Eustorg de Beaulieu parodiste :
la Chrestienne resjouyssance comme propagande musicale
Alice Tacaille
Sorbonne Université – IreMus CNRS
L’engagement religieux de Beaulieu le dispose à proposer, avec la Chrestienne resjouyssance, un recueil de chansons spirituelles où se côtoient louange, prière et posture agonistique. Comme l’exigent les règles du genre, ce recueil ne comporte pas de notation musicale. Mais pour le musicologue, Beaulieu est également un musicien accompli, ce dont on peut par ailleurs se rendre compte dans les rares pièces musicales isolées qui nous sont parvenues (1538, 1556). On sait que ses recueils musicaux de chansons et de motets étaient attendus1, et n’ont probablement pas paru, ou n’ont pas été conservés. Un musicien accompli, mais cependant difficile à placer au rang des plus grands, à l’aune de ces quelques rares partitions.
Or Beaulieu, dans les aspects notamment métriques de ses vers pour la Chrestienne resjouyssance, montre une connaissance approfondie des rouages de l’air et de la parodie. Ses textes, dans le détail des mots qui les composent, s’accordent parfaitement avec les airs que nous avons conservés, une bonne partie d’entre eux au moins.
Le volume de Beaulieu constitue aux yeux des musiciens un des meilleurs témoins d’une tradition méconnue, celle d’utiliser des airs à des fins de parodie, en substituant au texte d’origine un nouveau texte. Cette technique de parodie, appelée à un vif succès aux xviie et xviiie siècles, n’en est alors qu’à ses débuts. La parodie sert un grand nombre de contextes, et se révèle par exemple très efficace sur scène, dans le théâtre comique, où elle permet d’emblée, par un chant que l’on peut reprendre à l’unisson des acteurs, une connivence de ces derniers avec le public, à qui l’on offre par là un signe de reconnaissance irremplaçable. Cette connivence spécifique se crée par le choix du support musical : la familiarité de l’air fredonné, qui ne nécessite dans le public aucune technique particulière. Même sans bien connaître les paroles de l’air, par ce subterfuge, les auditeurs se sentent compris, sont intégrés dans la magie de l’événement (pièce de théâtre, assemblée, manifestation…), et en quelque sorte disposés à la ferveur collective. La connaissance collective, ou commune, de l’air est donc une condition impérative pour le fonctionnement de la parodie2.
Eustorg de Beaulieu présente ses chansons de la Chrestienne resjouyssance comme une étape d’un dispositif personnel de conversion :
… je confesse publiquement avoir jadis trop souvent usé de resjouyssance mondaine, & avoir trop par trop souvent chanté les chansons abominables dont ay faict mention cy dessus, Et mesme les ay trop curieusement estudiées & jouées sur plusieurs instrumentz de musique, voire au grand deshonneur de Dieu & du dict art, tant honneste & louable. Mais quand il a pleu à Dieu de me donner à congnoistre, que j’abusois trop de ses dons : j’ay soubdain tourné bride, & par l’inspiration de ce tant bon père celeste (qui m’a tiré du gouffre d’enfer par sa seule grace) je me suis depuis quelque fois occupé à renverser & réduire à sa louange : tout tant de chansons charnelles, que m’a peu souvenir avoir jadis chanté au règne de Satan3.
Spectaculaire repentir d’artiste, en forme de pénitence publique, l’un des premiers dans un siècle qui devait découvrir l’exercice et multiplier les textes publics de contrition, notamment en tête des recueils spirituels – y compris musicaux4. Ce qui aujourd’hui passe pour un lieu commun n’était alors pas si usé, et l’on peut encore lire en filigrane cette opposition profane/sacré en tête des recueils de chansons spirituelles, à partir de 1532 à Genève5. Dans le passage ci-dessus, passe discrètement cette mention « Au grand deshonneur de Dieu & du dict art, tant honneste & louable » : cette idée pourtant est propre à Eustorg de Beaulieu, qui se repent devant Dieu mais aussi devant la musique, dans une formulation émouvante qui manifeste sa réelle vocation de musicien, peut-être plus que de poète ou de pasteur6.
Faisant de l’exercice l’occasion d’une pénitence, Beaulieu précise encore qu’il a renversé et réduit à la louange de Dieu autant de chansons « charnelles » qu’il a pu trouver dans sa mémoire musicale, celles qu’il a personnellement chantées au temps d’avant, celui du « règne de Satan ». Ce détail frappant montre à la fois l’étendue des chansons populaires qu’il avait lues et sans doute mémorisées, mais encore la conscience qu’il en a, et, pour nous, donne une assez bonne image du répertoire qui circulait en réalité, et dont nous n’avons pas la moindre partition notée, ou presque. Il est juste de souligner que la mémoire musicale, encore aujourd’hui, se peuple aisément de plusieurs centaines d’airs, fragments sonores, couleurs, qui permettent non seulement au musicien mais à tout auditeur de s’orienter et de donner un sens à ce qu’il entend. L’effort de Beaulieu de procéder à une anamnèse personnelle, puis à une sorte de purification de la mémoire musicale – des textes, en réalité – dénote une mécanique de la faute et de l’expiation qui apparente sa démarche, un peu à contretemps pour un futur réformé, à un « rosaire » musical…
Mais surtout, le rôle confié à cette culture musicale pour partie orale, ici tout entière mise dans la balance par Beaulieu, a pour vertu de recentrer nos regards sur la chanson spirituelle protestante et ses substrats, ou ses supports musicaux. Contrairement au psaume, la chanson spirituelle réformée au xvie siècle se fonde en effet systématiquement sur des airs déjà existants, et se publie sans musique. Chaque recueil de chansons spirituelles est ainsi d’abord un recueil de chansons populaires, au sens de « favorites », et c’est aussi le cas de la Chrestienne resjouyssance.
Beaulieu n’est pas le premier à proposer une anthologie spirituelle d’inspiration réformée, et mystérieusement la sienne n’a pas connu le destin des autres, qui se sont constituées en tradition, en laissant cet imposant volume à part. Ainsi les textes de Beaulieu ne se sont frayé aucune place dans ce nouveau corpus réformé, comme l’ont noté les critiques7. Mais plus encore, l’emploi qu’il fait de certaines mélodies a été entièrement négligé, voire désavoué par de nouveaux textes dans la lignée « officielle », en dépit de la publication de la Chrestienne resjouyssance. Les mélodies de Beaulieu, en somme, rejoignent le sort de ses nouveaux textes, ses chansons, et complètent un tableau biographique déjà fort complexe et contrasté.
De quelle manière la Chrestienne resjouyssance nous renseigne-t-elle sur la mémoire musicale et le travail parodique d’un homme tourmenté au milieu du siècle ? La Chrestienne resjouyssance définit-elle donc un tableau personnel, singulier, ou au contraire constitue-t-elle un recueil attendu, comparable à d’autres productions moins immédiatement confessionnelles ?
Corpus parodiques avant 1550 : les airs
Le propre des grands corpus parodiques de la première moitié du siècle c’est justement d’être fondés sur un bien commun, une culture sonore commune, puisque la musique y est systématiquement mentionnée, sans partition toutefois, à chaque page. Les recueils de textes à chanter de cette période tablent sur les airs que les lecteurs ont déjà en tête. Dans cet univers de poésie étroitement lié au sonore, à la musique, les emprunts de formules musicales, les détournements et citations semblent permanents, depuis que la parole existe semble-t-il. Mais au début de la période moderne, ou juste avant, dès la fin de la guerre de Cent Ans, la quantité de textes qui font référence explicitement à des airs « connus », donc des textes parodiques, de substitution, augmente considérablement. Aux xve puis xvie siècle, ces airs sont utilisés notamment pour la danse, au théâtre, puis, avec les débuts du livre imprimé, dans les recueils paroliers, ou encore dans des noëls, juste avant la montée en puissance de la chanson spirituelle. En réalité, on connaît les noms de plusieurs centaines d’airs en circulation entre le xve et le xvie siècle, le plus souvent en dehors du circuit de la musique savante et des partitions. Au xviie siècle, les recueils de cantiques et de chansons spirituelles, mais aussi de chansons politiques ou facétieuses usent massivement de la technique de la parodie sur un air connu (désormais nommé « timbre »). Beaulieu est l’un des premiers représentants du genre au début de la période moderne.
Cerner Beaulieu musicien en étudiant son choix de chansons et d’airs, c’est probablement être au plus près de ses meilleures dispositions : et la Chrestienne resjouyssance nous donne une vision assez précise de ses influences concrètes. Beaulieu avait en tête un catalogue d’airs. On peut les retrouver, alors même que pour certains, ils fuient systématiquement la notation musicale, mais aussi les dénombrer, s’en faire une idée juste même si les partitions polyphoniques et la musique savante, que nous connaissons bien mieux, leur tournent précisément le dos.
Parmi ces airs populaires, favoris, il en est certes de différentes sortes. La mémoire musicale de Beaulieu n’est pas peuplée uniquement d’airs transmis oralement, de façon traditionnelle : certains de ces airs proviennent en réalité de chansons de facture savante, sur de beaux textes de haute poésie, qui sont devenus des outils mentaux pour la parodie spirituelle telle que Beaulieu l’entend. Dans ce cas, quelles sont ses relations avec les auteurs des chansons d’origine, poètes et musiciens, lorsqu’ils sont connus ? Favorise-t-il tel ou tel, ou bien s’appuie-t-il plus opportunément, non pas sur sa mémoire, comme il le prétend, mais sur des recueils récemment parus à l’époque ? On sait aussi que Beaulieu, finalement accueilli en Suisse après une période lyonnaise, a connu une vie mouvementée. Les airs proposés par Beaulieu montrent-ils une terre d’élection particulière ?
