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Christophe-Philippe Oberkampf (1738-1815) et l’industrie des toiles peintes en France

L’impact du protestantisme sur son parcours et la création

Aziza GRIL-MARIOTTE

Université de Haute-Alsace

Le 4 octobre 1815, il y a donc un peu plus de deux cents ans, disparaissait Christophe-Philippe Oberkampf, le fondateur de la manufacture de Jouy, considéré sous l’Empire comme l’un des industriels les plus novateurs de son temps. Son parcours est original : d’un côté, il caractérise la situation de l’indiennage dans la seconde moitié du XVIIIe siècle ; de l’autre, il incarne une ascension économique et sociale exceptionnelle. En 1758, à l’âge de 18 ans, il arrive d’Allemagne en France pour répondre au besoin d’ouvriers en indienne. Il est loin d’être le seul dans ce cas, mais peu nombreux seront les ouvriers qui se mettront à leur compte et encore moins ceux qui dirigeront une véritable manufacture. Dans le portrait de chef d’entreprise dressé par Serge Chassagne à travers un important fonds d’archives1, on découvre le parcours d’un ouvrier, devenu sous l’Empire un des plus importants industriels2.

Bien qu’Oberkampf incarne à lui seul l’essor de l’indiennage en France, la postérité n’a retenu que le nom de son entreprise pour désigner un style de quelques motifs, parmi plus de 30 000 dessins, créés entre 1760 et 1821. Son génie est d’avoir réussi à maîtriser tous les aspects – technique, chimique et artistique – d’une production variée. Dans son parcours, le protestantisme est rarement affiché. Or il guide indéniablement certains de ses choix, allant jusqu’à lui inspirer une nouvelle composition de toiles de Jouy.

L’industrie des toiles peintes est longtemps passée pour une activité de prédilection des entrepreneurs protestants. Bien que ce constat soit exact au XVIIIe siècle, il doit être relativisé à propos de l’époque où cette fabrication apparaît en Europe au XVIIe siècle. Lorsqu’en 1686, cédant à la pression des fabricants de soieries et de draps, Louis XIV décrète une prohibition sur les toiles peintes, interdisant les importations mais aussi toutes formes de fabrication, il est difficile d’affirmer que les fabricants soient majoritairement des huguenots. Certains historiens ont vu dans cette prohibition un lien avec la politique religieuse de la monarchie française à l’encontre de la Réforme. Pour Louis Dermigny, la prohibition des toiles peintes résultait d’une influence de Louvois qui avait « d’autant plus délibérément sacrifié cette industrie qu’il la savait presque exclusivement en mains protestantes3 ». Reprenant l’argument de « la ruine et la désertion des ouvriers », Edgard Depitre considérait déjà que les problèmes rencontrés par la Fabrique lyonnaise étaient liés à la révocation de l’édit de Nantes qui avait provoqué l’exode en Suisse des soyeux protestants tandis que l’édit de prohibition aurait eu pour objectif de réprimer les fabricants huguenots d’indiennes4. Herbert Lüthy poussait la comparaison encore plus loin, confondant les deux années – la révocation de l’édit de Nantes en 1685 et la prohibition en 1686 – et mettant en parallèle « les persécutions des commis inspecteurs des manufactures, brisant les moules » et « les convertisseurs bottés et armés » dans les régions du Midi. Dans cet amalgame très excessif, l’industrie des toiles peintes était perçue comme exclusivement exercée par des huguenots, et Lüthy allait jusqu’à affirmer qu’il est « difficile de distinguer l’émigration religieuse de l’émigration économique5 ».

Depuis longtemps, les historiens ont remis en cause l’exagération des conséquences économiques attribuées à l’exode des huguenots au XVIIe siècle. Concernant l’indiennage, aucun chiffre fiable ne permet d’établir qu’il s’agissait, avant la prohibition, d’une production majoritairement exercée par des fabricants protestants. Les premières traces d’impression sur toiles ont été trouvées à Marseille lorsque des indienneurs arméniens, venus de l’Empire ottoman au XVIIe siècle, introduisent ses techniques auprès des maîtres-cartiers6. Après 1686, la franchise du port de Marseille permet aux fabricants d’échapper aux mesures de prohibition. Serge Chassagne note que des huguenots contraints à l’exil en Suisse trouvent alors le moyen de revenir comme ressortissants suisses et s’installent comme commerçant ou indienneur à Marseille7. Le régime de prohibition a entraîné une dispersion des ouvriers en indiennes dans les pays limitrophes. La Suisse, notamment, dispose d’une main d’œuvre bon marché où les fabricants développent pendant cette période les techniques d’impression qui nécessitent des effectifs nombreux. Les ouvriers français qui émigrent en Suisse sont loin d’être tous protestants et les commerçants profitent de l’interdiction de fabriquer les indiennes en France pour développer cette industrie dans leur région. Les pays limitrophes – Suisse, régions allemandes, Hollande et même Angleterre – introduisent et développent cette industrie, alimentant la contrebande des indiennes en France8.

Lorsque la prohibition est levée en 1759, la situation est différente, les liens entre l’industrie de l’impression et le protestantisme apparaissent avec plus d’évidence. Plus de soixante ans de prohibition ont entraîné en France un important retard technologique par rapport à la Suisse et l’Angleterre. Aussi en 1759, lorsque les partisans de la liberté d’imprimer sur toile obtiennent gain de cause auprès du roi grâce, notamment au soutien de la marquise de Pompadour, l’indiennage dépend de l’étranger pour se développer.

