Book Title

La bibliothèque de la Nation Germanique d’Orléans

Quelques balises pour une histoire

Frédéric BARBIER

CNRS – École Pratique des hautes Études – PSL

Ainsi vint à Bourges, où estudia bien longtemps et proffita beaucoup en la faculté des loix. [… ] Partant de Bourges, vint à Orléans, et là trouva force rustres d’escholiers1

Prolégomènes : la Réforme en tant que problème de transferts culturels

Le cinq-centième anniversaire de l’événement fondateur de la Réforme luthérienne, l’affichage par Luther de ses 95 Thèses sur la porte de la chapelle du château à Wittenberg le 31 octobre 1517, amène à relire la suite d’événements qui se déroulent dans les premières décennies du xvie siècle dans une perspective inspirée par la problématique de l’histoire du livre et des transferts culturels : envisager la chronologie et les modalités d’exécution et de réception du transfert ayant conduit à l’implantation de la « réforme » des pays germaniques dans le royaume de France à partir de l’hiver 1517-15182.

En abordant ce complexe de phénomènes, nous sommes immergés dans un monde de clercs, dont la langue d’usage est le latin et qui, selon que l’on s’approche du sommet de la hiérarchie ecclésiastique, opèrent dans un cadre de plus en plus transnational. C’est le temps de la peregrinatio academica, mais aussi celui des grandes carrières dans l’Église, lesquelles intègrent le plus souvent un passage par Rome. Les personnages que nous rencontrons appartiennent à une microsociété, d’autant que les effectifs des universités restent toujours limités – les phénomènes de sociabilité, voire de solidarité, font plutôt penser à ce que nous pouvons traditionnellement observer dans le système des « grandes écoles à la française ».

Pour autant, la conjoncture est très différente d’un espace à l’autre et, par exemple, les rapports de force dans lesquels l’Église est engagée changent radicalement entre les « états » de l’Empire et le royaume de France. Dans l’Empire, le statut des prélats fait de ceux-ci des princes territoriaux (un évêque ou un abbé gouverne un ensemble de territoires), voire de hauts dignitaires impériaux (l’archevêque-électeur de Mayence est archichancelier d’Empire). Entre les différents acteurs (l’Empereur, les princes, les villes libres, l’Église), les rapports sont d’autant plus changeants et ambigus que le principe de l’élection est largement répandu… et qu’il faut par suite se concilier les électeurs. En France, la préférence va nettement au concile contre le pape et, surtout, la Pragmatique de Bourges (1438) et le concordat de Bologne (1516) placent l’Église dans la main du roi (c’est le principe du gallicanisme).

Bien évidemment, la question récurrente de la réforme de l’Église prend une dimension nouvelle avec la révolution du nouveau média, la typographie en caractères mobiles : la Réforme, initiée par Luther à Wittenberg à l’automne 1517, est un phénomène fondamentalement lié à sa propre médiatisation. Le moine augustin ne voulait pas sortir de l’Église, mais bien réformer celle-ci de l’intérieur, et il explique avoir été surpris par la puissance de la publicité, de sorte que c’est aussi l’économie du média qui l’amènera à rompre avec Rome. Dès lors, la « Réforme » devient une réforme d’abord allemande, dont la langue vectrice est de plus en plus la langue vernaculaire. Par suite, son transfert vers des pays non germanophones ne peut se faire qu’en s’appuyant sur des personnalités, sur des institutions, sur des pratiques et sur des lieux spécifiques et plus ou moins aisément identifiables.

Du côté des hommes, ce sont les émigrés originaires des pays allemands, dont on sait qu’ils occupent une grande place au sein du « petit monde du livre », dans le royaume de France, entre la fin du xve et le début du xvie siècle3 : certaines des plus grandes maisons d’imprimerie-librairie sont tenues par des dynasties originaires notamment du Wurtemberg, mais aussi des « anciens Pays-Bas ». Un bon nombre manifestera dans les années 1520 des sympathies pour la Réforme.

Du côté des institutions et des lieux, une mention spéciale doit être réservée aux collèges et aux universités, où les étudiants et enseignants d’origine allemande sont nombreux. La principale et la plus renommée est celle de Paris, mais les pérégrins se rencontrent aussi en nombre à Orléans, comme à Bourges et à Poitiers, voire plus loin (Montpellier). Selon la tradition, ils sont organisés en « nations », soit des structures dont la définition géographique reste complexe, et parmi lesquelles la « nation germanique » est généralement l’une des plus nombreuses : à Orléans, elle regroupe les étudiants venus de l’aire du Saint-Empire, mais aussi des autres régions germanophones (notamment les cantons suisses), voire de régions francophones4.

I – Portrait historique d’une cité et d’une institution

1. Orléans

Les princes de l’Église sont très puissants dans le Centre de la France dès l’époque carolingienne, avec les deux abbayes de Saint-Martin de Tours et de Fleury (Saint-Benoît-s/Loire), l’archevêché de Tours et l’évêché ­d’Orléans. Mais l’importance politique d’Orléans, au coude de la Loire et sur la rive droite du grand fleuve, donc à l’abri des inondations, s’accroît surtout sous les Capétiens : à une époque où la monarchie se heurte aux grands princes territoriaux, la ville est l’un de ses trois points d’appui principaux, avec Paris et Chartres5.

Orléans : plan de Fleury (1640) (Médiathèque d’Orléans, Rés. 2H 3G)

La bulle Semper specula de 1219 avait interdit l’enseignement du droit romain à Paris, alors même que la demande se renforce du côté de jeunes gens désireux de s’assurer une place dans des structures administratives en plein développement. Des écoles de droit apparaissent bientôt à Orléans (au plus tard en 1235), sous le contrôle de l’évêque et de son écolâtre. Le Studium aurelianense est élevé au rang d’université par la bulle Inter cetera de Clément V (lui-même un ancien d’Orléans) en 1306, ce qui en fait la troisième université la plus ancienne du royaume, après Paris et Toulouse : on y enseigne le droit canon (on est doctor decretorum) et le droit civil (avec le titre de doctor legum, ou, le cas échéant, de doctor utriusque) de sorte que, au xiiie siècle, « les trois quarts des légistes au service du roi [… ] avaient étudié à Orléans ».

En 1337, les « écoles » sont groupées dans l’actuel quartier de la préfecture, près de l’abbaye bénédictine de Bonne-Nouvelle, où l’université se réunit dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste. Une bibliothèque est organisée dans les premières décennies du xve siècle, pour laquelle un bâtiment sera construit rue de l’Escrivinerie (actuelle rue Pothier)6

Orléans : le quartier des écoles (détail du plan de Fleury)

De plus en plus, la région de la Loire marque alors l’épicentre du pouvoir royal : les souverains et leur famille7 résident fréquemment à Blois, à Amboise et à Tours, mais aussi à Loches8. Leur présence et celle de la cour entraînent non seulement celle de toute une population de bourgeois enrichis entrés au service du roi, mais aussi un mouvement d’hommes, de marchandises et de valeurs très important. La route de Paris à Orléans9 est relativement brève, mais très fréquentée : 120 km environ, qu’Aléandre parcourt en deux jours en 151010. Les villes se peuplent d’hôtels particuliers inspirés par le style de la Renaissance, tandis que les châteaux se multiplient dans les bourgs. À Orléans, la nouvelle enceinte, élevée à partir de 1481, délimite une superficie urbaine de 130 hectares. En 1498, l’université commence à être installée dans le bâtiment des Grandes Écoles, actuelle rue de l’Université.

2. Transferts et passeurs

Les processus de transfert culturel s’appuient, on l’a dit, sur des groupes minoritaires d’intermédiaires, entretenant des relations suivies avec les pays allemands. Or, les écoles de droit attirent à Orléans une importante population liée aux clercs, lesquels se procureront rapidement des exemplaires imprimés en Allemagne, parfois avant même que la typographie en caractères mobiles ne soit acclimatée sur les rives de la Seine11. Voici la figure du doyen du chapitre cathédral, Jean (II) de Vailly, lequel acquiert un très bel exemplaire de la Bible achevée par Fust et Schoeffer à Mayence le 14 août 1462 (GW 4204) : les deux volumes, imprimés sur parchemin, ont été enluminés. Le feuillet initial de chacun porte une lettre ornée aux armes du doyen12. Quelques années plus tard (1470), les chanoines de la cathédrale autorisent un libraire à ouvrir une échoppe sur la place devant le porche du croisillon sud

pour y vendre livres, à la condition de ne point vendre de livres impies et d’être inspecté toutes les semaines. Par suite, plusieurs libraires eurent la permission de venir aussi s’y placer, et le cloître prit le nom de Cloître des Libraires13.

La densité des échanges avec les pays allemands est rendue évidente par la présence précoce, à Orléans et dans la région, d’exemplaires nurembergeois d’Albrecht Dürer, dont l’Apocalypse dans les éditions de 1500 et de 1511. L’exemplaire aujourd’hui conservé à Bourges porte un ex libris manuscrit contemporain, au nom de Martial Marchant (est-il parent du libraire ?), prévôt de Boiscommun, lequel possède aussi le Liber chronicarum de Hartmann Schedel (BM Bourges, Inc. 241). De même, les bénédictins de Fleury-s/Loire se procureront-ils un exemplaire du Catalogue de Tritheim, mais dans l’édition donnée à Cologne par Peter Quentell en 1531…14

Enseignants et étudiants étrangers seront en nombre à Orléans jusqu’au xviie siècle. En principe, les étudiants sont d’abord des juristes, venus pour acquérir leurs grades dans une université renommée, mais la philologie intervient aussi, et l’apprentissage de la langue :

Linguæ Gallicanæ elegantia hic & Bloesiis ea floret, ut palmam facile præcipiant omnibus. Hinc Gallis Aurelianismus quod Graecis Atticismus15

Parmi les noms célèbres, bornons-nous à citer celui de l’Anversois Jan Brant (1559-1639), le premier beau-père de Rubens… Ou celui de Cornelis Van Beveren (Dordrecht, 1591-1663), étudiant à Leyde, puis docteur à Orléans (1613), curateur de l’école latine et à plusieurs reprises bourgmestre de sa ville natale. Orléans est aussi visitée par les voyageurs « de qualité », princes, ambassadeurs, etc., avec leur suite plus ou moins nombreuse. Reuchlin accompagne ainsi le jeune margrave Friedrich v. Baden à Paris, et il s’inscrit à l’université d’Orléans en 147816. La ville devient une étape du grand tour effectué par les jeunes gens nobles ou fortunés en France : Lord Hertford, avec son précepteur, visite successivement Orléans, Lyon, Marseille, Nîmes, Toulouse et Bordeaux, avant de remonter vers le nord (1561). Félix Platter (1536-1614) aussi passe par la Loire (Tours, Amboise, Blois, Orléans) pour rentrer à Paris, et il revient à Orléans lorsqu’il retourne à Bâle par Bourges. Plus tard, le Strasbourgeois Elias Brackenhoffer (1618-1682) vient à Orléans, et il aura à cœur de donner un volume à la Bibliothèque de la Nation Germanique :

Libellum hanc perexiguum bibliothecae reliqui voluit omnium in commodum inque sui recordationem Elias Brachenoffer17.