Un recueil ordonné
Pour mieux évaluer la singularité de Beaulieu, on peut examiner d’abord la forme de son ouvrage (en raison notamment de la section centrale). La segmentation qu’opère notre auteur dans son recueil est d’ordre musical, relativement à la technique de la parodie. Entre la 101e et la 102e chanson, Beaulieu fait insérer une note :
J’ay mis icy à part (amy Lecteur) trente & noeuf chansons spécialles, parmy les aultres. Lesquelles j’ay ainsi sequestrées pour t’advertir expressement que je n’ay point composé aulcun subject ou aultre partie, du chant des chansons précédentes, n’aussi des aultres : que tu trouveras subsequemment, après ceulx-ci.
Mais, touchant ce nombre ici de ces trente & nœuf seulement : tu seras adverti, qu’après leur avoir faict la lettre je leur ay aussi faict & composé à chascune à part un chant, à scavoir : en note musicalement (les unes à trois, & les aultres à quatre parties) selon le don que Dieu m’a administré, en ce tant noble art de Musique. Lequel chant ainsi composé, j’espère avec le temps, s’il plaict au Seigneur (& si je trouve Imprimeur commode) communiquer publiquement à toute l’Eglise. Ensemble encore le chant d’un certain nombre de mottetz latins, de ma composition, la lettre desquelz ay prinse de la saincte Escripture8.
Les trente-neuf chansons (102-140) placées après cette exposition sont donc, à la différence des autres, de sa plume. Il en a composé le « subject et les autres parties », c’est-à-dire la mélodie principale et les voix polyphoniques restantes. Pour toutes les autres chansons (comprendre sous sa plume : les textes), il n’a pris aucune part au « chant », aux aspects musicaux, ici, à l’air. Pour les chansons 102-140, il a fait la « lettre » (le texte d’abord) puis le « chant », la composition polyphonique9.
Comme pour l’édition des psaumes, qu’il annonce à plusieurs reprises10, Beaulieu parle ici de musique qui n’a semble-t-il jamais été imprimée. Compte tenu de son échec récent et renouvelé dans l’édition de ses psaumes, on peut imaginer ce qui pousse quelqu’un qui manifestement possède une plume musicale à publier des textes seulement : peut-être la nécessité, tout simplement. Ou l’opposition manifeste de Viret et d’autres à ce que ses nouvelles musiques prennent pied, à un moment où l’on publie (1542) des recueils qui forment la base de l’unité liturgique du psautier de Genève…
L’imprimeur glisse avant la chanson 141 une note signalant la fin de la section « musicale », entendons musique savante écrite polyphonique. La section II comporte donc 39 chansons, pour l’essentiel (sauf 103, 124 et 125) jamais retrouvées, sans doute inédites en dépit de ce qu’espérait Beaulieu. Les seules trois chansons polyphoniques connues de Beaulieu appartiennent à cette section mais elles ont déjà été imprimées huit ans avant la Chrestienne resjouyssance à Lyon, par Jacques Moderne11. Dans cette même section, 6 textes au moins ont ici ou là déjà été mis en musique par d’autres musiciens12 sans compter des citations de textes dans les « fricassées » musicales, ces pots-pourris de l’époque (n° 129).
Cette section II de l’ouvrage suffirait à définir un ouvrage en deux parties. Pourtant si l’ouvrage est en trois parties, et que subsistent plusieurs chansons après (141-160), c’est qu’une autre répartition est à l’œuvre. Beaulieu nous informe à la chanson 130, donc au cours de la section « II », que les chansons restantes (131-160) sont « défectueuses en vraie mesure poétique ».
Presque toutes ces chansons icy suivantes sont en plusieurs vers, defectueuses en vraye mesure poétique. Mais pour autant qu’on ne les eust sceu chanter, sans suyvre la quantité (telle quelle) des sillabes de celles sur qui les ay composées : j’ay mieulx aymé m’abstraindre à telle rusticité, qu’à faulte de cella, priver les gens : de ne s’en pouvoir resjouir chestiennement, comme les aultres précédentes. Parquoi je prie : que toute calumnie & murmuration, soit loing du cœur & de la bouche des lecteurs.
Cette remarque, d’une rugueuse « honnêteté » qui paraît curieuse de prime abord, ne trouve son plein sens que dans la perspective de la technique musicale : comme Loys Bourgeois en 155113, Beaulieu est concentré sur la réalisation de sa tâche : et toutes les chansons qui viennent ensuite sont parmi les plus anciennes et les plus « orales » de son temps, de celles qui sont pourvues de nombreux refrains insérés et terminaux, plus proches des structures des musiques de tradition orale, et dansées, que de tout autre chose. Ces chansons résistent à la mise par écrit, leur mise en page produit des « vers » courts, des strophes hétérométriques, elles jouent de l’assonance plus que de la rime. Mais elles constituent, comme ne l’ignore pas Beaulieu, un trésor dans la mémoire de son auditoire, puisqu’elles se propagent souvent mieux que d’autres dans le temps, précisément en raison de leur plasticité. À partir de la chanson 130, rares d’ailleurs sont celles qui ont connu une version musicale imprimée.
Le recueil procède donc de deux logiques emboîtées, celle d’isoler les chansons polyphoniques récentes de Beaulieu (inédites, de fait), et celle de séparer deux répertoires fort disjoints dans l’esprit du musicien, les chansons régulières (1-130) des chansons défectueuses – nous savons que ce sont les chansons à refrain, pour une part traditionnelles, et les danses.
Faire chanter une assemblée
Dans ce second avertissement, Beaulieu, peut-on avancer, s’occupe de ses « chansons » comme il s’occupe des « gens » quelques lignes plus loin : avec tolérance et indulgence, celle-là même qu’il demande pour lui, car c’est le but qui compte pour l’auteur, c’est-à-dire l’œuvre prosélyte que peut mettre en œuvre un musicien, la réjouissance chrétienne musicale. Les chansons de Beaulieu ne sont pas toutes « spirituelles », ni même théologiquement claires, elles sont aussi polémiques et satiriques. Son prosélytisme vise donc plus généralement à entraîner à la joie chrétienne par le chant, un festin dont il n’a garde de « priver les gens ». Il « s’abstraint » donc à la rusticité de ces mètres, et pense son recueil avec soin sous cet angle. Sa priorité personnelle, son art est essentiellement musicien, il le reconnaît ici volontiers semble-t-il, et n’envisage sans doute pas de carrière poétique au travers de la Chrestienne resjouyssance.
La mise en page du volume révèle d’autres aspects de cette sollicitude. Beaulieu, comme Bourgeois, comme Davantès14, cherche en outre à développer l’usage de signes nouveaux pour, semble-t-il, préciser de manière plus claire ce qu’on peut attendre du chant d’une assemblée, ou de lecteurs communs. Cette attention et cette ouverture aux « gens » se traduit chez Beaulieu par l’usage de signes marginaux de son cru, qui indiquent le début des répétitions musicales (« 2. », bis), et de signes indiquant au contraire soit un chant alterné d’une « voix » sur l’autre (une possibilité de dialogue), soit une limitation des répétitions (« 1. », un avertissement de ne pas redoubler le vers, en somme). Il s’agit d’une expérimentation, qui témoigne d’une marque d’intérêt pour son lectorat moins averti, et c’est chose rare, en soi. La chanson 125 sur le chant « Bon jour, bon an et bonne estreine » porte par exemple la mention marginale « Monologue chrestien », ce qui indique clairement d’une part la voix poétique générale (comme « L’eglise (ou l’ame fidele) recite ceste chanson », chanson 128), en même temps que les sections bissées sont soigneusement matérialisées par un chiffre « 2. ». Ailleurs, des possibilités de dialogue apparaissent (« Chante aussi ceste [chanson] par deux si tu veux », chansons 99, 100 par exemple, avec usage des chiffres « 1. » et « 2. »). Beaulieu invente ici la didascalie à l’usage de ses lecteurs comme le ferait un metteur en scène. Si l’on imagine Beaulieu en musicien d’église, il est évident que faire chanter l’assemblée lui apparaît comme le métier, sinon la prérogative du musicien, comme le pensait aussi Loys Bourgeois, en purs techniciens, l’un et l’autre peu conscients d’ailleurs que sur ce terrain ils peuvent se trouver en conflit avec l’institution, pour qui le musicien est parfois un prestataire comme un autre. L’auditoire, transformé par ces signes dans ce recueil en auditoire actif et chantant, est traité comme tel, il est « agi », il est conduit, tel semble du moins être le projet.
Ces annotations de Beaulieu n’ont pas de postérité immédiate : comme le système à points de Davantès, il s’agit de traces d’un brillant esprit pédagogique réformé, issues du milieu musical, mais qui semblaient destinées à l’oubli provisoire, en dépit de l’intérêt que nous pouvons leur trouver aujourd’hui.
Le réseau musical de la Chrestienne resjouyssance
Les travaux de Harvitt, Pegg, Bridgman, ou Honegger brossent le portait biographique, psychologique, littéraire, musical et chrétien de Beaulieu. Pour rendre compte de l’inscription de Beaulieu musicien dans son temps, on peut encore affiner la description de son réseau relationnel et de ses sources d’inspiration : les chansons qu’il a parodiées, dont on a bien perçu la double provenance, imprimée et polyphonique pour une part, mais aussi orale et jamais notée d’autre part, dressent une géographie et une chronologie singulières. Fantômes de cette publication, puisqu’elles sont simplement mentionnées, elles constituent pourtant un décor de fond qui aide à mieux percevoir l’homme.