Après 1759, les premiers fabricants installés en France sont d’abord des étrangers profitant de la nouvelle législation et insérés dans un réseau. C’est le cas du Suisse Jean Wetter, commerçant en toiles qui avait ouvert une manufacture à Marseille où la prohibition ne s’appliquait pas, et qui s’installe alors à Orange avec des ouvriers spécialisés qu’il fait venir de Suisse. Ou bien ce sont des investisseurs qui parient sur un essor industriel et dont les fabriques reposent sur l’embauche d’ouvriers en indienne qu’ils font venir de l’étranger (voir ill. 1). C’est alors qu’un protestantisme industriel, reflet du goût pour les innovations techniques, commence à s’épanouir dans l’indiennage avant de s’étendre à toutes les industries innovantes au XIXe siècle9. Au milieu du XVIIIe siècle, l’indiennage est encore une production artisanale, mais rapidement les nouvelles techniques importées d’Angleterre (impression à la plaque et au cylindre de cuivre, machine à vapeur) nécessitent des capitaux, la banque huguenote joue alors un rôle important en favorisant les investissements. En quelques décennies, l’indiennage passe d’une production exercée dans des ateliers à des « proto-fabriques »10.

Avant même la levée de la prohibition, les teinturiers sont parvenus à contourner l’interdiction d’imprimer sur toile, en développant les procédés de teinture à la réserve. Cette technique consiste à disposer sur la toile des dessins de cire, appliqués avec des moules en laiton, puis à passer la toile dans un bain de teinture à basse température. La toile est ensuite lavée dans un bain d’eau chaude et la cire laisse alors place à des dessins réservés en blanc sur le fond coloré. Cette technique, importée des Indes où elle est utilisée pour le bleu d’indigo, donne un aspect proche d’une toile imprimée en une couleur. Après plusieurs saisies et débats au Bureau de Commerce, la teinture à la réserve est finalement autorisée en octobre 1757. La fabrication des toiles à la réserve était déjà pratiquée dans des ateliers parisiens ; son autorisation la développe et provoque des confusions entre toiles teintes à la réserve et toiles imprimées au moule, rendant la prohibition intenable11. Lorsqu’Oberkampf arrive en France, il a été embauché par Franz Simon, teinturier d’origine suisse employé par Cottin, un banquier qui a installé dans l’Arsenal une fabrique qui produit des toiles teintes à la réserve, d’après les échantillons conservés12. Il est embauché comme graveur et coloriste, mais on imagine sa déception face à ses teintures de motifs très simples, comparé à ce qu’il a appris chez le fabricant Ryhiner à Bâle ou dans les manufactures de la cour de Lorraine à Mulhouse. La levée de la prohibition et l’arrivée de son frère Frédéric en septembre 1759 vont lui permettre de se mettre à son compte. Quoique la capitale, centre commerçant et artistique, soit un lieu propice à la diffusion des nouveautés, les besoins en eau et en prés le conduisent à décider de s’installer à Jouy-en-Josas dans la vallée de la Bièvre – à proximité de Versailles et de Paris.

L’ascension fulgurante d’un ouvrier en indiennes

Les ouvriers étrangers venus en France pour répondre aux besoins de main d’œuvre dans l’indiennage sont très recherchés. La plupart restent employés dans les manufactures toute leur vie. Durant la décennie qui suit la levée de la prohibition, nombre d’entre eux cherchent à se mettre à leur compte, mais rares sont ceux qui arrivent à développer une véritable fabrique. Lorsqu’Oberkampf imprime, selon la tradition le 1er mai 1760, la première pièce de toile, il possède les connaissances techniques de l’indiennage suisse, mais il n’a que très peu de soutiens financiers et ne dispose pas d’un réseau commercial. L’essai d’anthropologie réalisé par Serge Chassagne montre qu’il est représentatif de la première génération de fabricants (jeune, ouvrier spécialisé, étranger et protestant), mais qu’il a aussi le handicap ne pas être issu du négoce et d’un milieu d’entrepreneurs, même si son père a tenté à plusieurs reprises de s’installer à son compte13.

Son éducation protestante, où labeur et réussite matérielle sont deux éléments importants, explique aussi sa capacité à transformer le petit atelier d’impression en une véritable manufacture. Mais sa mauvaise maîtrise du français et son manque de connaissances juridiques provoquent des déboires financiers avec ses premiers associés. L’arrivée d’un nouvel associé, Sarazin de Maraise, avocat au parlement de Grenoble, originaire du Dauphiné où il se procure des toiles mixtes (lin et coton), lui permet de se relancer. Après avoir mis de l’ordre dans les affaires de la manufacture et obtenu le désintéressement des premiers associés, une nouvelle société est fondée en 1772. Oberkampf profite d’une situation plus que favorable – son frère et lui obtiennent leur naturalisation en 1770, plus de dix ans après leur arrivée à Paris – et d’une période de relative tolérance vis-à-vis des protestants14. Entouré de plusieurs compatriotes et coreligionnaires recrutés par l’intermédiaire de son père en Suisse, il s’emploie à rattraper le retard technique et à former sur place des ouvriers en indienne afin de développer sa fabrique de Jouy. La réussite de la manufacture repose sur un noyau de précieux collaborateurs dont Oberkampf partage la langue et la culture protestante, et d’ouvriers formés depuis leur plus jeune âge, issus de familles locales qui contribuent à implanter l’entreprise dans la vallée de la Bièvre.

