Revue Italique

Conférence Barbier-Mueller 2014

OJ-italique-417

La descriptio puellæ dans la poésie italienne de la Renaissance : quelques notes pour une nouvelle approche

María Nieves Muñiz Muñiz

Aimer la perfection parce qu’elle est le seuil,

Mais la nier sitôt connue, l’oublier morte
YVES BONNEFOY, L’imperfection est la cime, vv.5-6


Dans ses Ritratti écrits en 1514 et publiés dix ans plus tard, 1 Giovan Giorgio Trissino, pour démontrer la superiorité de la poésie sur la peinture, fait un portrait d’Isabelle d’Este. La description prend Pétrarque pour modèle suprême, selon le critère fixé par l’interlocuteur principal du dialogue, Pietro Bembo :

ma noi il nobilissimo di tutti i pictori Messer Francesco Petrarca chiameremo, e a questa impresa a fare il daremo ; il quale primariamente colorirà le chiome, come fece quelle della sua Laure, faccendole d’oro fino, e sovra or terso bionde, et il volto farà di calda neve, o più tosto di quelle candide rose, con vermiglie in vasel d’oro. Le labra parimente di rose vermiglie, e le ciglia di ebano togliendo, il bel, dolce suave, bianco, e nero de gli occhi a due lucidissime stelle assembrando, con quel non so che dentro, che in un punto, può far chiara la notte, oscuro il giorno, E ’l mêle amaro, et addolcir l’assentio. Le guancie appresso di fiamma, o rose sparse in dolce falda di viva neve colorendo, e la bianchezza del collo tale facendo, dove ogni latte perderia sua pruova et aguagliando le mani bianche, e sottili al colore de le perle orientali, farà lei generalmente una donna più bella assai, che ’l sole, e più lucente ; dicendo molto più ragionevolmente di lei, che non fece di Laura. Leggiadria, né beltate simil non vide il sole credo io già mai. Tale adunque è questa meravigliossima donna, come le nostre parole, et il nobile Poeta ve l’hanno dipinta. Ma quello che sopra avanza, e fiorisce in tutta questa figura, è la grazia, che l’accompagna ; anzi tutte le Grazie, e tutti gli Amori le vanno ballando, e scherzando sempre d’intorno ; et adornando ogni suo minimo atto, la fanno tale, che a pena si può con la mente comprendere, non che con parole, o con altra arte umana ritrarre. Divina cosa veramente, rispose il Bembo, è questa, che voi dite, la quale si può ben dire, che sia rarissimo dono dal Cielo a le mondane genti concesso. Ma non vi sia grave ancora di dirci l’abito suo, et in che maniera la vedeste. Ella, disse Macro, aveva i capegli in capo diffusi, in guisa, che sopra i candidi, e dilicati umeri ricadeano. etc. 2

D’abord, les cheveux « d’or fin » et « plus blonds que l’or même » ; puis, le visage de « chaude neige, ou plutôt de roses blanches, avec des rouges dans un vase d’or » ; ensuite, les lèvres « également rouges », les sourcils « d’ébène » et les yeux « d’un blanc et d’un noir » pleins de douceur, comparés à des « étoiles resplendissantes », avec un je ne sais quoi « qui peut éclairer la nuit et obscurcir le jour, rendre le miel amer et adoucir l’absinthe » ; enfin, les joues de « flamme » ou de « roses disséminées sur une pente enneigée », le cou d’une blancheur « qu’aucun lait ne pourrait vaincre » et les mains « blanches et minces » comparées à la couleur des « perles orientales » : c’est le portrait d’une créature « plus belle et plus resplendissante que le soleil », douée d’une grâce et d’une beauté sans égal. Voici, concluait Trissino, une femme telle que l’avaient « peinte » ses « paroles » ainsi que celles du « Noble poète » de Laure. La description que nous venons de lire regorge d’expressions pétrarquesques au point de rendre difficile toute distinction entre l’original et la copie. De la même façon, l’Isabelle décrite par Trissino ne se différencie pas de la Laure du « Nobile Poeta », à cela près que la marquise de Mantoue ressemble davantage au portrait qu’il en fait (« dicendo molto più ragionevolmente di lei, che non fece di Laura »). Trissino propose donc un renversement hiérarchique entre la nature et sa représentation artistique : c’est l’idéal exprimé par la poésie qui doit s’incarner dans la belle femme et non pas l’inverse. En définitive, si un poète reprend mot à mot un autre poète, c’est parce que l’idéal de l’art prévaut sur les contingences de la nature. Faut-il rappeler la fréquence avec laquelle apparaît à la Renaissance l’apologue des cinq jeunes filles de Crotone qui auraient servi de modèles à Zeuxis pour composer, avec des traits empruntés à chacune d’elles, une Helène idéale ?3 À y regarder de plus près, Trissino a appliqué la méthode de Zeuxis au texte de Pétrarque : pour composer sa descriptio puellæ, il a assemblé un puzzle de citations puisées dans neuf poésies différentes des Rerum vulgarium fragmenta.4 Cet assemblage s’appuie sur un corpus de pièces dont il avait éliminé celles qui ne répondaient pas à ses fins.Ilse trouve que, comme pour les jeunes filles de Crotone, aucune composition isolée de Pétrarque ne semblait satisfaire l’idéal poursuivi par Trissino : il a en effet élargi le catalogue des beautés en les disposant, excepté les lèvres, dans un ordre descendant, plus conforme au canon médiéval (cheveux, visage, lèvres, sourcils, yeux, joues, cou, main).5 De la même façon, il y a inclus la couleur noire des sourcils, citée une seule fois dans le Canzoniere mais tout à fait nécessaire dans la descriptio puellæ traditionnelle. Certes, comme Giovanni Pozzi l’a écrit, le « canon bref » de Pétrarque ne se base pas seulement sur le choix des beautés, 6 mais aussi sur un système limité de combinaisons et de comparants métaphoriques. 7Il est également vrai que, au XVIesiècle, la prose et la poésie narrative tendent à reproduire le catalogue extensif ‘de la tête aux pieds’, tandis que la poésie lyrique s’en tient le plus souvent au visage. Mais c’est précisément cette coexistence des deux modèles dans un siècle dominé par le pétrarquisme qui exige une explication. Au fond, il faudrait renverser la question et se demander pourquoi la Laure de Pétrarque tend parfois à céder le champ à la codification médiévale de la beauté ou du moins à s’y mélanger. Un exemple frappant de ce phénomène se trouve dans le portrait de Sabinetta brossé par Bembo dans les Asolani :