3. La Réforme

Foyer d’humanisme entretenant des relations régulières avec les pays allemands, l’université d’Orléans penche naturellement vers la Réforme, alors même que les tensions montent dans le royaume, du règne de François Ier à celui d’Henri II. La trajectoire de Melchior Wolmar est caractéristique du phénomène : il s’inscrit d’abord à Tübingen (où il rencontre probablement Mélanchthon) et à Fribourg (Br.) avant de venir à Paris, où il se forme au grec et où il fréquente les ateliers d’imprimerie. Il quitte pourtant la capitale, pour se réfugier à Orléans lorsque la répression commence à s’appesantir sur ceux que l’on soupçonne d’être proches des idées de Luther. C’est par le biais de ces premiers maîtres et étudiants que la sensibilité « évangélique » (au sens de Luther) s’étend à un public francophone.

Rappelons que Théodore de Bèze vient étudier à Orléans, que Calvin y passe sa licence (il est d’ailleurs le syndic de la Nation Picarde18). On ne peut passer sous silence Laurent de Normandie (1510-1569), né à Noyon, docteur en droit à Orléans (où il retrouve Calvin), puis maître des requêtes et secrétaire du dauphin (1545), enfin maire de sa ville natale (1546). Réfugié à Genève en 1548 et reçu avocat en 1556, il exerce aussi comme imprimeur-libraire et soutient très activement la diffusion de la « librairie réformée », notamment en direction du royaume : Max Engammare nous rappelle que son inventaire après-décès comporte entre autres 720 exemplaires de la Bible en français imprimée par Jaquy à Genève en 1562, et dont l’un est aujourd’hui conservé à Orléans19. Nous devinons les ­solidarités « orléanaises » à l’œuvre lorsque la situation se fera plus tendue. Parmi les gloires de l’université, qui attirent nombre d’étudiants à Orléans, figure le juriste Pierre de L’Estoille (1486-1537)20. Lorsque Mathieu Béroald s’enfuit de Paris avec le jeune Agrippa d’Aubigné en 1562, il se réfugie d’abord au Coudray, fief de Louis (fils de Pierre) de L’Estoille, avant d’être arrêté à Courances et emprisonné à Milly, d’où il s’échappe pour gagner Montargis et Orléans.

Il n’y a pas lieu de reprendre ici le déroulement de la crise politico-­religieuse, mais la ville occupe un rôle majeur après la mort de Henri II. François II décède à l’hôtel Groslot d’Orléans (5 décembre 1560)21, où les États Généraux sont ouverts le 13, avec la célèbre harangue du chancelier Michel de L’Hospital. Mais le massacre de Wassy marque le point de non-­retour : Louis de Condé prend Orléans (2 avril 1562), d’où il lance une guerre de pamphlets, appuyée notamment sur l’atelier typographique d’Éloi Gibier, imprimeur de la ville (1556) et de l’université (1568), tandis qu’un synode protestant se tient dans la ville (25 avril). Parallèlement, une Faculté de théologie protestante est un temps créée en annexe à la Faculté de droit : elle est établie dans le temple de la Grange des Jacobins, place de l’Étape, et compte parmi ses enseignants, l’hébraïsant Béroald22, l’helléniste François Bérault23 et le théologien Nicolas de Gallars. C’est encore à Orléans que décède en 1562 Conrad, le fils de Josse Bade24.

La répression est violente à partir de 1568, pour culminer en 157225, quand les membres de la Natio Germanica eux-mêmes sont inquiétés : « Comme les Allemands mes compatriotes étaient pour la plupart logés chez des Huguenots », ils risquent d’être pris à partie (Botzheim26). Orléans devient dès lors une place forte de la Ligue, que Henri IV devra assiéger en 1594.

4. La Nation Germanique de l’université d’Orléans

Armoiries de Joannes de Mepsche, originaire de Groningen, procurateur de la Nation Germanique d’oct. à déc. 1545

(Livre des Procurateurs de la Nation Germanique, AD Loiret, D 213).

Les dix registres des rapports et actes de la NG contiennent, pour la période 1444-1689, près de 600 enluminures représentant des armoiries.

L’université est dirigée par un collège de docteurs-régents cooptés et de procurateurs, et l’un des docteurs-régents est élu recteur. Organisée au xive siècle (elle se dote de statuts en 1378)27, la Natio Germanica est au xve siècle la plus nombreuse de l’université. Elle est dirigée par un ­procurateur élu par l’assemblée tous les trois mois, assisté d’un bureau dont les membres sont en charge des différentes tâches (administration, mais aussi « événements ») : un receveur, un bedeau (pedellus, chargé de porter la masse de la Nation), plus tard un assesseur et un messager. En 1566, celui-ci s’engage à se rendre chaque année deux fois aux Pays-Bas (Germania Inferior) et une fois à la foire de Francfort-s/Main, mais sa charge ne sera pas régulièrement reconduite. Le procurateur reçoit les insignia de sa fonction : les livres (entendons, les archives), le sceau, la clé de la caisse (archa nationis) et les deux clés de deux petits coffres contenant l’étendard et les cierges, et la monnaie courante. L’étudiant (novicius) est d’abord reçu par le recteur, qui le dirige vers le procurateur de la Nation devant lequel il doit prêter serment28. Puis vient le paiement des droits d’immatriculation, variables selon la période et selon la qualité de l’étudiant29.

La cohésion de la Nation Germanique et la solidarité entre ses membres se manifestent dans un certain nombre d’occasions, par exemple lors de l’inhumation de ses « suppôts ». De même, la caisse constitue-t-elle un instrument de solidarité, qui permet d’ouvrir un prêt ou de couvrir des frais de justice. En principe, les privilèges de la Nation protègent ses membres – même si le danger n’en est pas moins réel lorsque les tensions religieuses s’accroissent. Nous connaissons des exemples ponctuels de membres des « Nations Germaniques » des universités du sud-ouest qui sont arrêtés pour des raisons religieuses, mais libérés sur ordre du roi. Les fêtes aussi sont l’occasion de manifester le statut de la Nation, avec un banquet tous les trois mois, et surtout la grande fête du 6 janvier, où il s’agit toujours de l’emporter sur les autres Nations. En revanche, le particularisme ne s’étend pas à l’écriture, comme l’explique Blotius en 1566 :

Omnes qui munere aliquo funguntur in Natione Germanica quaecunque in libris Nationis scribent, characteribus non nisi italicis scribere debent. Quod si quis illis litterarum formis assuetus non sit, per alium ejus rei non ignarum sibi curet30.

Cette « écriture italienne » s’impose de fait comme l’écriture à la fois moderne et internationale.

II – La bibliothèque de la Natio Germanica

La Natio Germanica possède d’abord seulement une collection de hasard, soit une dizaine de volumes à peine au début du xvie siècle. L’institutionnalisation de la bibliothèque date de la décennie 156031, sous l’impulsion du ­procurateur Obertus Giphanius32 et de son confrère Hugo Blotius33. La décision est pourtant difficile, comme le souligne Giphanius : « Tantae molis erat Germanos condere libros »34. On décide alors que, comme les procurateurs, les assesseurs devront désormais tenir un registre où ils noteront les Acta relatifs à la bibliothèque, ce qui est effectivement le cas à partir de 156635.

1. Une bibliothèque girovague

Le premier problème est celui du local. Lorsque les docteurs-régents proposent de mettre à la disposition de la nouvelle structure une pièce au-dessus de la salle des thèses (la « chambre de la librairie ») et d’institutionnaliser ainsi l’existence d’une bibliothèque commune, le local est visité par une délégation36 : il apparaît qu’il ne convient pas, étant difficile d’accès et bruyant. De sorte que, à compter de cette date, la bibliothèque naissante (en fait, toujours une petite collection de quelques dizaines de volumes) va errer de place en place, dans la conjoncture difficile des tensions religieuses : en novembre 1566, les livres sont entreposés dans la maison de Charles d’Aise (Carolus de Asse), apothicaire et bedeau de la Nation37. Ils seront brièvement transférés dans la maison du procurateur, Georgius Korman ab Menneburg (1567), avant de revenir chez le bedeau. Quatre ans plus tard, les voici chez le procurateur Christophorus Schell, avant que la Nation ne décide de louer une pièce (cubiculum) chez son messager, Martinus Antonius Neomagensis (Marten de Cleermaker, de Nimègue). Celui-ci exerce en ville comme tailleur et c’est chez lui que l’archa Nationis est aussi transportée38. En 1580, nouveau déménagement, cette fois dans la maison que le tailleur Blanchet occupe dans l’enceinte de l’église Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, rue de l’Université. Puis, en juillet 1585, la bibliothèque vient chez ­Vrain-Moireau, cordonnier et bedeau (1598), au coin des rues de Bourgogne et des Gobelets. Thomas Platter le Jeune expliquera, en 1599, qu’elle est l’une des curiosités de la ville :

Les étudiants allemands ont leur propre conseil et leurs procurateurs. Ils possèdent dans la rue Bourgogne une maison où se trouve leur bibliothèque ou librairie, composée de beaucoup de bons livres qu’ils mettent à la disposition des écoliers allemands qui se sont fait inscrire sur leurs registres et qui ont payé à la bourse commune la contribution fixée…39

De même, lorsque Justus Zinzerling (Sincerus) décrit Orléans, au début du xviie siècle, ne manque-t-il pas de signaler la bibliothèque de la Natio Germanica40 D’après Cuissard, la bibliothèque est ensuite chez Viot Mercure, puis, à partir de 1721, elle est transportée dans

une partie de la salle haute du bâtiment des grandes écoles, avec les registres, les sceaux et les médailles de la Nation : les Allemands firent enclore à leurs frais cette portion à eux accordée d’une cloison en bois de chêne à panneaux et, pour tout prévoir, remirent une des clefs entre les mains du recteur, une autre au grand bedeau, et le procurateur garda la troisième41.

2. Gérer

Le responsable de la troisième clé (« tertiae clavis custos ») reçoit un ensemble beaucoup plus précis de charges à partir de 1566, en tant que conseiller, orateur (chargé de prononcer le discours lors de la fête patronale) et responsable de la bibliothèque42. Il doit prêter un serment en cinq points :

In nomine Domini juro. 1- Me adsessoris et praefecti bibliothecae Inclitae Germanicae nationis nostrae in hac urbe Aurelianensi optima fide et dignitate commodoque ejusdem nationus administraturum. 2- Et in primis nullam iniisse pactionem vel coicionem de hoc munere vel recusando vel adipiscendo. 3- Deinde procuratori me in rebus subitis maxime aliisque recte deliberandis et procurandis, in adeundis magistratibus salutandis principibus et legatis, perscribendis epistulis et cautionibus formulisque ad utilitatem et honorem nationis pertinentibus, consilio, opera et re praesto futurum. 4- Daturum etiam operam, ut bibliotheca nostra, et quae ad eam pertinebunt, conservantur, augeantur, floreant, et si qui vel libri vel pecuniae ad eam conferantur, diligenter conservem et eam ad utilitatem bibliothecae convertam omniaque collatorum et conferentium nomina in acta mea referam. 5- Postremo cum hoc munere suo tempore prompte consensu nationis abiero, rationem me redditurum, clavem, libros adsessorios et si qua erunt reliqua successori ex fide omnia traditurum. Ita juro itaque me Deus adjuvet43.