En une décennie, Oberkampf augmente considérablement sa production. En 1760, la manufacture imprime 1 700 pièces, contre 12 000 à la manufacture d’Orange la même année ; dix ans plus tard, Jouy produit plus de 25 000 pièces par an, avant d’atteindre, entre 1774 et 1777, plus de 50 000 pièces de toiles peintes15. Ces chiffres progressent encore au XIXe siècle, jusqu’à atteindre près de 90 000 pièces, en 1805. Ils donnent une idée de l’essor industriel de l’entreprise, comparé à la manufacture des frères Petitpierre à Nantes qui ne dépasse pas les 25 000 pièces en 178516. La comparaison est éclairante : cette manufacture a été fondée quelques années après la fin de la prohibition par deux frères originaires des environs de Neuchâtel ; ils ont profité d’une conjoncture analogue à celle d’Oberkampf, avec même des conditions plus favorables en raison de leur origine sociale, leur père possédant une manufacture en Suisse. L’emplacement de Nantes est en outre propice à l’indiennage, avec les eaux abondantes de la Loire ainsi que le port où arrivent drogues et matières premières indispensables. C’est dire que le développement industriel de la manufacture de Jouy résulte aussi de la volonté d’Oberkampf de parvenir à un niveau technique et artistique jamais atteint jusque-là.

Oberkampf et la société protestante

Son ascension sociale, Oberkampf la doit d’abord à ses compétences techniques et à ses talents de chef d’entreprise. Il se fait une idée très autoritaire du manufacturier : « tout ce qui regarde la fabrication jusqu’à l’arrivée des marchandises sur la table où l’on fait les factures de celles qui sont vendues fut conduit par la même personne. Je l’ai pratiqué ainsi jusqu’à présent et la chose est faisable si l’on a les contremaîtres nécessaires pour les différents travaux17 ». L’organisation très hiérarchisée de la manufacture, avec à la tête quelques compatriotes de confiance, lui permet de consacrer beaucoup de temps et d’énergie à se procurer des toiles de coton brut. Par l’intermédiaire du négociant suisse Pourtalès, il achète des toiles de coton des Indes, puis intègre les réseaux internationaux qui lui donnent accès directement aux ventes annuelles de la Compagnie des Indes à Londres. Confronté à l’augmentation des prix, à cause notamment de la guerre d’Indépendance des États-Unis, il sollicite des banques pour acheter d’importantes quantités de toiles. Là encore, il peut compter sur le réseau protestant pour poursuivre son développement économique.

Entre-temps, il s’est allié à une famille de marchands protestants en Normandie, à Rouen, en épousant Marie-Louise Pétineau en 1774. Leur mariage est célébré à la chapelle de l’ambassade de Suède, par le pasteur Carl Friedrich Baer (1742-1784), Alsacien bilingue, théologien cultivé, reçu à la cour du roi de France. Comme nombre de ses coreligionnaires, Oberkampf contracte officieusement une union bénie par un pasteur. Le choix de l’ambassade de Suède est significatif de son intégration dans les milieux luthériens francophiles alors qu’à son arrivée en France, son frère et lui fréquentaient la chapelle de Danemark, comme la plupart des artisans et ouvriers d’art allemands, nombreux à Paris au XVIIIe siècle18. Leurs noms figurent sur le registre des communiants, d’abord comme « graveur », puis pour la dernière fois, en 1764 comme « fabricant de toiles à Jouy19 ». En 1781, il obtient un « Brevet de Permission Royale de se marier à l’étranger » en la chapelle de Hollande qui lui offre la possibilité de régulariser sa situation matrimoniale ainsi que les naissances de ses quatre enfants dont seuls deux, Marie-Julie et Christophe, sont encore vivants20.

Cette alliance dans un milieu commerçant – Pétineau père était marchand de vin – est relativement modeste, mais elle marque une évolution sociale qui reflète la réussite matérielle d’Oberkampf. Il fait preuve d’un certain paternalisme en prenant à sa charge ses jeunes beaux-frères. Le plus jeune, Jacques-François, est placé en pension : Oberkampf entend ainsi lui permettre d’accéder à une instruction qu’il regrette de ne pas avoir reçu. Il contribue ensuite aux affaires de l’entreprise grâce au réseau des commerçants huguenots21. Oberkampf lui délègue les achats de toiles de coton à Londres, à Lorient et jusqu’à Copenhague. La manufacture imprime surtout sur des toiles de coton de qualité supérieure, seuls supports capables de sublimer les dessins des indiennes colorées qui sortent du Cabinet des dessinateurs de la manufacture (ill. 2).

