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L’action de l’Armée du salut en France durant la Première Guerre mondiale

Marc MULLER

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

L’Armée du salut naît de la vie et de l’action de William et Catherine Booth, couple pastoral méthodiste anglais installé dans le quartier de l’East End, le plus pauvre de Londres, à la fin des années 1850. Pour les Booth, chaque individu, transformé par la puissance de l’Évangile et réconcilié avec lui-même, permet un progrès social, politique et économique.

La Mission chrétienne1 est fondée en 1865 par W. et C. Booth. Avec leurs premiers militants, ils s’inspirent de la forme de l’armée britannique pour annoncer l’Évangile et mettre à l’ouvrage les nombreux convertis qui les suivent. En 1878, cette mission d’évangélisation devient l’Armée du salut2 et adopte une hiérarchie, un uniforme, un drapeau, une terminologie et des règlements.

L’œuvre se diffuse hors du Royaume-Uni, d’abord dans la sphère d’influence de l’Empire britannique : ce développement est plus facile et plus rapide dans les pays de langue anglaise et de tradition protestante, grâce aux flux migratoires ultramarins ; puis il s’étend en Europe, dans les pays de culture latine.

Depuis février 1881, à la demande de protestants français intéressés par l’expérience, l’Armée du salut s’implante en France. Elle va rapidement se développer à Paris et en province, puis en Suisse et en Belgique. Mais le mouvement rencontre de nombreux détracteurs, même au sein des Églises réformées. Sa théologie et sa doctrine sont considérées comme simplistes et quelque peu élémentaires, et ses méthodes sont jugées extravagantes3. Dans la rue, les « titis » parisiens provoquent le tapage et chahutent les salutistes affublés de leur étrange uniforme.

son caractère protestant, au sein d’une société catholique, et son origine britannique, dans un contexte géopolitique colonial tendu entre la France et le Royaume-Uni, rendent l’Armée du salut tout à fait exogène à la masse du peuple français de la fin du XIXe siècle. Néanmoins, le mouvement prend de l’ampleur et, à la veille de la Première Guerre mondiale, l’Armée du salut compte en France plus de 40 postes d’évangélisation, 13 asiles de nuit et maisons de rééducation, plusieurs centaines de soldats et d’officiers4. Par ailleurs, et cela ne peut manquer de poser problèmes et contradictions, en 1914 l’Armée du salut est présente dans les deux camps qui vont s’affronter. Ainsi, par exemple, en Allemagne, elle compte près de 150 postes d’évangélisation et 500 officiers, dont plusieurs de nationalité britannique5.

En France, le conflit mondial suscite l’engagement salutiste aux côtés des civils puis des soldats mobilisés. Cette implication au cours des quatre années de guerre, et de celles qui suivront l’armistice, va permettre à l’œuvre d’être considérée et de gagner la reconnaissance de la société française.

À la veille d’une guerre mondiale

Comme l’Armée du salut utilise, dans sa forme et sa communication, les éléments d’une culture militaire, elle ne manque pas d’éprouver de l’empathie pour les soldats. L’intérêt pour les forces navales et militaires du Royaume-Uni est manifeste dès ses débuts. Après de premières initiatives individuelles et spontanées6, l’Armée du salut crée, sous la direction d’Alice Lewis, la Naval and Military League7 en novembre 1894, pour accompagner les salutistes qui servent dans les forces armées de l’Empire britannique8.

À partir de 1899, des foyers de la Naval and Military League sont établis dans les villes de garnisons et arsenaux de Devonport, Portsmouth, Aldershot, Gibraltar, Yokohama, Hong-Kong et la Barbade.

Au début de la Seconde Guerre des Boers, le 15 novembre 1899, Mary Murray9 arrive en Afrique du sud pour établir une œuvre en faveur des militaires. Dans le camp adverse, les salutistes boers de la République sud-africaine du Transvaal entreprennent eux aussi de réaliser une œuvre en faveur de leurs soldats. L’Armée du salut acquiert ainsi une première expérience qui lui servira pendant la Première Guerre mondiale.

En 1914, l’Armée du salut britannique est officiellement reconnue comme une dénomination chrétienne par l’Amirauté et le War Office10.

En août 1914, la déclaration de guerre de l’Allemagne à la France (3 août) et celle du Royaume-Uni à l’Allemagne (4 août) imposent au chef mondial de l’Armée du salut Bramwell Booth11 de prendre position en raison du caractère international et chrétien de l’œuvre. Dès l’ouverture des hostilités, il publie un éditorial dans The War Cry le journal hebdomadaire de l’Armée du salut. Loin de tout nationalisme, ce texte s’efforce de rappeler les principes généraux de l’œuvre salutiste, avec même des accents pacifistes :

Nous sommes profondément inquiets de cette guerre parce que nous croyons que les peuples d’Allemagne et d’Angleterre sont des peuples à bien des égards amicaux. Les classes ouvrières, qui constituent la plus grande partie de la population des deux pays, et malgré leurs rivalités commerciales et les infimes différences qui les caractérisent, ont beaucoup de choses en commun qui favorisent l’amitié authentique. Les Britanniques ne considèrent pas les Allemands, ni les Allemands les Britanniques, comme ils le faisaient auparavant. Ils pensent à eux comme des collègues de travail. Beaucoup voient en eux des collègues qui luttent pour de meilleures conditions de vie et pour un traitement plus respectueux et de meilleure qualité des pauvres. Certains les reconnaissent comme leurs frères chrétiens12.

Trois semaines plus tard, il écrit à nouveau :

Une fois de plus j’aimerais dire que je ne regarde pas cette guerre comme étant une guerre des peuples ou de certaines classes. Sans doute, maintenant que les massacres sordides et les destructions ont commencé, de larges proportions de la population seront profondément angoissées et en colère. Mais ceci n’est que la conséquence de la situation. La guerre elle-même a été préparée par les états-majors militaires, en particulier en Allemagne et en Russie.