L’assemblée du 7 juin 1572 met en place les statuts de la bibliothèque, mais la crise politique pousse la Nation à se retirer alors de la vie universitaire, qu’elle ne réintégrera que trois ans plus tard. Blotius insère dans le premier livre des assesseurs (p. 334-368) un Catalogus alphabeticus librorum ad bibliothecam nationis germanicae pertinentium, et Otto Kemper, élu assesseur-bibliothécaire le 11 septembre 1572, établit un catalogue des 58 titres constituant alors le fonds. Ses successeurs Assuerus Stroyff et Mathias Dans accroîtront la collection de 25 numéros44. Enfin, on s’inquiète de donner à la bibliothèque une installation « convenable », et le sujet revient à plusieurs reprises dans le Troisième livre des procurateurs45. Un règlement plus précis sera promulgué (Leges de bene gerenda bibliotheca), le 3 mars 1582, en neuf points46 :

Postremo novem leges de bene gerenda bibliotheca tulimus, quas hic adnecto :

Solus praefectus bibliothecae ad eam ingressum alicui faciendi facultatem habeto.

Procurator vel quaestor hac de re aditus hominem ad praefectum demittito, si secus faxit decem asses in fiscum bibliothecae inserto.

Generaliter quisquis inscio praefecto librum e bibliotheca secum asportari pro singulis corporibus vel codicibus eadem poena plectitor…

Pour des raisons de sécurité évidentes, l’assesseur-bibliothécaire est désormais le seul à avoir la clé du local47, un budget plus ou moins régulier est consacré aux achats de livres et le règlement, imprimé en placard, est affiché dans la salle48. La fonction de l’assesseur réunit la garde des archives et celle de la bibliothèque mais, en 1598, les deux fonctions sont disjointes, avec un « assesseur » pour les archives et un « préfet » pour la bibliothèque49. Normalement, chacun peut avoir accès aux livres en s’adressant au bibliothécaire mais, en 1596 celui-ci, pour ne plus être constamment dérangé, fait réduire l’ouverture quotidienne à une tranche de deux heures (13h-15h). Les emprunts se font après enregistrement et, pendant un temps, moyennant paiement d’un droit50.

L’étude du Catalogue de 1678 et de son supplément, et l’examen des exemplaires ayant appartenu à la Nation et aujourd’hui conservés à Orléans, permettent de préciser certains points relatifs à la gestion de la collection51. Les volumes sont cotés selon un système alphanumérique – nous y reviendrons – et parfois reliés sous forme de recueils. La cote est portée au titre, ainsi que la mention d’appartenance (« Bibliothecae inclytae Nationis Germanorum »). Une attention certaine est donnée aux conditions de conservation : les exemplaires sont soigneusement reliés, et deux fers armoriés sont réalisés dès 1567 pour la décoration des plats, fers qui seront utilisés plusieurs décennies durant.

3. Les livres : anthropologie du don

Le point fort de la collection est bien entendu constitué par le droit : le premier titre acquis est celui du Corpus juris canonici, pour la somme (qui semble très raisonnable) de 8 ll52. Puis, en 1567, on décide de se procurer les Œuvres de Bartolus de Sassoferato (1314 ? -1357). Mais le fonds sera progressivement élargi, à partir de 1583, au-delà des seules sciences juridiques : la Nation achète alors un Parvum theatrum orbis terrarum53et une Charta cosmographica54.

Comme c’est parfois le cas dans le milieu des administrateurs réformés (par ex. chez les magistrats des villes libres et impériales), les responsables semblent au moins… attentifs à limiter les dépenses, de sorte que la bibliothèque est essentiellement alimentée par des dons, dont les exemplaires aujourd’hui conservés gardent le souvenir. On connaît la problématique de l’anthropologie du don, et les fonctions que celui-ci remplit. La première finalité est évidente : le don permet a priori d’enrichir la bibliothèque à moindres coûts. Il témoigne aussi d’une forme de révérence envers l’institution même de la bibliothèque et envers la Nation. Enfin, l’insertion par Blotius, dans le premier livre des assesseurs (p. 261-305), d’un Catalogus alphabeticus eorum qui aliquid ad promovendam ornandamque bibliothecam contulerunt, désigne le troisième objet, qui vise à conforter l’identité et la mémoire collectives : c’est le temps du contre-don, par lequel la Nation manifeste à son tour sa reconnaissance et une forme de consécration à l’égard de ses bienfaiteurs – ici, l’inscription nominative dans un livre mémoriel.

Nous ne présenterons que quelques exemples, repérés à partir des mentions de provenance. Beaucoup de ces dons datent des dernières décennies du xvie et du début du xviie siècle, et un certain nombre portent une note précisant les noms des dignitaires de la Nation au moment du don55 : il arrive d’ailleurs parfois que le don soit fait par l’un de ces dignitaires, comme le procurateur Ernst Friedrich Mollinger56. Le fait que l’inscription soit portée en or sur le plat ou au dos du volume témoigne du caractère somptuaire du don. L’enquête devrait, bien évidemment, être systématiquement poursuivie sur la base des exemplaires conservés, ce qui n’est malheureusement pas possible dans l’immédiat.

Le droit

Le droit constitue, comme de juste, le premier point fort de la bibliothèque de la Natio Germanica. Pierre de L’Estoille (1480-1537) est docteur utriusque et professeur à Orléans, avant d’être nommé par François Ier conseiller au Parlement de Paris. Il publie en 1531 un recueil de documents sur une controverse avec Uldaricus Zasius (Epistola nuncupatoria ad [… ] Dominum Gabrielem ab Acromonte, cardinalem…), dont la particularité bibliographique est l’adresse : « in officina libraria Jacobae Houys, viduae [… ] Petri Marchant » (Médiathèque Orléans, Rés. H6854)57. L’exemplaire figurant dans la ­bibliothèque de la Natio Germanica lui a été offert par Guilielmus Camere (van der Camere)58 en 1581, comme en atteste la mention manuscrite (« Hunc librum bibliothece nationis germanie dedit Gulielmus Camere Gandensis vetarg »)59. La Nation possède aussi l’édition des Opuscula de Pierre de L’Estoille (Catal. 1678, p. 63) sortie des presses parisiennes de Chrétien Wechel en 1531, toujours pour Claude Marchant60.

Egenolphus Schermar (Ulmensis Suevus)61, immatriculé en 1596, donne son exemplaire de Barthélemy de Chasseneuz, Commentaria in consuetudines ducatus Burgundie (Lyon : Jacques Maréchal, pour Simon Vincent, 17 IX 1517 : Baudrier, XI, 398. Médiathèque Orléans, Rés. B1610 : Cuissard, 343)62. Joannes de Lisingen vient de Hesse, et étudie à Orléans dans les dernières années du xvie siècle : il donne à la Nation un exemplaire de Cujas, In recitationes in II et IV libros Decretalium (Trier, typis Bernardini Aldini, 1595), relié en vélin estampé à chaud, aux armes de la Nation Germanique (le fer est celui daté de 1567)63. Johann Kemp, venu de Gorinchem/Gorcum64, donne en 1610 à la Nation Germanique son exemplaire du manuel de Sébastien Brant (Titulorum omnium juris) publié à Lyon par Antoine Gryphe en 1578 (Médiathèque Orléans, B1141). Enfin, Guilhelmus Nooms donne, vers 1627, un exemplaire du Doctrinale d’Alexandre de Villedieu (Lyon : Jean de Vingle, 18 VIII 1495)65.

Un sort particulier devra être fait à la seule mention de don fait de la part d’un personnage qui n’était pas membre de la Nation : il s’agit du libraire-imprimeur Saturnin Hotot, lequel donne en 1607 un exemplaire des Commentaria de Jean Feu (Joannis Ignei) imprimés à Lyon en 1539-154166.

Les lettres

Le second domaine de prédilection de la bibliothèque concerne la littérature, qu’il s’agisse d’éditions des classiques, ou de travaux plus récents. Les étudiants étrangers profitent en effet de leur séjour à Orléans pour se familiariser avec la langue vernaculaire et avec un certain nombre de titres de philologie ou de littérature. Voici Petrus Quentelius, de Cologne (un parent de l’imprimeur ?), qui remet en 1572 à la Nation Germanique son exemplaire du Commentaire de Pline par Beatus Rhenanus67. Le De Felicitate de Philippus Beroaldus (Bologne, 1453-1505) est imprimé à Paris par Thielmann Kerver, pour Jean Petit, le 28 mars 1500. Le petit fascicule conservé à Orléans est inséré dans un recueil, avec une mention d’ex dono d’Andreas Schreck, de Berlin, en commémoration de la Saint André : « Andreas Schreck, Marchiacus, bibliothece dedit die Andree anno [15]82. Liber inclytae Nationis Germaniae »68. Les Œuvres d’Ange Politien, dans l’édition aldine de 1498, reliées en vélin, portent une note manuscrite de la main de Reinerus (Reijner) Schrassert, en date du 26 février 160569 :

Librum hunc a blattarum tinearumque (cum quibus ut authoris verbis utar, rixabatur) injuria vindicans foliis quamplurimis quos hic et inde dispersos collegi in gratiam I. N. G. multorumque utilitatem ex officiis et fide qua generaliter et specialiter commodo Bibliothecae consulere teneor, ex quo potui modo, restitui et cum hactenus sine alicujus usu et commodo jaceret, alligatum hanc in formam, hisque vestibus vestitum, Nationi offero, Reinerus Schrassert, Hard-Geldrus Inclytae Nationis Germanicae quae est Aureliis ad Ligerim Bibliothecae Praefectus anno 1605, 26 febr.70

La « Germanie »

Plusieurs titres intéressent l’identité collective des membres de la Natio Germanica et la généalogie des grandes familles. Un des premiers traités imprimés concernant l’histoire de l’Allemagne est constitué par les Germaniae exegeseos volumina duodecim de Franciscus Irenicus, dont un exemplaire est offert par Petrus Tripsaeus, de Namur (dit aussi Leodensis)71. Les années 1600, du moins jusqu’au début de la Guerre de Trente ans, semblent à cet égard marquer un temps fort de ce genre de publications. C’est ainsi qu’un recueil généalogique des empereurs et des grandes familles allemandes est publié par Reusner en 159272 : l’exemplaire de la Natio lui a été offert en 1604 par une personnalité remarquable, en ­l’espèce de Samuel a Winterfelt, « ing. ex Procurator »73. Christophorus Fabricius Pannonius, certainement originaire de Haute-Hongrie et inscrit à Königsberg en avril 1600, se fait immatriculer à Orléans le 9 novembre 1601. Quatre ans plus tard, il donne à la Natio Germanica son exemplaire du De heroicis virtutibus memorabilibus factis, dictis et exemplis principium Germaniae libri V74. Un second titre aurait été offert par lui, mais il n’a pu être repéré75. La ­prosopographie des hommes célèbres ­d’Allemagne est quant à elle offerte en 1606 par un certain « Georgius Wilhelm ab Eblebenz » (?)76. Enfin, plusieurs décennies plus tard, le Strasbourgeois Ernst Friedrich Mollinger, Durlacensis (de Durlach), offre un recueil général de généalogie couvrant la période 1400-166477.

