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Henri-Jean Martin, historien de l’édition contemporaine

Jean-Yves MOLLIER

Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines – Université Paris Saclay/Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines

jean-yves.mollier@uvsq.fr

Auteur, en 1969, d’une remarquable thèse intitulée Livre, pouvoirs et société à Paris au XVIIe siècle (1598-1701)1, Henri-Jean Martin est à l’évidence ce que l’on appelle dans le jargon des historiens, un moderniste et non un contemporanéiste2. Pourtant, un simple coup d’œil sur sa bibliographie révèle un certain nombre de braconnages assumés sur les terres des dix-neuviémistes3 et même sur les rivages des vingtiémistes. C’est ce qui devait le conduire, vingt-cinq ans après avoir publié L’Apparition du livre4, à diriger, avec Roger Chartier et Jean-Pierre Vivet, une Histoire de l’édition française5 appelée à faire souche et à donner naissance à des dizaines d’histoires nationales du livre et de l’édition6. Les quatre volumes de cette somme publiés entre 1983 et 1986 s’appuient d’ailleurs sur nombre de travaux qu’il avait dirigés ou encouragés. Il suffira de citer ici les noms de Frédéric Barbier, d’Isabelle de Conihout, d’Élisabeth Parinet, de Valérie Tesnière et de Bernard Vouillot pour voir surgir nombre de thèses, de l’École des chartes7, des universités8 ou de Sciences-Po9, qui confirment la capacité du professeur de bibliographie et d’histoire du livre à l’École nationale des chartes et du directeur d’études à l’École pratique des hautes études, dans la conférence intitulée « Histoire et civilisation du livre », à enjamber les siècles et à pratiquer cette histoire totale que Lucien Febvre avait érigée en ligne d’horizon de tout chercheur.

Les recherches qui passionnèrent Henri-Jean Martin après l’achèvement de l’Histoire de l’édition française montrent d’ailleurs une réelle propension à interroger notre présent et à se passionner pour les possibilités ouvertes par l’ordinateur et l’émergence de l’écran plat. Dès 1988, Histoire et pouvoirs de l’écrit10 analysait longuement la révolution industrielle et l’apparition d’une culture de masse qui l’inquiétait mais qui était le corollaire de l’alphabétisation systématique des populations européennes11. S’il n’a pas traité longuement de l’écran plat et de cette nouvelle révolution des manières de lire qui surgissait au tournant des XXe et XXIe siècles12, du moins était-il conscient de vivre une époque de mutations que l’utilisation de plus en plus massive de smartphones et autres androïdes dans la vie quotidienne allait révéler après son décès. Les Métamorphoses du livre, une série d’entretiens réalisés avec Jean-Marc Chatelain et Christian Jacob, publié en 2004, manifestait clairement le déplacement des interrogations du père de la nouvelle histoire du livre13. Le dernier opus, posthume, Aux sources de la civilisation européenne14, revenait, lui, aux origines du livre, mais on pouvait lire en filigrane, dans les angoisses d’un chercheur qui avait été également un « spectateur engagé » de son siècle15, son amour du livre et son inquiétude face à un univers qui semblait vouloir oublier tout ce qu’il devait à l’imprimé16.

1. L’Histoire de l’édition française ou les effets de la demande sociale

Bien que le nom du troisième éditeur de cette fresque soit à peu près totalement ignoré des jeunes générations, il n’est pas inutile de revenir un instant sur la personnalité de Jean-Pierre Vivet parce qu’elle éclaire les curiosités de Henri-Jean Martin et son aptitude à répondre à une demande étrangère, au départ, à l’univers de la recherche scientifique17. Journaliste à Combat puis au Monde, au Nouvel Observateur et à L’Express, membre du club Jean-Moulin18, fondateur du Bulletin du livre, de Livres de France puis de Livres Hebdo qui prit la suite, en 1978, de la Bibliographie de la France, Jean-Pierre Vivet (1920-1998) était aussi un descendant des frères Garnier, les célèbres éditeurs fondateurs de la librairie éponyme19. Si Baptiste-Louis Garnier (1822-1893), le Brésilien de la fratrie, Auguste (1812-1887) et Hippolyte Garnier (1815-1911), les Parisiens, moururent sans héritiers, leurs frères et sœurs en avaient engendré suffisamment pour donner à la génération des neveux l’envie de reprendre les rênes de la maison Garnier frères20. Henri-Jean Martin savait évidemment tout cela, comme il connaissait l’existence de la libreria Garnier Hermanos qui rayonna longtemps sur le continent latino-américain21, et celle de la livraria Garnier Irmaos, son pendant brésilien22, quand il accepta le challenge que lui proposait Jean-Pierre Vivet. Moderniste, il allait ultérieurement obtenir l’accord de Roger Chartier, lui aussi historien de l’époque moderne, pour l’aider dans son entreprise23, mais il ne disposait pas d’un historien contemporanéiste capable de se charger des deux derniers siècles couverts par le projet24. C’est ce qui devait le conduire à rédiger lui-même le gros chapitre intitulé « le monde des éditeurs » dans le tome 3 de l’Histoire de l’édition française. Le titre même du volume, Le temps des éditeurs. Du romantisme à la Belle Epoque, dit assez l’obligation qui fut la sienne de s’interroger sur l’apparition d’une nouvelle figure d’homme du livre inconnue des siècles précédents, celle de l’éditeur moderne25. Charles-Joseph Panckoucke, repreneur de l’Encyclopédie et, surtout, initiateur de l’Encyclopédie méthodique, anticipa largement sur ce que sera l’éditeur du XIXe siècle26, mais ce sont Louis Hachette27, Gervais Charpentier28 et Michel Lévy29, bien plus encore que Pierre-Jules Hetzel30 et Pierre Larousse31, qui furent les personnalités les plus marquantes de leur époque32.