Ces élites militaires et les personnes qui vivent de la fabrication des armes, ainsi que les journaux qui, à cause de cette situation, augmentent leurs ventes, ont pendant des années promu et favorisé ces doctrines horribles qui maintenant ravagent dans toute leur méchanceté les champs de bataille de Belgique et de France [...].

Désormais, nous devons nous en souvenir quand nous pensons et parlons de ce qui se passe [...]. Efforçons-nous d’en faire porter la responsabilité aux personnes concernées en évitant de nous adonner à l’amertume et à la haine pour des nations entières13.

Et quelques mois plus tard :

Au nom du Dieu d’amour, nous devons refuser les exigences terribles qui sont proposées par le dieu de la guerre de nous abandonner à la rage, à la haine, à la convoitise et à la vengeance qui ne sont que trop dramatiquement manifestes autour de nous. Nous devons, avec l’aide de Dieu, garder notre tendre sympathie envers les souffrants, car ceci est la sympathie du Christ. Nous devons chérir et cultiver dans nos cœurs la pitié pour les injustes parce que nous démontrons ainsi la pitié du Christ. Nous devons laisser notre compassion se diriger vers ceux qui s’opposent à nous et nous blessent, et prier pour eux, parce que c’est l’esprit et le commandement de Jésus-Christ. Et surtout, nous devons continuer à aimer nos ennemis, parce que l’amour est de Dieu, et sans amour à leur égard, il est impossible de le connaître, lui, de lui plaire ou de lui appartenir14.

Néanmoins, les réalités de la guerre vont amener les salutistes des pays belligérants à faire un choix patriotique et à assurer une œuvre pour leurs nationaux respectifs. Ainsi, et bien qu’il soit de nationalité suisse, François Fornachon15 écrit en août 1914 dans une édition ronéotypée de En Avant, l’hebdomadaire salutiste français :

Notre première pensée va vers nos camarades, officiers et soldats [de l’Armée du salut], qui ont été appelés sous les drapeaux, ayant quitté leurs postes et leurs familles. Nous sommes avec eux de cœur et d’âme, et nous les portons devant Dieu dans la prière.

Nous songeons ensuite à nos camarades restés en France pour leur demander de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour faire du bien autour d’eux, et de ne rien négliger afin de se rendre utiles de toute manière, par des distributions de soupe, de lait, ou dans les garderies d’enfants, etc. Que Dieu dirige chaque officier [de l’Armée du salut], car il devient très difficile de se tenir en contact les uns avec les autres par le moyen de lettres et de télégrammes.

L’Armée du salut en France fera son devoir pour soulager toutes les misères. Nos institutions sociales, nos salles de réunions, seront ouvertes à toutes les infortunes, et nos camarades donneront temps, forces et cœur pour y faire du mieux qu’il sera en leur pouvoir16.

Dans un autre article du même numéro du journal, il exprime le sentiment d’« Union sacrée » auquel il fait adhérer l’Armée du salut française et conclut en rappelant le message évangélique et ses préceptes :

Dans les cathédrales catholiques, dans les temples protestants, dans les synagogues des juifs et les salles populaires de l’Armée du salut, partout ce cri : vive la France ! Nous voulons qu’elle vive, la France, et elle vivra ! Par quel moyen ?

1° Par l’organe de ceux qui dirigent ses destinées ; la France appelle sous les drapeaux et envoie à la frontière tous ses fils. Ils répondent tous à l’appel. Les troupiers joyeux se hâtent de rejoindre leur régiment ; les marins intrépides leurs unités de combat. Tous vont défendre le patrimoine sacré de la patrie, vont donner leur sang pour elle. Ils sont dans leur rôle ! Vive la terre de France [...].

2° L’Église tout entière est debout et crie aussi : vive la France ! Tous ceux qui composent l’Église de Dieu, soldats de Jésus-Christ, vivant de sa vie, sentent qu’à côté du soldat qui combat pour l’intégrité du sol français, il doit y avoir le soldat du Christ qui combat pour son intégrité morale et religieuse [...].

Que cette épreuve, permise par Dieu, nous fasse rentrer en nous-mêmes, avec la France tout entière, et nous dispose aux résolutions qui s’imposent ! Que cette épreuve nous mène à la repentance sincère, à la croix qui efface les transgressions passées, qui ranime la vie divine dans nos cœurs et nous aide à marcher sur le chemin de la sainteté et de l’obéissance à la loi de Dieu. Et tous d’un seul cœur et d’une même âme, redisons : vive la France qui combat pour le droit, la justice, la civilisation, et qui est décidée à lutter contre tous ses ennemis extérieurs et intérieurs, contre le péché, l’ivrognerie, la débauche, le luxe malsain, l’avarice, l’amour des richesses et des vanités qui passent, de l’orgueil, de l’envie et de la vengeance mauvaise17.

L’œuvre de guerre de l’Armée du salut

Au début d’août 1914, un groupe de salutistes anglais de la Naval and Military League, sous la direction de Mary Murray, John Aspinall et May Whitaker, est envoyé en France sur le front occidental aux bénéfices des troupes du corps expéditionnaire britannique (BEF)18. Des officiers de l’Armée du salut sont enrôlés en qualité d’aumôniers dans l’armée britannique, dans le corps expéditionnaire canadien (CEF)19, parmi quelques éléments des forces sud-africaines (SAOEF)20 et plus tard avec le corps d’armée australien et néo-zélandais (ANZAC)21 en Méditerranée. Le succès remporté par les foyers du soldat dans les garnisons de Chatham, Devonport, Harwich et Portsmouth, pousse leur introduction sur le territoire occupé par les troupes britanniques en France. Le premier établissement salutiste de l’armée britannique est ouvert dans le quartier d’Henriville à Amiens (Somme)22, suivi de ceux du Havre, de Rouen et de Forges-les-Eaux (Seine-Maritime).

