voir Stadter 1965 et Jaillard 2007b ; de plus, Plutarque fréquente Kléa, la « prieure » des thyiades de son temps, à laquelle il avait dédié des traités théologiques.

78 Plutarque, Questions Grecques 12 et Isis et Osiris 35 (365A).

79 Pausanias X, 4, 3.

80 Pausanias X, 32.

81 Voir supra et en particulier note 77.

82 Plutarque, Sur le premier froid 18.

83 Plutarque, Les vertus des femmes 13 ; à propos de l’historicité de l’événement, voir notamment Stadter 1965, p. 79-80, pour lequel il n’y a pas lieu de douter de sa véracité.

84 Jaillard 2007a, p. 74.

85 Voir, dans ce sens les remarques de Vernant 1986, p. 299 : « leur thiase ne forme pas un groupe ségrégé d’initiés, une confrérie marginale d’élus, une secte de déviants. Les Thyiades sont un collège féminin officiel auquel la cité confie la charge de représenter Athènes auprès des Delphiens dans le cadre du culte rendu à Dionysos au sanctuaire d’Apollon » ; un autre collège dionysiaque féminin est attesté à Athènes, celui des Gerairaí : Démosthène, Contre Nééra 76-78, pour les rites sacrés qu’elles accomplissent lors des Anthestéries au bénéfice de toute la Cité, et dont la nature exacte est largement débattue, sans qu’interviennent des éléments relevant de la transe.

86 Voir en particulier Zeitlin 1993.

87 Voir en particulier Pailler 1988 et 1998.

88 Même si je n’irais sans doute pas jusqu’à une formulation aussi radicale que celle de Bérard & Bron 1986, p. 27 : « à Athènes… au départ, la cité tout entière était initiée ».