En dehors des dons, nous restons dans l’ignorance des canaux par le biais desquels la Nation se procure ses livres : on peut imaginer qu’un personnage comme le libraire Claude Marchant occupe une place privilégiée dans ces échanges. Bien évidemment, les relations directes avec les « pays allemands » et l’Europe du nord-ouest permettent le cas échéant de faire venir tel ou tel titre, comme celui de l’Atlas d’Ortelius : une grande partie des enrichissements se fait en marge des circuits professionnels, par le biais notamment de la société académique. Enfin, si la proximité de la capitale explique la place des éditions parisiennes, on ne peut qu’être frappé par le nombre des éditions de Bâle et de Lyon…

Il demeure l’essentiel, l’analyse du fonds lui-même, à partir des exemplaires conservés, des sources d’archives et des travaux déjà réalisés (notamment le catalogue de Cuissard), ainsi que des deux catalogues et du supplément publiés à partir de 1664.

III – À propos de théologie : le premier catalogue imprimé (1664)

1. Présentation générale

Plusieurs catalogues imprimés de la bibliothèque de la Nation Germanique d’Orléans ont été conservés, dont le premier est celui qu’a rédigé Emmike Nedergaard en 166478. Le souci de la publicité constitue un indice intéressant des préoccupations de la Nation au début du règne personnel de Louis XIV. Le petit fascicule s’ouvre par une page de titre présentant en fleuron un aigle à deux têtes, avant une citation du De bibliothecis syntagma de Juste Lipse79. Suivent l’Épître liminaire, et le « Carmen gratulatorium » de dédicace : « Viro praestantissimo Dom. Emmichio, Cimbro, post in ordinem redactos I. N. G. libros, Catalogum ejusdem Bibliothecæ in lucem edenti Feliciter ». Ne doutons pas qu’il ne s’agisse aussi d’une reprise en mains de la collection, laquelle a subi des pertes et se trouve dans un certain désordre :

Fuit tempus, quando Bibliothecam nostram, omnibus a multis retro annis ad usum publicum patentem, illustrabant libri omnium scientiarum editi, magnis cura et sumptu congesti. Nunc vero videas illam videam et mancam, bene multis, iisque maximam partem rarioribus, furto (quis credat ?) subductis.

Le catalogue informe indirectement sur le dispositif matériel de la bibliothèque : celle-ci dispose de tables et de pupitres (in mensis et pluteis). Les tables accueillent les volumes de grand format (les Effigies imperatorum, Zurich : Gesner, 1559 ; l’Hortus Eystettensis, Bâle : Besler, 161380; l’Atlas de Blaeu, Amsterdam, 1638, 3 vol.), dont le catalogue de 1678 précisera qu’ils ne doivent en aucun cas être empruntés. Elles servent à la consultation, et la bibliothèque possède des éléments de décoration – deux globes terrestre et céleste, et une sphère armillaire (sphaera armillaris)81. Ce catalogue donne en outre des précisions sur le dispositif intérieur de la bibliothèque, sur sa classification systématique (des « Libri theologici » aux « Dictionaria, Grammatici & Romans ») et sur son système de cotation (par armoires, travées et numéros d’ordre) : nous pouvons en déduire le nombre des armoires (ou travées), soit vingt-cinq (une série alphabétique et trois doubles cotes : AA, AB, AC). Il est plus difficile de déterminer le nombre des rayonnages en hauteur, dans la mesure où celui-ci varie selon les formats : à titre d’exemple, la section de théologie compterait six rayonnages (de a à f), tandis que les sections où dominent les petits formats (surtout in-12) en auraient davantage.

Les quelque 2 100 titres de 1664 sont sommairement décrits (le principe semble être celui de ne pas dépasser une ligne par titre) et répartis en classes systématiques, avec un sous-classement par formats :

FolioQuartoOctavoDuodecimoTotal
Teologici633010665264
Juridici23121924585780
Medici1314261265
Humaniores6171243129504
Politici21428041184
Mathematici141521050
Geogr. et hist.18411300297
Romans045851113
Dictionaria [sic]2017293682102
Total6075258084192359

La tradition juridique orléanaise s’impose toujours : le droit représente la première série systématique, avec 780 titres (juridici). Parmi les classiques, on remarque les Expositiones de Brant, données à Lyon par R. Odet en 1622, et achetées en quatre exemplaires (p. 24, n° 62) : cet exemple montre que l’institution a aussi pour objet de fournir enseignants et étudiants en exemplaires de travail83. Les éditions « régionales » paraissent être rares : outre Pierre de L’Estoille, le Catalogue de 1678 mentionne les Coutumes d’Orléans (par Achille de Harlay) et celles de Blois, imprimées à Orléans en 1609 et 1625 (p. 33) – les exemplaires ne sont pas conservés sur place.

Les humanités (humaniores) s’inscrivent à un niveau élevé, soit 504 titres : il s’agit d’éditions des classiques de l’Antiquité (parfois en plusieurs exemplaires), mais aussi de titres plus récents, comme les Essais de Montaigne dans l’édition d’Abel L’Angelier de 159584. Nous pourrions y joindre les deux dernières sections, celle des Romans et des Dictionnaires (et Grammaires).

Les autres sous-séries sont moins importantes sur le plan quantitatif, mais elles restent significatives sur le plan thématique : 297 titres relèvent de la section « géographie et histoire », la série moderne par excellence. Cet ensemble (où l’on retrouve à nouveau un certain nombre d’historiens anciens, à commencer par César85, Tacite, etc.) semble être le plus ouvert sur le plan de la géographie typographique et des langues d’impression. La bibliothèque possède 264 titres de théologie, dont un certain nombre d’exemplaires de la Bible, et surtout du Nouveau Testament en latin, flamand, italien ou français (par moins de quatorze exemplaires pour les éditions en français : cf. p. 7, n° 5. Nous n’avons malheureusement pas d’éléments qui permettent de les situer plus précisément). Un certain nombre de ces titres sont mis à l’Index depuis 1566.

Les 184 titres de sciences politiques (politici) retiennent aussi l’attention. Cette section, dont le propos s’articule avec le domaine juridique mais qui intègre aussi la science militaire, rend compte de la modernité de la théorie politique. La Nation Germanique a acquis le texte de la République de Bodin, en deux exemplaires, non pas dans l’original en français, mais dans l’édition latine de 1586 (p. 47, n° 2) : il s’agit de répondre à la demande de lecteurs qui ne sont pas francophones de naissance.

Les mathématiques (65 titres) et la médecine (50 titres) s’inscrivent à des niveaux bien plus faibles, de même que la section des Dictionnaires et des Grammaires (qui correspondent à un fonds d’usuels) et celle des « Romans » (la collection remplit désormais aussi une fonction de récréation).

Les langues de publication sont le latin et le français, puis l’allemand86 et le néerlandais. Même si le catalogue a été dressé par un rédacteur qui connaît la bibliographie, certaines précisions données par lui semblent erronées : par exemple l’Apologie pour les Chrétiens de France [… ] de la religion évangélique [d’Innocent Gentillet] est faussement datée de 1558 (p. 4, n° 25), quand il s’agit d’une coquille (pour Genève, P. Marceau, 1588).

2. Une sensibilité réformée… et diplomate

Avec l’Apologie pour les Chrétiens de France, nous touchons au monde de la Réforme. Dans un certain nombre de cas, le recours à l’exemplaire permettrait seul de déterminer s’il provient effectivement de la Nation Germanique ou d’une autre bibliothèque, notamment pour des textes qui relèvent de la philologie ou de l’apprentissage des langues anciennes, et pour des manuels d’enseignement. Ainsi du traité de Reuchlin In septem Psalmos poenitentiales hebraicos, publié à Wittenberg par Joseph Klug en 1529 et incorporé dans un recueil avec d’autres éditions relatives à l’hébreu87. Un autre recueil réunit un exemplaire de la Grammaire latine de Mélanchthon (Bâle, 1555)88 et le Petit catéchisme de Luther89. La reliure est d’origine allemande, et l’ouvrage porte une note d’un certain Johannes Sinfresius (de Sion), attestant qu’il a été acheté à Bâle en 1569 du Lausannois Johannes Rupicus90. Enfin, il paraît très probable que certains titres appartenant à la Nation Germanique et relevant le cas échéant de la Réforme ont pu entrer, aux xviie et xviiie siècles, dans des bibliothèques de maisons religieuses. Nous prendrons pour seul exemple une Bible lyonnaise de 1562, en français, qui porte au titre la mention manuscrite suivante : « Cette Bible est hérétique et a esté donné aux Récollets d’Orléans, 1630 »91.

La Bible

À la base de la Réforme, l’Écriture. Le Catalogue de 1664 s’ouvre par une série d’éditions de la Bible in folio données à Genève, Zurich, Dordrecht et Anvers – donc, la pleine géographie de la Réforme. Nous citerons la Bible hébraïque interlinéaire d’Arias Montanus, donnée à Genève, correspond probablement à une édition de 1619, si nous nous référons au Catalogue de 167892. Du côté des Bibles latines, la Biblia sacrosancta Testamenti Veteris et Novi est présente dans l’édition donnée à Zurich par Froschauer en 1543 ; cependant, l’exemplaire aujourd’hui à Orléans provient de la bibliothèque des Augustins, ce qui n’exclut pas qu’il ait d’abord appartenu à la Nation Germanique93. Il en va de même avec la Bible latine sortie des presses parisiennes de Jean Prével en 1528, et dont l’exemplaire aujourd’hui à Orléans provient du fonds des Capucins94.

Biblia, dat is, de gantsche Heylighe Schriftuere, Dordrecht, 1596.

Offerte à la Nation allemande en 1618 (Médiathèque d’Orléans).

La Bible néerlandaise de 1596 a été offerte à la Nation par Martius Gisbertus ab Heringa, Frisius, en 1618. Elle se présente sous une très belle reliure allemande, veau estampé à froid, avec deux fermoirs et un ombilic95. Une Biblia gallica est identifiable avec la Bible de Diodati, sortie des presses de Pierre Chouet à Genève en 1644 (n° 6)96. D’autres Bibles de petits formats sont cataloguées dans les sections correspondantes, in quarto (Londres et Amsterdam) et in octavo (Genève, 1605). La Bible allemande de Luther (Francfort-s/M., 1575) est présente en quatre exemplaires, dont aucun ne semble aujourd’hui conservé sur place97, tandis que le Novum Testamentum d’Érasme figure en deux exemplaires98.