Le 1er décembre 1914, l’Armée du salut britannique forme une flotte de cinq ambulances automobiles à destination du front français. En février 1915, le mécénat de la reine Alexandra, veuve du roi Édouard VII d’Angleterre, permet l’équipement de six autres ambulances salutistes23. Dans les diverses zones de guerre, quarante ambulances seront ainsi déployées par les salutistes. Chaque véhicule, qui permet la prise en charge de quatre blessés couchés ou huit blessés assis, est conduit par un chauffeur et deux infirmiers salutistes24.

Entre août et septembre 1914, la guerre chasse devant elle une partie de la population civile de Belgique et du Nord de la France. Pour les salutistes français, « l’œuvre de guerre » commence.

Ce sont d’abord des initiatives isolées, car la guerre ne semble pas devoir durer. Cependant, François Fornachon met les locaux de l’Armée du salut à la disposition des autorités et offre ses services. Localement, des salutistes répondent spontanément : ici, on héberge les réfugiés ou on accueille des soldats de passage ; là on visite des blessés dans les services de santé militaires. Le 8 septembre 1914, l’hôtellerie salutiste de Lyon devient l’hôpital temporaire HB n° 3 bis avec une capacité de 100 lits, avant d’être reconverti, en 1916, en hébergement pour les réfugiés, puis pour les soldats travaillant à la défense nationale25.

Ambulance de l’Armée du salut, dite « Reine Alexandra » en service sur le front français en 1915.

Hôpital militaire HB 3 bis dans les locaux de l’hôtellerie salutiste de Lyon au 71, rue Servient en 1915.

Des officières de l’Armée du salut, infirmières de métier, se présentent bénévolement dans les hôpitaux pour y soigner et veiller les blessés. Et à l’instar des prêtres et des pasteurs, les salutistes répondent aux questions spirituelles dans ce contexte de guerre et apportent leur aide, leur soutien aux hommes et aux familles marqués par l’éloignement, la souffrance et le deuil.

Or la guerre se prolonge. L’Armée du salut s’oriente alors vers une action durable et mieux établie. Pendant l’hiver 1914-1915, les centres sociaux salutistes accueillent les premiers soldats réformés et invalides, et envoient des vêtements et des colis aux soldats sur le front. Le ministère de la Guerre apprécie cette « Ligue du vieux linge » et la fourniture, par les salutistes américains, d’une centaine de caisses de 173 410 matériels de pansement26.

Mais les salutistes sont peu habitués à une action longue et coûteuse. De plus, l’activité traditionnelle de l’Armée du salut souffre de l’état de guerre. En février 1915, François Fornachon passe par le territoire neutre de la Confédération helvétique pour rejoindre la Belgique, via l’Allemagne, afin de visiter et de réconforter les salutistes soumis à l’occupation des armées allemandes. Il publie dans En Avant le rapport de son séjour27. Il constate l’efficacité de l’action des salutistes belges vis-à-vis des populations civiles malgré leurs faibles moyens. Ainsi, par exemple, la subvention et le ravitaillement du Comité de secours américain permettent la distribution gratuite de lait pour les nourrissons et de nourriture pour les adultes.

En France, la mobilisation générale du 2 août 1914 enrôle indistinctement les salutistes comme les pensionnaires des établissements sociaux de l’Armée du salut. Ainsi, Henri Vincent, officier de l’Armée du salut, est incorporé au 158e régiment d’infanterie ; il est tué à l’ennemi le 31 mars 1916 à Vaux-devant-Damloup (Meuse)28 ; Marcel Rosier, ex-pensionnaire de l’orphelinat salutiste de Colombes (Hauts-de-Seine), brigadier au 13e régiment de chasseurs à cheval, est tué à l’ennemi le 5 octobre 1914 à Vieux-Berquin (Nord)29. La plupart des hommes de 20 à 48 ans sont mobilisés, alors que la tâche caritative s’est alourdie. Néanmoins, le corps des officiers de l’Armée du salut est déjà majoritairement féminin30. Les femmes vont prendre une part essentielle au maintien de l’œuvre et dans le développement des actions en faveur des militaires. À Croix, dans le Nord occupée par les Allemands, Jenny Blanc et Julie Chevalier, isolées et coupées de tout contact avec Paris, demeurent sur place et se consacrent au soutien de la population civile. À Reims, Françoise Carrel et Lucie Gaugler restent en poste sous les bombardements, même après l’évacuation progressive de la population. Jusqu’en 1917, elles participent aux secours des civils31 (accueil des enfants, visite des hôpitaux, transport de la nourriture pour les vieillards et les malades) et à l’assistance des militaires (tricot et confection d’épaulettes pour atténuer le poids du fusil, préparation des repas) 32. Au Havre, Noémie Schleiden transforme sa salle de réunion en salon de lecture et de correspondance pour les soldats en cantonnement. Sous l’impulsion d’Emma Rovigue, un « foyer » est créé à Nîmes. Inspirés des cantines de la Salvation Army britannique, équipés de façon rudimentaire, ces lieux d’accueil pour militaires permettent la détente, la lecture de journaux et de livres, la rédaction du courrier, et fournissent papier à lettres, enveloppes et cartes postales. Des réunions et des soirées récréatives sont organisées et, selon les cas, il y a même une cantine. Peu de services religieux sont organisés : les salutistes français sont surtout à l’écoute de tous ceux pour qui la foi semble être une réponse à leur enfer quotidien ou à leurs angoisses.

À partir de 1916, l’œuvre de guerre salutiste multiplie ses implantations, comme à Valence, Grenoble, Marseille et Mazamet. Des cuisines populaires s’ouvrent à Paris ; chaque soir, une centaine de « poilus » permissionnaires, en transit par la gare de l’Est, peuvent passer la nuit dans l’hôtellerie salutiste de la rue de Chabrol. Toutefois l’action salutiste en faveur des militaires reste très localisée, au gré de ses implantations urbaines d’avant-guerre. C’est son action à travers l’organisation des Foyers du soldat qui va lui permettre un essor inattendu.