Egli la mira intentamente con infingevole occhio, et per tutte le sue fattezze discorrendo, con vaghezza solo da gli amanti conosciuta, hora risguarda la bella treccia, più simile ad oro che ad altro, la quale sì come sono le vostre (né vi sia grave che io delle belle donne ragionando tolga l’essempio in questa et nelle altre parti da voi), la quale, dico, lungo ’l soave giogo della testa, ugualmente dalle radici partendosi et nel sommo segnandolo con diritta iscriminatura, per le derretane parti con dovuto ordine s’avolge in più cerchi ; ma dinanzi, giù per le pure tempie, di qua et di là in due pendevoli ciocchette scendendo et dolcemente ondeggiando per le gote, mobili ad ogni vegnente aura, pare a vedere un nuovo miracolo di topaci palpitante in fresca falda di neve. Hora scorge la serena fronte, con allegro spatio dante segno di sicura purità ; et le ciglia d’ebano piane et tranquille, sotto le quali vede lampeggiar due occhi neri et ampi et pieni di bella gravità, con naturale dolcezza mescolata, scintillanti come due stelle ne’ lor vaghi et vezzosi giri, il dì che primieramente mirò in loro et la sua ventura mille volte seco stesso tacitamente benedicendo. Vede doppo questi le morbide guancie, la loro tenerezza et bianchezza con quelle del latte appreso rassomigliando, se non in quanto alle volte contendono con la colorita freschezza delle matutine rose. Né lascia di veder la sopposta bocca, di picciolo spatio contenta, con due rubinetti vivi et dolci, haventi forza di raccendere il disio di basciargli in qualunque più fusse freddo et svogliato. Oltre a cciò quella parte del candidissimo petto riguardando et lodando, che alla vista è palese, l’altra che sta ricoperta loda molto più anchora maggiormente, con acuto sguardo mirandola et giudicandola : mercé del vestimento cortese, il quale non toglie perciò sempre a’ riguardanti la vaghezza de’ dolci pomi che, risistenti al morbido drappo, soglion ben spesso della lor forma dar fede, mal grado dell’usanza che gli nasconde. (Asolani II 22)8

Le modèle est ici la descriptio puellæ des Ninfe fiorentine de Boccace, où la chevelure perd la légèreté qu’elle avait chez Pétrarque au profit de l’abondance et de la somptuosité, 9 tandis que la mention de « l’aure » et du miracle de « topaci palpitante in fresca falda di neve » met àprofit deux images de Pétrarque, la première relative aux cheveux (« L’ auro e i topacii al sol sopra la neve / vincon le bionde chiome » Rvf 30, 37-38), la seconde aux joues (« o rose sparse in dolce falda / di viva neve » Rvf 146, 5-6). Boccace et Pétrarque s’entremêlent aussi dans de nombreux autres détails du portrait (voyez le tableau 1). Le puzzle qui en résulte est assez symptomatique d’une stratégie visant à obtenir une beauté plus proche de la turgescence élégante des portraits de Titien10 que de l’évanescence de la Laure de Pétrarque. Ce n’est pas un hasard si Bembo place la description de Sabinetta dans la bouche de l’épicurien Gismondo, et non pas dans celle de Lavinello, chargé de défendre la théorie ficinienne de la beauté vue comme harmonie entre l’âme et le corps (Asolani III 6). Nous devrons revenir sur cette dualité. On peut tirer des conclusions semblables par rapport à de nombreux autres portraits en prose du XVIe siècle (celui d’Amaranthe dans l’Arcadie de Sannazar, ceux de Della eccellenza et dignità delle donne de Galeazzo Flavio Capella, Della bellezza delle donne de Firenzuola, de la Leonora de Betussi) ; mais il faut rappeler aussi la descripio puellæ des humanistes latins du XVe siècle, tels que Politien (dans In puellam suam) ou Piccolomini (dans la Lucrèce de l’Historia de duobus amantibus), et, dans le genre de la poésie narrative renaissante, certains portraits du Roland furieux dont je parlerai immédiatement. Giovanni Pozzi avait placé la descriptio puellæ du poème d’Arioste à côté de celle de Bembo, la considérant comme l’une des manifestations les plus paradigmatiques du canon de la Renaissance.11 J’essaierai, pour ma part, d’examiner l’intertextualité sous-jacente au portrait d’Alcina.12

Di persona era tanto ben formata,
quanto me’ finger san pittori industri ;
con bionda chioma lunga et annodata :
oro non è che più risplenda e lustri.
Spargeasi per la guancia delicata
misto color di rose e di ligustri ;
di terso avorio era la fronte lieta,
che lo spazio finia con giusta meta.

Sotto due negri e sottilissimi archi
son duo negri occhi, anzi duo chiari soli,
pietosi a riguardare, a mover parchi ;
intorno cui par ch’Amor scherzi e voli,
e ch’indi tutta la faretra scarchi,
e che visibilmente i cori involi :
quindi il naso per mezzo il viso scende,
che non truova l’Invidia ove l’emende.

Sotto quel sta, quasi fra due vallette,
la bocca sparsa di natio cinabro ;
quivi due filze son di perle elette,
che chiude et apre un bello e dolce labro :
quindi escon le cortesi parolette
da render molle ogni cor rozzo e scabro ;
quivi si forma quel suave riso,
ch’apre a sua posta in terra il paradiso.

Bianca nieve è il bel collo, e ’l petto latte ;
il collo è tondo, il petto colmo e largo :
due pome acerbe, e pur d’avorio fatte,
vengono e van come onda al primo margo,
quando piacevole aura il mar combatte.
Non potria l’altre parti veder Argo :
ben si può giudicar che corrisponde
a quel ch’appar di fuor quel che s’asconde.

Mostran le braccia sua misura giusta ;
e la candida man spesso si vede
lunghetta alquanto e di larghezza angusta,
dove né nodo appar, né vena escede.
Si vede al fin de la persona augusta,
il breve, asciutto e ritondetto piede.
Gli angelici sembianti nati in cielo
non si ponno celar sotto alcun velo.

(Orlando furioso VII 11-15)

Pio Rajna y avait vu des traces de l’Emilia de Boccace (Teseida XII 53-63) et de la Simonetta de Politien (Stanze per la Giostra I 42-47).13 Les choses paraissent toutefois moins simples, comme on peut le constater en examinant le tableau 2.