Pour s’attaquer à ce siècle d’airain, Henri-Jean Martin avait lancé ses élèves de l’École des chartes sur sa piste, notamment Frédéric Barbier qui, en commençant par la dynastie des Berger-Levrault33, esquissait une recherche qui le mènera à sa thèse de doctorat ès lettres et sciences humaines, soutenue en Sorbonne en 1987, et portant sur une comparaison entre les éditeurs et les libraires germaniques et leurs homologues français34. Avec lui, mais plus précocement, Bernard Vouillot et Isabelle de Conihout avaient consacré leur thèse de l’École des chartes à l’administration de la Librairie, pendant la période consulaire et impériale pour le premier cité, la Restauration et la monarchie de Juillet pour la seconde35. Puisqu’il n’existait pas encore de synthèse couvrant le XIXe siècle, Henri-Jean Martin avait poussé Valérie Tesnière à étudier la librairie scientifique36, et Roger Chartier avait amplement puisé dans son propre réseau pour convaincre Madeleine Rebérioux37, Christophe Charle38 et de nombreux autres universitaires de participer à cette grande enquête39. Toutefois, au-delà de cette aptitude à faire travailler ensemble des chercheurs aux sensibilités éventuellement différentes, voire opposées – l’univers idéologique et politique de Madeleine Rebérioux se situait à cent lieues de celui de Henri-Jean Martin40 – les deux maîtres d’œuvre du projet avaient accepté une commande sociale émanant des milieux de l’édition professionnelle, ce qui mérite explication41.

Henri-Jean Martin m’ayant raconté lui-même l’origine de ­l’Histoire de l’édition française, je voudrais la rappeler brièvement afin d’aider à comprendre les raisons qui l’amenèrent à se lancer dans une entreprise qui dépassait en partie ses propres compétences. Tout était en effet à faire pour les XIXe et XXe siècles, ce qui devait conduire les deux maîtres d’œuvre à interrompre leur histoire aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale et à ne pas s’aventurer au-delà de la fin des années 1940. Il restait cependant à pallier l’absence de thèses ou d’articles de fond sur les grands éditeurs de ces deux siècles et, plus grave, à suppléer l’inexistence d’archives accessibles. Rappelons en effet que mes travaux sur la maison d’édition Michel Lévy frères devenue ensuite Calmann-Lévy42, sans trait d’union avant 190243, ne seront publiés qu’à l’automne 1984, un an avant la mise en vente du tome 3 de l’Histoire de l’édition française, que L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition ne paraîtra qu’en 1988, année où l’apparition de l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine, l’IMEC, allait commencer à faire remonter à la surface des archives d’éditeurs concernant la période contemporaine44. Cela explique l’ajout d’une assez longue « Postface » à la réédition du tome 3 de cette histoire, en 1990-1991, tâche que m’avaient confiée Roger Chartier et Henri-Jean Martin, alors que les autres volumes n’ont pas fait l’objet d’une mise à jour autre que bibliographique45.

Sollicité par Jean-Pierre Vivet plusieurs années avant qu’il n’accepte de relever le défi, Henri-Jean Martin avait dû convaincre ses élèves de l’aider dans son travail, ce qui n’était pas l’obstacle le plus difficile à surmonter, mais également se préparer, avec l’aide de son épouse, Odile, qu’il associa à la propriété littéraire du chapitre consacré au « monde des éditeurs »46, à embrasser une époque qu’il n’avait jamais véritablement abordée. Jean-Pierre Vivet, créateur de la maison Promodis, très introduit au Cercle de la Librairie, offrait par ailleurs de publier les travaux importants qui surgiraient dans le sillage du projet prométhéen et il tint parole en mettant sous presse tant la thèse de Nicole Felkay sur les éditeurs de Balzac47 que l’étude pionnière de Martyn Lyons, toujours inédite dans sa langue, l’anglais, sur la sociologie de la lecture en France au XIXe siècle48. Avec la recherche de Françoise Parent-Lardeur sur les cabinets de lecture au XIXe siècle49, déjà parue, et les promesses d’Élisabeth Parinet et de Valérie Tesnière de se confronter au monde des auteurs du XXe siècle50, ainsi que le recrutement d’autres contributeurs, Pascal Fouché51, Pascal Ory52 et Alain Choppin53 notamment, l’aventure pouvait démarrer avec quelque chance de réussir. Toutefois, comme on l’a dit, il resterait à compenser le faible recours aux archives, ce qui pour un historien comme Henri-Jean Martin, n’était pas sans poser de redoutables problèmes de conscience54.