Les Foyers du soldat de l’Union franco-américaine

En France, l’élan patriotique et philanthropique en faveur des soldats est caractérisé par la fondation de nombreuses œuvres pour les militaires. Financées par des industriels ou des particuliers33, souvent éponymes, elles manifestent l’intérêt de la nation pour ses conscrits, comme le Cercle national du soldat, l’Entente des œuvres de guerre avec les armées, la Ligue patriotique des Françaises, le Linge du soldat de l’Automobile club, l’Œuvre pour le front, l’Œuvre du soldat dans la tranchée, Mon soldat 1915, le Paquet au front, le Soldat au front (sous les auspices du Touring-club de France), le Tricot du combattant34. Plusieurs mécènes obtiennent de soutenir les unités militaires de leur région comme par exemple, la Compagnie des forges et aciéries électriques Paul Girod à Ugine (Savoie) qui soutient la division de Savoie, la Compagnie des chargeurs réunis qui parraine la division d’Algérie ou les compagnies de chemins de fer qui soutiennent les divisions des régions de leurs réseaux respectifs.

Dans ce florilège d’œuvres, il convient de distinguer particulièrement celle des Foyers du soldat de l’Union franco-américaine (UFA)35. Créés dès 1914, à l’initiative d’Emmanuel Sautter36, par les Unions chrétiennes de jeunes gens et financés par des fonds américains, ils apportent un soutien moral aux soldats sur le modèle de ce que les YMCA avait fait pendant la guerre de Sécession ou pendant la guerre de 1898 contre l’Espagne37. Installés à proximité du front, les Foyers offrent aux soldats un réconfort matériel autant que moral. À la fin de l’année 1914, deux foyers sont ouverts à Saint-Dié (Vosges) et à Baccarat (Meurthe-et-Moselle), puis, en janvier 1915, à Gérardmer (Vosges), La Valbonne (Ain) et Villers-Cotterêts (Aisne). Au début de 1916, la première reconnaissance officielle arrive du ministère de la Guerre qui salue les efforts et la réussite des Foyers du soldat pour « protéger les jeunes recrues des dangers de l’alcoolisme et du péril vénérien » en leur offrant des « distractions saines et des boissons hygiéniques »38. La loi du 30 mai 1916 donne un cadre légal et des ressources aux « œuvres de guerre ».

L’association va assurer le fonctionnement et l’organisation des foyers pour soldat sur l’ensemble du front français39. Le Comité de patronage des Foyers du soldat décrit les établissements comme

autant de salles de lecture et de correspondance à l’usage exclusif des militaires, garnies de bancs, tables, matériel pour écrire, livres, brochures, journaux illustrés, jeux. Il s’y donne des auditions de phonographe, des causeries avec projections, de petits concerts dont les soldats forment les éléments, des conférences antialcooliques et sur des sujets divers, destinés soit à instruire et à intéresser les soldats, soit à fortifier et à maintenir le moral, indépendamment de toute préoccupation politique et confessionnelle. Plusieurs de ces foyers ont comme annexe une cantine débitant à prix coûtant des boissons non alcooliques40.

Ils sont installés dans les zones de cantonnement des régiments, hébergés dans des baraques préfabriquées type « Adrian » ou de grandes tentes. La direction de ces établissements est confiée à un civil (homme ou femme)41 agréé par l’autorité militaire, ou d’un homme des services auxiliaires mis en sursis d’appel pour ce service.

Les Foyers sont dans l’ensemble bien acceptés par les autorités de l’État, malgré leur origine confessionnelle. Auprès de l’Église catholique, l’aide protestante suscite plus de réticences. Le journal La Croix et le cardinal Luçon, archevêque de Reims, y voient l’instrument d’une vaste entreprise de prosélytisme qui viserait vingt millions de Français détachés de l’Église catholique42. Après les mutineries de mai-juin 1917, l’état-major mène une politique de reprise en main du moral de l’armée française. Le développement des Foyers du soldat va permettre l’amélioration des conditions de vie des militaires. Enfin, en novembre 1917, l’État demande à l’Union franco-américaine — YMCA de coordonner l’ouverture de 1 300 nouveaux foyers et de fédérer l’action des Foyers du soldat de toutes les autres œuvres de guerre comme, entre autres, l’Armée du salut43.

Les Foyers du soldat de l’Armée du salut

L’objectif hygiéniste des foyers de l’UFA, qui est de préserver le moral et la morale des soldats, convient aux principes de l’Armée du salut. De 1917 à 1923, elle s’investit dans la création et la gestion des Foyers du soldat sur le front et d’hôtels pour soldats à l’intérieur. Le successeur de Fornachon, Albin Peyron44, dont les trois fils sont mobilisés, ne peut manquer de manifester son vif intérêt pour l’œuvre organisée par l’Armée du salut britannique et américaine en faveur des soldats luttant sur les fronts européens45. Il souhaite assister les soldats français combattant sur les fronts des armées. Le 9 août 1917, Peyron présente au général Philippe Pétain, commandant en chef des armées françaises, une demande pour obtenir l’autorisation d’ouvrir des Foyers du soldat sur le front :

J’ai l’honneur, conformément à la circulaire ministérielle 567/D du 31 janvier 1916, de vous demander l’autorisation pour l’Armée du salut d’établir quelques Foyers du soldat sur le front.

Nous nous conformerons strictement aux instructions de cette circulaire qui défend de donner à ces foyers un caractère confessionnel.

NOUS sommes informés que Monsieur le maréchal French a dû vous écrire pour vous faire connaître quels services l’armée du salut avait rendus sur le front britannique. Nous serions heureux, sur le front français, de pouvoir aussi aider nos soldats dans la mesure du possible46.