D’emblée, le parcours dessine une ligne en zig-zag qui complexifiela contaminatio entre Boccace et Pétrarque, en y ajoutant d’autres sources. On y perçoit de plus une fusion oxymorique des modèles que l’on pourrait illustrer avec l’image bimembre « duo negri occhi, anzi duo chiari soli », où le noir de Boccace forme un tout unique avec le soleil de Pétrarque. Giovanni Pozzi avait déjà relevé une duplicité dans ce portrait, mais il s’est borné au contraste entre l’énumération des parties du corps selon le canon long et la distribution géométrique des détails propre à la Renaissance.14 À mon avis, il ne s’agit pas seulement d’un nouveau sens de la proportion, mais aussi d’une stratégie qui contamine la stylisation et la sensualité, l’art et la nature. Ce phénomène s’observe dans quelques couples significatifs : la « chioma lunga et annodata », dont la longueur médiévale est corrigée par l’élégante coiffure ; les yeux « pietosi a riguardare, a mover parchi », dans lesquels on trouve un regard à la fois engageant et réservé, plus oxymorique que celui de Sabinetta, qui les a « pieni di bella gravità, con naturale dolcezza mescolata » ; le « natio cinabro », qui fait penser à l’artifice de la chimie tout en le niant ; la tendresse du lait et de la neige, attributs du cou et de la poitrine, qui contrebalance la dureté de l’ivoire propre au front et aux seins (dans ce dernier cas, également en couple oxymorique avec la fraîcheur de l’adjectif « acerbe »). Ce croisement se répète dans les spécifications « tondo » pour le cou, et « colmo e largo » pour la poitrine, le premier faisant allusion à l’architecture, les deux autres à la mollesse de la chair. D’autre part, les « due filze [...] di perle elette » suggèrent l’élégance d’un collier, 15 et si les « parolette » qui en sortent renvoient à Pétrarque, qui avait évoqué des « parolette accorte » (Rvf 253, 1), l’adjectif « cortesi » nous ramène aux bienséances de la civile conversazione. Enfin, l’allusion à l’œuvre d’un artiste mise au premier plan dans l’exorde (« Di persona era tanto ben formata / quanto me’ finger san pittori industri »), revient implicitement en clôture avec la « persona augusta », qui à son tour se trouve en gracieux contraste avec le pied mince mais en harmonie avec les justes proportions du bras et de la main. À la lumière d’un tel examen, il n’est guère surprenant de constater que « l’aura » qui rendait évanescent l’ondoiement des cheveux d’or chez Pétrarque se transfère aux mammelles boccaciennes, qui « vengono e van come onda al primo margo, / quando piacevole aura il mar combatte ». Arioste se situe ainsi dans un territoire ambigu où la distinction entre les canons bref et long s’estompe de la même façon que l’art supplante la nature lorsqu’il s’en approche. La beauté féminine est devenue moins troublante du point de vue moral et philosophique, mais plus inquiétante du point de vue esthétique. C’est pour cela que la Laure de Pétrarque se divise dans le Roland furieux en trois figures, Angelica, Alcina et Olimpia, créant une gradation qui s’éloigne progressivement de son modèle : dans le premier cas, on confie le canon bref (« io parlo de’ begli occhi e del bel volto » Roland furieux VIII 80, 2-6) au personnage qui en incarne la dissolution, mais à condition que la belle fugitive symbolise l’évanescence même et qu’elle ne livre à ses amants que son corps ; dans le second cas, celui d’Alcina, le modèle pétrarquesque se contamine avec le canon long en la personne d’une enchanteuse qui domine l’art du trompe-l’oeil en imitant la grâce la plus naturelle, et qui, lorsque le charme s’évanouit soudain, cède la place à une redoutable vieille (Roland furieux VII 72-74) ; enfin, dans le cas d’Olimpia, la naturalité sans artifice coïncide avec la parfaite nudité qui ne laisse rien à l’imagination, tandis que les métaphores suggèrent d’un côté une statue de Phidias (d’ailleurs expressément cité), 16 de l’autre un tableau vivant composé à la manière d’Arcimboldo avec des fragments de paysages (« Era il bel viso suo, quale esser suole / da primavera alcuna volta il cielo, / quando la pioggia cade, etc. » Roland furieux XI 65).17Ces choix ne relèvent pas seulement de l’ironie maniériste d’Arioste. Si l’on examine les portraits disséminés dans les chansonniers pétrarquistes du XVIe siècle, on constatera la coexistence ou l’entrecroisement de lignes qui, d’une façon ou d’une autre, glissent vers la nature morte et l’ut pictura poësis, vers la dissolution bucolique de la beauté et son évolution courtisane, ou bien vers son abstraction néoplatonicienne et le pur et simple mirage. Cela expliquerait aussi les changements subis par quelques images pétrarquesques telles que la bouche entrouverte, les yeux sereins et le miroir.

La bouche entrouverte : perles et rubis

Pour désigner le couple lèvres+dents, Pétrarque avait recours à la combinaison roses-perles en l’associant à la douceur des paroles prononcées par Laure : « perle et rose vermiglie, ove l’ accolto / dolor formava ardenti voci et belle » (Rvf 157, 12-13) ; « la bella bocca angelica, di perle / piena et di rose et di dolci parole » (Rvf 200, 10-11).18 Cette image est l’une des plus imitées dans le pétrarquisme du XVIe siècle parce qu’elle permet d’additionner la beauté physique et la beauté morale en présentant la partie la plus sensuelle du visage comme la source des sublimes expressions de l’âme ; on trouve là le critère ficinien réitéré par Lavinello dans les Asolani et précisé par Bembo dans le Courtisan de Castiglione :

[deve il cortegiano] considerar che ’l corpo, ove quella bellezza risplende, non è il fonte ond’ella nasce, anzi che la bellezza, per esser cosa incorporea e, come avemo detto, un raggio divino, perde molto della sua dignità trovandosi congiunta con quel subietto vile e corruttibile [...]. Rimovasi adunque dal cieco giudicio del senso e godasi con gli occhi quel splendore, quella grazia, quelle faville amorose, i risi, i modi e tutti gli altri piacevoli ornamenti della bellezza ; medesimamente con l’audito la suavità della voce, il concento delle parole. (IV 62)19