C’est donc attiré par le côté prométhéen de l’odyssée du livre français que le directeur d’études à l’École des chartes accepta une commande émanant d’un éditeur passionné par l’histoire de sa profession. Ce n’était certes pas la première fois qu’un historien cédait aux amicales pressions d’un directeur de collection ou d’un éditeur ami, mais il s’agissait, dans le cas d’espèce, d’un pari qui comportait l’obligation, pour Henri-Jean Martin, à la différence de Roger Chartier qui demeura solidement arrimé dans l’époque moderne, de se muer en historien de l’édition française au XIXe siècle. Compte tenu des lacunes de l’historiographie et du retard pris par les contemporanéistes à répondre aux incitations que Lucien Febvre leur avait pourtant adressées dès 195255, on peut dire que le pari fut tenu. En s’appuyant sur les souvenirs de Jean-Nicolas Barba56 et sur l’étude fortement documentée d’Edmond Werdet sur la librairie française57, Henri-Jean Martin allait à l’essentiel, à savoir la pratique d’un métier alors dans les limbes. Grâce aux articles de Balzac sur le sujet58, à la correspondance de Flaubert59 et de Zola60, et en se référant aux rares études concernant les librairies Hachette61 et Larousse62 alors disponibles, Odile et Henri-Jean Martin parvinrent à mettre en scène ces hommes doubles qu’Élias Regnault avait magnifiquement campés dans le chapitre des Français peints par eux-mêmes63 qu’il leur avait consacré, et Balzac mis en scène dans la deuxième partie d’Illusions perdues64. Christian Amalvi65 et Alfred Fierro66 avaient apporté de précieuses indications sur les vrais best-sellers du siècle, les livres de classe et les guides de voyage, ce qui confirmait les analyses de Martyn Lyons sur le côté marginal, en termes de tirages, de la littérature romantique67, et quelques notices biographiques ajoutées en fin de chapitre mettaient en lumière une province, bien moins présente il est vrai dans l’édition que dans les siècles précédents68.

Manifestement les éditeurs français et l’initiateur du projet, Jean-Pierre Vivet, furent satisfaits du résultat, mais, pour avoir rencontré Henri-Jean Martin, pour la première fois de ma vie, en septembre 1984, au moment où je remettais les épreuves corrigées de Michel et Calmann Lévy ou la naissance de l’édition moderne. 1836-1891 à mon éditeur, Alain Oulman, alors PDG des éditions Calmann-Lévy, je puis témoigner de l’inquiétude qui l’habitait. Persuadé qu’il fallait intégrer le résultat de mes recherches à son tome 3, il m’avait suggéré de rédiger au plus vite une double page qui aurait servi d’encadré et mis en lumière les conclusions de mon étude69. Le tome 3 de l’Histoire de l’édition française étant lui-même pratiquement achevé70, l’éditeur refusa, mais, là encore, je puis témoigner de l’insatisfaction d’un historien qui avait une claire conscience des limites du volume qui était consacré à un événement majeur dans l’histoire du livre français, la naissance de l’édition, au sens plein que ce terme devait revêtir par la suite. Les travaux de Robert Darnton71, ceux moins connus mais pourtant essentiels à bien des égards de Suzanne Tucoo-Chala72, avaient isolé une figure centrale dans cette mutation, celle de Charles-Joseph Panckoucke. Toutefois le personnage leur apparaissait encore comme un libraire d’Ancien Régime alors qu’il possédait tous les traits de l’éditeur moderne. Seule l’accumulation de travaux universitaires, mémoires de maîtrise, de DEA et thèses, qui s’accélérèrent dans la deuxième moitié de la décennie 198073, allait autoriser une vision plus claire de ce mouvement. La réaction de Henri-Jean Martin à la publication de ma synthèse, L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition, en 1988, montra qu’il acceptait les conclusions de ce travail qu’il me demanda de présenter dans son nouvel Institut d’Étude du Livre qu’il concevait un peu comme une machine de guerre dressée contre le nouvel administrateur de la Bibliothèque nationale, Emmanuel Le Roy Ladurie, dont il n’avait rien oublié du militantisme au PCF et qu’il qualifiait de « stalinien ».

2. Un spectateur engagé dans son époque

Même s’il s’abstint, semble-t-il, de tout engagement partisan, Henri-Jean Martin aimait égrener ses propos et son enseignement de prises de position sur l’actualité. Ainsi affirmait-il en privé qu’il avait conçu son Institut d’Étude du Livre, volontairement logé à la Bibliothèque nationale, grâce à l’aimable complicité de François Dupuigrenet-Desroussilles, comme « une seringue dans le derrière de l’administrateur ». Se souvenait-il que cette métaphore, comme celle du clystère, présente dans l’Antiquité, avait été utilisée par Adolphe Thiers lorsqu’il avait voulu que la commission départementale siégeant en permanence pendant les vacances des conseils généraux soit « une véritable seringue dans le derrière des préfets »74 ? Je ne saurais l’affirmer, quoique la comparaison avec le Versaillais qui avait « purgé la France du socialisme pour dix ans » en 187175 ne lui eût sans doute pas paru outrecuidante. Défenseur vigilant d’une certaine conception de la liberté, conservateur sans complexe, il détestait le communisme et tout ce qui s’y rapportait, mais méprisait encore plus ceux qui avaient été tentés par cette idéologie pour s’en écarter, l’âge ou les nécessités de la carrière étant venus.

