Book Title

Isabelle Antonutti (dir.) assistée de Jean-Charles Geslot, Amélie Jehan, Agnès Sandras et Cécile Swiatek, Figures de bibliothécaires

Préface de Jean-Yves Mollier ; Villeurbanne, Presses de l’enssib (Papiers), 2020 ; 310 pages, ill. couleur et N & B. 16 x 24 cm. [29 €] – ISBN ; 978-2-37546-135-8

Guillaume FLAMERIE de LACHAPELLE

Université Bordeaux Montaigne

L’ouvrage ici recensé présente cent bibliothécaires (dont vingt et une femmes) ayant marqué les xixe et xxe siècles. Pour ce faire, Isabelle Antonutti a coordonné les efforts de soixante-deux rédacteurs.

L’introduction, due à la directrice de l’ouvrage, brosse efficacement un panorama du métier de bibliothécaire dans la période considérée en en décrivant les principaux aspects, sans négliger la vie personnelle. Elle fournit également quelques données statistiques sur les fonctions, la formation, la production écrite, l’origine familiale des cent individus retenus. Puis sont explicités les critères de sélection et les principes de rédaction des notices ; après les éléments d’état-civil viennent successivement un résumé des éléments saillants de la carrière et une biographie retraçant « la vie personnelle, l’action en bibliothèque et l’implication dans la société ». Chaque fiche, généralement longue de deux pages, est ­accompagnée d’une ou plusieurs illustrations et d’indications bibliographiques.

À travers ces cent bibliothécaires émergent, conformément au vœu même de I. Antonutti, différents profils ; l’historien (Jean Adhémar ou G. Duplessis pour l’histoire de l’art ; Jean Babelon pour la numismatique), l’homme de lettres (Georges Bataille1), le bâtisseur (Jean Bleton), le catalographe (Armand Boutillier du Retail), le réformateur (Julien Cain), la bibliographe (Louise-Noëlle Malclès), le fondateur (Jules Cousin), les pionniers de la lecture publique (René Fillet) ou de la bibliothèque jeunesse (Marguerite Gruny), etc. Même le mondain est représenté (Charles-Edmond Chojecki). Toutefois, aucun de ces types n’est là à l’état parfaitement pur, tant il est vrai que le statut de bibliothécaire requiert une grande variété de compétences et de pratiques. Nous laissons à chacun le plaisir de découvrir ces personnages, tous des précurseurs à un degré ou à un autre, certains même visionnaires, tel Henry Joly, qui annonce en 1928 « le jour où le lecteur, sans quitter son studio, verra à son appel n’importe quel livre, n’importe quel recueil d’estampes, projeté de son dépôt, même page à page, sur l’écran qui constituera la pièce maîtresse de toute table de travail. » Les membres de la Société des bibliophiles de Guyenne liront eux avec un intérêt particulier les pages consacrées à celui qui en fut l’un des membres les plus éminents, Louis Desgraves. Ce dernier contribua puissamment à la transformation du Bulletin de la Société des bibliophiles de Guyenne en une publication à caractère international ; la Revue française d’histoire du livre que le lecteur tient en ce moment entre les mains.

À ces notices succèdent un index des noms, une liste des sigles et une bibliographie générale.

Cet ouvrage répond parfaitement aux attentes de ses concepteurs et, à ce titre, il est une belle réussite. Il a le mérite de rendre hommage à des figures qui sont trop souvent inconnues, ou bien alors qui ne survivent plus dans les mémoires qu’à travers une plaque de rue, en conjuguant des aspects professionnels et d’autres plus intimes. L’opportunité d’un tel répertoire se mesure aussi au fait qu’il rejoint d’autres recherches récentes ; mentionnons par exemple l’article que J.-Y. Mollier, préfacier de ce recueil, consacra à H.-J. Martin dans la Rfhl 141, 2020, p. 309-323 ou la journée d’études organisée par l’École nationale des chartes autour de Jean Babelon le 9 février 2019.

L’exécution matérielle est de qualité, les inévitables scories qu’implique un ouvrage d’une telle ampleur demeurant très limitées2.

En résumé, il faut savoir gré à I. Antonutti et aux contributeurs qu’elle a réunis pour cette somme appelée, souhaitons-le, à connaître les prolongements imprimés ou électroniques esquissés dans l’avant-propos.

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1 Précisons que les bénéficiaires de sinécures au xixe siècle, tels Gustave Flaubert ou Anatole France, ont été délibérément exclus de ce répertoire.

2 Nous n’avons relevé que quelques coquilles sans importance (par exemple p. 187 ; « ple théâtre ») et de menues impropriétés (par exemple p. 171, « éponyme » est employé à mauvais escient). P. 123 ; qu’est-ce qu’un « agrégé de lettres classiques et modernes » ? ; p. 224 ; dans la légende de la photographie, les noms de Renzo Piano et Richard Rogers sont inversés.