Le mot « concento » avait déjà été utilisé par Bembo dans la chanson Sì rubella d’Amor pour désigner l’harmonie entre la beauté extérieure et la beauté intérieure : « bellezza e castità dolce concento » (v. 11).20 Ce dernier avait répété à trois reprises cette solution bifronte dans les Rime, 21et bien d’autres poètes l’avaient imité. Quant aux comparants utilisés pour les lèvres et les dents, le couple rose+perle était entré dans une voie sans issue après l’utilisation qu’en avaient fait Giusto de’ Conti et Sannazar, tandis que d’autres combinaisons s’étaient bientôt imposées : le même Giusto de’ Conti avait utilisé plus souvent rose+viole et coralli+perle ;22 De Jennaro s’en était tenu aux sécrétions de la mer (« fine perle tra coralli » CXIII 3-4) et Boiardo aux fleurs (« chi non vide fiorir quel vago riso / che germina de rose e de viole » Amorum libri I 42, 4-5) ; Politien avait associé les perles aux violettes dans le portrait de Simonetta (« Poi formò voce fra perle e viole » Stanze per la Giostra I 50, 5), et les coraux aux perles dans son élégie In puellam.23 Ce dernier couple avait été choisi également par Bembo dans la prose des Asolani (« mirando ne’ coralli et nelle perle, di cui sono men pretiose tutte le gemme de gli orientali thesori, sentirne uscir quelle voci » II 32).24 Et, probablement à cause de son influence, d’autres auteurs l’avaient utilisé dans leur poésie.25 Mais la solution la plus répandue était le couple rubis+perles : une combinaison qui remontait au neuvième sonnet de Boccace, où, comme de coutume, la Laure de Pétrarque avait perdu son évanescence au profit d’une sensualité et d’une préciosité à la fois païenne et médiévale : « Candide perle, orientali e nuove, / sotto vivi rubin chiari e vermigli, / da’ quali un riso angelico si muove » (1-3). On doit l’immense fortune de cette image à Bembo, qui, après avoir imité les « due rubinetti » de la Fiammetta du Decameron dans les « due rubinetti vivi et dolci » de Sabinetta, remplira de perles et de rubis sa descriptio puellæ en vers : c’est le cas des sonnets Crin d’oro crespo (« Rubini e perle, ond’escono parole / sì dolci, ch’altro ben l’alma non vòle » 6-7) et Se ’n dir la vostra angelica bellezza (« neve, or, perle, rubin, due stelle, un sole » 2), 26 de la chanson Donna de’ cui begli occhi alto diletto (« Avea per sua vaghezza teso Amore / un’alta rete a mezzo del mio corso, / d’oro e di perle e di rubin contesta » 33-35), et de ses Stanze (« care perle e rubini, ond’escon note / da far ogni uom da se stesso diviso » 27, 3-4). Pour illustrer l’influence de ce choix, il suffira de rappeler la présence du couple dans douze autres poètes du XVIe siècle.27 Une fois de plus, les comparants prêtent au visage la consistance matérielle de l’art. La rose, par contre, se spécialise en métaphore par excellence de la jeunesse, et par conséquent des joues, 28 en liaison avec les motifs du collige rosas ou du carpe diem. Cette dernière tendance illustre un processus de traduction bucolique de la beauté qui va bien au-delà des suggestions fournies par Pétrarque. C’est ce qui semble expliquer l’évolution subie par la seconde image que nous allons examiner.

Les yeux sereins

Pétrarque avait loué la sérénité du regard dans deux compositions du Canzoniere (Rvf 160, 5 : « Dal bel seren de le tranquille ciglia » et Rvf 200, 9 : « li occhi sereni »), 29 bien que la connotation la plus fréquente fût celle de la luminosité. Dans deux autres cas, il avait attribué à la voix de Laure un effet apaisant sur le ciel et sur l’esprit : respectivement dans le sonnet 157 (« e ’l dolce amaro lamentar ch’i’ udiva, / facean dubitar, se mortal donna o diva / fosse che ’l ciel rasserenava intorno » Rvf 157, 6-8), et dans la chanson 270(« Fammi sentir de quell’aura gentile / di for, sí come dentro anchor sí sente ; / la qual era possente, / cantando, d’ acquetar li sdegni et l’ire, / di serenar la tempestosa mente / et sgombrar d’ogni nebbia oscura et vile » Rvf 270, 31-36). Ces deux images vont se fondre dans la poésie de la Renaissance. Le point d’irradiation sera cette fois la Simonetta de Politien, où l’on trouve deux allusions à la sérénité du regard projetée dans le paysage : « e pur col ciglio le tempeste acqueta » (Giostra 143, 8) ; « Folgoron gli occhi d’un dolce sereno / [...] / l’aer d’intorno si fa tutto ameno, / ovunque gira le luce amorose » (Giostra 144, 1-4). Le glissement est presque imperceptible, mais sa signification pour l’histoire de l’idée de beauté paraît d’autant plus grande. En effet, la beauté s’épanouit maintenant dans le paysage, en créant une réciprocité circulaire entre la belle femme et la nature. Vénus en devient le symbole quelques stances plus loin : « la dea negli occhi folgorar vedresti/e’lcel riderli a torno e gli elementi » (Giostra I 100, 3-4). Ajoutons que dans leur ensemble, la description de Simonetta et celle de Vénus s’associent au motif des nymphes qui cueillent des fleurs pour s’en parer, geste répété par Sannazar dans son portrait d’Amaranthe (Arcadie Prose IV).30 Ce n’est pas un hasard si l’image de la beauté féminine répandant le calme à l’entour s’installe avec force dans une longue liste de poètes italiens du XVIe siècle. Bembo fut, parmi eux, l’un des plus productifs. 31 Déjà dans une chanson des Asolani, il avait décrit la belle femme comme une apparition printanière répandant la sérénité à travers ses yeux, sa voix, sa robe et sa démarche, Perché ’l piacer a ragionar m’invoglia :

E ’n contro i raggi delle luci sante
ogni ramo inchinarsi
del bosco intorno, e più frondoso farsi :
e fiorir l’erbe sotto le sue piante :
e quetar tutti i venti
al suon de’ primi suoi beati accenti
[...]
vincea la neve il vestir puro e bianco
dal collo a’ piedi : e ’l bel lembo d’intorno
avea virtù da far l’aria serena
l’andar toglieva l’alme alla lor pena.
(Asolani III, 40-45, 49-52)

Par la suite, il introduira une variation significative dans le vers de Pétrarque sur le regard de Laure (« pò far chiara la notte, oscuro il giorno » Rvf 215, 12-13) en associant le rire à la douceur des yeux, et en renversant l’ordre nuit/jour pour rattacher l’effet de sérénité à celui de clarté : « occhi soavi e più chiari che ’l sole, / da far giorno seren la notte oscura, / riso, ch’acqueta ogni aspra pena e dura » (3-5). Dans la chanson pour la mort de la Morosina, enfin, la trace de Politien devient encore plus évidente avec la reprise textuelle de l’expression « le tempeste acqueta », Donna de’ cui begli occhi alto diletto, 33-38 :

Avea per sua vaghezza teso Amore
un’alta rete a mezzo del mio corso,
d’oro e di perle e di rubin contesta,
che veduta al più fero e rigid’orso
umiliava e ’nteneriva il core
e quetava ogni nembo, ogni tempesta.