Provocateur avec ses élèves comme avec ses collègues, un tantinet anarchiste, mais plutôt de droite que de gauche, il s’ennuyait cependant avec les siens et ne détestait pas se confronter avec ses adversaires ou ceux qui pensaient autrement que lui, sans doute persuadé que le confort intellectuel est le pire ennemi du chercheur. Mis dans l’obligation, dès ses premiers travaux, de tenir compte de la civilisation matérielle, il n’avait jamais oublié le plan ou le schéma tracé par Lucien Febvre : « le livre, cette marchandise » et « le livre, ce ferment », devenus les chapitres 4 et 8 de L’Apparition du livre76. Même si ses goûts personnels le poussaient plutôt vers l’étude des ferments, notamment religieux, de la Bible et des Bibles en langues vernaculaires qui firent tant pour la propagation de la Réforme77, il ne négligeait aucunement l’importance des infrastructures et se révélait à l’occasion dialecticien sans oser l’avouer, un peu à la manière de Monsieur Jourdain qui pratiquait la prose sans en avoir vraiment conscience. Historien moderniste, il s’était attaqué, pour sa thèse de doctorat ès lettres aux inventaires après décès et autres documents d’archives qui lui parlaient certes du livre et de sa présence dans les intérieurs parisiens, mais bien plus encore de la société et des pouvoirs78, ce qu’un esprit malicieux aurait pu assimiler aux « trois étages de la fusée labroussienne »79, l’économique réagissant sur le social et celui-ci sur le mental, en allant « de la cave au grenier » pour reprendre la formule chère à Michel Vovelle.

Les derniers travaux de Henri-Jean Martin devaient illustrer sa capacité à balayer large, à enjamber les siècles avec une joie juvénile et à se risquer avec ardeur sur le territoire des contemporanéistes. Histoire et pouvoirs de l’écrit, ce livre de la maturité qui aida à révéler ses travaux à un public élargi, n’hésite pas à embrasser l’histoire de l’humanité, des premières écritures au langage de l’ordinateur80. Revenant sur l’invention de l’imprimerie et l’arrivée du livre sous la forme qu’il devait revêtir pendant cinq siècles, l’auteur insiste de nouveau sur ce qu’il appelle une « révolution métallurgique », dans une perspective qu’un André Leroi-Gourhan n’aurait pas reniée81. Poursuivant son étude, il aborde la révolution industrielle, n’hésitant pas à montrer l’essor de la presse socialiste, à citer Karl Marx et Friedrich Engels, une fois chacun et d’ailleurs à titre de journalistes et non comme penseurs82, et à dénoncer les ravages du capitalisme destructeur des anciennes sociétés, en se référant au Félicité de Lamennais du Peuple constituant83. Il citait d’ailleurs la fin de l’article du 11 juillet 1848 annonçant le sabordage du journal en ces termes : « Il faut aujourd’hui de l’or, beaucoup d’or pour jouir du droit de parler : nous ne sommes pas assez riches : silence aux pauvres ! »84.

Commentant l’ascension des éditeurs français du XIXe siècle, entrepreneurs schumpetériens enrichis et tout puissants, il a tendance à les comparer avec les grands libraires du XVIIe et du XVIIIe siècle et à les inclure dans la catégorie des « bourgeois conquérants » chers à son collègue de la 4e section de l’EPHE, Charles Morazé, qu’il ne cite cependant pas85. Livre foisonnant, fourmillant d’idées empruntées ici ou là, au gré des multiples lectures qui traduisent autant de curiosités jamais satisfaites, Histoire et pouvoirs de l’écrit exprime fortement une sorte de volonté hégélienne d’embrasser tous les savoirs du monde pour juguler les angoisses de l’heure, et trouver, dans les références au passé, des raisons de croire encore au présent. Les dernières pages, dans lesquelles Henri-Jean Martin évoque l’émergence d’un nouveau monde et le renouvellement des cultures, est l’occasion d’ironiser sur les « valeurs » et les « non-valeurs » américaines qui « pénètrent partout en fonction du savoir-faire des hommes d’outre-Atlantique, mais aussi des moyens que leur procure la diffusion de leur langue »86. Il inclut dans sa critique sans complaisance le Japon et ses « dessins animés basés sur une confusion culturelle et l’avalanche des changements et des novations »87 et s’inquiète, à l’évidence, de ce déluge d’images et de sons qui envahit notre vie quotidienne, transformant tout en spectacle et limitant de plus en plus la place de la raison au profit de la sensibilité, pour ne pas dire des sens.

Spectateur engagé, avons-nous dit, Henri-Jean Martin l’est pleinement dans la conclusion qui clôt cette réflexion sur l’histoire de l’humanité et dans laquelle il rappelle les réactions des lettrés à l’époque de Boèce « quand ils entendaient les chants des guerriers et des poètes germains à la cour de Théodoric »88. Sans citer expressément la Consolation de Philosophie du poète latin qui fut contemporain de la chute de l’empire romain mais transmit l’héritage de l’Antiquité aux penseurs des générations futures89, Henri-Jean Martin prône l’usage d’une raison critique capable de comprendre les dangers du présentisme. Historien et, à ce titre, professionnel sachant combien le passé offre un recul nécessaire pour appréhender le présent, l’historien du livre redit son espoir que les générations à venir conservent l’usage d’un écrit lui-même produit de multiples luttes contre tous les ignorantismes. Par ce dernier trait, le livre s’achève sur une note plutôt optimiste, le rappel des traductions de Boèce, passeur s’il en fut et intermédiaire entre deux mondes, deux cultures, celle de l’Antiquité et celle de la Renaissance, effaçant celle de Cassandre pleurant la disparition d’un être cher.

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1 Henri-Jean MARTIN, Livre, pouvoirs et société à Paris au XVIIe siècle (1598-1701), Genève, Droz, 1969, 2 vol.