Car même dans le cadre de la chanson spirituelle d’inspiration réformée, dans lequel on tend à l’inscrire le plus souvent, Beaulieu semble extravagant : Marc Honegger signale à raison que ses textes n’ont pas fait souche, ne se sont pas trouvés inscrits dans la généalogie principale de ces chansonniers « huguenots ». En effet ces recueils publiés à Genève à partir des années 1532-33 se révèlent interdépendants. Ils se reprennent et s’augmentent mutuellement, le plus souvent en variant l’air proposé pour chanter un même texte, comme une simple remise au goût du jour musical, la « lettre » tendant à se cristalliser plus nettement. Or il est vrai que si Beaulieu emprunte les mêmes airs au même moment – la définition stricte d’un air à la mode –, en revanche deux constats s’imposent : ses paroles n’ont pas été reprises, et pour la majorité des airs qu’il a choisis, il est le premier ou le seul à le faire dans le milieu réformé15. Si l’on le mesure au cadre de la chanson spirituelle, le musicien Beaulieu est tout aussi excentré et atypique que le laissent entrevoir les différentes études qui lui ont été consacrées.
Pour autant, la Chrestienne resjouyssance montre un musicien parfaitement intégré dans les autres milieux musicaux qui manient cette technique de parodie, de recyclage d’airs favoris, dans les milieux « parodistes », au fond. Elle laisse aussi entrevoir un homme sensible à la poésie, avec un regard parfois antiquaire comme on le verra, et enfin, un parodiste fondamentalement lyonnais, ou du moins particulièrement inspiré par les musiques et les textes qui circulaient à Lyon, et qu’il a pu notamment mieux connaître lors de son séjour entre 1533 et 1537. C’est au travers des musiques qu’il annonce emprunter que nous pouvons aujourd’hui en juger.
La Chrestienne resjouyssance et les contemporains poètes et musiciens
Il faut d’emblée excepter de l’enquête les chansons par lui inventées de toutes part, texte et musique, et qui constituent une partie de la section centrale16.
Les chansons utilisées dans la Chrestienne resjouyssance s’appuyaient, pour les plus célèbres, sur des poèmes signés. Dans la section initiale qui compte 101 chansons-sources, l’Odhecaton de Beaulieu en somme17, le poète principal est Clément Marot. Dans la section centrale (102-140), Eustorg de Beaulieu lui-même. Mais globalement, à partir du caveat sur les chansons restantes en « mauvaise mesure poétique » (130), on ne trouve pratiquement plus aucun poème d’auteur.
Ce sont ainsi, dissimulés derrière la parodie, 48 poèmes signés dans leur version d’origine, de Bonaventure des Périers18 à François Ier19 en passant par Marguerite d’Orléans20 et…Vasquin Philieul21. Ce dernier cas illustre bien toutes les complexités de l’enquête : tôt dans le siècle, Vasquin Philieul a transposé en français la poésie de Pétrarque et cette pièce est la démarcation de « Ite calde sospiri » (RVF, 153). Dès 1548, on disposait dans son recueil Laure d’Avignon (Paris : Jacques Gazeau, 1548) des sonnets « in vita di Madonna Laura » dont Ite caldi sospiri fait partie. Beaulieu connaissait donc le poème avant la publication de 154822. Mais il y a mieux : la chanson « Allez souspirs » dont Beaulieu substitue le texte d’origine – donc celui de Philieul – s’inspire fortement d’une traduction mise en musique de 1530. Cette dernière avait été publiée sans nom de compositeur chez l’imprimeur parisien Attaingnant23. Ce quatrain chanté qui inspire Philieul était donc connu au plus tard en 1530. Outre ce détail d’histoire littéraire, on découvre par les textes démarqués, trouvés dans les chansons-support, une orientation poétique assez sûre chez Beaulieu.
De Clément Marot l’on compte 31 poèmes, soit la majorité des poèmes attribués, disponibles dès 153224, et souvent avant dans leurs versions musicales. Mais on n’ignore pas que Marot a également été diffusé en recueils paroliers, où ses poèmes côtoient un vaste ensemble de vers à chanter, qui pour la plupart ne prétendent pas à l’art poétique. Il y a donc plusieurs façons pour Beaulieu de s’intéresser à Marot, par les éditions de poésie d’abord, par les éditions musicales ensuite – l’aspect le plus attendu, et enfin par la circulation dans ces carnets à chanter, la circulation marotique la moins connue, précisément ces recueils paroliers où figurent aussi des chansons de « moindre mesure poétique », utilisées plus loin par Beaulieu. La chanson 37 (« Qui la vouldra, fault premier que je meure ») nous apporte un éclairage oblique : c’est la seule des chansons de Marot qu’on ne puisse pas trouver dans un parolier, notamment pas dans l’édition célèbre de 153825. La circulation musicale de cette chanson de Marot avant la Chrestienne resjouyssance remonte à 153226, c’est-à-dire l’année même de publication de l’Adolescence clementine, où elle ne figure pourtant pas encore. La leçon de Beaulieu est bien « Qui la vouldra souhaite que je meure », c’est-à-dire non celle de l’édition de 1538 de l’Adolescence clementine, mais celle du manuscrit de Chantilly27… et avant tout, celle de la partition de Sermisy en 1532.
Il faut revenir sans doute sur ce recueil parolier de 1538 : Toutes les chansons de Marot présentes dans la Chrestienne resjouyssance (sauf le n° 37 donc) sont issues aussi de ce recueil. La plupart d’entre elles ont été mises en musique avant, et beaucoup dès les années 1520. Ce n’est pas étonnant : Brian Jeffery montre que dans les années 1530 les recueils paroliers commencent à s’appuyer plutôt sur des imprimés de musique dont ils se contentent, à partir de 153528, de prélever simplement les paroles. Avant cette date, ils comportaient aussi des chansons de transmission orale, en plus grand nombre. Un tournant se produit donc avec les premières éditions musicales parisiennes de 1528, puis les recueils chansonniers notamment à partir de 1535. Pour « Martin menoit son pourceau au marché » (n° 125), qui arrive dans le parolier de 1535, il y est manifestement copié d’après la récente partition de 1534. Mais il ne sera plus jamais bienvenu dans les paroliers, et se trouve, lui seul, expurgé des grands paroliers successifs. Il ne figure donc pas dans le parolier de 1538, mais en revanche la version polyphonique de Janequin29 a été rééditée par Jacques Moderne à Lyon quelques années avant la Chrestienne resjouyssance, en 1540. C’est peut-être par là que Beaulieu a choisi de compléter son hommage à Marot, bien qu’à cette date il ait quitté Lyon. Chose curieuse cependant, son pastiche de « Martin » est placé en section II, proposé comme nouveau texte à placer sur sa propre version musicale (perdue), n° 125. Et de fait, les paroles proposées pour le pastiche spirituel n°125 ne peuvent en aucun cas s’appliquer à la version musicale « Attaingnant/Janequin » la plus connue. Elles s’appliquent mieux à la version Sermisy, mais Beaulieu avait manifestement réécrit une version personnelle.
Chrestienne resjouyssance et poésie ancienne
Beaulieu rend aussi hommage, toujours par le biais des partitions, au père de Clément Marot, Jean Marot30. Si « A tout jamais d’un vouloir immuable » est bien présent dans les paroliers du début du siècle, comme témoin tardif de la gloire des derniers grands rhétoriqueurs et du père du poète officiel de la cour de François Ier, le deuxième, « Mort ou mercy en languissant j’attendz », n’est alors connu que par une édition musicale savante lyonnaise de 1538, chez Jacques Moderne31. Malgré son absence des paroliers populaires, le texte lui-même avait suscité l’intérêt du compositeur Villiers, peut-être après l’édition poétique récente des œuvres de Jean Marot (1536).
Ces deux premières pièces sont des rondeaux, forme tardive, en 1546, pour la musique, et plus encore pour la poésie. Beaulieu opère d’une façon étonnante : pour la première (son n° 29), fondée sur un rondeau cinquain, il gomme entièrement les refrains musicaux que l’on pouvait encore chanter intégralement à la fin du xve siècle. De fait, dans la version musicale de 1520 (chez Andrea Antico), ce rondeau se prête à une interprétation strophique, sans répétition musicale, donc sans trace de refrains ou rentrements. C’est sans doute celle-ci qu’entend utiliser Beaulieu. Seule la croisure des rimes, aabba, permet encore d’y déceler la structure d’une première strophe de rondeau.
Parmi les pièces les plus anciennes toujours, deux sont conservées dans le chansonnier de Rohan32, daté du dernier quart du xve siècle, encore un rondeau (n°111) : « Cent mille ecus », et le refrain « Las mon amy le souvenir de vous me tue » de la chanson très populaire, « Mon ami n’a plus que faire » (n° 82). Les deux textes ont connu des mises en musique précoces, notamment manuscrites du premier quart du xvie siècle, et une circulation en paroliers jusqu’en 1535 pour la première. On peut penser que c’est ce qui la désigne comme bon support de parodie aux yeux de Beaulieu.
Le n° 65 (« J’ai demouré seulle esgarée ») est connu depuis l’édition très précoce du Jardin de Plaisance (Paris : Antoine Vérard, 1502), et fait figure de remarquable souvenir d’une période poétique antérieure. Sa fortune musicale manuscrite puis imprimée est immense. Beaulieu semble avoir trouvé là une de ses plus anciennes sources d’inspiration, musique et poésie réunies. De même pour une autre édition gothique de Vérard, La Chasse et le Départ d’amour (1509), au n° 81 (« Qui la dira la peine de mon cœur »). Les premières éditions musicales de cette chanson datent de 1501 (Petrucci). Mais là encore, il est possible que Beaulieu soit plus familier non des partitions fort anciennes, mais de l’air de ces chansons, en ce qu’il servait de timbre encore dans les années 1530 et notamment à Lyon, pour des noëls33. Ce serait donc plus par l’actualisation auditive de ces chansons dans le milieu lyonnais, notamment par le biais des parodies des noëllistes, que par une connaissance approfondie des chansons polyphoniques anciennes que Beaulieu aurait été inspiré.
Poèmes signés, musique d’auteur ?