Cette série de glissements est l’indice d’une interprétation orphique de la beauté, comme le démontrent les deux poètes les plus enclins à l’associa-tion entre la descriptio puellæ et le printemps : Boiardo et Bernardo Tasso. Le premier avait réuni la mer, le ciel, l’air et les fleurs en additionnant à l’effet apaisant de la femme celui de la floraison : « Al suo dolce guardare, al dolce riso, / l’erba vien verde, e colorito il fiore, /eil mar s’acqueta, e il ciel sè rasserena » (Amorum libri I 6, 12-14). Quant à Bernardo Tasso, l’abondance d’exemples parle d’elle-même (« fioriti lidi, chiare e lucid’ onde, / tutti d’ amore, e di dolcezza pieni : / beati voi, ch’ognor fatti sereni / da quelle luci a null’altre seconde », 11, 3-6 ; « Questa Donna gentil, che sola e lieta / di tante meraviglie ha ’l mondo adorno, / e nel più oscuro e più turbato giorno / sgombra le nebbie, e le tempeste acqueta » ;32 « ’l ciel sereno / fa co’ begli occhi, e le campagne infiora » ;33 et encore : « Da’ bei vostr’occhi, ond’ognor cade e piove / quanta grazia può dare ogni pianeta, / al cui sol cenno subito s’acqueta / l’irato mar »).34 Hors du courant bucolique, d’autres poètes illustrent la fortune du nouveau stéréotype : Antonio Brocardo (« Occhi da far il mar a un sguardo queto » Rime 9, 3), Tebaldeo (« riso che il mar tranquillo e il ciel fa chiaro » ;35 « Al rider di costei fasse sereno / il ciel, la terra adorna, il mar placato » Rime dubbie 50, 1-2), Luigi Da Porto (« Voci escon, che ’l mar queto e ’l ciel fan vago » Rime 3, 11 ; « ’l raggio lor [des yeux], che ’l ciel fa chiaro/e’lmar tranquillo » Rime 7, 9-10), Francesco Maria Molza (« Qual è il vederla errar in treccia e in gonna, / e tra fiori seder scalza e sicura, / o far l’un tronco al bel fianco colonna, / quetando con dolcezza ogn’ altra cura ; / qual come Diva, e non terrestre donna / serenar l’aria tenebrosa e oscura ; / e ovunque il passo mova, e gli occhi gire, / bandire i tuoni, e al Ciel prescriver l’ire » Stanze 33-40).36 La beauté semble donc s’allier avec le locus amoenus au nom de l’harmonie et de la douceur, mais cette association entraîne des conséquences contradictoires. En effet, plus on identifie la beauté avec le printemps, plus on glisse vers le thème de la caducité. Ce n’est pas un hasard si l’un des sonnets les plus imités dans la poésie baroque espagnole du desengaño37 est celui que Bernardo Tasso consacre à la beauté éphémère des jeunes filles en fleur :

Mentre che l’aureo crin v’ondeggia intorno
a l’ampia fronte con leggiadro errore,
mentre che di vermiglio e bel colore
vi fa la primavera il volto adorno ;

mentre che v’apre il ciel più chiaro il giorno,
cogliete, o giovenette, il vago fiore
de’ vostri più dolci anni, e con Amore
state sovente in lieto e bel soggiorno :

verrà poi ’l verno, che di bianca neve
suol i poggi vestir, coprir la rosa,
e le piaggie tornar aride e meste.

Cogliete, ah stolte, il fior ! ah siate preste !
che fugaci son l’ore, e ’l tempo lieve,
e veloce a la fin corre ogni cosa.

Le miroir

Tous les nœuds thématiques que je viens d’examiner semblent nous amener au motif du miroir. Pétrarque lui avait associé deux valeurs indépendantes : celle de la beauté narcissique et superbe, appliquée à la femme (« non devea specchio farvi per mio danno, / a voi stessa piacendo, aspra et superba » Rvf 45, 10-11), et celle de la vieillesse, appliquée au poète déçu : « In questa passa ’l tempo, et nelo specchio / mi veggio andar ver’ la stagion contraria » (Rvf 168, 9-10) ; « Dicemi spesso il mio fidato speglio, / l’animo stanco, et la cangiata scorza » (Rvf 361, 1-2). Par ailleurs, le Canzoniere contenait des allusions au caractère inexprimable de la beauté unique de Laure, que ce soit à cause de son excès éblouissant (rappelons-nous la métaphore du soleil et du papillon brûlé), 38 ou en raison de la défaillance du poète, pétrifié par l’effet de l’amour, selon le mythe de Méduse, 39ou, enfin, du fait de l’insuffisance même de l’art poétique à représenter un objet surhumain.40 Dans la poésie pétrarquiste de la Renaissance, ce filon thématique se rattache au motif du miroir, avec, en toile de fond, l’irréproductibilité artistique de la nature. Dans ce cas, c’est Tebaldeo qui fut le principal innovateur et Torquato Tasso son plus grand interprète. Si pour Pétrarque la beauté de Laure représente une exception « che sol se stessa, et nulla altra, simiglia » (Rvf 160, 4), la Renaissance fait de la reproductibilité des modèles un principe central d’ordre esthétique et philosophique. D’ailleurs, la beauté et l’amour se lient en un tout unique, selon la définition ficinienne de l’amour comme désir de beauté, et de la beauté comme manifestation de l’harmonie cosmique. Plus on s’approche de l’idéal, donc, et plus on est contraint de l’imiter. L’art était l’instrument chargé de cette reproduction idéalisante ad infinitum ; mais si la beauté idéale n’était pas réelle et qu’elle consistait de surcroît dans une grâce intangible émanant de l’âme, le serpent se mordait la queue. Il en résultait l’impossibilité d’une quelconque représentation pour des causes opposées à celles de Pétrarque. C’est dans ce cadre qu’il faut lire le sonnet de Tebaldeo sur le portrait d’Isabella d’Este réalisé par Gian Cristoforo Romano, dans lequel le poète joue avec le double sens du marbre, celui employé par le sculpteur et celui produit par le regard pétrifiant de Méduse (251, 12-14) :

Ma guarda, se al suo viso te apresenti,
de chinar gli occhi e non specchiarte in ello,
che pietra de sculptor tu non diventi.

L’on comprend mieux aussi pourquoi la compétition entre les arts devient un lieu commun face au dilemme entre la beauté matérielle – objet du peintre et du sculpteur – et la beauté spirituelle, plus proche du poète mais insaisissable par définition. Ici, une nouvelle fois, nous retrouvons un sonnet très significatif de Tebaldeo, où l’on attribue au seul coeur amoureux le pouvoir de reproduire l’image idéale :

Qual fu il pictor sì temerario e stolto
che ritrar volse la tua forma in carte ?
Ché Zeusi e Apel, che inteser sì ben l’arte
e che hanno il pregio a tutti gli altri tolto,

imitar non saprian del tuo bel volto
col suo disegno pur la minor parte ;
né se confidaria di novo farte
epsa Natura, benché possa molto.

Sì che non dar fatica a la pictura :
se sei un sol, non ti fare una stella,
non ha in carta il suo honor la tua figura.

Solo il cor mio scia farla come è bella,
che se di fuor potesse per ventura
mostrarla, udresti ognun gridar : “Gli è quella !”
41

Nous nous trouvons donc face à un cercle vicieux : la beauté existe seulement dans les idées, et par conséquent dans l’art ; mais c’est pour cette raison même que l’art ne peut pas la reproduire. Par ailleurs, si le cœur de l’amant en est le seul miroir fidèle, celui-ci ne peut que s’aliéner dans l’objet de sa passion. Pour ce même motif, l’objet perd toute consistance en tant que reflet dans les yeux d’un autre ... et du miroir. L’une des modifications les plus significatives du thème du miroir à la Renaissance est en effet la liaison entre le narcissisme féminin et l’amour aliéné du poète, qui en devient le reflet. À ce propos, Tebaldeo écrivait : « A che presti, superba, a un vetro fede ? / Se ben comprender vòi la tua belleza, / spècchiate in me, ché tanta è sua grandeza / quanto è l’incendio mio, che ogni altro excede » ; et il précisait encore : « L’effecto è da veder, non la figura » (sonnet 36 de la Vulgata). Le Tasse devait rendre cette idée plus explicite encore dans le sonnet Chiaro cristallo a la mia donna offersi (Rime 44) : 42

Chiaro cristallo a la mia donna offersi
sì ch’ella vide la sua bella imago
qual di formarla il mio pensiero è vago
e qual procuro di ritrarla in versi.