D’autres textes « réformés »

Plusieurs exemplaires d’œuvres de Luther sont mentionnés dans le catalogue : les Enarrationes seu postillae majores traduites en latin99et les Hauspostillen dans une édition wittenbergeoise, sous une reliure en peau de truie estampée à froid100. Le Catechesis germanice, latine, graece et hebraice (p. 5, n° 27) ne semble pas conservé : il s’agit de l’édition wittenbergeoise de 1585101. En revanche, la référence au Catechismus Lutheri, Lemigoviæ [Lemgo] 1601 (p. 5, n° 27), demeure plus hermétique, tandis que la Bibliothèque possède une édition allemande du Petit catéchisme donnée comme imprimée à Erfurt par « Melchior Gaschen » (probablement Melchior Sachse der J.) en 1572, et qui ne figure pas dans le VD16…102

Les textes pédagogiques occupent une place stratégique dans la morale des réformateurs, à commencer par le In Partitiones oratorias Ciceronis dialogi duo de Jean Sturm. Celui-ci prolonge les problématiques ouvertes par le De Adolescentia de Wimpheling (Strasbourg : Matrin Flach, 1500103) : un manuel de pédagogie morale, en même temps que d’enseignement, appuyé sur un grand nombre de citations des classiques.

Les Centuries de Magdebourg figurent dans l’édition bâloise de Johannes Oporinus104, mais l’exemplaire aujourd’hui conservé provient de la collection Prousteau105.

Pour la théologie réformée, voici un exemplaire de la Concordance française de Calvin de 1555106et un autre de l’Institution de la religion chrétienne, en français, dans l’édition genevoise de 1609 (p. 2, n° 39. 1678 : cote A. b. 12). L’exemplaire conservé (Médiathèque Orléans, A3064) porte une mention de provenance datée de 1620 :

Hunc librum Bibliothecae I.N. Germanicae ad liberandam fidem meam […] calend. septemb. Anno M.DC.XX. Petrus Eisinge G[ermaniae]. I[nferioris]. Nationis Germ. ex procurator107

La note comprend un étonnant anagramme autour du nom de Calvin :

Joannes Calvinus Ovis in luce sana

Collige Calvini mentem sub nominis umbra.

Una salus in eo, I nova luce sinas, Alius canon Jesu.

Praeter apostolicas Christi post tempora chartas

Huic peperere libro sæcula nulla parem.

La Confession de la foi chrétienne de Théodore de Bèze figure dans l’édition donnée par François Perrin à Lyon chez Jean de Tourne et Guillaume Gazeau en 1563108. On relève aussi plusieurs exemplaires d’œuvres de Philippe Duplessis-Mornay (1549-1623), dont un certain nombre d’éditions sorties des presses de Saumur109, voire de La Rochelle ou de Sedan. Ainsi le traité De la vérité de la religion chrétienne, rédigé en latin par Duplessis-Mornay, puis traduit par lui en français et publié à Anvers, chez Plantin, en 1583110; L’institution, usage et doctrine du S. Sacrement de l’Eucharistie, en l’Église ancienne, publié à La Rochelle chez Jérôme Haultin en 1598111; Le Mystère d’iniquité, ou ­l’Histoire de la papauté, édition saumuroise de 1611, dont un exemplaire porte une mention d’appartenance à la Nation Germanique112.

Notons enfin un ouvrage de Pierre du Moulin (1568-1658), la Nouveauté du papisme, opposée à l’antiquité du vray christianisme, publié en 1627 à Sedan : l’exemplaire, figurant au catalogue de 1664 et aujourd’hui conservé a été donné par le procurateur Scherff à la Nation Germanique, avant d’entrer dans les collections de l’évêché113.

Le catalogue de 1664 présente aussi un certain nombre de titres relevant de l’obédience catholique, voire de la polémique anti-protestante, et le phénomène semble s’amplifier au début du xviie siècle. Voici par exemple l’Anacrise des Bibles, de Jacques Severt, publiée à Lyon en 1623, et dont le sous-titre précise l’objet : c’est-à-dire, Examens iudiciels et espreuues speciales [… ] pour discerner les Bibles françoises fauses [sic] et desprauées par les Heretiques de nostre siecle114 La Méthode nouvelle facile et solide de convaincre de nullité la Religion prétendue réformée, de François Véron (s.j.), a été publiée à Paris par Jean Mestaié en 1623, mais la Nation se procure la deuxième édition, sortie deux ans plus tard115. Une dernière dimension de la rencontre entre les différentes confessions tient au fait que l’Université continuera, logiquement, à enseigner le droit canon : par suite, les exemplaires d’ouvrages relevant de cette discipline se rencontrent toujours en nombre dans le catalogue de 1664116.

Épilogue : un paysage contrasté

Le tableau auquel nous aboutissons est en définitive beaucoup plus contrasté qu’on ne s’y attendrait a priori. Même si nous avons privilégié la problématique de l’histoire de la Réforme, l’étude en profondeur de la bibliothèque de la Nation Germanique reste à conduire, sur la base des deux catalogues de 1664 et de 1678, avec le supplément de 1682117, et surtout à partir de l’étude des exemplaires conservés. La Nation entrera en décadence après l’édit de Fontainebleau, et le dernier étudiant « germanique » quitte Orléans en 1734… Quant à l’Université elle-même, elle sera dissoute en 1793 : la bibliothèque de la Natio, qui a très certainement déjà subi un certain nombre de pertes, sera placée l’année suivante sous la gestion du bibliothécaire de la ville.

Bien des questions restent posées (comment circule l’information sur les nouveautés, comment fonctionne pratiquement la bibliothèque, qui peut y avoir accès, et dans quelles conditions ?), mais la présentation rapide amène à constater trois points. Tout d’abord, la présence en nombre d’intellectuels (et d’artisans ?) d’origine allemande à Orléans au début du xvie siècle a considérablement facilité le transfert de la Réforme vers la France. Ensuite, le glissement vers une Réforme de langue française se fait progressivement, peut-être par le biais des nombreux étudiants venus de « Germanie inférieure », alias des « anciens Pays-Bas ». Enfin, il est clair que la Nation Germanique est attentive à ne jamais prendre parti en tant qu’institution : la rencontre à Orléans de ces « forains » venus des différents états de l’Empire et de ses marges, pratiquant des langues parfois différentes et appartenant à des confessions elles aussi différentes, conduit à une culture de la diplomatie qui permet aux uns et aux autres de vivre ensemble. Une culture, qui s’impose, d’une manière générale, comme la culture politique du Saint-Empire.

____________

1. Rabelais, Pantagruel, ch. V. Mais Rabelais explique aussitôt que les étudiants d’Orléans sont d’abord experts au jeu de paume, qu’ils n’étudient pas de peur de se fatiguer la vue et que, en définitive, les grades que l’on y acquiert ne représentent pas grand-chose. C’est devant la porte d’Orléans sur la route de Paris qu’il rencontrera peu après l’« écolier limousin » (ch. VI). Enfin, d’Orléans, Pantagruel et ses compagnons gagnent Paris, pour y « visiter la grande université » (ch. VII). Certes, Rabelais décrit des universités dont le niveau intellectuel est médiocre, et où l’ardeur au travail semble au moins limitée, mais il rédige une satire, et défend les positions de la modernité humaniste. Pour autant, la situation semble être relativement favorable aux « écoles » d’Orléans, qui voient en effet l’humanisme impulser un aggiornamento aussi dans les études juridiques, et qui deviennent au début du xvie siècle un pôle de la recherche sur la tradition antique et du travail sur les textes originaux (J. Boussard, « L’université d’Orléans et l’humanisme au début du xvie siècle », dans Humanisme et Renaissance, 5 (1938), p. 209-230). D’une manière générale, la présence de maîtres célèbres attire des cohortes d’étudiants : on pense à Pierre de L’Estoille, à André Alciat ou encore à Anne du Bourg…

2. La réforme de l’Église est de longue date à l’ordre du jour, dont l’urgence a déjà conduit à des événements parfois tragiques, comme l’illustre l’exemple de la Bohême. Mais la question reste posée tout au long du xve siècle, et elle est notamment au principe de la réunion du concile de Bâle. Frédéric Barbier, « Les débuts de la Réforme en France : transferts culturels et histoire du livre, 1517-1523 », Journal des savants, janv.-juin 2018, p. 71-95.

3. Frédéric Barbier, « Émigration et transferts culturels : les typographes allemands et les débuts de l’imprimerie en France au xve siècle », dans Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Comptes rendus des séances de l’année 2011, janv.-mars, Paris : Diff. De Boccard, 2011 [sic pour 2012], p. 651-679.

4. Jusqu’en 1538, Orléans compte dix Nations : France, Lorraine, Germanie, Bourgogne, Champagne, Normandie, Picardie, Touraine, Écosse et Aquitaine, nombre réduit à quatre ensuite (France, Germanie, Picardie, Normandie). La Natio Germanica sera alors la seule à pouvoir conserver une forme d’autonomie, parce qu’elle n’appartient pas au royaume (elle conserve la gestion de sa caisse, et la nomination de son procurateur et de son receveur). À partir de cette même date, elle incorpore en outre les étudiants venus de Lorraine.

5. Les Robertiens sont comtes d’Orléans. Le fils d’Hugues Capet, Robert le Pieux (lui-même né à Orléans), est sacré roi à la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans le jour de Noël 987. Ce rapport de la monarchie à la ville peut aussi expliquer que le pouvoir municipal ne sera établi à Orléans que de manière assez tardive (1385). La fidélité au roi apparaîtra de manière évidente lorsque Jeanne d’Arc libère la ville du siège anglais (1428-1429).

6. Charles Cuissard, La Bibliothèque d’Orléans : son origine, sa formation son développement, Orléans : Herluison, 1894 (Mémoires de la Société archéologique et historique de l’Orléanais, t. XXV, p. 51-326) (ci-après : Cuissard, MSAHO), p. 71 et suiv. Voir aussi : Orléans. L’université et la typographie [catalogue d’exposition], Orléans : SAHO, 1885.

7. Orléans est érigé en duché en 1344, et désormais donné en apanage au fils cadet du roi : le rôle de la famille d’Orléans est dès lors considérable.

8. Charles VII décède à Mehun-s/Yèvres en 1467 ; Louis XI naît à Bourges (1423) et meurt au Plessis-lès-Tours (1483) ; Charles VIII (1470-1498) naît et meurt à Amboise ; Louis d’Orléans, futur Louis XII, naît à Blois en 1462. François Ier est le premier souverain à n’être pas directement lié à la région de la Loire, et c’est sous son règne que l’axe du pouvoir royal remonte vers Fontainebleau, Rambouillet et surtout Paris. A contrario, la proximité de Paris interdit tout développement réel de l’activité d’imprimerie à Orléans, au contraire de plusieurs villes proches : Angers (1476), Poitiers (1479), Chartres (1482), Tours (1480-1485 ?). L. Jarry, Les Débuts de l’imprimerie à Orléans, Orléans : H. Herluison, 1884).

9. D’après La Guide des chemins de France de Charles Estienne (Paris, 1552). L’itinéraire est le suivant : Bourg-la-Reine, Étampes, Villesauvage (« la Beausse commence »), Toury : Cercottes (« pavé jusqu’à la ville »), Orléans.

10. « En ceste Beausse n’y a chemin plus notable que celuy d’Orléans, fréquenté tant pour marchandises que pour conduicte aux autres endroits de France… » (Guide, p. 97).

11. Nous n’avons pas pu utiliser : Orléans : ville de la Renaissance, Tours, Presses universitaires François Rabelais, 2019.