Si l’on fait l’hypothèse que Beaulieu montre, dans le choix de ses chansons-support, un goût pour la haute musique et pour la haute poésie, on voit que les raisons de l’affirmer s’amenuisent pourtant avec l’examen détaillé. Certains modes de circulation semblent plus évidemment proches de la réalité sonore de Beaulieu que les sources plus anciennes, plus vénérables… et inaccessibles. En musique aussi, il existe un mur entre les générations selon qu’elles ont ou non connu la diffusion imprimée.
Ainsi, si le nom de Sermisy se détache pour un cinquième des pièces (35 chansons), c’est certainement que Clément Marot y est associé. Or Sermisy en a été l’un des arrangeurs musicaux les plus efficaces. Il faut entendre ici l’efficace d’une technique musicale beaucoup plus simple et accessible que celle de Janequin. Sermisy est le maître de chapelle de la cour de Louis XII à François II, c’est ainsi un homme de métier qui fait chanter quotidiennement de grandes quantités de répertoire, et pour qui l’écriture musicale simple et performante n’a nécessairement plus de secrets. L’alliance du poète Clément Marot et du musicien Claudin de Sermisy possède donc fondamentalement des vertus propices au succès populaire : robustesse des constructions, clarté, facilité de mémorisation, réalisations musicales portées à un bon niveau de systématisme, peu surprenantes mais d’un charme exquis, donc séduisantes. Le nom de Sermisy est le seul qui se détache véritablement de notre corpus.
Recueils collectifs de vers à chanter et de musique
Il faut donc s’intéresser aux circulations plus légères de la musique et de la poésie. Non plus seulement les grandes collections de musique savante, ou les anthologies poétiques ou monographies d’auteurs, mais plutôt les répertoires des paroliers, et les airs utilisés par d’autres parodistes. Le début du xvie siècle voit naître ces paroliers, sorte de guide-chants pratiques qui permettent de chanter sans lire la musique, devenus si communs ensuite. Leur répertoire dépasse largement celui des chansons savantes, et l’on y trouve beaucoup des chansons dont Beaulieu propose des réécritures.
Nous avons pu observer la relation de Beaulieu avec Clément Marot, mais plutôt avec « le poète du parolier de 1538 », à l’exclusion d’autres sources. On peut aussi observer d’intéressants recoupements : 46 pièces sont directement accessibles dans le grand parolier de 1535. En élargissant la perspective, plus de 107 pièces de la Chrestienne resjouyssance sont, à notre connaissance, transmises par les paroliers. Un de ces paroliers a été imprimé à Lyon en 1534, chez Claude Nourry. Il présente 16 chansons en commun avec la Chrestienne resjouyssance34.
Si Beaulieu ne s’est pas inspiré des travaux de ses futurs coreligionnaires dans le domaine de la chanson spirituelle, ni ne les a inspirés en retour, en revanche il travaille semble-t-il de la même manière (et dans la même grande mouvance des paroliers imprimés) que nombre de noëllistes, les noëls constituant l’autre grand corpus en matière de parodies textuelles à son époque. C’est ainsi qu’il partage avec eux des airs particulièrement employés dans ce domaine, au moins 55, dont les 28 plus populaires35. Parmi ces airs favoris de noëls, 23 ont même donné lieu à plusieurs noëls à succès distincts, au cours du xvie siècle, ce qui est relativement rare. Ces airs sont donc de grands succès populaires. 7 sont d’ailleurs, à l’origine, tirés des airs de chansons de Marot/Sermisy. Si l’on se réfère aux seules chansons d’origine de la Chrestienne resjouyssance qui nous sont connues (128), les airs utilisés aussi pour des noëls en représentent donc plus du tiers, presque la moitié. Et c’est bien ce qui doit étonner plus encore, au regard du peu de points communs entre la Chrestienne resjouyssance et la chanson spirituelle imprimée à Genève depuis les années 1530. Beaulieu semble plus immédiatement s’inscrire dans la tradition des noëllistes français, cela se vérifie notamment par la communauté de mémoire musicale partagée.
Anthologies polyphoniques
L’idée que Beaulieu ait pu mettre en scène sa propre « mémoire musicale » en l’aidant un peu de sources textuelles imprimées au moment de la collation du recueil se précise ainsi, au regard de certains corpus, de certains recueils. Si l’on tente de vérifier de quelle manière il a pu s’appuyer sur des musiques existantes en recueil, cette fois, les constats sont moins tranchés, à une exception près. La musique imprimée par Attaingnant dès 1528 constitue l’une des plus importantes sources de musique notée disponible36. Avec le développement de l’imprimerie à Lyon, et notamment l’officine de Jacques Moderne, d’autres partitions circuleront, plus largement. Mais Jacques Moderne n’édite pas, tant s’en faut, que des musiques originales, et nombre des publications d’Attaingnant sont reprises à Lyon dans les années 1530, où Beaulieu a pu en prendre connaissance.
Dans le domaine de la musique manuscrite, à la circulation infiniment moins commune, le tableau change un peu : la Chrestienne resjouyssance partage 10 à 17 chansons avec les quelques manuscrits auxquels elle est le plus étroitement liée37. L’un d’entre eux en particulier, le manuscrit 1848 de Copenhague, présente 19 concordances avec la Chrestienne resjouyssance38. Ces manuscrits définissent un périmètre de chanson légère française, mais depuis l’étude de Christoffersen, on sait que le ms. 1848 est un manuscrit de Lyon, datant des années 153039.
Lyon
La question de l’inspiration musicale de Beaulieu, même en l’absence de notation musicale, semble donc se resserrer sur Lyon. Pour certaines pièces du ms. 1848, ce manuscrit lyonnais représente même une des meilleures sources : notamment pour la chanson 80, « Mon père m’a donné mari »40, une chanson du début du siècle, peu imprimée, jamais en France, mais diffusée en revanche par des sources manuscrites illustrant bien le tropisme Lyon/Suisse d’une audience discrète. Il existe plusieurs chansons de mal mariée presque similaires, datant de la même époque, mais on les distingue relativement bien. Celle-ci n’a pas encore été retrouvée dans le moindre parolier populaire. Sa diffusion repose donc probablement, du temps de Beaulieu, uniquement sur la musique (ou plutôt simplement l’air) de cette chanson, qui est caractérisée par une parcimonie imprimée avérée, ou sur les noëls qui ont pu la populariser – mais sans notation musicale. Cette modeste chanson en devient donc un indice supplémentaire en faveur d’une imprégnation auditive toute lyonnaise.
Beaulieu, dans sa période lyonnaise a pu lire des chansons polyphoniques notamment reprises récemment par Moderne41. Il a pu se trouver proche du manuscrit 1848 de Copenhague. Il a sans doute fréquenté, plus précisément, les éditeurs musicaux de Moderne, certainement Layolle42, et Villiers43. Certains imprimeurs vénitiens ont pu reprendre des répertoires qui circulaient à Lyon, à la faveur des nombreux échanges qui liaient de fait Lyon et l’Italie44.
Mais Beaulieu a aussi pu puiser directement à certains paroliers ou recueils de noëls, toujours des recueils de textes pour chanter, précisément publiés à Lyon dans les années 1530 : c’est ainsi que le réseau de concordances montre 16 airs cités dans le recueil lyonnais de chansons publié par Claude Nourry en 153445. C’est donc par plusieurs biais que l’on peut rattacher les parodies de la Chrestienne resjouyssance à des sources lyonnaises, lorsqu’on prend soin d’observer à la fois le tissu musical et les circulations textuelles de pièces qui se chantaient sur ces airs, et qui circulaient à Lyon, comme les noëls en particulier. Ainsi des Bourguignons, grand timbre de noëls s’il en est46. Ce sont, en tout, quelque 62 pièces au moins, que ce soit au titre des paroles ou des musiques ou même de l’usage des timbres à Lyon pour les noëls.
Beaulieu parodiste solitaire
Eustorg de Beaulieu semble donc bien inséré dans le milieu lyonnais et une culture musicale datant plutôt des années 1530, plutôt comparable, dans son métier de parodiste, à un noëlliste de cette époque. Ses difficultés semble-t-il constantes à se faire éditer peuvent expliquer la chronologie curieuse de la Chrestienne resjouyssance, dans les faits potentiellement prête en 153847, à un moment où se développe par ailleurs, à Genève, un corpus de chansons spirituelles qui lui tourne le dos. Le personnage se conçoit mieux dans le milieu de la culture populaire chrétienne du début de la décennie en France, en somme.
C’est amplement souligner ici, après d’autres, le peu de rayonnement de la Chrestienne resjouyssance, et plus généralement l’insuccès suisse de Beaulieu, dans ses publications de psaumes, dans ses propositions de chansons spirituelles, et plus généralement dans sa carrière.
Mais dans une proportion intéressante, en déplaçant la perspective, on s’aperçoit que Beaulieu a réussi à initier un mouvement de timbres à partir de la Chrestienne resjouyssance. Dans 13 cas, la Chrestienne resjouyssance est la première ou la seule anthologie à faire de ces chansons des airs, des « timbres »48. Ces airs sont donc à la fois attestés musicalement et partagés, il revient à Eustorg de Beaulieu d’en avoir le premier fait l’essai.
L’art du parodiste
Pour rendre compte enfin de l’art de Beaulieu en matière de textes de substitution, il n’y a pas d’autre solution que de confronter les sources musicales, lorsqu’elles sont disponibles, avec ses vers. Mais restituer à l’écrit une pratique de parodie essentiellement orale, c’est prendre le risque de créer une « partition » d’un objet qui n’a sans doute jamais existé : entre les versions savantes où l’on relève les mélodies, et le fredon qu’on en peut faire, il y a tout un monde de possibilités. Ainsi Beaulieu cherchant ses rimes, avec à l’esprit un air connu, n’en chantait peut-être pas toutes les notes, ni sans doute exactement les mêmes que celles qui sont imprimées dans des partitions polyphoniques de l’époque. Pourtant, les superpositions des versions textuelles et musicales sont très instructives, et deux exemples peuvent illustrer le talent particulier de Beaulieu, celui de parodiste.