Après la mort de son épouse en 1782, l’essor de la manufacture et la situation sociale d’Oberkampf continuent de progresser. En 1785, son deuxième mariage est révélateur de son attachement au protestantisme, mais également de son ascension sociale : sa seconde épouse, Elisabeth Massieu, est issue d’une famille de banquiers et de négociants protestants de Caen dont le père a été anobli par lettres du roi en 177622. La jeune fille est de bonne famille calviniste, le mariage a lieu encore une fois à la chapelle de Hollande, avec cette fois-ci la permission du roi. De cette union naîtra l’année suivante Alphonse, décédé à 16 ans, puis un an plus tard Émile, qui prendra la succession de son père à la tête de la manufacture (il épousera une fille Joly), puis deux filles en 1794 et 1797, Émilie et Laure, qui épouseront les deux fils Mallet (Louis-Jules et Jacques). Son mariage protestant ne l’empêche pas de faire baptiser ses enfants par le curé de l’église de Jouy-en-Josas, comme la plupart des notables protestants au XVIIIe siècle23.

Ses deux mariages, comme ceux de ses enfants, sont contractés avec des coreligionnaires. Si le contexte industriel leur est indéniablement favorable, de telles unions sont aussi révélatrices de l’importance du protestantisme dans la vie d’Oberkampf. Sa conception de la famille s’en trouve élargie, il se considère comme un véritable patriarche, faisant bénéficier de sa réussite économique aux siens restés en Suisse. Il attire à Jouy ses neveux, Samuel et Gottlieb Widmer, pour les former aux travaux de la manufacture ; Samuel deviendra son principal collaborateur, avant que son fils Émile soit en âge de le seconder24.

Oberkampf est représentatif des grands patrons protestants du XIXe siècle en raison de sa conception du travail, de son intérêt pour les innovations industrielles et de son insertion dans la haute société protestante par les alliances matrimoniales pour lui, pour ses enfants et plus largement sa famille. Ces caractéristiques, il les partage avec d’autres entrepreneurs protestants de la même époque. Par exemple avec Nicolas Schlumberger en Alsace au début du XIXe siècle, dont les ancêtres sont aussi originaires du Wurtemberg et dont le sens des affaires, les relations à l’étranger et la capacité à rapporter en contrebande les innovations anglaises invitent au rapprochement avec Oberkampf. On retrouve chez les deux hommes un même goût pour le travail, l’investissement et l’innovation technique, l’organisation sociale et l’attention au bien-être de ses ouvriers.

La place du protestantisme dans la création des motifs

Si de grandes dynasties protestantes ont durablement marqué la production d’art industriel – Oberkampf et les toiles de Jouy, Haviland et la porcelaine de Limoges25 pour citer les plus connus –, c’est aussi en raison d’une alliance entre innovation technique et créativité artistique. À des époques très différentes, ces deux manufactures se distinguent par leur collaboration avec des artistes capables de comprendre les nécessités techniques d’une production industrielle, Jean-Baptiste Huet à Jouy et Félix Bracquemond à Limoges. Oberkampf est particulièrement attentif à la création des motifs dont dépend la vente des toiles : les impressions sont d’abord le reflet du goût et de la mode. Il accorde donc une grande importance à la formation des dessinateurs et invite des artistes à faire preuve d’inventivité et d’originalité. Les thèmes décoratifs des toiles de Jouy reflètent une époque, un style, car c’est le goût du consommateur qui dicte la création artistique.

La collaboration d’Oberkampf avec Jean-Baptiste Huet, peintre de l’Académie royale de peinture et de sculpture, commence en 1783 avec la commande de la célèbre composition représentant Les Travaux de la manufacture. Ce dessin inaugure une relation féconde entre le fabricant et l’artiste qui dure jusqu’à la mort de celui-ci en 1811. À quelques exceptions près, Oberkampf intervient relativement peu dans la création de ces compositions de « meubles à personnages » selon les termes de l’époque, dont la fabrication s’est répandue dans les manufactures françaises avec l’introduction de la technique d’impression à la plaque de cuivre importée d’Angleterre.
Pendant longtemps, ce genre de toiles imprimées en une seule couleur reste influencé par le goût anglais, scènes champêtres et représentations de chasses mettant en scène les plaisirs de l’aristocratie à la campagne26. Lorsque Huet réalise ses premiers dessins de meubles, la manufacture de Jouy imprime ce genre de toiles depuis le milieu des années 1770 et il ne fait que reprendre des thèmes couramment répandus. Néanmoins, en faisant appel à un artiste reconnu, Oberkampf entend donner une nouvelle envergure artistique à ce genre de toiles, produites également dans les manufactures nantaises, puis rouennaises. Rapidement, grâce aux dessins de Huet, les meubles à personnages de Jouy deviennent des produits recherchés, vendus en grande quantité par la manufacture et imprimés à façon pour des commerçants en gros de toiles27.

Ces impressions figuratives reprennent des dessins composés de scènes de genre, se référant à des thèmes littéraires ou mythologiques, ou encore à des événements historiques ou contemporains. Au XVIIIe, les meubles à personnages sur des thèmes d’actualité sont fort appréciés du public puisque les manufactures de toiles peintes, à Jouy comme à Nantes, proposent régulièrement de nouveaux motifs en lien avec des événements contemporains, diffusés par la gravure. Le textile imprimé apparaît parfois comme le support d’une véritable gazette illustrée, mais le maintien du succès de certains thèmes pendant plusieurs décennies contribue à faire évoluer une scène d’actualité en sujet historique. À Jouy par exemple, les toiles imprimées au début des années 1780 sur le thème de la guerre d’indépendance d’Amérique continuent à être fabriquées et commercialisées au XIXe siècle28.