En attendant les accréditations officielles, Albin Peyron et son épouse, Blanche, se documentent sur le travail de l’Armée du salut parmi les troupes britanniques au Havre. Durant huit jours, ils s’informent sur le fonctionnement d’un camp australien, avec l’aumônier salutiste Robert Henry, « grand bel homme en kaki, ayant la douceur du Saint-Esprit dans les yeux et les manières du parfait gentleman »47.

Pour son premier Noël comme chef salutiste, Peyron est auprès des « poilus », dans la zone des armées. Le 25 décembre 1917, il organise, avec l’approbation de l’état-major, une réunion dans les caves de la maison Krug à Reims. Le lendemain, il écrit :

... Le bombardement était incessant ; la nature semblait pleurer sur la cité martyre... La neige, ce jour de Noël, la recouvrait d’un fin linceul immaculé, l’arbre s’allumait sous les voûtes d’une cave à champagne ... Il y avait là bien cent personnes, surtout des soldats. 48

Sous la fédération de l’Union franco-américaine et sous l’autorité militaire, les Foyers du soldat de l’Armée du salut s’installent jusque dans la zone des armées, à l’arrière du front. Le 29 décembre 1917, le général Joseph Micheler, commandant la Ve armée, attribue à l’Armée du salut cinq premières localités de la Marne, dans la région de Reims, pour l’installation des Foyers à Ville-en-Selve, Villers-aux-Nœuds, Ormes, Poilly et Germaine49. Suivront au début de l’année 1918, les cantonnements d’Aigny, de Mareuil-sur-Ay, d’Epernay, d’Avenay et du Cadran (commune de Sermier). En parallèle, deux foyers sont établis dans la zone de la VIIe armée française : en 1917 à Boron (Territoire de Belfort) et en 1918 à Audincourt (Doubs).

Aimé Boisson50 est nommé directeur régional des Foyers du soldat de l’Armée du salut. Il dirige « intrépide et plein d’allant »51 l’ensemble des Foyers et, en collaboration avec les autorités militaires, obtient l’autorisation de se maintenir dans la zone des armées et de progresser en même temps que les troupes. Les Foyers du soldat deviennent mobiles :

En quelques heures, une vaste tente est dressée au coin d’un champ, les tables et bancs pliants sont sortis du fourgon, et le poilu peut déguster la tasse de chocolat bouillant et mettre sa signature sur la carte pré-imprimée qui apportait à sa famille les nouvelles si ardemment attendues52.

Cela ne va pas sans risque : en juin 1918, nombre de Foyers doivent être évacués devant la contre-offensive allemande.

Trois directeurs des Foyers du soldat de l’Armée du salut : Deschamps, Bastide et Boisson, en 1917.

La fréquentation des bibliothèques et des salles de correspondance des Foyers du soldat intéresse l’Armée du salut qui y voit, comme l’état-major de l’armée, les effets positifs du livre sur la troupe. Cela se traduit par la création de bibliothèques à destination des conscrits dont le triple but est : « récréer, instruire, élever53 ». Les fonds d’ouvrages sont autorisés par l’autorité militaire. Le général Pétain rapporte au ministre de la Guerre les conclusions des généraux commandant l’armée sur l’influence de la lecture sur le moral des troupes et donne les consignes de censure et de propagande relatives aux supports imprimés54. Ainsi, le bureau des œuvres militaires du ministère de la Guerre, reconnaissant l’intérêt de l’Armée du salut à « combattre le fléau de l’alcoolisme », lui recommande la diffusion d’« ouvrages de propagande antialcoolique inscrits sur la liste des livres autorisés, qu’il y aurait le plus grand intérêt à placer dans les bibliothèques des Foyers du soldat55 ». Peu avant, Albin Peyron demande au même bureau à placer dans les bibliothèques des Foyers l’ouvrage Pots cassés d’Harold Begbie publié par Fischbacher56. Ce livre présente les témoignages de conversion au Christ dans les milieux populaires de l’Angleterre. Le ministère de la Guerre répond par la négative car il se fait « une règle d’observer la neutralité religieuse la plus absolue, et de n’admettre dans les Foyers du soldat que les publications dépourvues de tout caractère confessionnel»57. Néanmoins, le contact personnel entre les salutistes et les miliaires suscite des conversions, même si elles restent rares. Par exemple, Fernand David, soldat illettré, apprend à lire dans la Bible de la directrice salutiste du Foyer du soldat à Marseille. Plus tard, il survit au torpillage du transport de troupes qui le mène aux Dardanelles. Néophyte, David s’engage dans l’Armée du salut à la fin de la guerre58.

En 1918, on peut estimer que 3 à 400 hommes en moyenne fréquentent chaque jour l’un des Foyers du soldat gérés par l’Armée du salut française (une vingtaine).

Après avoir subi des attaques aériennes allemandes depuis janvier 1918, Paris et sa banlieue sont bombardées par l’artillerie à longue portée ennemie, de mars à août 1918. La population parisienne s’inquiète de cette menace. Albin et Blanche Peyron prennent une initiative en faveur des enfants de la capitale dont les parents sont appelés à se séparer pour les mettre à l’abri. Dans ce but, l’Armée du salut crée en province trois maisons destinées à recevoir 82 enfants parisiens évacués : à Bron (Rhône), au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire) et à Roquecourbe (Tarn) 59.

Le 11 novembre 1918, l’armistice est signé, la Grande Guerre s’achève. Retrouvant l’élan cocardier de son prédécesseur en 1914, Albin Peyron écrit :

Le canon qui tonne et le carillon des cloches nous annoncent la suspension des hostilités. C’en est donc fini de ce long cauchemar, la force a cédé devant le droit. La France est libérée, la Belgique, l’Alsace-Lorraine vont l’être demain. Gloire à Dieu dans les cieux, honneur à notre grande France, aux peuples alliés, paix aux hommes de bonne volonté ! 60

Les soldats n’ont plus à combattre, mais ils restent mobilisés. En décembre 1918, le vingt-quatrième foyer salutiste est ouvert à Strasbourg, rue de la Nuée-Bleue, dans une Alsace redevenue française. L’autorisation d’installation d’un Foyer dans le Palatinat allemand occupé par les forces françaises est accordée61.