Le premier, « J’attends secours », est une chanson de registre élevé, dont presque aucun mot de la première strophe ne nécessite de transformation.
Sur la partie supérieure de la chanson originelle de Sermisy49, la versification de Beaulieu se coule sans difficultés. La chanson amoureuse d’origine (Marot) possède une première strophe à l’expression réservée, facile à transposer sur le plan spirituel sans trop la retoucher :
Pour la seconde, le travail de Beaulieu est plus soutenu :
Cette reconstitution utilise la partie supérieure de la chanson « Alles souspirs », de Sermisy (RISM 1530/3) sur le texte de Vasquin Philieul, traduit de Pétrarque. La chanson 57 de la Chrestienne resjouyssance « O Sainct Esprit » s’adapte parfaitement à la partition. Les musiciens remarqueront dans l’original le petit signe de congruence au début du dernier vers « Fay nous prier »50, pour le faire chanter deux fois, et la coïncidence avec la didascalie « 2. » chez Beaulieu (p. 44). Le soin de Beaulieu relativement à la parodie est donc très grand, tourné vers l’exécution musicale et sa notation, qu’il maîtrise parfaitement51. Mais, comme la plupart des parodistes, les strophes suivantes sont écrites avec une trop grande confiance, et perdent certaines de leurs vertus métriques ou sonores : ici, les vers 3 des strophes 2 et 3 (« Lequel pria », « Et qu’en Enfer ») sont musicalement hypométriques. La mesure 14 est peu adaptable, car elle est destinée impérativement au chant d’une syllabe féminine de milieu de vers, ici « numéraire » en musique, c’est-à-dire à chanter sur deux notes, comme « pri-è-re », dispositif que l’on ne trouve pas aux strophes 2 et 3 chez Beaulieu. Ce désagrément notable de la mesure 14 indique avec certitude que le poète travaille les strophes supplémentaires à la table, probablement sans chanter. La réussite du vers 3 de la première strophe montre au contraire un travail poétique chanté, c’est-à-dire effectivement contrôlé vocalement par Beaulieu, avec pour résultat une mise en place irréprochable.
L’assemblage réalisé par Eustorg de Beaulieu pour son fort recueil de chansons de propagande laisse apparaître, par la filiation et l’identification des airs, tout d’abord un net ancrage local à Lyon, par le choix des imprimeurs, des sources textuelles des paroliers, des compositeurs, et même de la circulation lyonnaise des airs qu’ils partagent. Au-delà de cet ancrage lyonnais, on remarque que Beaulieu choisit des airs qui ont en général largement circulé. On peut penser qu’ils faisaient effectivement partie de sa propre culture musicale mémorisée, comme l’annonce la préface. Il a ensuite sans doute complété son choix de parodies, éventuellement en puisant directement dans de grands recueils paroliers qui semblent le soutenir fortement, notamment les deux principaux, des années 1534 et 1535. Enfin, Beaulieu installe la notion de timbres pour 13 nouvelles pièces, dont 4 dans la section II, c’est-à-dire qu’il prétend à la fois composer une nouvelle pièce (section II) et estimer qu’elle sera suffisamment popularisée pour être reprise. Pour ces 13 chansons, le pari est partiellement tenu : elles ont une postérité en musique savante. Mais l’on peut se demander, puisque les chansons 102 à 140 n’étaient pas même parues au moment de la constitution du recueil, quelle est la part de la conviction et de l’emballement, voire de l’exagération dont a pu faire preuve Beaulieu. Car en dépit d’une réalisation très soignée, faute de musiques bien mémorisées, ou trop nouvelles, le fonctionnement de la parodie n’est pas assuré.
Enfin le choix d’un timbre appelé à une immense fortune dans le domaine des noëls, le n°15052, devenu chez Beaulieu « Il est huy bon jour de fête/Non et non dit le Prophète » suggère, au-delà d’une lutte contre les chansons lascives, bien autre chose : on pourrait y voir aussi, ou plutôt, une réaction contre les premiers usages de cet air fameux « Il est jour dit l’alouette », c’est-à-dire les parodies qui en sont faites dans les noëls, sous la plume des noëllistes catholiques. Sous cet angle, la corrélation fréquente observée entre les airs de noëls et ceux de la Chrestienne resjouyssance représenterait moins l’expression d’un patrimoine sonore commun, que celle d’une lutte « timbre à timbre », « air à air », dans un souci de combat musical que seul l’examen précis de ces airs permet de révéler. Ce phénomène d’iconoclasme musical, peut-être ici dans une phase précoce, trouve plus tard dans le siècle de vigoureuses illustrations avec les recueils de chants catholiques sur timbre, ceux de Pierre Doré (1549), d’Artus Désiré (1561 ?) et de Christophe de Bordeaux (1581). Ces pamphlétaires combattent à leur tour timbre à timbre les chansons du chansonnier huguenot cher à Henri Léonard Bordier, et constituent par là même un hommage, en creux, à la puissance que ces paroliers, et la Chrestienne resjouyssance, tirent de cette pratique parodique réformée fondée sur un « chant commun ».
ANNEXE 1
AIRS DE LA CHRESTIENNE RESJOUYSSANCE
Changeons propos c’est trop chanté d’amour | 1 | noël |
En faict d’amour beau parler n’a plus lieu | 2 | |
Puis qu’en amour a si beau passetemps | 3 | noël |
D’estre amoureux jamais je ne fus las | 4 | |
D’amour me va tout au rebours | 5 | |
De bien aymer les Dames je ne blasme | 6 | |
De tant aymer mon cœur s’abuseroit | 7 | |
Un grand plaisir Cupido me donna | 8 | |
Vray Dieu qu’amoureux ont de peyne | 9 | |
J’ayme le cœur de m’amye | 10 | |
Secourez moy ma dame par amours | 11 | noël |
Quand vous vouldrez faire une amye | 12 | noël |
J’ay grand desir / D’avoir plaisir / D’amour mondayne | 13 | |
Le jaulne et bleuf sont les colleurs | 14 | |
Gris et tané me fault porter | 15 | |
Las je me plaings mauldicte soit fortune | 16 | |
Le content est riche en ce monde | 17 | |
Mauldicte soit la mondaine richesse | 18 | |
Ma dame ne m’a pas vendu | 19 | |
O cruaulté logée en grand beaulté | 20 | |
C’est une dure despartie | 21 | noël |
J’attendz secours de ma seulle pensée | 22 | |
Dieu gard ma maistresse et regente | 23 | noël |
Long temps y a que je vy en espoir | 24 | |
De retourner mon amy je te prie | 25 | |
Si je vy en peyne et langueur | 26 | |
En attendant le languir me tormente | 27 | |
Par ton regard tu me fais esperer | 28 | noël |
A tout jamais d’un vouloir immuable | 29 | noël |
Est il conclud par un arrest d’amours | 30 | noël |
Au pres de vous secretement demeure | 31 | |
Content desir qui cause ma dolleur | 32 | noël |
Vivre ne puis content sans sa presence | 33 | |
Las voulez vous qu’une personne chante | 34 | |
J’ay trop aymé vrayment je le confesse | 35 | noël |
J’ay faict pour vous cent mille pas | 36 | |
Qui la vouldra souhaite que je meure | 37 | |
Languir me fais sans t’avoir offencée | 38 | |
Mort ou mercy en languissant j’attendz | 39 | |
Tristes pensers à mes yeulx donnez tresve | 40 | |
Plaisir n’ay plus mais vy en desconfort | 41 | noël |
Le cœur est mien qui oncques ne fut prins | 42 | noël |
Je me plainctz fort amours m’ont rué jus | 43 | noël |
Pour avoir faict au gré de mon amy | 44 | |
Si par souffrir on peult vaincre fortune | 45 | |
Quand j’ay pensé en vous ma bien aymée | 46 | |
Qui veult avoir liesse | 47 | |
Je suis aymé de la plus belle | 48 | |
J’ay contenté / Ma volunté | 49 | |
Je ne fay rien que requerir | 50 | |
D’un nouveau dard je suis frappé | 51 | |
Hellas que vous a faict mon cœur | 52 | noël |
Il me souffit de tous mes maulx | 53 | noël |
De mon tres triste desplaisir | 54 | noël |
Le cœur est bon et le vouloir aussi | 55 | |
Le cœur de vous ma presence desire | 56 | |
Allez souspirs enflammez au froigt cœur | 57 | |
Ta bonne grace et maintien gracieux | 58 | |
En contemplant la beaulté de m’amye | 59 | noël |
Je n’avois pas à bien choisir failly | 60 | |
Je ne me puis tenir pour chose que l’on die | 61 | |
Jouyssance vous donneray | 62 | noël |
Qui veult entrer en grace | 63 | |
N’aurez vous pas de moy pitié | 64 | |
J’ay demouré seulle esgarée | 65 | noël |
Fortune laisse moy la vie | 66 | |
Femme qui tant souvent babille | 67 | |
Faict ou failly ou du tout rien qui vaille | 68 | |