Cette mode se traduit en 1789 et 1790 par plusieurs compositions révolutionnaires dessinées par Huet, représentant l’actualité politique avec « Louis XVI, Restaurateur de la Liberté » (ill. 3) et la « fête de la Fédération ». Dans la première le titre « Louis XVI, Restaurateur de la Liberté » apparaît sous forme d’une inscription dans une banderole tenue par un amour. Cette composition présente l’originalité de se référer à une actualité politique particulièrement récente puisque le thème reprend aux Décrets du 4 août 1789 qui abolissent les privilèges, l’article 17 qui stipule que « l’Assemblée nationale proclame solennellement le Roi Louis XVI “Restaurateur de la Liberté française”29 ». Le monarque est aisément identifiable, mais sa représentation en empereur romain contraste avec l’idée d’un roi de tous les Français. C’est plutôt l’idée d’un roi juste qui est mise en valeur par la balance, emblème de la Justice et représentant l’égalité dans l’Iconologie de Cesare Ripa, idée renforcée par la présence du personnage de la Justice à ses côtés30.

Une comparaison de la maquette dessinée par Huet et des meubles commercialisés par la manufacture montre que le thème d’origine était totalement différent (ill.4). Le dessin met en scène un « Louis XVI, protecteur de la Religion », peu de temps après la promulgation de l’édit « de Tolérance » en 1787 qui avait accordé l’état civil aux réformés. Si aucune inscription ne fait référence à cet édit, la mise en scène du roi ayant à ses côtés la Justice tenant une lance coiffée d’un bonnet phrygien et accueillant une Religion voilée reconnaissable à son crucifix, entourée de Mars et de Minerve, permet de lire les autres motifs. La scène de fête, le paysage maritime, l’allégorie de l’agriculture dans le cartouche donnent l’image d’une France prospère tandis que la lance, coiffée du bonnet phrygien, symbolise une certaine liberté recouvrée par les protestants. Le dessin est donc une véritable célébration de l’instauration de l’édit de Tolérance dont bénéficiaient notamment Oberkampf et sa famille en tant que Français protestants. Tout concours à interpréter cette composition comme une allusion à la politique de Louis XVI en faveur des protestants. Cette impression est renforcée par la présence de deux personnages qui assistent à la scène : Mercure, le messager des dieux reconnaissable à son caducée, qui accompagne un représentant du peuple, vêtu simplement, pieds nus, déroulant un manuscrit où est censé figurer le texte de l’Édit. À ce stade du dessin, des inscriptions pouvaient être encore ajoutées par le dessinateur ou à la demande du fabricant au moment de la gravure de la planche.

Ce dessin n’est pas sans rappeler l’estampe « À la gloire de Louis XVI », éditée en 1788 par le graveur Antoine Louis Sergent (1751-1847) à l’occasion de la publication de l’édit de Tolérance, le 29 janvier 1788 (ill. 5)31. Louis XVI,

Ill. 1 Échantillons de toiles peintes fabriquées à Marseille pendant la prohibition, Manuscrit du duc de Richelieu, 1736, vol.1, fol° n°29. Bnf, Cabinet des Estampes, cote LH 45.

Ill. 2 Robe à l’anglaise taillée dans une perse de Jouy, composée d’un caraco, d’un jupon et d’un manteau, empreinte partielle datée de décembre 1785, D8209.

Ill. 3 Louis XVI, Restaurateur de la Liberté, dessinateur Jean-Baptiste Huet, impression à la plaque de cuivre, 1789, D140, rapport 100 x 92 cm.

Ill. 4 Jean-Baptiste Huet, projet dessiné pour impression à la plaque de cuivre, 1788, 102,5 x 92,5 cm, plume, lavis gris.

Ill. 5 « À la gloire de Louis XVI : sous le règne de François Ier beaucoup de François séduits par la doctrine de Calvin abandonnèrent leur patrie pour suivre leur maître à Geneve... : [estampe] / M... Suzanne, ; C... C... sculp. 1788 », 1788. Bnf, Cabinet des Estampes, RESERVE QB-370
(47)-FT 4.

Ill. 6 Détails. Louis XVI, Restaurateur de la Liberté, dessinateur Jean-Baptiste Huet, impression à la plaque de cuivre, 1789, D140, rapport 100 x 92 cm.

entouré de Minerve et de la Justice recevant des mains de Chronos – Le Temps – le texte de l’édit, est accueilli par la France et acclamé par le peuple.entouré de Minerve et de la Justice recevant des mains de Chronos – Le Temps – le texte de l’édit, est accueilli par la France et acclamé par le peuple. La mise en scène du roi obéit à une esthétique de l’imagerie religieuse que Huet ne reprend pas alors que sa composition doit orner les intérieurs, mais on retrouve chez lui la volonté de rendre hommage à la politique de Louis XVI en faveur des protestants puisque le personnage du Temps, accompagné d’un angelot soufflant dans la tompette de la renommée, est assis sur les feuillets de la « Révocation de l’édit de Nantes » raturés et qu’il tend au souverain le texte du nouvel édit portant l’inscription « Fastes de Louis XVI, Lois du 29 janvier 178832 ». La conclusion du texte accompagnant la gravure commente la mise en scène : « il était réservé à la justice et à la bonté de Louis XVI de rappeler dans ses États ses enfants proscrits en fixant par son Édit du 29 janvier 1788 leur état civil ».