2 Traditionnellement, l’histoire enseignée dans les universités sépare quatre périodes : l’Antiquité, le Moyen Âge (Ve-XVe siècle), les temps modernes (1492-1789) et la période contemporaine, de la Révolution française à nos jours. Ces périodisations sont évidemment relatives à la France et susceptibles de varier en fonction de l’objet étudié. Ainsi le Moyen Âge embrassa-t-il longtemps la période qui va de la chute de l’empire romain d’Occident (476) à celle de Constantinople (1453) avant de venir s’éteindre avec la découverte du « Nouveau Monde » et le début de la « Renaissance ». Sur ces questions, voir François HARTOG, Régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Éd. du Seuil, 2003.

3 Le « long XIXe siècle » des historiens s’étend de 1789 à 1914 et le « court XXe siècle » de 1914 à 1991 ; voir Eric HOBSBAWM, L’Âge des extrêmes. Le court XXe siècle. 1914-1991, Paris-Bruxelles, Le Monde diplomatique/Complexe, 1999.

4 Lucien FEBVRE et Henri-Jean MARTIN, L’Apparition du livre, Paris, Albin Michel, 1958.

5 Henri-Jean MARTIN et Roger CHARTIER, en collaboration avec Jean-Pierre VIVET, Histoire de l’édition française, Paris, Promodis-Éditions du Cercle de la Librairie, 1983-1986, 4 vol.

6 Sur la multiplication des histoires nationales du livre et de l’édition, voir Martyn LYONS et Jean-Yves MOLLIER, « L’histoire du livre dans une perspective transnationale », Histoire et civilisation du livre. Revue internationale VIII, 2012, p. 10-20, et Jean-Yves MOLLIER, « Histoires nationales et histoire internationale du livre et de l’édition », Mémoires du livre/Studies in Book Culture 7/2, 2016, http ://id.erudit.org/iderudit/1036854ar.

7 Frédéric BARBIER, Nouvelles recherches sur l’imprimerie strasbourgeoise (1676-1830) [1976], Isabelle de CONIHOUT, Recherches sur l’administration de la librairie (1815-1848) [1980], Valérie TESNIÈRE, Les Éditions Montaigne : Fernand Aubier éditeur (1926-1940) [1984] et Bernard VOUILLOT, L’Imprimerie et la librairie à Paris sous le Consulat et l’Empire (1799-1815) [1979] ont soutenu une thèse de l’École des chartes.

8 Fr. BARBIER a récidivé en soutenant, ultérieurement, une thèse de doctorat d’État en histoire, Livre, économie et société industrielles en Allemagne et en France au XIXe siècle(1840-1914), université Paris IV, dir. François Caron, 1987.

9 Élisabeth PARINET, La Librairie Flammarion. 1875-1914, thèse de doctorat en histoire, IEP de Paris, dir. Raoul Girardet, 1990.

10 Henri-Jean MARTIN, Histoire et pouvoirs de l’écrit, Paris, Perrin, 1988.

11 Sur la culture de masse, voir La Culture de masse en France de la Belle Époque à aujourd’hui, dir. J.-P. Rioux et J.-Fr. Sirinelli, Paris, Fayard, 2002, et Culture de masse et culture médiatique en Europe et dans les Amériques. 1860-1940, dir. J.-Y. Mollier, J-.Fr. Sirinelli et F. Vallotton, Paris, PUF, 2006.

12 Dès sa nomination comme conservateur des bibliothèques de la ville de Lyon, en 1962, H.-J. Martin s’est intéressé aux possibilités offertes par l’informatique appliquée aux bibliothèques.

13 Henri-Jean MARTIN, Les Métamorphoses du livre, entretiens avec Jean-Marc Chatelain et Christian Jacob, Paris, Albin Michel, 2004.

14 Henri-Jean MARTIN, Aux sources de la civilisation européenne, Paris, Albin Michel, 2008.

15 Raymond ARON, Le Spectateur engagé, Paris, Julliard, 1981.

16 Où va le livre ?, Paris, La dispute, 2000, 2002 et 2007, tente de proposer des pistes pour une appréhension distanciée de ces mutations.

17 Voir aussi l’article intitulé « Réflexions », un entretien avec les trois auteurs de ­l’Histoire de l’édition française paru dans le Bulletin des bibliothèques de France 29/4, 1984, p. 314-321.

18 Claire ANDRIEU, Pour l’amour de la République. Le club Jean-Moulin. 1958-1970, Paris, Fayard, 2002.

19 Une des sœurs des frères Garnier, Sophie-Rosalie, née en 1809, épousa Célestin Hilaire Fauchon en 1838 dont elle eut trois enfants. Une de ses deux filles épousa un sieur Vivet avec qui elle eut deux fils, Léon et Charles Vivet, le père et l’oncle de Jean-Pierre Vivet ; cf. Lucia GRANJA, « Chez Garnier, Paris-Rio (De Homens e de Livros) », Suportes e Mediadores. A Circulaçao transatlantica dos impressos (1789-1914), dir. L. Granja et T. Regina de Luca, Campinas, Editora Unicamp, 2018, p. 55-79.

20 Jean-Yves MOLLIER, « Les frères Garnier, les Hetzel, père et fils, Pierre Larousse et les siens, ou les vraies grandeurs de l’édition », L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition, Paris, Fayard, 1988, p. 235-277.

21 Jean-Yves MOLLIER, « Uma livraria internacional no seculo 19, la livraria Garnier frères », dans A Circulaçao Transatlantica dos impressos (1789-1914), op. cit. [n. 19], p. 33-55.

