Jean-Thierry Du Pasquier (1944-2015)
Dans l’esprit et dans le cœur de ceux qui l’ont connu, la place de Jean-Thierry Du Pasquier restera longtemps marquée. Les autres doivent savoir ce qu’ils lui doivent, pour que tous partagent l’émotion provoquée par sa mort en juillet 2015, à l’âge de 71 ans, et la reconnaissance suscitée par une vie riche de compétences, de dévouement et d’attachements mis au service, en particulier, du protestantisme et, tout spécialement, de la Société de l’histoire du protestantisme français.
Dès 1976, Jean-Thierry Du Pasquier fut nommé membre associé, l’un des plus jeunes, de notre Comité. Son titre principal à entrer rue des Saints-Pères, il l’avait acquis deux ans plus tôt en publiant, aux éditions de La Baconnière, un ouvrage intitulé, tout simplement, La famille Du Pasquier, l’année même de son mariage avec Mlle Marie-Laure Bozo, dont l’ascendance protestante était repérable dès la fin du xvie siècle. La sienne remontait bien plus haut, à ce Rollin dou Pasquier établi à Fleurier, dans le canton de Neuchâtel, dans la deuxième moitié du xive siècle. Il ne s’agissait pas seulement de donner corps à l’esprit de famille, si développé chez J.-Th. Du Pasquier : à trente ans, il livrait une contribution considérable à l’histoire du protestantisme, sous la forme non subalterne de la généalogie, à laquelle, depuis sa collaboration précoce à la revue Héraldique et Généalogie, il devait consacrer tant de science et d’énergie. Ainsi, dès 1977, il fonda avec d’autres, au sein de notre Société, le Centre de généalogie protestante, une mine dont notre collègue extrayait, par une sorte de miracle périodiquement renouvelé, les précieux Cahiers de généalogie à la couverture rouge. En 1985, prolongement du livre précédent, parut aux éditions Christian Généalogies huguenotes, somme devenue indispensable dans laquelle J.-Th. Du Pasquier reconstituait, au prix d’une recherche minutieuse et sûre, l’ascendance de vingt-quatre familles protestantes de France dont beaucoup des membres étaient disséminés en Europe et dans le monde.
L’ouverture à l’extérieur était en effet l’un des traits marquants de notre collègue. En témoigne au premier chef son engagement au sein du Comité protestant des amitiés françaises à l’étranger, dont il fut secrétaire général, président, enfin président d’honneur. Dans les réunions de descendants de huguenots régulièrement organisées, il se sentait à l’aise. De fait, il y était chez lui. Il était encore chez lui parmi les membres de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, dans la branche française du Grand Bailliage de Brandebourg, dont l’œuvre caritative est bien connue : il en avait fait, au cours d’une conférence rue des Saints-Pères, une présentation remarquée. Est-ce ce sens de l’espace, ce goût du grand large, venu peut-être aussi de ses père et grand-père havrais, qui nourrit sa passion pour la mer, en particulier pour la chasse à la baleine dont il était un expert reconnu et passionné, auteur de deux ouvrages sur le sujet et titulaire de la médaille de l’Académie de Marine ? Le chevalier de Saint-Jean, et de la Légion d’honneur, était un tempérament original, et pour cela aussi, nous l’aimions.
En 1989, J.-Th. Du Pasquier devint membre titulaire du comité de la SHPF, et rejoignit son bureau, en tant que trésorier. Il était là dans son élément. En effet, diplômé de l’École des hautes études commerciales, il s’était engagé dans une carrière de financier qui l’avait conduit à la banque labellisée protestante Odier-Bungener-Courvoisier, et pour finir à la présidence du Conseil de gestion financière. Vingt ans durant, notre Société a bénéficié de sa compétence dévouée, tout comme sa paroisse de la rue Cortambert, aujourd’hui Église protestante unie de l’Annonciation, dont il était également trésorier.
Aussi est-ce notre Comité unanime qui le porta à la présidence de la SHPF. De 2003 à 2012, puisque son mandat fut renouvelé, il exerça cette fonction avec un inlassable dévouement, présidant nos séances et nos assemblées générales avec bonne humeur, représentant dignement et efficacement la Société au sein des organismes associés comme auprès des instances extérieures, ne ménageant ni son temps ni ses déplacements. Et il le faisait avec une modestie qui le distinguait. De cela aussi, nous savons gré à notre président honoraire. Et cette gratitude, nous prions sa famille d’en accepter l’expression vive et sincère.
Laurent Theis
Président honoraire de la SHPF