L’année 1787 est, pour Oberkampf, riche en événements qui ne concernent pas seulement sa confession protestante. Dès le mois de mars, plusieurs mois avant l’édit de Tolérance, Oberkampf se voit décerner des lettres de noblesse. Déjà en 1783, l’obtention du titre de manufacture royale a récompensé le haut niveau artistique et technique atteint depuis l’impression de la première toile en 1760, mais cette distinction, très utile administrativement, Oberkampf la partage avec d’autres fabricants. L’obtention des lettres de noblesse donne une idée de sa propre ascension économique et sociale. On peut supposer qu’en sollicitant Jean-Baptiste Huet en 1788 pour mettre en scène Louis XVI dans un meuble à personnages, le fabricant souhaitait davantage rendre hommage à la politique de Louis XVI en faveur des protestants qu’exprimer sa gratitude pour ce titre de noblesse. Mais en juillet 1789, les événements révolutionnaires rendent ce dessin inutilisable, alors qu’il est en cours de gravure – il faut au moins six mois pour graver une planche de cuivre. Oberkampf entend néanmoins poursuivre sa réalisation car l’achat du dessin, de la plaque de cuivre et le coût de sa gravure représentent un investissement important. Il apporte à cette fin plusieurs modifications : il commence par supprimer la croix dans la main de la Religion, qui devient le personnage de la Liberté. Le jeune homme pieds nus est complètement transformé pour apparaître sous les traits d’un citoyen, portant redingote et chaussures. Dans le médaillon, les amours sont remplacés par la Bastille en cours de destruction, d’après une peinture d’Hubert Robert, La Bastille dans les premiers jours de sa démolition, présentée au Salon en septembre 1789. Avec l’ajout de ce motif et l’inscription « LA DÉMOLITION DE LA BASTILLE 14 JUILLET 1789 » sur une banderole dans le médaillon, Oberkampf donne une nouvelle actualité à la composition (ill. 6). Le thème du dessin devient alors Louis XVI, Restaurateur de la liberté, agréant la cocarde tricolore sur le tricorne du citoyen. L’ensemble de la composition et les motifs sont identiques, mais Louis XVI en empereur romain, toujours accompagné de la Justice, accueille le personnage de la Religion, transformée en Liberté. Tout autour, les divinités antiques et les symboles évoquant la royauté française (chêne, fleurs de lys), ainsi que l’allégorie des arts au pied du roi, le lion symbolisant la force et le coq la France, sont conservés.

La toile est vendue à partir de la fin de 1789 sous le titre de Louis XVI, Restaurateur de la Liberté, mais cet intitulé est rapidement changé car trop lié à la personnalité du roi. Dès juin 1790, Oberkampf indique à ses clients : « le Dessin n° 140 s’appelle le dessin de la Révolution, je vous prie de le vendre sous ce nom33 » ; certains commerçants le nomment « Démolition de la Bastille », reprenant l’inscription du médaillon34. La modification du titre donne au dessin une espérance de vente plus longue, malgré la représentation de Louis XVI. En mars 1793, Oberkampf écrit : « il me reste très peu de dessin de la […] révolution & je continue à les vendre au même prix que les autres meubles35 ». Peu après, la Terreur l’oblige à liquider ses dernières pièces du dessin de La Révolution 3 livres moins cher par aune36. Les nombreuses pièces textiles conservées dans les collections publiques et privées sont révélatrices du succès de ce dessin dont la manufacture a commercialisé, en quelques années, d’importantes quantités. Ce n’est pas la première fois qu’Oberkampf modifie un dessin avant ou après sa gravure pour s’adapter à l’évolution de l’actualité, mais ici le sujet est complètement transformé. C’est le seul cas où le protestantisme a été à l’origine d’une composition originale, même si celle-ci est restée à l’état de projet, les événements révolutionnaires contraignant le fabricant à en modifier le thème sans que le dessin lui-même soit beaucoup transformé.

Les scènes religieuses illustrant l’Ancien Testament sont absentes des impressions de Jouy : non qu’Oberkampf refuse de revendiquer ainsi son appartenance à la religion réformée à l’instar d’autres manufacturiers, mais simplement parce que ces motifs ne correspondent pas au goût des consommateurs. Lorsque les manufactures nantaise et rouennaise s’emparent des sujets bibliques dans les années 1820, la manufacture de Jouy a définitivement abandonné l’impression des meubles à personnages qui sont devenus des produits populaires et bon marché37. Émile Oberkampf poursuit la politique d’une production haut de gamme après la mort de son père en 1815 et se refuse à imprimer sur des toiles ordinaires des compositions stéréotypées, devenues supports de messages didactiques. Le choix de sujets bibliques est certes révélateur de l’appartenance à ces fabricants à la religion réformée, à Nantes comme à Rouen, mais il ne faut pas oublier que ces produits répondent à l’attente des consommateurs. Plus tard, les mêmes manufactures n’hésiteront pas à mettre en scène la vie de Jésus, les saints sacrements, séduisant la clientèle en reprenant des imageries catholiques : là encore, le goût des consommateurs dicte le choix des entrepreneurs, et non leur attachement au protestantisme.