22 Lucia GRANJA, « Crossing a century : printers, booksellers and publishers in nineteenth-century Brazil », dans The Cultural Revolution of the Nineteenth Century. Theatre, the Book-Trade and Reading in the Transatlantic World, dir. M. Abreu et A. C. Suriani da Silva, Londres, I.B. Tauris, 2016, p. 87-100.

23 Maître de conférences en histoire à l’EHESS depuis 1978, Roger Chartier n’a guère publié que L’Éducation en France du XVIe au XVIIIe siècle, avec Marie-Madeleine Compère et Dominique Julia, Paris, SEDES, 1976, quand il est recruté par Henri-Jean Martin pour prendre avec lui la direction de l’Histoire de l’édition française. Toutefois, l’étendue de ses réseaux est telle que Henri-Jean Martin n’a pas hésité à s’adresser à lui quand Jean-Pierre Vivet est revenu à la charge. Il faut cependant noter que, selon une autre version, Jean-Pierre Vivet se serait adressé à Roger Chartier en même temps qu’à Henri-Jean Martin…

24 Roger Chartier et Henri-Jean Martin, conscients des faiblesses du tome 3, m’ont demandé d’ajouter une longue mise au point dans la réédition parue chez Fayard en 1989-1991 ; voir Jean-Yves MOLLIER, « Postface », dans Histoire de l’édition française, rééd. Paris, Fayard/Éditions du cercle de la Librairie, 1989-1991, 4 vol., t. 3, Le Temps des éditeurs, p. 569-593. Par ailleurs, ils avaient décidé d’interrompre le tome 4 au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, considérant qu’ils ne disposaient pas de travaux susceptibles d’éclairer les années 1950-1980. Celles-ci ne feront l’objet d’un volume spécifique qu’en 1998 : L’Édition française depuis 1945, dirigé par Pascal Fouché aux Éditions du cercle de la Librairie.

25 Dans L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition, op. cit. [n. 20], j’ai, pour ma part, fait naître l’éditeur à la toute fin du XVIIIe siècle. Voir aussi Jean-Yves MOLLIER, « La naissance de l’édition », dans Une autre histoire de l’édition française, Paris, La fabrique, 2015, p. 105-132.

26 Suzanne TUCOO-CHALA, Charles-Joseph Panckoucke et la Librairie française. 1736-1798, Pau-Paris, Martimpouey Jeune/Jean Touzot, 1975, et J.-Y. MOLLIER, « Des Panckoucke aux Dalloz, trois siècles de stratégies éditoriales », L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition, op. cit. [n. 20], p. 17-49.

27 Jean-Yves MOLLIER, Louis Hachette (1800-1864). Le fondateur d’un empire, Paris, Fayard, 1999.

28 Isabelle OLIVERO, La Naissance de la collection, Paris, IMEC Éditions, 1999.

29 Jean-Yves MOLLIER, Michel et Calmann Lévy ou la naissance de l’édition moderne (1836-1891), Paris, Calmann-Lévy, 1984.

30 André PARMENIE et Catherine BONNIER de LA CHAPELLE, Histoire d’un éditeur et de ses auteurs : P.J. Hetzel (Stahl), Paris, Albin Michel, 1953.

31 Jean-Yves MOLLIER et Bruno DUBOT, Histoire de la librairie Larousse. 1852-2010, Paris, Fayard, 2012.

32 R. Chartier et H.-J. Martin ont fait de Louis Hachette, Pierre-Jules Hetzel et Pierre Larousse les trois figures emblématiques de l’édition française au XIXe siècle. Or, si Louis Hachette fut bien un entrepreneur schumpetérien avant la lettre, ni Hetzel père, dont l’entreprise demeurait fragile à sa mort, ni Pierre Larousse dont le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle était inachevé à son décès, ne furent, stricto sensu, de grands industriels des lettres. Promoteur du livre de jeunesse pour P.-J. Hetzel et rédacteur d’une encyclopédie qui marqua le siècle pour Pierre Larousse, ces deux hommes ne sont pas comparables à Louis Hachette, Michel Lévy, Ernest Flammarion et Arthème Fayard qui furent des éditeurs au sens plein du terme.

33 Frédéric BARBIER, Trois cents ans de librairie et d’imprimerie : Berger-Levrault (1676-1830), Genève, Droz, 1979.

34 Fr. BARBIER, Livre, économie et société industrielles en Allemagne et en France…, op. cit. [n. 8].

35 B. VOUILLOT, op. cit. [n. 7], et I. de CONIHOUT, op cit. [n. 7].

36 V. TESNIERE, op. cit. [n. 7]. Voir aussi, mais plus tardif, du même auteur, Le Quadrige. Un siècle d’édition universitaire. 1860-1968, Paris, Presses universitaires de France, 2001.

37 Madeleine REBERIOUX avait publié Les Ouvriers du livre et leur fédération : un centenaire : 1881-1981, Paris, Messidor/Temps actuels, 1981.

38 Élève à la fois de Maurice Agulhon qui dirigea sa thèse de doctorat d’État en histoire et de Pierre Bourdieu dont il fut très proche, Christophe CHARLE avait publié La Crise littéraire à l’époque du naturalisme, Paris, Presses de l’ÉNS, 1979, et il se chargea du « champ de la production littéraire » dans le tome 3 de l’Histoire de l’édition française.