C’est boucaner de se tenir à une | 69 | noël |
Ces fascheux sotz qui mesdisent d’aymer | 70 | noël |
C’est à grand tort que <moy> paouvreté endure | 71 | |
Si j’ay eu du mal ou du bien | 72 | |
L’amitié fut bien commencée | 73 | |
Amour au cœur me poingt | 74 | |
Amy souffrez que je vous ayme | 75 | noël |
Si j’ayme mon amy | 76 | noël |
Vostre cul verd couvert de verd | 77 | |
En entrant en un jardin | 78 | |
Ma chere Dame ayez de moy mercy | 79 | |
Mon pere m’a donné mary | 80 | noël |
Qui la dira la peine de mon cœur | 81 | noël |
Mon amy n’a plus que faire | 82 | noël |
N’aymez jamais une villaine | 83 | |
N’aymez jamais ces gens de court | 84 | |
Mauldict soit le petit chien | 85 | noël |
Je vais je vien mon cœur s’en vole | 86 | noël |
Las à qui dira sa pensée / La fille qui n’a point d’amy | 87 | noël |
D’où vient cella belle je vous supply | 88 | noël |
Tant que vivray en eage flourissant | 89 | noël |
Je ne sçay pas comment | 90 | noël |
Faulte d’argent c’est dolleur non pareille | 91 | noël |
M’amye m’a cousté cent livres | 92 | noël |
Ein ougenblitz / Bringt offt das glulz [sur une Allemande] | 93 | |
Herz lieb was han ich dier gethan [sur une Allemande] | 94 | |
Les Bourguignons meirent le camp devant la ville de Peronne | 95 | noël |
Nous servirons le roy | 96 | |
J’ay un Cyron sur la mothe | 97 | noël |
Brunette joliette / Vous me faictes mourir | 98 | |
Resjouyssez vous bourgeoises / Belles filles de Lyon | 99 | noël |
Touchez nous l’antiquaille / Et nous la danserons | 100 | |
A Dieu la bonne chere | 101 | |
Le temps n’est plus tel comme il souloit estre | 102 | |
Mondain sejour j’ay perdu ta presence | 103 | |
Si de mon cœur malheur a la regence | 104 | |
Fy de Venus et de son passetemps | 105 | |
Allez fascheux envieux plein d’audace | 106 | |
Puis que t’en vas ne sçay où je m’applique | 107 | |
Les envieux ne leurs motz si cuisans | 108 | |
Contre raison vous m’estes fort estrange | 109 | |
Quand tu vouldras ton humble serf changer | 110 | |
Cent mille escus quand je vouldroye | 111 | |
Plaisant Bordeaulx noble et royal domaine | 112 | |
Si mon malheur me continue | 113 | noël |
C’est assez dict je vous entendz ma dame | 114 | |
Qu’en dictez vous : ferez vous rien / De ce dont tant vous ay requise | 115 | |
On dict que c’est un grand sollas | 116 | |
Resveillez vous Dame nature | 117 | |
Morir convient / Souvent advient | 118 | |
Trop endurer me faict m’amye | 119 | |
Entre nous bons pellerins | 120 | |
Vivray je tousjours en soucy | 121 | noël |
C’est tout pour vous Dame musique | 122 | |
Martin menoit son porceau au marché | 123 | |
Voicy le bon temps/Que chascun s’apreste | 124 | |
Bon jour bon an et bonne estreine | 125 | |
La rosée du moys de may | 126 | |
L’aultre jour m’alloye esbattre | 127 | |
Seulle suis demourée / Sans secours ne demy | 128 | |
Sus debout beuvons d’autant | 129 | |
O Hermite sainct Hermite | 130 | noël |
Und weller vil hellenden | 131 | |
Miserere mei Diu [sur le chant d’une Rouergasse] | 132 | |
Paix là sus ho là paix là | 133 | |
Vella bon / Faictes ailleurs ce sermon / Vella bon | 134 | |
Te remues tu / Te remues tu gentil fillete | 135 | noël |
Vire vire Jehan vire Jehan Jehannete | 136 | noël |
Vous mocquez vous monsieur de moy | 137 | |
Jehan fournier four cy four là | 138 | |
Vous me rendrez mon Carolus / Ma belle jeune fille | 139 | noël |
Marie en Bethlehem s’en va [un noël de jadis] | 140 | noël |
[sur une Allemande] | 141 | |
S’on m’a donné le bruit et renommée | 142 | noël |
Je ne sçay comment je pourrois avoir marrisson | 143 | noël |
Or vien ça vien m’amye Perrete | 144 | |
Nous vinsmes à la feste / Avec la Tourolora ra ra ra | 145 | noël |
Il m’est advis que les amoureux / Ont meilleurs temps que | 146 | |
Piscatore [une italienne] | 147 | |
Io te faro portar le corne | 148 | |
Et d’en bon jour / Et d’où venez vous | 149 | noël |
Il est jour dict l’alouete | 150 | noël |
Venez venez venez y toutes | 151 | noël |
Dansez saultez Damoyselles / Dansez | 152 | |
Dictes que c’est du mal m’amye / Dicte s que c’est du mal des dentz | 153 | |
Bourriquet bourriquet | 154 | noël |
Ribon ribaine / Tout en despit de moy | 155 | noël |
Sansonnet / Buissonnet / Las que devint mon cotillonnet | 156 | noël |
Hellas que j’auray d’ennuy / Si le temps que je voy me dure dure | 157 | |
C’en devant derriere / Nous voulions passez les montz / C’en dessus dessoubz | 158 | noël |
Jamais n’aymeray maçon | 159 | |
Laudate dominum | 160 |
ANNEXE 2
AIRS DE LA CHRESTIENNE RESJOUYSSANCE, ORDRE ALPHABÉTIQUE
[sur une Allemande] | 141 | |
A Dieu la bonne chere | 101 | |
A tout jamais d’un vouloir immuable | 29 | noël |
Allez fascheux envieux plein d’audace | 106 | |
Allez souspirs enflammez au froigt cœur | 57 | |
Amour au cœur me poingt | 74 | |
Amy souffrez que je vous ayme | 75 | noël |
Au pres de vous secretement demeure | 31 | |
Bon jour bon an et bonne estreine | 125 | |
Bourriquet bourriquet | 154 | noël |
Brunette joliette / Vous me faictes mourir | 98 | |
C’en devant derriere / Nous voulions passez les montz / C’en dessus dessoubz | 158 | noël |
Cent mille escus quand je vouldroye | 111 | |
Ces fascheux sotz qui mesdisent d’aymer | 70 | noël |
C’est à grand tort que <moy> paouvreté endure | 71 | |
C’est assez dict je vous entendz ma dame | 114 | |
C’est boucaner de se tenir à une | 69 | noël |
C’est tout pour vous Dame musique | 122 | |
C’est une dure despartie | 21 | noël |
Changeons propos c’est trop chanté d’amour | 1 | noël |
Content desir qui cause ma dolleur | 32 | noël |
Contre raison vous m’estes fort estrange | 109 | |
D’amour me va tout au rebours | 5 | |
Dansez saultez Damoyselles / Dansez | 152 | |
De bien aymer les Dames je ne blasme | 6 | |
De mon tres triste desplaisir | 54 | noël |
De retourner mon amy je te prie | 25 | |
De tant aymer mon cœur s’abuseroit | 7 | |
D’estre amoureux jamais je ne fus las | 4 | |
Dictes que c’est du mal m’amye / Dictes que c’est du mal des dentz | 153 | |
Dieu gard ma maistresse et regente | 23 | noël |
D’où vient cella belle je vous supply | 88 | noël |
D’un nouveau dard je suis frappé | 51 | |
Ein ougenblitz / Bringt offt das glulz [sur une Allemande] | 93 | |
En attendant le languir me tormente | 27 | |
En contemplant la beaulté de m’amye | 59 | noël |
En entrant en un jardin | 78 | |
En faict d’amour beau parler n’a plus lieu | 2 | |
Entre nous bons pellerins | 120 | |
Est il conclud par un arrest d’amours | 30 | noël |
Et d’en bon jour / Et d’où venez vous | 149 | noël |
Faict ou failly ou du tout rien qui vaille | 68 | |
Faulte d’argent c’est dolleur non pareille | 91 | noël |
Femme qui tant souvent babille | 67 | |
Fortune laisse moy la vie | 66 | |
Fy de Venus et de son passetemps | 105 | |
Gris et tané me fault porter | 15 | |
Hellas que j’auray d’ennuy / Si le temps que je voy me dure dure | 157 | |
Hellas que vous a faict mon cœur | 52 | noël |
Herz lieb was han ich dier gethan [sur une Allemande] | 94 | |
Il est jour dict l’alouete | 150 | noël |
Il me souffit de tous mes maulx | 53 | noël |
Il m’est advis que les amoureux / Ont meilleurs temps que | 146 | |
Io te faro portar le corne | 148 | |
Jamais n’aymeray maçon | 159 | |
J’attendz secours de ma seulle pensée | 22 | |
J’ay contenté / Ma volunté | 49 | |
J’ay demouré seulle esgarée | 65 | noël |
J’ay faict pour vous cent mille pas | 36 | |
J’ay grand desir / D’avoir plaisir / D’amour mondayne | 13 | |
J’ay trop aymé vrayment je le confesse | 35 | noël |
J’ay un Cyron sur la mothe | 97 | noël |
J’ayme le cœur de m’amye | 10 | |
Je me plainctz fort amours m’ont rué jus | 43 | noël |
Je n’avois pas à bien choisir failly | 60 | |
Je ne fay rien que requerir | 50 | |
Je ne me puis tenir pour chose que l’on die | 61 | |
Je ne sçay commebnt je pourrois avoir marrisson | 143 | noël |
Je ne sçay pas comment | 90 | noël |
Je suis aymé de la plus belle | 48 | |
Je vais je vien mon cœur s’en vole | 86 | noël |
Jehan fournier four cy four là | 138 | |
Jouyssance vous donneray | 62 | noël |
La rosée du moys de May | 126 | |
L’amitié fut si bien commencée | 73 | |