Ella da tanti pregi e sì diversi
non volse il guardo di tal vista pago,
gli occhi mirando e ’l molle avorio e vago
e l’oro de’ bei crin lucidi e tersi.

E parea fra sé dir : “Ben veggio aperta
l’alta mia gloria e di che dolci sguardi
questa rara bellezza accenda il foco !“

Così, ben che ’l credesse in prima un gioco,
mirando l’armi ond’io fuggii sì tardi
de le piaghe del cor si fe’ più certa.

À partir de là, il n’y avait plus qu’un pas à franchir pour arriver à la dissolution de la beauté en tant que mirage. C’est la fusion entre le thème de la vieillesse et celui de la belle au miroir qui en est l’indice. On trouve cette nouveauté dans un sonnet de Tebaldeo, où la femme brise le miroir qui reflète son image enlaidie (« Alhor di sdegno il specchio spezarai » Rime della vulgata 99, 12), et dans un autre de Bembo, qui rattache la vanité narcissique au thème du carpe diem (« quando le chiome d’or crespo e lucente/saranno argento.../ [...] /e ne lo specchio mirerete un’altra » O superba e crudele 3-9).43 Le caractère éphémère de la beauté entre ainsi en contradiction avec son image, soit que le reflet devienne trop réaliste, soit au contraire qu’il cache la vérité pour préserver l’idéal. Dans ce dernier cas, c’est le Tasse qui franchitle pas décisif en revenant sur le motif de la femme vieillie pour opposer l’illusion menteuse du portrait poétique à la vérité cruelle du miroir : « Vedrò da gli anni in mia vendetta ancora / far di queste bellezze alte rapine, / [...] / e, se pur tanto or mi disdegna e sprezza, / poi bramerà, ne le mie rime accolta, / rinnovellarsi qual fenice in foco » (Rime 76) ; « Non più crespo oro o d’ambra tersa e pura / stimo le chiome che ’l mio laccio ordiro, / e nel volto e nel seno altro non miro / ch’ombra de la beltà che poco dura / [...]. / Fero inganno d’Amor, l’inganno omai / tessendo in rime sì leggiadri fregi/alacrudel ch’indi più bella apparve. / Ecco, i’ rimovo le mentite larve : / or nele proprie tue sembianze omai / ti veggia il mondo e ti contempli e pregi ! » (Rime 108). C’est également le Tasse qui rattache tous les fils que nous venons de suivre pour en faire un seul nœud. C’est ce que l’on constate dans le portrait d’Armida, la magicienne qui, comme Alcina (et plus qu’Alcina), utilise les ressources de l’art pour imiter la nature. Je ne dispose pas ici de l’espace nécessaire pour analyser les variations introduites dans la longue descriptio puellæ que le poète dédie à ce personnage (Gerusalemme liberata IV 29-34), 44 mais il suffit d’en rappeler les vers conclusifs (IV 87) :

Usa ogn’arte la donna, onde sia colto
ne la sua rete alcun novello amante ;
né con tutti, né sempre un stesso volto
serba, ma cangia a tempo atti e sembiante.

Désormais la beauté devient une fiction qui s’adapte à chaque spectateur : la fixité du portrait se dissout au profit d’une auto-imitation déguisante. C’est dans ce cadre que l’épisode du jardin d’Armida acquiert sa pleine signification, car la nature semble s’y imiter elle-même grâce à l’artifice. Elle le fait pour créer l’illusion d’un printemps éternel, c’est-à dire pour se préserver de l’action dévastatrice du temps (XVI 10, 3-8) :

Di natura arte par, che per diletto
l’imitatrice sua scherzando imiti.
L’aura, non ch’altro, è de la maga effetto,
l’aura che rende gli alberi fioriti :
co’ fiori eterni eterno il frutto dura,
e mentre spunta l’un, l’altro matura.

La deuxième description d’Armide a lieu – et pour cause – dans le faux paradis qu’est ce jardin, et elle est significativement introduite par le motif de la caducité de la rose qui « quanto si mostra men, tanto è più bella » (XVI 14, 4). Cette variation sur le motif traité par Arioste dans le Roland furieux (« La verginella è simile alla rosa » I 42) mérite un commentaire, car la part intérieure de la beauté y figure comme une vérité que l’on doit cacher pour éviter sa prochaine dissolution au moment où elle se déployera dans toute sa nudité : « Ecco poi nudo il sen già baldanzosa / dispiega ; ecco poi langue e non par quella » (5-6). Il n’est guère étonnant que dans le second portrait d’Armide, la beauté déploie sans pudeur toute sa tautologie narcissique, et que cet effet se produise dans une scène dans laquelle l’amant-esclave lui offre un miroir qui le sépare de son objet précisément parce qu’il est son seul moyen de conjonction avec lui :

Dal fianco de l’amante (estranio arnese)
un cristallo pendea lucido e netto.
Sorse, e quel fra le mani a lui sospese
a i misteri d’Amor ministro eletto.
Con luci ella ridenti, ei con accese,
mirano in vari oggetti un solo oggetto :
ella del vetro a sé fa specchio, ed egli
gli occhi di lei sereni a sé fa spegli.

Qu’est-ce, en effet, que la beauté dans la poésie de la Renaissance, si ce n’est une image auto-réfléchie dont l’intermédiaire est l’artiste Pygmalion ?

Tableau 1. Sources du portrait de Sabinetta (Pietro Bembo, Asolani I 22)