39 Citons dans l’ordre de leur apparition au sommaire du tome 3 de l’Histoire de l’édition française Maurice Crubellier, sociologue, Ségolène Le Men, historienne d’art, Martyn Lyons, Claude Savart, Jean Glénisson, historiens, Anne-Marie Thiesse, littéraire férue d’ethnologie, ou encore Anne Sauvy et Jean Hébrard, également historiens. De nombreux historiens du livre, conservateurs de bibliothèques, ont participé à leurs côtés à cette aventure, notamment Michel Melot, Jean Watelet et Jean Viardot. La liste des auteurs d’encadrés est encore plus impressionnante et témoigne de la capacité des maîtres d’œuvre du volume à s’entourer de collaborateurs en phase avec la recherche alors en cours.

40 Ce n’était un secret pour personne que Henri-Jean Martin détestait tout ce qui s’inspirait du marxisme alors que Madeleine Rebérioux s’en réclamait et avait milité longtemps au P.C.F., comme Emmanuel Le Roy Ladurie qui s’en écarta pour adhérer au P.S.U. ; cf. E. LE ROY LADURIE, Paris-Montpellier. PC-PSU (1945-1963), Paris, Seuil, 1982.

41 Bien que souvent passée sous silence, la commande sociale des livres publiés par les universitaires occupe pourtant une large place dans leurs travaux. En prendre conscience évite les reconstructions a posteriori et la linéarité de parcours beaucoup plus chaotiques qu’on ne l’imagine. La formule n’a rien de péjoratif si on veut bien entendre par là que l’historien est sensible aux demandes qui émanent de la société et qui le renvoient à l’obligation de vulgariser, là encore au meilleur sens du terme, les connaissances produites dans les laboratoires où s’effectue la recherche.

42 J.-Y. MOLLIER, Michel et Calmann Lévy ou la naissance de l’édition moderne…, op. cit. [n. 29].

43 J.-Y. MOLLIER, L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition, op. cit. [n. 20], p. 355-suiv.

44 L’IMEC devait recevoir rapidement en dépôt les archives Flammarion et, un peu plus tard, celles de la Librairie Hachette et de ses filiales, ensemble auquel le ministère de la Culture a accordé le statut de « monument historique » en 2002.

45 J.-Y. MOLLIER, « Postface », dans Histoire de l’édition française, rééd. Paris, Fayard/Éditions du Cercle de la Librairie, 1991, op. cit.

46 Henri-Jean MARTIN et Odile MARTIN, « Le monde des éditeurs », dans Histoire de l’édition française, t. 3, p. 158-216.

47 Nicole FELKAY, Balzac et ses éditeurs. 1822-1837. Essai sur la librairie romantique, Paris, Promodis/Éditions du Cercle de la Librairie, 1987.

48 Martyn LYONS, Le Triomphe du livre. Une histoire sociologique de la lecture dans la France du XIXe siècle, Paris, Promodis/Éditions du Cercle de la Librairie, 1987.

49 Françoise PARENT-LARDEUR, Lire à Paris au temps de Balzac : les cabinets de lecture à Paris. 1815-1830, Paris, Éditions de l’EHESS, 1981.

50 Élisabeth PARINET et Valérie TESNIÈRE, « Une entreprise : la maison d’édition », dans Histoire de l’édition française, t. 4, p. 122-147, et É. PARINET, « L’édition littéraire : 1890-1914 », dans Histoire de l’édition française, t. 4, p. 148-187.

51 Pascal Fouché allait publier une Histoire de l’édition française sous l’Occupation, Paris, Bibliothèque de littérature française contemporaine de l’université Paris 7, 1986, 2 vol., et il s’était vu confier le chapitre intitulé « L’édition littéraire : 1914-1950 », dans Histoire de l’édition française, t. 4, p. 188-241.

52 Alors occupé par la rédaction d’une thèse d’État consacrée à la politique culturelle du Front populaire, et par ailleurs collectionneur de bandes dessinées auxquelles il a consacré plusieurs articles et publications, Pascal Ory signa le chapitre intitulé « De la presse enfantine à la bande dessinée » dans le tome 4 de l’Histoire de l’édition française, p. 468-478.

53 Chargé du programme « EMMANUELLE » – une base de données concernant les manuels scolaires publiés en France depuis 1789 – Alain Choppin a rédigé le chapitre intitulé « Le manuel scolaire » dans le même tome 4 de l’Histoire de l’édition française, p. 280-305.

54 L’ouverture des archives des maisons d’édition a vraiment démarré après l’achèvement de la publication des quatre tomes de l’Histoire de l’édition française, la création de l’IMEC relevant du même engouement pour une histoire désormais intégrée à celle de la vie culturelle de la nation. Christian Bourgois, Jérôme Lindon et Antoine Gallimard se sont tenus, dès le début de cette aventure, aux côtés des fondateurs de l’IMEC, Claude Dauphin, Pascal Fouché et Olivier Corpet, son premier directeur et l’artisan de son installation à l’abbaye d’Ardenne dans la banlieue de Caen.

55 Lucien FEBVRE, « Quelques aspects de l’édition parisienne au XVIIe siècle », Annales, juillet-septembre 1952, p. 309-319.

56 Jean-Nicolas BARBA, Souvenirs d’un ancien libraire, Paris, Ledoyen et Giret, 1846.

57 Edmond WERDET, De la librairie française. Son passé, son présent, son avenir, Paris, Dentu, 1860.

58 Les textes de Balzac sur la librairie sont réunis dans H. de BALZAC, Œuvres diverses, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », t. 2, 1996.

59 Gustave FLAUBERT, Correspondance, en ligne sur le site de l’université de Rouen, www.arvensa.com

60 Émile ZOLA, Correspondance, Montréal-Paris, Les Presses de l’université de Montréal/Éditions du CNRS, 10 vol, 1978-1995.