Le destin d’Oberkampf est d’abord celui d’un homme qui a dû déployer ses compétences d’indienneur pour parvenir à un niveau technique et artistique jamais atteint auparavant. Son parcours s’apparente à celui d’un self made man dont la vie est devenue un modèle au XIXe siècle pour plusieurs générations d’industriels, sans pour autant être un exemple à reproduire car Oberkampf est d’abord un homme de son temps, né au siècle des Lumières, profitant de la paix relative accordée aux protestants en France à la veille de la Révolution et du formidable essor économique pendant les périodes révolutionnaires (excepté la Terreur) et l’Empire. Pour Serge Chassagne, Oberkampf a pu tenter très jeune sa chance et quitter sa situation d’ouvrier car il pouvait compter sur les « solidarités de la Diaspora protestante ». Il incarne l’essor d’une industrie et sa réussite matérielle s’inscrit dans la lignée du capitalisme protestant, mais sa sensibilité artistique le distingue des entrepreneurs mulhousiens dont les manufactures succèderont en réputation à celle de Jouy.

Oberkampf conçoit les toiles peintes comme une industrie répondant à une exigence de nouveauté. Il s’efforce d’anticiper, ou du moins de suivre de près, les nouveautés en matière de mode parce qu’une production industrielle est soumise à des contraintes techniques qui nécessitent un temps incompressible. Oberkampf s’avère être un « détecteur de tendance » et un « styliste » avant l’heure. Il développe une production de toiles polychromes pour le vêtement, introduisant régulièrement de nouveaux dessins jusqu’à imaginer des collections renouvelées chaque année, et ne poursuit la fabrication de motifs antérieurs que lorsqu’ils sont encore largement demandés par les consommateurs.

Sa réussite économique repose sur sa capacité à diversifier ses productions, en privilégiant le haut de gamme : même pour les impressions ordinaires, il préfère toujours des toiles de coton de qualité supérieure qui donnent un plus bel aspect une fois l’impression terminée. C’est sans doute par sa capacité à se renouveler sans cesse qu’il apparaît comme un exceptionnel chef d’entreprise : « il faudrait pouvoir lire dans l’avenir, écrit-il, pour savoir quel genre succèdera à celui qui existe alors car de tous temps il y a eu un genre plus recherché que les autres et cela sera toujours38 ». L’actualité politique a eu raison de sa volonté de rendre hommage aux mesures de Louis XVI en faveur des protestants, et il adhère bien volontiers aux idéaux révolutionnaires, tout en restant modéré dans son engagement. Son soutien financier à la cause révolutionnaire et à ses ouvriers reflète davantage un pragmatisme économique qu’un véritable engagement politique.

Les compositions figuratives, surnommées toiles de Jouy à la fin du XIXe siècle, ne forment qu’une infime partie des centaines de motifs créés chaque année à la manufacture. L’essentiel est composé de formes ordinaires, fleurs stylisées, formes géométriques, employées dans le vêtement populaire. Oberkampf se distingue de ses concurrents par la création d’impressions imitant les très belles indiennes, ces étoffes forment alors des produits à part dont le luxe lui assure une clientèle à la cour et à l’étranger.

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1. Les archives de la manufacture de Jouy appartiennent à la banque Neuflize OBC (Neuflize, Schlumberger, Mallet), elles sont actuellement en dépôt au centre des archives du monde du Travail (CAMT) à Roubaix. Je remercie Dominique Leudet, sous-directeur de la Banque de Neuflize de m’avoir autorisée à les consulter.

2. Serge CHASSAGNE, Oberkampf un entrepreneur capitaliste au Siècle des Lumières, Paris : Aubier, 1980, réédition 2015.

3. Louis DERMIGNY, Cargaisons indiennes. Solier et Cie. 1781-1793, Paris : SEVPEN, 1960, t. I, p. 205.

4. Edgard DEPITRE, La toile peinte en France au XVIIe et au XVIIIe siècle, industrie, commerce, prohibition, Paris : M. Rivière, 1912.

5. Herbert LÜTHY, La Banque protestante en France de la Révocation de l’Edit de Nantes à la Révolution, t. II : De la Banque aux finances, Paris : SEVPEN, 1961, p. 663.

6. Olivier RAVEUX, « Espaces et technologies dans la France méridionale d’Ancien Régime : l’expérience de l’indiennage marseillais (1648-1793) », Annales du Midi, revue de la France méridionale, L’industrie textile sous l’Ancien Régime 116 n° 246 (2004), p. 155-170.

7. Il cite notamment le cas de Jean Pelet, réfugié à Genève vers 1690, s’installant à Marseille vers 1720 avec plusieurs ouvriers imprimeurs : Serge CHASSAGNE, Le coton et ses patrons : France 1760-1840, Paris : EHESS, 1991, p. 75.

8. Voir Olivier NANTOIS, « Le commerce des toiles peintes et imprimées “indiennes” en France au temps de la prohibition (octobre 1686 – septembre 1759) », thèse de doctorat d’histoire sous la direction de Jean-Pierre Poussou, Paris-IV, 2006.

9. Michel HAU, Familles industrielles d’Alsace, Strasbourg : Oberlin, 1989, p. 215-223.

10. S. CHASSAGNE, op. cit., p. 148-169.

11. Sur les débats au Bureau du Commerce, voir Serge CHASSAGNE, La manufacture de toiles imprimées de Tournemine-les-Angers (1752-1820), Paris : Klincksieck, 1971.