BemboBoccacePétrarque et Sannazar
« la bella treccia, più simile ad oro che ad altro [...] lungo ’l soave giogo della testa, [...] partendosi et nel sommo segnandolo con diritta iscriminatura, [...] s’avolge in più cerchi ; ma dinanzi, giù per le pure tempie, diqua et di là in due pendevoli ciocchette scendendo et dolcemente ondeggiando per le gote, mobili ad ogni vegnente aura, pare a vedere un nuovo miracolo di topaci palpitante in fresca falda di neve »« i biondi capelli, [...] lunghissimi, parte ravolti alla testa nella sommità di quella, [...] vede raccolti ; e altri più corti, [...] sparti vede e raggirati ; e altri dati all’aure, ventilati da quelle, quali sopra le candide tempie e quali sopra il dilicato collo ricadendo » (Comedia delle Ninfe fiorentine 12, 7)PÉTRARQUE : « L’ auro e i topacii al sol sopra la neve/vincon le bionde chiome » (Rvf 30, 37-38) ; « o rose sparse in dolce falda/di viva neve » (Rvf 146, 5-6) ; « Aura che quelle chiome bionde et crespe/ cercondi et movi, et se’ mossa da loro, /soavemente, et spargi quel dolce oro, /et poi ’l raccogli, e ’n bei nodi il rincrespe » (Rvf 227, 1-4)
« la serena fronte, con allegro spatio »« la lieta fronte » (Rime IX 9-10) ; « La fronte [...] ampia e spaziosa » (Teseida XII 55, 1)PÉTRARQUE : « quella fronte, più che ’l ciel serena » (Rvf 220, 7-8) ; « del bel dolce soave bianco et nero, / in che i suoi strali Amor dora et affina » (Rvf 215, 13-14)
« le ciglia d’ebano piane et tranquille »« eran due ciglia [...] / neris-sime e sottil » (Teseida XII 55, 5-6) ; « le circulate ciglia [...] nere non meno che quelle degli Etiopi » (Commedia delle Ninfe fiorentine 12, 10)PÉTRARQUE : « le tranquille ciglia » (Rvf 160, 5) ; « hebeno i cigli » (Rvf 157, 10)
« vede lampeggiar due occhi neri et ampi [...] scintillanti come due stelle »« occhi [...] neretti, soavi, lunghi » (Commedia delle Ninfe fiorentine 15, 16) ; « eran gli occhi lucenti / e più che stella scintillanti assai ;/[...]/e brun » (Teseida XII 66, 1-4)PÉTRARQUE : « lampeggiar de l’angelico riso » (Rvf 292, 6)
« le morbide guancie, la loro tenerezza et bianchezza con quelle del latte appreso rassomigliando, se non in quanto alle volte contendono con la colorita freschezza delle matutine rose »« le fresche guance e dilicate » (Filostrato VI 1, 6) ; « le guance [...] si ritornarono nella pristina loro morbidezza » (Fiammetta VII 5)SANNAZAR : « un volto [...]/ che di colore avanza latte e rose » (Arcadia, Egl. I 64-65) ; « Tirrena mia, il cui colore agguaglia/le matutine rose e ’l puro latte » (Egl. II 109-10)
« la sopposta bocca, di picciolo spatio contenta, con due rubinetti vivi et dolci, haventi forza di raccendere il disio di basciargli »« sopposta la bella bocca, di piccolo spazio contenta » (Commedia delle Ninfe fiorentine 9, 15) ; « con una boccuccia piccolina li cui labbri parevan due rubinetti » (portrait de Fiammetta, Decameron, conclusion de la IV journée) ; « Ella aveva la bocca piccioletta, / tutta ridente e bella da basciare » (Teseida XII 59, 1-2)
« candidissimo petto »PÉTRARQUE : « quand’ ella preme / col suo candido seno un verde cespo » (Rvf 160, 10-11)
« l’altra che sta ricoperta [...] mercé del vestimento cortese, il quale non toglie perciò sempre a’ riguardanti la vaghezza de’ dolci pomi che, risistenti al morbido drappo, soglion ben spesso della lor forma dar fede »« la forma de’ tondi pomi, li quali con sottile copritura ascondendo, resistenti pareano che volessero mostrarsi malgrado del vestimento » (Commedia delle Ninfe fiorentine 12, 14)

Tableau 2. Sources du portrait d’Alcina (Arioste, Orlando furiosi VII II-17)