12. Trésors de la bibliothèque de l’Arsenal (1980), n° 124 : Arsenal, Fol. T 58. La notice indique que Jean de Wailly est doyen de 1436 à 1479, mais cette dernière date est infirmée par Charles Vulliez, « Un grand dignitaire ecclésiastique de province au xve siècle et ses livres : Jean II de Vailly, doyen de l’église cathédrale d’Orléans (†1475) », Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France, 2010, p. 101-114. L’auteur cite l’article publié par Max Prinet dans Le Bibliographe moderne, 25 (1930), n° 1, p. 12-17. L’itinéraire de l’exemplaire est incertain entre la disparition de son propriétaire (qui lègue ses livres au chapitre d’Orléans), son entrée dans la bibliothèque de l’abbaye de Gladbach et son rachat par le marquis de Paulmy en 1784… Pourtant, la Bible semble appartenir à la bibliothèque du chapitre, comme le signale un Répertoire des livres du trésor dressé en 1779 : le fabricier a acheté pour 9 écus « une Bible en deux volumes sur parchemin écrite comme à la main » (AD Loiret, 51 J 2 (cité par Ch. Vulliez).

13. Lottin, I, p. 324. La bibliothèque du chapitre du Sainte-Croix, considérée comme l’une des plus riches de la ville dans les décennies 1450-1460, occupe un bâtiment sur le flanc sud de cette même place.

14. VD16, T 1999 (Médiathèque Orléans, Rés. E4986).

15. Jodocus Sincerus, Itinererarium Galliae…, Lyon, Jacques Ducreux, dit Molliard, 1616, p. 44-45 (et cf. p. 47 et suiv. sur l’université et plus particulièrement sur la Nation Germanique).

16. Cf. Premier livre des procurateurs, p. 65 (réf. infra). Reuchlin est inscrit le même jour (4 janv. 1479) que le Bâlois Jeronymus Zechenburlin.

17. Cité par Cuissard, MSAHO, p. 91, n. 7.

18. P. Ménard, « Jean Calvin, étudiant en droit à Orléans », dans Actes du congrès sur l’ancienne université d’Orléans, 1962, p. 83-91.

19. Médiathèque Orléans, A147 : l’exemplaire porte une mention de provenance « C. Meusnier », personnage que l’on peut identifier avec Charles Meusnier, « doctor Sorbonicus », grand vicaire et doyen du chapitre. Heidi-Lucie Schlaepfer, « Laurent de Normandie », dans Aspects de la propagande religieuse, Genève : Droz, 1957, p. 176-230.

20. Pierre de L’Estoille ∞ Marie Buisnart, fille de Jacques, docteur régent d’Orléans.

21. Descendant d’une famille de tanneurs et de marchands, Jacques Groslot est lui-même docteur en droit (?), conseiller du roi (comme successeur d’Antoine du Bourg), chancelier de Marguerite de Navarre, chancelier d’Alençon et bailli d’Orléans. Il accompagne Marguerite à Lyon entre octobre 1524 et août 1525, et meurt en 1552. C’est lui qui fait construire l’hôtel Groslot, dit « Grande maison de l’Étape », à partir de 1530, peut-être sous la direction de Jacques (Ier) Androuet du Cerceau. Son fils, Jérôme Groslot, achète en 1550 un terrain proche de Saint-Jean le Blanc, et y fait construire un château, dit plus tard château du Bois-de-l’Île. À son tour bailli d’Orléans, il reçoit François II en ville, mais est bientôt soupçonné, arrêté et condamné à mort ; il réussit cependant à se réfugier au château de l’Île, lequel accueillera le culte protestant à Orléans après 1569. Louis Ier de Condé fait de l’hôtel Groslot le quartier général des protestants, avant que Charles IX n’y descende à son tour après la Saint-Barthélemy.

22. Mathieu Béroald (pseud. Mathieu Brouard, Saint-Denis, 1520 – Genève, 1576), ancien élève de Vatable puis enseignant au collège du cardinal Lemoine, se convertit au protestantisme grâce à Jules César Scaliger à Agen en 1550. Précepteur de Théodore Agrippa d’Aubigné, avec lequel il fuit Paris (1562). Il séjourne à Montargis et à Gien (sous la protection de Renée de France), à Orléans (1562-1568), à Sancerre, etc., enseigne à Sedan, puis se réfugie à Genève. Cf. Charles Peyran, Histoire de l’ancienne Académie réformée de Sedan, Strasbourg : Vve Berger-Levrault, 1846. Cette famille des Brouard vient, elle aussi, de Picardie (Gamaches).

23. Nicolas Bérauld, lui-même familier de l’atelier de Josse Bade et proche de Budé, est aussi connu comme le précepteur des frères Coligny. Son fils est François Bérault, professeur à Montbéliard et Lausanne, principal du collège de Montargis en 1571, puis à La Rochelle.

24. Proche de Théodore de Bèze, il se réfugie à Genève en 1549. Rentré en France après l’édit de janvier 1562 pour s’établir comme pasteur à Orléans, il meurt au cours d’une épidémie de peste.

25. Le procurateur de la Natio Germanica est alors le juriste strasbourgeois Johann Wilhelm Botzheim, lequel donnera un récit des événements à Orléans. Le libraire Pierre Trepperel figure parmi les victimes de la Saint-Barthélemy. Trepperel est établi libraire à Orléans dès avant 1547. Il succède en 1558 à l’un des bedeaux de la Natio Germanica, le libraire François Guiard (Guyard), dit d’Orléans, en qualité de receveur général de l’université. Guiard est peu apprécié, parce qu’il s’est chargé de trop d’obligations, mais Trepperel sera, de son côté, soupçonné de fraudes. Trepperel travaille occasionnellement en association avec l’imprimeur orléanais Éloi Gibier. Calviniste, il signe un acte de soumission au roi le 8 août 1570, mais, d’après le témoignage de Botzheim, il est massacré lors de la Saint-Barthélemy (fin août 1572), alors même qu’il entre dans une église pour abjurer. Les actes de l’université confirment son décès à la date du 8 octobre 1572. Sa veuve se remarie avec le libraire Jean Courtin.

26. « La Saint-Barthélemy à Orléans, racontée par Joh.-Wilh. De Botzheim, étudiant allemand, témoin oculaire », BSHPF 21 (1872), p. 345-392.

27. Le fait qu’une partie de ses archives ait échappé au désastre de la destruction des Archives départementales du Loiret en 1940 explique qu’elle ait fait l’objet d’un certain nombre de publications importantes, notamment : Les Livres des procurateurs de la Nation germanique de l’ancienne université d’Orléans, 1444-1602, t. I : Premier livre des procurateurs, Leiden : Brill. Première partie, Texte des rapports des procurateurs [AD Loiret, D 213], éd. Cornelia M. Ridderikhoff, Hilde De Ridder-Symoens, 1971. Seconde partie, Biographies des étudiants, éd. Detlef Illmer, Hilde De Ridder-Symoens, Cornelia M. Ridderikhoff. Vol. I, 1444-1515, 1978. Vol. II, 1516-1546, 1980. Vol. III. Tables, additions et corrections, illustrations, 1985. Deuxième livre des procurateurs de la Nation germanique de l’ancienne université d’Orléans, 1546-1567. Première partie, vol. I [II], éd. Cornelia M. Ridderikhoff, 1988. Troisième livre des procurateurs de la Nation germanique de l’ancienne université d’Orléans, 1567-1587. Texte des rapports des procurateurs, éd. Hilde De Ridder-Symoens, Cornelia M. Ridderikhoff, Leiden, Boston : Brill, 2013. Quatrième livre des procurateurs de la Nation germanique de l’ancienne université d’Orléans, 1587-1602. Texte des rapports des procurateurs, éd. Hilde De Ridder-Symoens, Cornelia M. Ridderikhoff, 2015.

28. La cérémonie est décrite par un procurateur en 1517 : le procurateur demande au candidat pourquoi il veut s’inscrire. « Peto, honorande Procurator, ad hanc venerabilem Alemanie nationem ex ejus humanitate me recipi atque inscribi ». Quo facto, Procurator sciscitabitur, sit Alemanus necne? Item nobilis an vero plebejus? Quod deinde sit illi nomen? Cognomen? Patria? Provincia seu dyocesis? Et hec quidem non privatim sed in facie Nationis ante ejus juramentorum prestationem seriatim (ut premititur) instar preludii fieri debent (AD Loiret, D 244, f. 4v°).

29. Au xve siècle, un étudiant noble paie deux écus, et un roturier un écu d’or (les pauperes sont plus ou moins exemptés), mais la valeur de l’écu augmente selon la dévaluation de la monnaie de compte (la livre et ses sous-divisions). Lorsque certains essaient de couper court à cette obligation, la Nation obtient leur régularisation, les candidats ne pouvant se présenter à un examen que s’ils sont régulièrement inscrits. Il faut remarquer que les études à Orléans reviennent relativement cher, parce qu’il n’y a absolument rien de comparable à l’infrastructure parisienne : pas de collèges, rien pour les étudiants pauvres, etc. Les étudiants sont de facto obligés de prendre une pension privée, assurant le gîte et le couvert, voire éventuellement des cours particuliers. L’essentiel des droits d’immatriculation va à la Nation, une partie à ses « fonctionnaires », et une partie couvre les frais d’entrée. Par ailleurs, l’université reçoit les collectae, alias les frais d’inscription aux cours, ainsi que les frais d’examen, dont une partie est à nouveau reversée à la Nation.

30. AD Loiret, D 231, p. 448 : « Il est interdit d’inscrire quoi que ce soit sur les registres de la Nation si ce n’est en “écriture italienne” et il est prescrit à ceux qui ne sont pas accoutumés à cette manière d’écrire de prendre des leçons de calligraphie ». On connaît nommément l’un de ces calligraphes à la fin du xviie siècle, « maître Arnold de Grysperrre, tenant école à Orléans » : cf. Auguste Baillet, « Arnold de Grysperre, calligraphe à Orléans au xvie siècle », dans Mémoires de la Société d’agriculture, sciences, belles lettres et arts d’Orléans, 1910, p. 60-68. D’une manière générale, l’approche socio-anthropologique du fonctionnement des « Nations » d’Orléans est éclairée par les travaux de Charles Vulliez, dont récemment : « Les nations universitaires au Moyen Âge, des réseaux de “compatriotes” en milieu estudiantin ? L’exemple de la nation de Champagne en l’université d’Orléans », dans Appartenances et pratiques des réseaux, Paris : CTHS, 2017, p. 124-134 (éd. électronique).

31. André Robinet, « Orléans ville universitaire : la bibliothèque de la nation germanique à l’Université d’Orléans », MSAHO, 1960 (n° 7), p. 322-327. Charles Cuissard, La Bibliothèque d’Orléans, op. cit., n’a pas été remplacé par la notice de Francis Déguilly dans Patrimoine des bibliothèques de France : Centre, Limousin, Paris : Payot, 1995, p. 102-115. Les autres travaux de Ch. Cuissard constituent des sources précieuses pour l’histoire de l’institution et de ses collections, notamment : Catalogue des incunables et des éditions rares [de la Bibliothèque publique d’Orléans], Orléans : Georges Michau et Cie, 1895 (ci-après cité : Cuissard). Voir aussi : Boek, bibliotheek en geesteswtenschappen, Hilversum : Verloren, 1986 (« De Germaanse natie te Orléans », p. 139ss). Le mémoire de Mélanie Turmeau, La Gestion de la bibliothèque de la Nation germanique à l’Université des lois d’Orléans au xviie siècle ([Tours : CESR, 1975], 131 p.) reste médiocre. Le même auteur a donné : Étude de la bibliothèque de la Nation Germanique à Orléans au xviie siècle, à partir des catalogues […] de 1664 et de 1678 [Tours : CESR, 2013].