12. « Manufacture de toiles établie dans une des cours de l’Arsenal » dans le Journal Œconomique ou Mémoires, notes et avis sur les arts, l’agriculture, le commerce [Texte imprimé] et tout ce qui peut y avoir rapport, ainsi qu’à la conservation et à l’augmentation des biens de famille. &c. Juin 1755, p. 143-145. Les échantillons qui accompagnent l’article sont des toiles à la réserve très ordinaires.

13. Serge CHASSAGNE, « Les entrepreneurs de la première génération : essai d’anthropologie » in op. cit. (1991), p. 93-100.

14. Patrick CABANEL, Histoire des protestants en France, XVIe-XXIe siècles, Paris : Fayard, 2012, p. 868.

15. Une pièce de toile correspond à la longueur totale d’un rouleau, soit environ 20 aunes. La longueur de l’aune varie d’une région à l’autre, à Jouy, elle mesure 1,188 m.

16. Isabelle MARGERAND, « la manufacture Petitpierre, fabrique de toiles imprimées à Nantes (1770-1847) », mémoire de maîtrise en Histoire de l’art sous la direction du professeur Alain Mérot, Université Paris IV-Sorbonne, 2000-2001, p. 17-18.

17. Archives Nationales (AN), Centre des Archives du Monde du Travail à Roubaix (CAMT), 41AQ.1/83.

18. Janine DRIANCOURT-GIROD, L’insolite histoire des luthériens de Paris, de Louis XIII à Napoléon, Paris : Albin Michel, 1992, p. 159-165.

19. Ibid., p. 160.

20. S. CHASSAGNE, Oberkampf, un entrepreneur capitaliste au siècle des Lumières, Paris : Aubier, 1980, p. 78.

21. Ibid., p. 302.

22. S. CHASSAGNE, op. cit. (1980), p. 80.

23. Ce constat n’est valable que pour les enfants nés de son premier mariage (Anne en 1775, Marie-Julie en 1777, Christophe en 1779 et Augustin en 1781). Tandis que des quatre enfants nés de son second mariage (Alphone en 1786, Emile en 1787, Emilie en 1794 et Laure en 1797), seules ses deux dernières filles auraient pu être baptisées par un pasteur, mais Oberkampf préfère sans doute respecter la tradition locale. Déjà en 1775, sa première fille est présentée aux fonts baptismaux par le marquis d’Harcourt-Beuvron, seigneur de Jouy et sa fille, preuve de sa volonté de s’insérer dans l’élite locale. Voir s. CHASSAGNE, op. cit. (1980), p. 79.

24. Samuel deviendra l’associé d’Émile en 1820 pour poursuivre l’activité de la manufacture de Jouy, mais face à l’ampleur de la tâche et aux multiples difficultés économiques auxquelles il doit faire face, il se suicide le 9 mai 1821. Émile s’associe avec un commerçant de Rouen Barbet, puis lui cède l’entreprise en décembre 1822. Gottlieb Widmer, plus jeune, reste jusqu’au bout, retiré il se consacre à l’écriture d’un récit hagiographique retraçant l’histoire de la manufacture Mémorial de la manufacture, manuscrit de 453 pages.

25. Voir Nathalie VALIÈRE, Un Américain à Limoges : Charles Edward Haviland Porcelainier, Tulle : Lemouzi, 1992.

26. Aziza GRIL-MARIOTTE, Toiles de Jouy. Histoire d’un art décoratif, Rennes : PUR, 2015, p. 53-61.

27. L’impression à façon consiste à imprimer des toiles fournies par les marchands qui choisissent eux-mêmes les modèles et paient la façon. Oberkampf la réserve à des commerçants qui lui envoient des quantités importantes de toiles bruts et seulement pour l’impression des plaques de cuivre, puis plus tard des cylindres.

28. A. GRIL-MARIOTTE, Op. Cit., p. 220.

29. An, Série Lois, Décrets et Originaux, A*186.

30. Iconologie ou explication nouvelle de plusieurs images, emblèmes et autres figures… tirée des Recherches et Figures de CESAR RIPA, moralisée par Baudoin, Paris, 1664.

31. « Allégorie de l’Édit de 1787 », Acte des journées d’études sur l’Édit de 1787, textes réunis par A. Encrevé et C. Lauriol, BSHPF 134 (1988), p. 307.

32. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6950686t

33. Oberkampf aux frères Berthault et Cie de Nantes, 28 juin 1790 (AN, CAMT, 41AQ82.113).

34. Vincent Thoré de La Flèche à Oberkampf, 21 septembre 1791 (MTJ, 980.12.164).

35. Oberkampf à Pont Rainaldis & Cie de Lyon, 14 mars 1793 (AN, CAMT, 41AQ83.116).

36. Oberkampf à Cretel de Rouen, 12 Frimaire an 3 (2 décembre 1794) (AN, CAMT, 41AQ83.572).

37. Par exemple une composition sur le thème de « Moïse sauvé des eaux » vers 1825 par la manufacture Petitpierre à Nantes ou encore « l’histoire de Joseph », manufacture nantaise années 1820.

38. AN, CAMT 41AQ1.83.