Languir me fais sans t’avoir offencée | 38 | |
Las à qui dira sa pensée / La fille qui n’a point d’amy | 87 | noël |
Las je me plaings mauldicte soit fortune | 16 | |
Las voulez vous qu’une personne chante | 34 | |
Laudate dominum | 160 | |
L’aultre jour m’alloye esbattre | 127 | |
Le cœur de vous ma presence desire | 56 | |
Le cœur est bon et le vouloir aussi | 55 | |
Le cœur est mien qui oncques ne fut prins | 42 | noël |
Le content est riche en ce monde | 17 | |
Le jaulne et bleuf sont les colleurs | 14 | |
Le temps n’est plus tel comme il souloit estre | 102 | |
Les Bourguignons meirent le camp devant la ville de Peronne | 95 | noël |
Les envieux ne leurs motz si cuisans | 108 | |
Long temps y a que je vy en espoir | 24 | |
Ma chere Dame ayez de moy mercy | 79 | |
Ma dame ne m’a pas vendu | 19 | |
M’amye m’a cousté cent livres | 92 | noël |
Marie en Bethlehem s’en va [un noël de jadis] | 140 | noël |
Martin menoit son porceau au marché | 123 | |
Mauldict soit le petit chien | 85 | noël |
Mauldicte soit la mondaine richesse | 18 | |
Miserere mei Diu[sur le chant d’une Rouergasse] | 132 | |
Mon amy n’a plus que faire | 82 | noël |
Mon pere m’a donné mary | 80 | noël |
Mondain sejour j’ay perdu ta presence | 103 | |
Morir convient / Souvent advient | 118 | |
Mort ou mercy en languissant j’attendz | 39 | |
N’aurez vous pas de moy pitié | 64 | |
N’aymez jamais ces gens de court | 84 | |
N’aymez jamais une villaine | 83 | |
Nous servirons le roy | 96 | |
Nous vinsmes à la feste / Avec la Tourolora ra ra ra | 145 | noël |
O cruaulté logée en grand beaulté | 20 | |
O Hermite sainct Hermite | 130 | noël |
On dict que c’est un grand sollas | 116 | |
Or vien ça vien m’amye Perrete | 144 | |
Paix là sus ho là paix là | 133 | |
Par ton regard tu me fais esperer | 28 | noël |
Pisicatore [une italienne] | 147 | |
Plaisant Bordeaulx noble et royal domaine | 112 | |
Plaisir n’ay plus mais vy en desconfort | 41 | noël |
Pour avoir faict au gré de mon amy | 44 | |
Puis que t’en vas ne sçay où je m’applique | 107 | |
Puis qu’en amour a si beau passetemps | 3 | noël |
Quand j’ay pensé en vous ma bien aymée | 46 | |
Quand tu vouldras ton humble serf changer | 110 | |
Quand vous vouldrez faire une amye | 12 | noël |
Qu’en dictez vous : ferez vous rien / De ce dont tant vous ay requise | 115 | |
Qui la dira la peine de mon cœur | 81 | noël |
Qui la vouldra souhaite que je meure | 37 | |
Qui veult avoir liesse | 47 | |
Qui veult entrer en grace | 63 | |
Resjouyssez vous bourgeoises / Belles filles de Lyon | 99 | noël |
Resveillez vous Dame nature | 117 | |
Ribon ribaine / Tout en despit de moy | 155 | noël |
Sansonnet / Buissonnet / Las que devint mon cotillonnet | 156 | noël |
Secourez moy ma dame par amours | 11 | noël |
Seulle suis demourée / Sans secours ne demy | 128 | |
Si de mon cœur malheur a la regence | 104 | |
Si j’ay eu du mal ou du bien | 72 | |
Si j’ayme mon amy | 76 | noël |
Si je vy en peyne et langueur | 26 | |
Si mon malheur me continue | 113 | noël de 1538 |
Si par souffrir on peult vaincre fortune | 45 | |
S’on m’a donné le bruit et renommée | 142 | noël |
Sus debout beuvons d’autant | 129 | |
Ta bonne grace et maintien gracieux | 58 | |
Tant que vivray en eage flourissant | 89 | noël |
Te remues tu / Te remues tu gentil fillete | 135 | noël |
Touchez nous l’antiquaille / Et nous la danserons | 100 | |
Tristes pensers à mes yeulx donnez tresve | 40 | |
Trop endurer me faict m’amye | 119 | |
Un grand plaisir Cupido me donna | 8 | |
Und weller vil hellenden | 131 | |
Vella bon / Faictes ailleurs ce sermon / Vella bon | 134 | |
Venez venez venez y toutes | 151 | noël |
Vire vire Jehan vire Jehan Jehannete | 136 | noël |
Vivray je tousjours en soucy | 121 | noël |
Vivre ne puis content sans sa presence | 33 | |
Voicy le bon temps/Que chascun s’apreste | 124 | |
Vostre cul verd couvert de verd | 77 | |
Vous me rendrez mon Carolus / Ma belle jeune fille | 139 | noël |
Vous mocquez vous monsieur de moy | 137 | |
Vray Dieu qu’amoureux ont de peyne | 9 |
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1. Chrestienne resjouyssance, p. 90 : « L’autheur ».
2. L’usage musicien réserve le terme de contrafactum, ou de contrafacta, que l’on rencontre souvent ailleurs, à la réécriture de chansons sur des polyphonies, en partition. C’est ce que pratique et publie par exemple Simon Goulard à Genève. Seule la polyphonie était nommée à l’époque res facta, une « chose faite », une « fabrication », le fruit de l’art en somme. Ici on emploie avec le mot « parodie » la racine grecque dans son acception la plus littérale, para odè, un texte nouveau modelé « contre le chant », ou « le long du chant » existant, et sans aucune notion d’ironie ou de dérision.
3. Chrestienne resjouyssance, Epître, [6 v°-7 r°].
4. Palestrina, préface du premier livre de madrigaux spirituels, Il primo libro di madrigali a cinque voci, Venise : Gardane, 1581.
5. Ces chansons constituent progressivement une série cohérente, à partir des recueils publiés sans nom d’auteur, mais attribués à Mathieu Malingre dès 1532-1533. Dans son ouvrage Au chemin de salvation. La chanson spirituelle réformée, 1533-1678, Uppsala : Uppsala Universitet, 2005, Anne Ullberg écarte pourtant la Chrestienne resjouyssance de cette série, dont ni les textes ni les airs ne coïncident avec l’ouvrage de Beaulieu.
6. M. A. Pegg consacre à Beaulieu une biographie sans concession, en introduction de son édition critique des Divers rapportz. Eustorg de Beaulieu, Les Divers rapportz, éd. M. A. Pegg, Genève : Droz, 1964.
7. Marc Honegger, au contraire d’Anne Ullberg, l’inclut dans le corpus des « chansons populaires huguenotes ». Marc Honegger, « La chanson spirituelle populaire huguenote », Jahrbuch für Liturgik und Hymnologie 8 (1963), p. 129-136.
8. Chrestienne resjouyssance, [f5 v°], 90.
9. Beaulieu expose clairement ce qui distingue cette section des autres : dans cette section il met en musique un texte préexistant, qu’il vient d’écrire lui-même. Dans les autres sections, par conséquent, il fait une autre « lettre » sur un « chant » ou un « subject » existant, une polyphonie, ou un air existant. Dans un cas c’est le texte qui est au départ de l’œuvre, dans l’autre, la musique. Ce témoignage est rare, et montre une claire conscience des enjeux techniques.
10. M. A. Pegg (éd.), Les Divers rapportz, op. cit. p. 22 n. 63, puis p. 25, n. 74 et 76. Beaulieu tente de faire imprimer ses psaumes en 1540, puis 1544 et 1545. À cette date, l’imprimeur Gérard, d’après Pierre Viret, aurait refusé le manuscrit puisque Beaulieu voulait y adjoindre de la musique. Tous les imprimeurs ne sont pas en mesure de pouvoir imprimer la musique, qui nécessite des caractères spéciaux. Genève n’est alors en capacité d’imprimer la musique que depuis peu (voir J.-F. Gilmont, Bibliographie des éditions de Jean Crespin, Verviers : Librairie P. M. Gason, coll. « Livre – Idée – Société » n° 2, vol. I, p. 12.
11. Répertoire International des Sources Musicales (RISM) 1538/15. 12. Nos 110, 111, 113, 115, 120, 126.
13. Loys Bourgeois, avertissement au lecteur, Pseaumes octantetrois de David, mis en rimes françoise ; Cantique de Siméon ; Les dix commandements par Clément Marot, Théodore de Bèze, [Genève], chez Jean Crespin, 1551.
14. Pseaumes de David, mis en rime françoise / par Clément Marot, Théodore de Bèze, avec nouvelle et facile méthode pour chanter chacun couplet des pseaumes sans recours au premier, selon le chant accoustumé en l’église, exprimé en notes compendieuses exposées en la préface de l’autheur d’icelles, [Genève], Pierre Davantès, 1560.
15. Il y a seulement trente airs communs à Beaulieu et au chansonnier spirituel de son temps (nos 11, 16, 18, 21, 23, 31, 32, 36, 38, 42, 45, 47, 52, 54, 70, 71, 75, 81, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 95, 100, 121, 130, 150, 151). Le n° 18, Mauldite soit la mondaine richesse (Marot), n’était pas employé avant lui, et apparait dans les recueils de chansons spirituelles seulement à partir de 1555. Sur ces mêmes airs, aucun de ses textes parodiques, en revanche, ne lui a survécu.