32. Hubert Jansz. van Giffen (alias Hubrecht van Giffen, Buren (Gueldre), 1534 – Prague, 1604). Étudiant à Louvain, Bourges et Paris, puis docteur en droit à Orléans en 1567. Il suit Paul de Foix (prélat soupçonné de sympathies pour la Réforme) à Venise (cf. Thuan. Hist. VII, 11, p. 186), avant de devenir professeur à Strasbourg (1571), où il épouse en premières noces Anna Margarita Marbach (fille du président du Kirchenkonvent). Professeur de droit à Altorf (1583-1590), puis à Ingolstadt, où il se convertit au catholicisme. Il quitte Ingolstadt en 1599 pour une charge de juge au Reichshofrat de Prague. Cf. MSAHO, 68 (1985).

33. Hugo de Bloote (alias Bloodt, Delft, 1533 – Vienne, 1608). Ancien étudiant à Louvain, Tolède, Paris, Orléans et Bâle. Quoique calviniste, il est appelé en 1574 par l’empereur Maximilien II (1527-1576) pour être le premier bibliothécaire impérial (Praefectus Bibliothecae) et entre en fonction en 1575, devient professeur de rhétorique à l’université de Vienne en 1576 (il doit se convertir au catholicisme). Il est l’auteur d’un catalogue alphabétique de la bibliothèque dès 1576, d’un catalogue alphabétique développé en 5 vol. (1596) et d’un inventaire des manuscrits (1597). Geschichte der Österreichischen Nationalbibliothek, Band 1, Wien : Prachner, 1968 (Museion : Neue Folge : Reihe 2, 3/1), p. 81ss. Hermann Menhardt, Das älteste Handschriftenverzeichnis der Wiener Hofbibliothek von Hugo Blotius 1576. Kritische Ausgabe der Handschrift „Series nova 4451“ vom Jahre 1597 mit vier Anhängen, Wien : Rohrer, 1957.

34. Deuxième Livre, p. xlv.

35. Premier livre, 1566-1585 : AD Loiret, D 231. Le reclassement fera désigner ensuite ce registre comme le Troisième livre.

36. La délégation est conduite par le comte Antonius d’Ortenburg, probablement le fils de Gabriel de Salamanca, comte d’Ortenburg, possessionné en Alsace et conseiller impérial.

37. Nommé par le collège des docteurs régents le 14 janvier 1565, Charles d’Aise décédera en 1573. Il succède à François Guyard, et intervient à plusieurs reprises dans les débats relatifs à la gestion de la Nation Germanique. Son successeur sera Jean Chapelain, élu par le collège de l’université, à la faveur du départ des Germani, et parce qu’il achète la charge 140 couronnes.

38. Sur cette installation, cf. Troisième livre, p. 241-245. Le dépôt de la bibliothèque chez une personne privée ne va pas sans poser problème : le propriétaire peut exercer un contrôle sur l’accès, tandis que la pièce sert non seulement aux livres, mais aussi aux réunions de travail pour l’administration et pour l’enregistrement des nouveaux membres. Schell est l’un des signataires de l’Album amicorum de Bronkhorst van Batenburg, à Orléans le 4 janvier 1572 (Bib. royale des Pays-Bas, K 26 AA. D’autres signataires d’Orléans figurent dans le même album).

39. MSAHO, t. XVII (1880), p. 334.

40. Justus Zinzerling (Jodocus Sincerus), vers 1590-vers 1620, voyage en France, en Angleterre et aux Provinces-Unies, exerce comme correcteur d’imprimerie à Lyon, et devient enfin conseiller en Allemagne du nord (Mecklembourg et Oldenbourg). Il publie à Lyon en 1616 un Itinerarium Galliae (voir n. 16).

41. Cuissard, MSAHO, p. 101.

42. Quatrième livre des procurateurs, p. 23, surtout n. 83.

43. Troisième livre des procurateurs, p. 63. Une sixième disposition sera ajoutée en 1602 : « Item juro me curaturum ut durante meo munere omnia nova privilegia, arresta et statuta, et alia ejusdem Inclytae Nationis Germanicae concernentia a notario regio, si causa desideret, fideliter in librum statutorum et privilegiorum scribantur » (Quatrième livre des procurateurs, p. 24, n. 84).

44. Premier livre des assesseurs (AD Loiret, D 231= 2 Mi 40), ouvert par Hugo Blotius en 1566, avec un Prooemium dans lequel il évoque les grandes bibliothèques de l’Antiquité, mais aussi la bibliothèque royale de Fontainebleau. Voir le détail dans Deuxième livre des procurateurs, p. lvss.

45. Fol. 75 (7 VI 1572), 110 (1er VIII 1575), 138 (VI 1580), 209 (VII 1583) et 252 (VII 1585) : cf. Troisième livre des Procurateurs, p. 37, n. 91.

46. Troisième livre des Procurateurs, p. 339-340.

47. Plus tard, la Nation décidera d’avoir une clé de réserve.

48. D’après Cuissard, MSAHO, p. 88, note 1, qui cite Gölnitz (de Dantzig), Ulysses belgico-gallicus (Amsterdam : Elzevier, 1655). Cet auteur consacre en effet de longs développements à la Natio Germanica, à ses privilèges et à sa bibliothèque (p. 203ss).

49. 1566 Hugo Blotius, de Delft. ?? D. Linio Scheltinga, D. Cornelio Dobbio 1572 Otto Kemper. 1582 Maximilianus Martinus Stella, Antverpiensis. 1583 Pancratius Strölain, Lodovicus Suffridus. 1605 Reijner Schrassert. 1623 Adolph Louwens, de Groningen ; Ambrosius Kolb.

50. Cuissard, MSAHO, p. 94.

51. Charles Cuissard, Catalogue de la bibliothèque de la ville d’Orléans : histoire, Orléans : Bibliothèque municipale, 1905. La bibliothèque de la N.G. est mentionnée p. 519-520, pour les années 1664 et 1678 (suppl., 1682). Les mentions de provenance sont également portées en abrégé (L. I. N. German.).

52. La Médiathèque d’Orléans conserve l’exemplaire des Decretales de Grégoire IX (Lyon, 1550 : Médiathèque Orléans, Rés. B42), le Liber Sextus de Boniface VIII (Lyon, 1550 : Médiathèque Orléans, Rés. B51-1), les Clementinae (B51-2) et les Extravagantes (B51-3).

53. L’exemplaire ne semble pas être conservé à Orléans, mais le premier atlas imprimé, le Theatrum orbis terrarum, est publié par Ortelius à Anvers en 1570. Un exemplaire figure dans le catalogue imprimé de 1664, p. 60, n° 86.

54. « Tabula cosmograhica seu mappa, cujus studii cognitio litteratis omnibis cum ob lectionem historiarum tum instituenda itinera valde utilis est » : peut-être Johann Huttich, Novus orbis regionum ac insularum veteribus incognitarum una cum tabula cosmographica…, Bâle : Johannes Hervagius, IX 1555, mais l’exemplaire Médiathèque Orléans Rés. E237 vient de Prousteau (Guillaume Prousteau, doyen des docteurs régents et fondateur de la Bibliothèque de la ville, 1714).

55. Par ex. E 493-2, etc.

56. Cuissard, MSAHO, donne un certain nombre d’autres exemples, p. 90, notes 1 à 6.

57. Médiathèque Orléans, Rés. H6854. Jacques Hoys († après 1520) est libraire général de l’université d’Orléans au moins depuis 1511 (cf. Médiathèque Orléans, A40). Il est probablement le père de Jacquette Hoys, laquelle épouse le libraire Pierre Marchand (Marchant). Il était établi comme « scribe […], libraire général et garde de la maison et librairie d’icelle Université », « in vico scriptorum » (rue de l’Escrivainerie, près Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, actuelle rue Pothier). Après son décès, son fils, Claude, lui succède : il est connu pour avoir publié en 1556 la Monodie, autrement le dueil et épitaphes […] des plus fameux et illustres docteurs régents de l’université d’Orléans, Orléans : Éloy Gibier, 1556 (Louis Desgraves, Éloi Gibier, imprimeur à Orléans (1536-1588), Genève : Librairie Droz, 1966, n° 6).

58. Il s’agit d’un membre d’une importante famille de la noblesse flamande (Médiathèque Orléans, Rés. B1191).

59. Pierre de L’Estoille publie en 1531 des Repetitiones imprimées à Paris par Chrétien Wechel pour le libraire orléanais Claude Marchant, et dont la Médiathèque d’Orléans possède un exemplaire venu de la collection Prousteau : Marchant décède en 1556. Pierre Aquilon signale une reliure contemporaine en veau brun estampée à froid (mais l’ouvrage aurait été relié postérieurement au don, puisqu’il figure dans un recueil factice). Successeur de Conrad Resch (à l’Écu de Bâle), Chrétien Wechel exerce comme imprimeur-libraire au Cheval volant (Pégase), rue Saint-Jean de Latran, où il est voisin des Estienne. Son neveu, André, lui succédera en 1553.

60. Médiathèque Orléans, Rés. B1191-1, mais la mention de provenance indique le nom de Guillaume Prousteau.

61. Egenolf (Egenolph) (von) Schermar, 1573-1605. Les Schermar sont une famille de notables à Ulm, et leur collection de manuscrits et d’imprimés musicaux est aujourd’hui conservée dans la bibliothèque de cette ville.

62. Première édition de cette coutume commentée. L’auteur (1480-1541), ancien étudiant de Dole, Poitiers, Turin et Pavie, sera avocat du roi (1502), conseiller du Parlement de Paris (1531), puis président du Parlement de Provence (1541).

63. Médiathèque Orléans, Rés. B107 : Dix siècles de reliure, p. 60-61.

64. Gorcum est tristement célèbre pour ses martyrs catholiques de 1572. Le personnage de Johann Kemp ne semble pas identifiable avec un homonyme apparaissant dans le Premier livre des procurateurs, p. 99, à la date de 1490.

65. Médiathèque Orléans, Rés. D298 (Cuissard, 79). GW 1041. CRI, X, 13.

66. Baudrier, V, 472 et 477 : Médiathèque Orléans, Rés. B912. Hotot, né à Chartres vers 1544, s’établit à Orléans vers 1572 et épouse la fille du libraire Charles Richard Cottereau. Imprimeur de la ville et de l’université d’Orléans, imprimeur du roi (1598), il décède à Orléans avant 1624.

67. Beatus Rhenanus, In C. Plinium, Bâle : Johann Froben, III 1526, f° (Médiathèque Orléans, Rés. B966.3 : il s’agit donc d’un recueil).