Cercle du soldat de l’Armée du salut à Paris au 5 boulevard de Strasbourg, en 1919.

À l’arrière, dans les villes de garnison et de transit pour les permissionnaires, l’Armée du salut mène une nouvelle action en organisant des Foyers pour soldats plus pérennes. En février 1919, à Paris, un immeuble est loué au 5 boulevard de Strasbourg pour y accueillir le Cercle du soldat. Le rez-de-chaussée accueille une cantine et une salle de repos et de correspondance, alors qu’aux étages, des chambres sont aménagées pour permettre à des soldats permissionnaires ou libérés de faire étape.

Action salutiste américaine en France

Dès le début du conflit, l’Armée du salut aux États-Unis d’Amérique soutient les œuvres de guerre salutistes sur le front français. La contribution au financement du Comité de secours américain pour les civils ou les envois de pansements pour les blessés manifestent le lien avec le « vieux continent ». Avec l’entrée en guerre des États-Unis, en avril 1917, et l’arrivée du contingent américain en Europe, les priorités des salutistes américains évoluent. L’opinion publique américaine souhaitant que ses militaires ne soient pas exposés aux pernicieuses influences de la société française, l’accompagnement des soldats devient nécessaire. En juin 1917, Evangeline Booth62 envoie le salutiste William Barker en Grande-Bretagne et en France afin d’examiner les possibilités d’action auprès des soldats du corps expéditionnaire américain (AEF)63 et d’inspecter le dispositif déjà mis en place pour l’accueil et le repos des militaires dans les Foyers du soldat salutistes comme ceux des YMCA64.

Le 21 août 1917, onze salutistes, hommes et femmes, débarquent à Bordeaux. Avec Barker, ils sont affectés auprès de la première division d’infanterie américaine, dans la zone de Gondrecourt-le-Château (Meuse), puis dans le secteur de Toul65. Le général John Pershing décide d’intégrer le détachement de l’Armée du salut comme auxiliaire du corps expéditionnaire américain. Les salutistes revêtent l’uniforme kaki de la troupe, casques lourds et masques à gaz compris ; seule la longue jupe des femmes et l’épaulette brodée « The Salvation Army » les distinguent des Sammies66 comme le montre la photo ci-après.

Les foyers pour soldat, totalement indépendants des Foyers du soldat de l’UFA, sont installés dans des baraques, ou de façon plus précaire dans des caves ou des tentes, dans les zones confiées à l’armée américaine en Lorraine, à Ansauville, Ménil-la-Tour, Mandres-aux-Quatre-Tours, Baccarat, dans le saillant de Saint-Mihiel et la forêt de l’Argonne ; en Picardie, à Montdidier, Breteuil, Tartigny, Froissy, Le Mesnil-Saint-Firmin, Noyers-Saint-Martin et Soissons, et en Champagne, à Château-Thierry. À l’arrière, dans les ports transatlantiques et les zones de cantonnement de l’armée américaine, quelques contacts sont noués avec les populations locales auxquelles les salutistes américains distribuent En Avant, le journal de l’Armée du salut en France.

Salutistes américaines au Foyer du soldat dans le saillant de Saint-Mihiel (Meuse), en 1918.

Dans ces lieux de repos et de détente, les jeunes femmes de l’Armée du salut donnent aux Foyers du soldat une atmosphère familiale, rendant mille services (raccommodage, pose de boutons d’uniforme, confection de pâtisseries, rédaction de courrier, etc.). Cette ambiance a pour symbole le beignet. En octobre 1917, deux officières de l’Armée du salut, Helen Purviance et Margaret Sheldon, conviennent de fabriquer des beignets « comme à la maison ». Cette initiative, rapidement populaire dans la troupe, crée un véritable lien entre les salutistes et les soldats au front. De même pour aider les familles aux États-Unis et décourager le jeu et l’achat de vins et spiritueux, l’Armée du Salut encourage les soldats à tirer parti du système de transfert d’argent qu’elle organise entre l’Europe et l’Amérique67. En retour, cette relation de confiance permet aux familles de s’adresser aux salutistes pour faire visiter et fleurir les tombes de leurs enfants tombés en Europe, ou pour organiser un service de recherche d’un père ou d’un fils disparu.

Conclusion

Après la signature du traité de paix le 28 juin 1919, l’œuvre de guerre salutiste décroît jusqu’en 1923, avec la fermeture de son dernier Foyer du soldat à Paris. Ce programme a donné satisfaction aux centaines de milliers d’utilisateurs comme au commandement militaire. Le maréchal Foch exprime à Albin Peyron, ainsi qu’à l’Armée du salut tout entière, « sa vive gratitude pour ce que vous avez fait pour nos soldats68 ».

Bien des combattants français passèrent par les Foyers du soldat et « apprirent ainsi à connaître et à apprécier ces gens de l’Armée du salut dont on riait si volontiers en France avant la guerre69 ». Les relations nouées avec les autorités de l’État durant la fin de la Première Guerre mondiale permettent à l’Armée du salut de se présenter comme un interlocuteur crédible dans ses actions philanthropiques. Cette réputation favorise les fondations des établissements qui marqueront les années 1920 à Paris (deux postes d’évangélisation ; la Salle centrale, en 1921 ; le Palais du peuple, en 1925 ; le Palais de la Femme, en 1926 ; la péniche Louise-Catherine, en 1930) comme en province (dix-sept postes d’évangélisation ; le Foyer familial à Marseille, en 1920 ; la Bonne hôtellerie à Lille, en 1921 ; la Bonne hôtellerie à Metz, en 1923 ; le Soleil d’automne à Tonneins, en 1928 ; mission en faveur des bagnards en Guyane, en 1928). Le 8 février 1927, Albin Peyron est nommé chevalier dans l’ordre national de la Légion d’honneur. Son dossier de nomination précise, au titre des services rendus, que « pendant la guerre [Peyron] a créé de nombreuses œuvres dans la zone des armées : foyers ou hôtels du soldat, foyers volants, œuvres des permissionnaires, colonies pour les enfants de Paris pendant le bombardement »70.