16. Cette section s’étend des nos 102 à 140, avec des chansons de « mauvaise mesure poétique » à partir du n° 130. Les chansons polyphoniques de Beaulieu jamais retrouvées, dont celles issues des Divers rapportz, en font partie. Elles auraient d’ailleurs fait de bien mauvaises candidates à la technique de la parodie, puisqu’elles étaient alors entièrement inconnues et nouvelles. Les chansons entièrement inconnues, air et musique, et aujourd’hui encore perdues sont les nos 102, 104-108, 112, 114, 116-119, 122, 127-128, 133-134, 137, 138. Elles ne sont pas, à notre connaissance, mentionnées au théâtre, dans les sources chorégraphiques, en musique instrumentale, ni comme support de noëls, de chansons spirituelles, ou collectées dans les paroliers avant 1546. Elles n’ont, à proprement parler, aucune popularité mesurable. Dans cette même section figurent également les trois chansons polyphoniques de Beaulieu aujourd’hui seules retrouvées, éditées en partition par Moderne à Lyon en 1538, toutes trois issues des Divers rapportz : les nos 103, 124 et 125.
17. C’est le titre de la première publication musicale polyphonique connue, une anthologie contenant plus ou moins 101 pièces musicales, d’où le titre inspiré du grec que lui avait trouvé l’imprimeur vénitien Ottaviano Petrucci.
18. N° 28, Par ton regard tu me fais espérer.
19. N°16, Las je me plains ; n°25 De retourner mon amy je te prie ; n° 30 Est il conclud par un arrest d’amours.
20. N° 117 Qu’en dictes vous, Rondeau, ms. BnF Fr. 1722, attr. Marguerite d’Orléans.
21. N° 57 Allez souspirs enflammez au froigt cœur.
22. Dans l’édition augmentée de 1555, Les Euvres de François Petrarque…, Ite caldi sospiri est le sonnet 84.
23. RISM 1530/3. Jean Vignes, consulté sur ce point, résume donc : « En 1548, traduisant à son tour ce sonnet, Philieul, qui connaît la chanson anonyme de 1530, s’en inspire visiblement, mais aussi s’en démarque comme il peut. » L’orthographe du nom de l’imprimeur Attaingnant (au lieu de « Attaignant ») tend à se stabiliser depuis 1970, où paraît la monographie décisive de Daniel Heartz qui lui est entièrement consacrée.
24. Nos 1, 5, 10, 11, 12, 13, 18, 19, 20, 22, 23, 24, 26, 37, 38, 41, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 56, 62, 63, 71, 74, 78, 88, 89, 123.
25. Après les minces plaquettes du début du siècle, les paroliers s’étoffent notablement dans la décennie 1520-130. Les deux plus grands paroliers contenant les paroles des airs utilisé par Beaulieu sont ceux de 1535 et 1538 : S’ensuyvent plusieurs belles chansons nouvelles Avec plusieurs aultres retirés des anciennes impressions, comme pourrez veoir à la table en lequel sont les premieres lignes des chansons et le fueillet là où se commencent lesdictes chansons. Mil cinq cens. xxxv., [1535], Wolfenbüttel : Herzog-August-Bibliothek, Lm 3971a ; Les chansons nouvellement assemblées oultre les anciennes impressions. M.D.XXXVIII, [1538], Stuttgart : Württembergische Landesbibliothek, R 16 Mar. 1. Le recueil de 1538 s’ouvre par une section séparée comportant les 32 premières chansons de l’Adolescence clementine. Brian Jeffery, après d’autres, soulignait en 1976 que l’on peut questionner l’autorité de Marot sur l’ensemble du recueil, qui est fondamentalement composite (B. Jeffery, Chanson Verse of the Early Renaissance, London : Tecla Editions, 1571-1576, 2 vol., vol II, p. 332).
26. Trente trois chansons musicales, Paris : Attaignant, 1532 (février 1531 AS), RISM 1532/12, chanson de Sermisy, f° 16.
27. Guillaume Berthon, « Clément Marot. Recueil inédit offert au connétable de Montmorency en mars 1538 (Manuscrit de Chantilly), fac-similé et édition critique établie et annotée par François Rigolot » (compte rendu), dans Réforme, Humanisme, Renaissance 72 (2011), p. 117s.
28. B. Jeffery, Chanson Verse, op. cit., vol. II, p. 127-131 puis 141.
29. RISM Attaingnant 1535/6 ; Gardane 1538/19 ; Moderne 1540/17 et de nombreuses versions instrumentales.
30. Nos 29, 39 et 121.
31. Villiers, 4 voix, RISM 1538/16. Voir concordances et autres versions tardives dans la Base Chansons (éd. Annie Cœurdevey) du CESR de Tours, programme Ricercar. Après la mort de Francesco Layolle en 1540, Villiers semble lui succéder comme éditeur musical chez Moderne.
32. Berlin, Preussiche Staatsbibliothek, Kupferstichkabinett, ms. 78 B 17.
33. P. Rézeau (voir n. 35), Noëls 331 et 734. Nos 462 et 548 sur « Vivre ne puys », cette dernière chanson constituant le double musical, et la « réponse » poétique à « Qui la dira ».
34. S’ensuyvent plusieurs belles chansons nouvelles : nouvellement imprimées, lesquelles sont fort plaisantes Et les noms d’icelles trouverez en la table qui est à la fin du present livre. Avec aulcunes de Clement Marot, de nouveau adjoustées. On les vend à Lyon, en la maison de feu Claude Nourry, dit le Prince, pres nostre Dame de Confort, Lyon : Claude Nourry, [1533 ou 1534], Wolfenbüttel, Herzog-August-Bibliothek, A : 562 Quod. (5).
35. Ceux qui sont transmis par plus d’une source imprimée (compte tenu de la rareté et du caractère lacunaire des supports qui nous sont parvenus). La récente étude de Pierre Rézeau sur les noëls, ainsi que son catalogue, constituent à présent la principale porte d’entrée sur ce répertoire. Pierre Rézeau, Les noëls en France aux xve et xvie siècles, Strasbourg : ELIPHI, 2013. Les pièces de la Chrestienne Resjouyssance chantées sur des airs aussi utilisés pour des noëls sont signalées dans la table des airs en annexe.
36. 18 chansons de la Chrestienne Resjouyssance se trouvent par exemple tirées du recueil RISM 1529/3.
37. CH-Bu, ms. F.X.17 ; DK-Kk Ny kongelige Samling 1848 ; D-Rtt Freie Künste Musik 3/1 ; D-B MS Mus. 40194 ; D-Mbs Mus. Ms. 1516 ; PL-GD 4003. Les abréviations des bibliothèques et lieux de conservation sont celles du RISM.
38. Les n°11, 19, 23, 25, 38, 44, 45, 50, 51, 62, 66, 69, 70, 80, 82, 86, 87, 90, 115.
39. Sur ce manuscrit et ses différentes sections, voir Peter Woetmann Christoffersen, French music in the early sixteenth century : Studies in the music collection of a copyist of Lyons, the manuscript Ny kgl. Samling 1848 2° in the Royal Library, Copenhagen, København : Københavns Universitet (Museum Tusculanum), 1994.
40. 4v. Isaac, I-Fn ms. Banco Rari 229 ; 5v. D-Rp 1018 : 3v. DK-Kk ms. Ny kongelige Samling 1848, 2° ; 4v. Petrucci 1502/2 ; pretrucci 1504/3 et FlorC2442 ; 3v. Antico 1520/6, CH-SGS ms. 463.
41. Recueils RISM Moderne 1538/10 ; 1538/14 ; 1538/16 ; 1538/18 ; 1543/14, soit 22 pièces au moins. Laurent Guillo rappelle que l’imprimerie musicale lyonnaise a commencé sans doute au plus tard en 1525, mais pas encore de façon commerciale comme dans la décennie suivante, et notamment pas en typographie avant 1532. La période intensive d’impression de chansons chez Moderne s’estompe après 1540.
42. Francesco Layolle était un organiste très actif à Lyon, et travaillait pour Jacques Moderne. La chanson 85 repose sur un timbre des plus connus à partir de 1536, « Les Bourguignons ont mis le camp », chanson militaire écrite après le siège de Péronne, et promise à un bel avenir comme air récurrent des chants de siège jusqu’au début du xviie siècle. On en trouve la seule version imprimée au xvie siècle sous la plume de Layolle (un canon à deux voix, recueil RISM 1538/18, Lyon, Jacques Moderne).
43. N° 39, « Mort ou mercy », sur un rondeau de Jean Marot, voir supra.
44. Ainsi du vénitien Gardane, dont un imprimé de 1539 réimprimé en 1544 (RISM 1539/21) présente 23 pièces communes avec la Chrestienne resjouyssance.
45. Lyon est un centre important de publication de noëls, issus notamment des officines de Nourry, Arnoullet, Moderne, Rigaud… c’est aussi la ville de Barthélemy Aneau.
46. P. Rézeau, Les Noëls, nos 140, 478, 878.
47. C’est en particulier ce qu’inspire la bibliographie musicale des chansons utilisées par Beaulieu, comme arrêtée après cette date.
48. Les nos 39, 57, 58, 60, 72, 84, 98 (une chanson de 1501), 110, 111, 115, 120, 126, 144, sans compter les chansons jamais retrouvées de la section II, et déjà présentes dans les Divers rapportz, sans postérité.
49. Chansons nouvelles en musique, Paris : Attaingnant, 1528, RISM 1528/3. Première réédition Trente et sept chansons musicales, Paris : Attaingnant, [1528], 1528/8. Ici superius, num. D-Mbs, Bayerische Staatsbibliothek.
50. Vingt et neuf chansons musicales, Paris : Attaingnant, 1530. RISM 1530/3, num. Bayerische Staatsbibliothek, n° 12.
51. La relation des didascalies « 2. » avec les signes de congruence des partitions imprimées chez Attaingnant est très éloquente, et suggère l’idée que Beaulieu est lecteur d’Attaingnant, tout autant qu’il travaille de mémoire.
52. « Disons Nau à pleine tête », sur « Il est jour, dit l’alouette », Rézeau n° 305, pour la première fois dans Noëlz nouveaulx en poetevin. On les vend à Paris en la rue neufve nostre dame a lenseigne sainct Nicolas. Wolfenbüttel 54 (2), daté de 1526 à 1531.