68. Médiathèque Orléans, Rés. D2728-2 : GW 4136, CRI, X, 106.

69. Angelus Politianus, Opera, Venezia : Aldus Manutius, Romanus, VII 1498 (GW, M 34727) : Rés. D2851 (Catal. 1678, cote Y a 13. Cuissard, 95, CRI X, 555). Les Schrassert sont une famille de notables de Harderwijk (Gueldre, PB), et Reinerus Schrassert (1584-1622 ?) est cité dans l’Album de Samuel Naeranus à Saumur le 17 janvier 1605.

70. En défendant ce livre de l’attaque des blattes et des cafards (avec lesquels il luttait, pour suivre l’expression de l’auteur) j’ai réuni [les feuillets] dispersés ici et là pour le service de la I.N.G.

71. Franciscus Irenicus (Friedlieb), Germaniae exegeseos volumina duodecim, Nürnberg, Anton Koberger, 1518 (VD16, F2815 ; Médiathèque Orléans, Rés. E2218).

72. Elias Reusnerus, Opus genealogicum de praecipuis familiis imperatorum, principum aliorumque procerum orbs christiani, Frankfurt/M., ex off. Barsaei, 1592 (Médiathèque Orléans, E4268).

73. Il s’agit de Samuel v. Winterfeld (1581-1643), ancien étudiant de Francfort/O., Marbourg et Tübingen, et qui accomplit au début du xviie siècle son Grand Tour en France et en Italie, accompagné par son précepteur, lui-même juriste. Il fera carrière au service du prince électeur de Brandebourg.

74. Matthias Castritius (pseud. Geltzenleuchter), De heroicis virtutibus memorabilibus factis, dictis et exemplis principium Germaniae libri V, Bâle, Johannes Oporinus, 1565 (Médiathèque Orléans, Rés. E2321. Rel. vélin).

75. La cote E2755 porte une note : « Hoc libro ornare voluit Chr. Fabricius in descessu suo in Lituaniam 1601 ». Certains étudiants remettent en effet un ouvrage lorsqu’ils quittent la ville, ce qui semble le cas de Fabricius lorsqu’il gagne la Baltique orientale (exemple également cité par Cuissard, MSAHO, p. 91, n. 3). Cf. András Varga, « A königsbergi egyetem magyar diákjai (1548-1715) » [Les étudiants hongrois de l’université de Königsberg, 1548-1715], Lymbus 6 (1999), p. 1-34.

76. Heinrich Pantaleon, Prosopographia heroum atque illustrium virorum totius Germaniae. Pars prima [tertia], Bâle : Nicolaus Freylinger, 1565 (Médiathèque Orléans, E5453. Catalogue, p. 56, n° 55, mais aussi Cuissard, p. 546, n° 5453).

77. Nic. Rittershusius, Opus ingens genealogicum, in quo continentur genealogiae imperatorum, ducum aliorunque procerum orbis totius ab anno Christi 1400 ad 1664, Tübingen, typis J. H. Reisii, 1664 (E 4340).

78. Catalogus librorum qui Aureliae in Bibliotheca Germanicae nationis extant, éd. Emmichius Nedergardius, Orléans, Antoine Rousselet, 1664 (Médiathèque Orléans, Rés. E17926-7). Emmike Nedergaard, pasteur du château de Copenhague, †1692.

79. Le premier des rois à avoir eu une bibliothèque est présenté comme Osymanduas d’Égypte (avec une référence à Diodore de Sicile). Juste Lipse, rentré de Rome à Leyde, entreprend d’éditer les classiques avec un commentaire historique développé (et non pas seulement le texte le plus fiable). Puis il s’oriente vers des travaux envisageant différents aspects de la civilisation antique. Le De Bibliothecis syntagma publié en 1602 et dédié à Charles de Croÿ prend rang parmi cette série. Jeannine de Landtsheer, « Juste Lipse et son De Bibliothecis syntagma », Littératures classiques 66 (2008/2), p. 81-91.

80. VD17, 7: 689534N.

81. La demande d’acquisition est faite en 1641, et le questeur indique qu’il ne peut se procurer les sphères à Paris, et qu’il faut se tourner vers les Pays-Bas. En définitive, on les achètera en 1642 auprès d’un avocat au présidial d’Orléans (Cuissard, MSAHO, p. 98, n. 1).

82. Nous avons porté ici, par commodité, non pas le nombre de Dictionnaires de format in-12 (il n’y en a apparemment aucun), mais le nombre des manuels de grammaire, que le Catalogue répartit par langues : hébreu, grec, latin, français, italien, espagnol et anglais.

83. Mais la Médiathèque d’Orléans conserve un autre exemplaire du même texte, Louvain : Bartholomaeus Gravius, 1552 (Rés. B1139). Cet exemplaire a été offert par Wolfgang Gentz en 1632.

84. p. 35, n° 38. Deux exemplaires probablement d’une autre édition, p. 37, n° 44, et sept d’une troisième édition, p. 43, n° 217 : Montaigne est devenu un classique

85. Cf. Cuissard, p. 130, n° 1757 : il s’agit de l’édition en trad. fr., Paris, Bonnemère, 1541.

86. Par ex. Bugenhagen, p. 8, n° 22.

87. Médiathèque Orléans, Rés. D68.3. Parmi les autres titres, on note l’Isagoge elementalis de Sébastien Munster (Bâle, 1535).

88. Philipp Mélanchthon, Grammatica latina […] una cum tractatu de Orthographia Ioach. Camerario auctore, Bâle : Johann Oporinus, 1555, 8° (Médiathèque Orléans, Rés. (BC) D306.1). Autre texte de Mélanchthon conservé par la Nation Germanique, le De Legibus oratio (Paris : Robert Estienne, 1528 : Médiathèque Orléans, B842).

89. Martin Luther, Catechesis parvus, graecolatina […] omnia a Michaele Neandro Soraviensi edita, Bâle : Johann Oporinus, 1556, 8° (Médiathèque Orléans, Rés. D306.2).

90. Johann Sinfresius, de Sion, apparaît dans les Registres de la Compagnie des pasteurs de Genève (t. VIII p. 439) comme l’un des signataires d’une attestation d’engagement à suivre la Réforme et à faire venir un pasteur à Sion (24 fév. 1603).

91. Médiathèque Orléans, Rés. A148.

92. Première cote de la bibliothèque : A. a. 1.

93. Médiathèque Orléans, Rés. A60. Cf. p. 1, n° 3. 1678 : cote A. a. 2.

94. p. 4, n° 4 : Médiathèque Orléans, Rés. A48. Cet exemplaire figure en 1715 au catalogue ms de la bibliothèque des Capucins (Médiathèque Orléans, ms 939, p. 110), sans que nous puissions préciser s’il s’agit effectivement de celui ayant anciennement appartenu à notre bibliothèque.

95. Dordrecht, Ghedruckt by Abraham ende Isaak Canin : Médiathèque Orléans, Rés. A174. Ancienne cote A. a. 6 en 1678. Cf. Dix siècles de reliure de la Bibliothèque municipale d’Orléans [catalogue d’exposition], Orléans : Bibliothèque municipale, 2005, p. 62-63.

96. Mais l’exemplaire Médiathèque Orléans, A154 provient des Capucins d’Orléans, auxquels il a été donné en 1667.

97. p. 4, n° 10. 1678 : ancienne cote C. c. 9 à 12.

98. p. 4, n° 14. Il s’agit très probablement de deux éditions différentes, puisque le Catalogue de 1678 précise : « Nov. Test. Lat. Erasmi, 2 ex. in 8°, Argent. & Antv., CC 19. 20 ».

99. Bâle, 1546 : Médiathèque Orléans, Rés. A3042 (et Catalogue, p. 2, n° 48).

100. Wittenberg : Hans Kraffts Erben, 1578 : VD16 ZV 10135 (Médiathèque Orléans, Rés. A3040bis. 1678: cote B. b. 14. La cote suivante, B. b. 15, concerne une édition du même texte, en latin, donnée à Bâle en 1615).

101. VD16, L 5028. 1678 : cote C. d. 24.

102. Médiathèque Orléans, Rés. A3041.1. Exemplaire relié avec : Matthaeus Richter, Martin Luther, Das Kleine Corpus Doctrinae das ist : die Heuptstücke und Summa Christlicher Lehre, Erfurt : Georg Baumann d. Ä., 1571 (VD16, ZV 13256, qui ne mentionne que le seul exemplaire de la Staatsbibliothek de Berlin…).

103. Médiathèque Orléans, Rés. C364.3 : CRI X, 691, qui ne cite pas la Nation Germanique.

104. Ecclesiastica historia, 1560-1574, 7 volumes : Catal., p. 55, n° 17. Catal. 1678, 13 t. en 8 vol., D. b. 8-15.

105. Médiathèque Orléans, E683.

106. p. 1, n° 16. 1678 : cote A. b. 13. Jean Calvin, Concordance qu’on appelle Harmonie, composée de trois évangélistes, Genève : Conrad Badius, 1555 (Rodolphe Peter, Jean-François Gilmont, Bibliotheca Calviniana, t. II, Genève : Droz, 1994, p. 569, n° 55/5). L’exemplaire ne semble pas conservé.

107. p. 2, n° 39. 1678 : cote A. b. 12. Petrus Eisinge (Groningen, 1594 – Groningen, 1658). Également cité par Cuissard, MSAHO, p. 92, n. 2.

108. p. 6, n° 66 : Médiathèque Orléans, A297, mais l’exemplaire vient des Récollets.

109. p. 5, n° 49 ; p. 6, n° 57.

110. Médiathèque Orléans, A3829, mais l’exemplaire, encore une fois, vient du Grand Séminaire d’Orléans.

111. L’ouvrage, qui figure au Catalogue (p. 3, n° 61. 1678 : cote B. c. 10), est conservé dans les collections orléanaises sous une reliure estampée à chaud : Médiathèque Orléans, A3249.

112. p. 2, n° 56 : Saumur : T. Portau, 1611. Après être entré un temps dans les collections des Archives départementales du Loiret, l’exemplaire est conservé à la Médiathèque d’Orléans, A6371. 1678 : cote B. b. 13). Un autre exemplaire provient des Capucins d’Orléans (Médiathèque Orléans, A3237).

113. p. 2, n° 60. 1678 : cote B. b. 12 : Médiathèque Orléans, A4579.

114. Le titre figure au Catalogue (p. 2, n° 52. 1678 : cote C. a. 15), et l’exemplaire est effectivement conservé à Orléans (Médiathèque Orléans, A6366).

115. 1678 : cote B. d. 6. L’ouvrage ne semble pas être conservé aujourd’hui à Orléans. Louis Desgraves, Répertoire des ouvrages de controverse entre catholiques et protestants en France (1598-1685), Genève : Droz, 1984-1985, n° 3395, ne cite que deux exemplaires, à la BnF et l’Inguimbertine. Le CCF y ajoute un exemplaire à Troyes.

116. p. 12, n° 92 et suiv. ; p. 21, n° 198 et suiv., etc.

117. Catalogus librorum qui Aureliae in Bibliotheca Inclytae Germanicae nationis extant, éd. Gisbertus Edingh [docteur utriusque, originaire de Groningen], Orléans : Nicolas Verjon, 1678 (Médiathèque Orléans, H9360, et Rés. E18180.3) ; Libri Inclytae Germanicae nationis priori catalogo non inserti, ibid., 1682.