L’organisation d’origine anglo-saxonne est désormais reconnue, intégrée et adoptée dans la société française. Ses « œuvres de guerre » apprennent à l’Armée du salut en France l’organisation et le développement de son projet missionnaire et social.

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1. Christian Mission.

2. The Salvation Army.

3. Sur le sujet, lire Pierre-Yves KIRSCHLEGER, « La guerre est déclarée ! regards protestants sur l’invasion salutiste de 1881 », La Diversité évangélique, Cléon d’Andran : Excelsis, 2003, p. 53-77.

4. Raymond DELCOURT, L’Armée du salut, Paris, Presses universitaires de France, 1989, p. 23.

5. Frederick COUTTS, The History of the Salvation Army: the Better fight, London : Hodder and Stoughton, 1973, p. 22.

6. Robert SANDALL, The History of the Salvation Army : social reform and welfare work, London : Thomas Nelson and Sons, 1955, p. 288.

7. Ligue navale et militaire.

8. Cette structure engage le salutiste : « Certain que Dieu, par l’amour du Christ, a pardonné tous [ses] péchés, [...] à aimer Dieu de tout [son] cœur, à aimer [son] prochain comme [soi]-même, et à servir Dieu comme un vrai soldat dans les rangs de l’Armée du salut. Par la grâce de Dieu, [il] promet : l’abstinence totale ; la pureté ; le renoncement au jeu ; la lecture quotidienne de la parole de Dieu ; de faire de [son] mieux pour amener [ses] camarades au Christ. » R. SANDALL, op cit., p. 289.

9. Mary Stewart Murray (1863-1938) est la fille de Sir John Irvine Murray (KCB), général de l’armée britannique aux Indes. Officière de l’Armée du salut, elle est responsable, de 1901 à 1919, de la Naval and Military League. Son action parmi les militaires lui vaudra la dignité de membre de l’ordre de l’Empire Britannique en 1921.

10. R. SANDALL, op. cit., p. 292.

11. Bramwell Booth (1856-1929) est le fils ainé de William Booth auquel il succède à la tête de l’Armée du salut de 1912 à 1929.

12. « We are deeply concerned about the war because we believe the peoples of Germany and England are in many ways friendly peoples. The working classes, which constitute the greater part of the population of both countries, notwithstanding their commercial rivalries and the minor différences which affect them, have many things in commons which make for true friendship. The British do not think of the Germans, not the Germans of the British, as they once did. They think of them as their fellow toilers. Many think of them as companions in the conflict for better conditions of life and for the better and kinder treatment of the poor. Some think of them as their fellow Christians ». Bramwell BooTH, The War Cry, 29 août 1914, p. 1.

13. « Once more let me say that i do not look upon this war as being so much a war of peoples as of certain classes. No doubt, now that the grim slaughter and destruction has begun, large parts of the various populations will be deeply stirred and angered. But that is an after-effect. The war itself has been made by the military classes, especially in Germany and Russia. They, and the people who live by manufacturing weapons and the newspapers in their pay, have for years been promoting and fostering the horrid doctrines which we now see worked out in all their ghastly wickedness on the battlefields of Belgium and France [...].

Now we must remember this when we think and speak of what is going on [...]. Let us strive to lay the responsibility on the right shoulders and avoid indulging in bitterness and hatred for whole nations. » Bramwell BooTH, The War Cry, 19 septembre 1914, p. 1.

14. « in the name of the God of love, we must refuse the awful demands which are being made by the god of war to yield to the rage and hate and lust of revenge which are only too awfully manifest around us. We must, by the help of God, keep our tender sympathy with the suffering, for it is the sympathy of Christ. We must cherish and encourage in our hearts pity for the wrongdoers because it is the pity of Christ. We must let our compassion flow out towards, and our prayers ascend for, those who oppose and injure us, because that is of the very spirit and command of Jesus Christ. And above all, we must go on loving our enemies, because to love is of God, and without love towards them it is impossible to known Him, or to please Him, or to be His. » Bramwell BooTH, The War Cry, 7 novembre 1914, p. 1.

15. François Fornachon (1863-1929) est le chef de l’Armée du salut en France de 1907 à 1917.

16. F. FORNACHON, En Avant, 15 août 1914, p. 1.

17. F. FORNACHON, Vive la France, En Avant, 15 août 1914, p. 2-3.

18. British Expeditionary Force.

19. Canadian Expeditionary Force.

20. South African Overseas Expeditionary Force.

21. Australian and New Zealand Army Corps.

22. R. SANDALL, op. cit., p. 293.

23. F. COUTTS, op. cit., p. 26-27.

24. Ce que fait l’Armée du salut pour les blessés, En Avant, 15 mai 1915, p. 1.

25. Armée du salut, Court exposé du travail de l’Armée du salut en France pendant la Grande Guerre, Paris, Armée du salut, 1918, p. 8.

26. Ce que fait l’Armée du salut pour les blessés, op. cit.

27. F. FORNACHON, Ce que j’ai vu en Belgique, En Avant, du 24 avril au 12 juin 1915.

28. En Avant, 16 septembre 1916, p. 1.

29. En Avant, 28 novembre 1914, p. 2.

30. Dans l’Armée du salut, depuis l’origine, le ministère d’officier est mixte. Les femmes ont accès aux mêmes charges et responsabilités que les hommes. Un couple d’officiers ne peut se former que par le mariage entre un officier et une officière, et la proportion d’officières célibataires est plus forte que celle des hommes. R. DELCOURT, op. cit., p. 57.

