Avant-propos
Naguère, l’Histoire de l’édition française1 tout comme la synthèse d’Élisabeth Parinet (2004)2 accordèrent une part congrue à l’étude de la bande dessinée dans l’ensemble du marché éditorial français, la bande dessinée faisant l’objet de plus amples développements dans les histoires de la presse destinée à la jeunesse3. Une approche scientifique de l’histoire de la bande dessinée a été rarement adoptée et privilégia plutôt les études de presse4.
Pour autant, depuis une dizaine d’années, de plus en plus de travaux et de synthèses historiques sont consacrés à la bande dessinée : la dimension artistique5 comme l’histoire des représentations6 ont constitué un premier angle d’attaque privilégié. Les périodes anciennes de l’histoire de la bande dessinée sont mieux connues7. Les périodes plus récentes sont également bien investies par la recherche académique. Les supports de la bande dessinée tels que l’album8 comme les acteurs de la production de bande dessinée commencent aussi à être examinés : les auteurs sont désormais étudiés, soit en dressant des monographies9, soit en réalisant des portraits de groupe10 ; des éditeurs font l’objet aussi de monographies11 enfin, la réception de la bande dessinée a fait l’objet de récents programmes de recherche régionaux12.
L’objectif de ce dossier est donc de donner un aperçu de ce renouvellement historiographique en proposant un ensemble d’études consacrées à l’histoire de l’édition de la bande dessinée au sens large. À rebours des approches monographiques privilégiant l’étude du contenu des bandes dessinées et des représentations ainsi véhiculées13, les travaux réunis se montreront sensibles à des acteurs clés de la chaîne éditoriale au xxe siècle : les maisons d’éditions, les hommes et les femmes qui les animent comme les relations complexes qui peuvent les unir avec les créateurs de bande dessinée.
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1 Henri-Jean Martin et Roger Chartier (dir.), Histoire de l’édition française, Paris, Fayard, 1989-1991.
2 Élizabeth Parinet, Une histoire de l’édition à l’époque contemporaine (xixe-xxe siècle), Paris, Le Seuil, 2004.
3 Alain Fourment, Histoire de la presse des jeunes et des journaux d’enfants (1768-1988), Paris, Éd. Éole, 1987.
4 Pascal Ory, Le petit nazi illustré. Vie et survie du Téméraire (1943-1944), Paris, Nautilus, 2002 [1e éd. : 1979].
5 Laurent Martin, Pascal Ory et Sylvain Venayre (dir.), L’art de la bande dessinée, Paris, Citadelles & Mazenod, 2012.
6 Par exemple Philippe Delisle, Bande dessinée franco-belge et imaginaire colonial des années 1930 aux années 1980, Paris, Karthala, 2016.
7 Camille Filliot, La bande dessinée au siècle de Rodolphe Töpffer : catalogue commenté des albums et feuilletons publiés à Paris et à Genève de 1835 à 1905, thèse de doctorat en lettres modernes, Université Toulouse 2, 2011.
8 Sylvain Lesage, Publier la bande dessinée : les éditeurs franco-belges et l’album, 1950-1990, Villeurbanne, Presses de l’ENSSIB, 2018.
9 Julien Baudry, La bande dessinée entre dessin de presse et culture enfantine : relecture de l’œuvre d’Alain Saint-Ogan (1895-1974), thèse de doctorat en histoire et sémiologie de l’image, Université Paris 7, 2014.
10 Jessica Kohn, « Travailler dans les Petits Mickeys ». Les dessinateurs-illustrateurs en France et en Belgique de
11 Benjamin Caraco, Renouvellement et montée en légitimité de la bande dessinée en France de 1990 à 2011 : histoire de L’Association et de ses auteurs, thèse de doctorat en histoire contemporaine, Université Paris 1, 2014 ; Florian Moine, Casterman (1919-1999) : une entreprise du livre, entre Belgique et France, thèse de doctorat en histoire contemporaine, Université Paris 1, 2020.
12 mediabd.citebd.org.
13 Tangi Villerbu, BD Western. Histoire d’un genre, Paris, Karhala, 2015.