61 Jean MISTLER, La Librairie Hachette de 1826 à nos jours, Paris, Hachette, 1964.

62 André RÉTIF, Pierre Larousse et son œuvre (1817-1875), Paris, Larousse, 1975.

63 C’est Élias Regnault qui a, le premier, défini les éditeurs comme « les hauts barons de la féodalité industrielle », désignation reprise par H.-J. et O. Martin dans leur propre évocation de ce monde ; cf. É. REGNAULT, « L’éditeur », dans Les Français peints par eux-mêmes (Paris, Léon Curmer, 8 vol., 1840-1842, t. 4), rééd. Paris, La découverte, coll. « Omnibus », 2004, p. 952, et H.-J. et O. MARTIN, « L’éditeur, baron de la féodalité industrielle », dans Histoire de l’édition française, t. 3, p. 181.

64 Le roman Illusions perdues a été publié en feuilleton entre 1837 et 1843. La deuxième partie, « Un grand homme de province à Paris » est parue en 1838 et le portrait de Dauriat, le voisin de Camille Ladvocat, l’éditeur de Lamartine, au Palais-Royal, est de 1839.

65 Christian AMALVI, « L’histoire à l’école et au lycée : les manuels d’Hachette (1830-1914) », dans Histoire de l’édition française, t. 3, p. 188-189.

66 Alfred FIERRO, « Les guides de voyage au XIXe siècle », dans Histoire de l’édition française, t. 3, p. 193.

67 M. Lyons définit le romantisme comme « la crête fugitive d’une vague sur un océan de classicisme et de catholicisme » ; cf. Le Triomphe du livre…, op. cit. [n. 48], p. 104.

68 Plusieurs encadrés sont consacrés aux Aubanel d’Avignon et autres Protat de Mâcon.

69 Notre rencontre se déroula au cours d’un cocktail organisé par la maison d’édition Calmann-Lévy, alors située rue Auber, dans l’immeuble historique construit en même temps que l’Opéra Garnier, situé à quelques pas.

70 Il ne devait toutefois être imprimé qu’en octobre 1985.

71 Robert DARNTON, L’Aventure de l’Encyclopédie, trad. fr., Paris, Robert Laffont, 1982.

72 S. TUCOO-CHALA, Charles-Joseph Panckoucke …, op. cit. [n. 26].

73 Jean-Yves MOLLIER, « L’histoire du livre et de l’édition dans l’espace français », Bulletin de la Société d’histoire moderne et contemporaine, 1994/3-4, p. 35-49. Voir aussi Jean-Yves MOLLIER et Patricia SOREL, « L’histoire de l’édition, du livre et de la lecture en France aux XIXe et XXe siècles », Actes de la Recherche en sciences sociales 126-127, mars 1999, p. 29-38, qui reprend cet article en développant la bibliographie. Celle-ci est consultable, en ligne, et à jour en 2020, sur le site du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines de l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines.

74 Jean-Marie MAYEUR, Les Débuts de la IIIe République. 1871-1898, Paris, Éd. du Seuil, 1973, p. 102.

75 Vainqueur de la Commune de Paris, fin mai 1871, Adolphe Thiers pratiquera une politique de répression sans faiblesse à l’égard des 36 000 insurgés arrêtés au lendemain de la Semaine sanglante. Les 4 000 déportés au bagne de Nouvelle-Calédonie et les milliers d’autres emprisonnés en France témoignent de la brutalité de cette répression judiciaire. Il faudra attendre le congrès ouvrier tenu à Marseille en octobre 1879 pour voir le collectivisme revenir sur le devant de la scène ; cf. Jean-Yves MOLLIER et Jocelyne GEORGE, La plus longue des Républiques. 1870-1940, Paris, Fayard, 1994.

76 Voir la postface de Fr. Barbier à la réédition de L’Apparition du livre chez Albin Michel en 1999.

77 Henri-Jean MARTIN, Le Livre français sous l’Ancien Régime, Paris, Promodis/Éditions du Cercle de la Librairie, 1987.

78 H.-J. MARTIN, Livre, pouvoirs et société à Paris au XVIIe siècle, op. cit. [n. 1].

79 Michel VOVELLE, De la cave au grenier. Un itinéraire en Provence au XVIIIe siècle. De l’histoire sociale à l’histoire des mentalités, Marseille, Éd. S. Fleury, 1980.

80 H.-J. MARTIN, Histoire et pouvoirs de l’écrit, op. cit. [n. 10].

81 On parle aujourd’hui volontiers de « révolution du paléolithique » mais cette expression était peu usitée il y a trente ans. Voir André LEROI-GOURHAN, Le Geste et la Parole, Paris, Albin Michel, 1964-1965, 2 vol.

82 H.-J. MARTIN, Histoire et pouvoirs de l’écrit, op. cit. [n. 10], p. 392 et 396.

83 H.-J. MARTIN, Histoire et pouvoirs de l’écrit, op. cit. [n. 10], p. 392.

84 Ibid.

85 Charles MORAZÉ, Les Bourgeois conquérants, Paris, A. Colin, 1957.

86 H.-J. MARTIN, Histoire et pouvoirs de l’écrit, op. cit. [n. 10], p. 457.

87 Ibid.

88 Ibid., p. 468-469.

89 Dans une bibliographie abondante sur Boèce, citons Sophie VAN DER MEEREN, Lectures de Boèce ; la consolation de Philosophie, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012.