31. En janvier 1917, il reste 17 000 habitants civils dans la ville de Reims. J.-N. B., « La population de Reims et son arrondissement », Population, octobre 1961, p. 724.

32. Ce que fait l’Armée du salut dans Reims bombardé, En Avant, 15 mai 1915, p. 2.

33. Service historique de la défense (SHD), 16 N 268, pièce non numérotée. Lettre n° 46, 21 mai 1917.

Sur le sujet, lire, par exemple, Catherine COSTE, « Marguerite de Witt-Schlumberger : une femme au service des victimes de guerre », BSHPF 160 (2014), p. 473-489.

34. SHD, 16 N 268, pièce non numérotée. Notes diverses, février 1917.

35. Sur le sujet, lire Hélène TROCME, « Un modèle américain transposé : les foyers du soldat de l’union franco-américaine, 1914-1922 », Les Américains et la France, 1917-1947: engagements et représentations, Paris, Maisonneuve et Larose, 1999, p. 5-23.

36. Emmanuel Sautter (1862-1933) est un industriel, secrétaire général de l’Alliance nationale des Unions chrétiennes de jeunes gens (UCJG/YMCA) de France de 1895 à 1910 puis du Comité universel des UCJG/YMCA de 1910 à 1915.

37. À l’exemple des initiatives de Florence Nightingale durant la guerre de Crimée entre 1854 et 1856.

38. H. TROCME, op. cit.

39. Le décret du 2 décembre 1913 sur l’organisation des armées en campagne prévoyait le partage du territoire en deux zones : la zone des armées (le front, ou l’avant) sous l’autorité du commandant en chef et son Grand quartier général (GQG) et la zone de l’intérieur (l’arrière) sous celle du ministre de la Guerre et de l’État-major de l’Armée. Ce partage en zones se traduisit par l’autorité bicéphale du ministère de la Guerre (service des Œuvres militaires diverses) et du Grand quartier général (service des Dons et Legs) sur les associations civiles en général et les Foyers du soldat de l’Union franco-américaine en particulier.

40. SHD, 16 N 270. Note concernant les foyers du soldat, août 1916.

41. Un quart des foyers de l’UFA sera tenu par des femmes.

42. Jean-François BOULANGER, « Les Américains et la France (1917-1947) », Vingtième Siècle : revue d’histoire, janvier 1998, p. 141.

43. SHD, 16 N 271. Compte rendu au sujet de la réunion des représentants des œuvres de guerre qui a eu lieu le mardi 27 novembre 1917, au ministère de la Guerre.

44. Albin Peyron (1870-1944) est le chef de l’Armée du salut en France de 1917 à 1933.

45. Marc FORISSIER, Un soldat du Christ dans l’Armée du salut : Albin Peyron, Tarbes : Éd. d’Albret, 1958, p. 152.

46. SHD, 16 N 267, pièce n° 9. Demande d’autorisation pour les « Foyers du soldat » de l’Armée du salut, 9 août 1917.

47. Raoul GOûT, Une victorieuse, Blanche Peyron, Paris : Altis, 1942, p. 386.

48. Armée du salut, Court exposé du travail de l’Armée du salut, op. cit., p. 11.

49. SHD, 16 N 267, lettre n° 246. Ve armée, état-major, 1er bureau, n° 4092/L du 29 décembre 1917.

50. Aimé Boisson (1869-1944), officier de l’Armée du salut.

51. Gilbert ABADIE, Aimé Boisson, Paris : Altis, 1955, p. 46.

52. Armée du salut, Court exposé du travail de l’Armée du salut, op. cit., p. 11.

53. Ministère de la Guerre, Instruction sur l’organisation et le fonctionnement des bibliothèques de troupe : catalogue général, Paris : Imprimerie nationale, 1908, p. 7.

54. SHD, 16 N 271, pièce non numérotée, Lettre n° 26.204 du Grand quartier général des armées du Nord et du Nord-Est, 23 août 1917.

55. Archives de l’Armée du salut (AAS), non coté. Ministère de la guerre, Œuvres militaires, 4e bureau, n° 6594/C du 2 août 1918.

56. AAS, non coté. Quartier général territorial du 24 mai 1918.

57. AAS, non coté. Ministère de la guerre, Œuvres militaires, 4e bureau, n° 4782/C du 10 juin 1918.

58. Charles PéAN, A Dieu-vat, Neuchâtel : Delachaux & Niestlé, 1973, p. 67.

59. Armée du salut, Court exposé du travail de l’Armée du salut, op. cit., p. 11-12.

60. M. FORISSIER, op. cit., p. 153.

61. AAS, non coté. Ministère de la guerre, Œuvres militaires, 4e bureau, n° 12082/C du 19 décembre 1918.

62. Evangeline Booth (1865-1950), fille de William Booth, est le chef de l’Armée du salut aux États-Unis de 1904 à 1934.

63. American Expeditionary Force.

64. Evangeline BOOTH — Grace Livingston HILL, The war romance of the Salvation Army, Philadelphia : J. B. Lippincott, 1919, p. 45-46.

65. E. BOOTH, ibid., p. 129 et al.

66. Surnom du fantassin américain, équivalent du « Poilu » français.

67. Le soldat américain perçoit 165 francs de solde mensuelle. Ce budget, supérieur à celui du soldat français, lui offre un fort pouvoir d’achat. Le soldat se voit proposer de verser une partie de sa solde à l’Armée du salut. Par mandat postal, les sommes sont transférées au siège salutiste de New-York. Aux États-Unis, le réseau du millier de postes d’évangélisation salutistes permet de délivrer, sans commission, l’argent aux familles des militaires. E. BooTH, op. cit., p. 50-51.

68. M. FORISSIER, op. cit., p. 153.

69. G. ABADIE, op. cit., p. 46.

70. Archives nationales, 19800035/1408/62733. Dossier Peyron Albin.