BemboBoccacePétrarque et Sannazar
« persona [...] ben formata »« la persona / grande e ischietta convenevolmente » (Teseida XII 53, 1-2)
« bionda chioma lunga »« lunghi, biondi e copiosi capelli » (Commedia delle Ninfe fiorentine 12, 8)
« guancia delicata »« guancie [...] dilicate » (Teseida XII 55, 5-6) « le fresche guance e dilicate » (Filostrato VI 1, 6)
« misto color di rose e di ligustri »POLITIEN : « dolce dipinto di ligustri e rose » (Giostra I 44, 6)
« di terso avorio era la fronte lieta, / che lo spazio finia con giusta meta »« lieta fronte » (Rime IX 10) [fronte con] « dovuti confini, [...] e di debita ampiezza » (Commedia delle Ninfe fiorentine 12, 22)TÉBALDÉ : « il terso avorio, l’oro puro e netto, / la bianca man » (Silloge pour Isabella d’Este 457, 7-8)
« due negri e sottilissimi archi »« ciglia [...] nerissime e sottili » (Teseida XII 55, 5-6)
« duo negri occhi, anzi duo chiari soli »BEMBO : « due occhi neri » (portrait de Sabionetta, Asolani) ; GIUSTO DE’CONTI : « quegli occhi vaghi, anzi quel sole » (La bella mano 35, 2) ; « dolci occhi, anci dui sol » (La bella mano 164, 3)45
« [occhi] intorno cui par ch’Amor scherzi e voli, / e ch’indi tutta la faretra scarchi, / e che visibilmente i cori involi »« que’ begli occhi splendidi, ne’ quali / Amor fabrica e tempra le saette / che mi passano il core » (Rime 4, 5-7)PÉTRARQUE : « gli occhi eran due stelle, / onde Amor l’arco non tendeva in fallo » (Rvf 157, 6-7) ; FILENIO GALLO : « du’ occhi, anzi duo stelle, ove nasconde / le sue saette e l’arco el cieco figlio (A Saphira I Terzo capitolo)
« il naso per mezzo il viso scende »« [il naso] in linea diritta discende » (Commedia delle Ninfe fiorentine IX 13)
« la bocca sparsa di natio cinabro »« [la bocca vermiglia] non dipinta, ma natura gliel’aveva data » (Teseida XII 58, 6) ; « labbra di naturale vermiglio » (Commedia delle Ninfe fiorentine IX 16)
« due filze son di perle elette, / che chiude et apre un bello e dolce labro : / quindi escon le cortesi parolette »« Candide perle, orientali e nuove, / sotto vivi rubin chiari e vermigli, / da’ quali un riso angelico si muove » (Rime 9, 1-3) ; « el parlare / a chi l’udia parea una angioletta ; / e’ denti suoi si potean somigliare / a bianche perle » (Teseida XII 59, 5-7)PÉTRARQUE : « la bella bocca angelica di perle / piena et di rose et di dolci parole » (Rvf 200, 10-11) ; « le perle, in ch’ei [Amor] frange et affrena / dolci parole, honeste et pellegrine » (Rvf 220, 5-6) ; « parolette accorte » (Rvf 253, 1) ; GIUSTO DE’CONTI : « Et l’armonia, che tra sì bianche et monde / perle risuona angeliche parole » (7, 5-6) ; « Parole udii, che altrui ascoltar non lice, / fra perle et rose » (33, 10-11) ; POLITIEN : « Quid margaritas dentium / praecandidorum proloquar ? » (In puellam suam) ; SANNAZAR : « ogni volta che parlava o sorrideva, mostrava alcuna parte de’ denti, [...] che a niuna altra cosa che ad orientali perle gli avrei saputo assomigliare » (Arcadia IV portrait d’Amaranta) ; BEMBO : « Quale, mirando ne’ coralli et nelle perle, di cui sono men pretiose tutte le sono men pretiose tutte le gemme de gli orientali thesori, sentirne uscir quelle voci che sono dall’ascoltante anima ricevute sì volentieri ? » (Asolani II 32)
« suave riso »« Le parole soave e ’l dolce riso » (Rime XVI 1)PÉTRARQUE : « dolce parlare et dolce riso » (Rvf 348, 4) ; GIUSTO DE’CONTI : « et la vaghezza del soave riso » (7, 5)
« riso [...] paradiso »PÉTRARQUE : « e ’l lampeggiar de l’angelico riso, / che solean fare in terra un paradiso » (Rvf 292, 6-7) ; POLITIEN : « lampeggiò d’un sì dolce e vago riso / [...] / che ben parve s’aprissi un paradiso » (Giostra I 50) ; BOIARDO : « Chi non vide fiorir quel vago riso / che germina de rose e de viole ; / chi non audi le angeliche parole / che sonan de armonia di paradiso » (Sonetti e canzoni I 35, 4-6)
« Mostran le braccia sua misura giusta »« distese braccia [...] di debita grossezza » (Commedia delle Nife fiorentine IX 21)
« ’l petto latte »OVIDE : « Prodita sunt, memini, tunica tua pectora laxam / atque oculis aditum nuda dedere meis, / pectora vel puris nivibus vel lacte tuamque / complexo matrem candidiora Iove » (Her. XVI 249-52) ; CARITEO : « quel bel tenero petto, / candido latte e non calcata neve » (Endimione chanson XII)
« il petto colmo e largo »« spazioso petto » (Commedia delle Ninfe fiorentine IX 26) ; « di carne pieno » (Commedia della Ninfe fiorentine XII 26)
« ben si può giudicar che corrisponde / a quel ch’appar di fuor quel che s’asconde »« e l’altre parti tutte si confanno / alle predette, in proporzion eguale » (Rime IX 13-14)OVIDE : « nec dubito, totum quin sibi par sit opus » (Her. XX 63)
« candida man »« con la candida man » (Teseida III 9)ANGELO GALLI : « Quella ligiadra et candida man dextra » (94, 9) ; FILENIO GALLO : « fatti da quella man candida e pura » (ASafira 193, 2) ; LORENZO DE’MEDICI : « quella candida man » (Canzoniere 90, 14) ; NICCOLÒ DA CORREGGIO : » e la candida man tutta mi diede » (139, 10) ; etc
« Bianca nieve è il bel collo »MATTHIEU DE VENDÔME : « Colla polita nivem certant superare » (Ars versificatoria I 56, 27) ;GUIDO DELLE COLONNE : « Sic miratur eciam in ipsa colli culumpnulam niueum presenare nitorem » (Historia destrutionis Troiae) ;BERNARDO PULCI : « di neve il collo » (42, 6)
« collo tondo »MAXIMIEN : « tereti collo » (Elégie I)
« pome acerbe, e pur d’avorio fatte / vengono e van come onda al primo margo / quando piacevole aura il mar combatte »« de’ pomi vaghi per mos-tranza tondi, / che per durezza avean combattimento » (Teseida XII 61, 7) ; « acerbi pomi » (Corbaccio 288)TEBALDEO : « che veggio, mentre il dolce vento spira, / ondeggiar doi bei pomi e spuntar fuora » (Rime estravaganti 314, 5-6)
« né nodo appar, né vena escede »ANTONIO PUCCI : « [mani] bianchissime senza alcuna apparente vena » (Libro di varie storie) ; BRIZIO VISCONTI : « che corda o vena sola / lì non appare overo altro difetto » (Mal d’Amor 100-101) ; De vetula : « Collum tam planum quam plenum, non ibi nervi / corda riget, non vena tumet, cuius cutis omni / asperitate caret nec fedat eam maculosa / menda » (304-306)
« il breve, asciutto e riton-detto piede » (ed. 1532)« il piccolino e ritondetto piede » (ed. 1516)« il pié piccolin » (Teseida XII 63, 2) ; « il viso ritondetto » (Decameron, conclusion de la IVe journée, portrait de Fiammetta)

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1 I ritratti del Trissino, Rome, Lodovico degli Arrighi et Lautitio Perugino, 1524. À propos de ce portrait, voir M. BEER, Idea del ritratto femminile e retorica del classicismo : i Ritratti d’Isabella d’Este di Gian Giorgio Trissino, in Il ritratto e la memoria. Materiali 3, a cura di A. Gentili, Ph. Morel, C. Cieri Via, Rome, Bulzoni, 1993, pp. 253-69.

2 Cf. Tutte le opere di Giovan Giorgio Trissino Gentiluomo vicentino non più raccolte. Tomo secondo contenente le prose, Verona, Jacopo Vallarsi, 1729, p. 272. Pour d’autres textes cités dans ce travail, faute de renvoi en note, la source implicite est l’Archivio della tradizione lirica da Pétrarque a Marino, a cura di A. Quondam (Lexis, 1997), et la Biblioteca Italiana (BibIt) de l’Université « La Sapienza » (on-line). Toutefois, j’ai consulté aussi les Rime diverse di molti eccellentissimi auttori nuovamente raccolte (Venise, Giolito, 1545), les Rime scelte di diversi autori (Venise, Giolito, 1563), et de nombreuses autres éditions de chansonniers du xvie siècle qu’il serait trop long d’énumé-rer ici.

3 Cf. P. SABBATINO, La bellezza di Elena. L’imitazione nella letteratura e nelle arti figurative del Rinascimento, Firenze, Olschki, 1997 (en particulier le ch. 1).

4 À savoir : Rvf 196, 7-8 (7-8 : « et le chiome or avolte in perle e ’n gemme, / allora sciolte, et sovra òr terso bionde »), Rvf 157, 9-10 (« La testa òr fino, et calda neve il volto, / hebeno i cigli, et gli occhi eran due stelle), Rvf 151, 5-8 (« Né mortal vista mai luce divina / vinse, come la mia quel raggio altero / del bel dolce soave bianco et nero, /in che i suoi strali Amor dora et affina »), Rvf 215, 12-14 (« et non so che nelli occhi, che ’n un punto / pò far chiara la notte, oscuro il giorno, /e’lmèl amaro, et adolcir l’assentio »), Rvf 127, 71-79 (« Se mai candide rose con vermiglie / in vasel d’ oro vider gli occhi miei / allor allor da vergine man colte, / veder pensaro il viso di colei / ch’ avanza tutte l’altre meraviglie / con tre belle excellentie in lui raccolte : / le bionde treccie sopra ’l collo sciolte, / ov’ ogni lacte perderia sua prova, /e le guancie ch’adorna un dolce foco »), Rvf 37, 98 (« le man bianche e sottili »), Rvf 146, 5-6 (« o fiamma, o rose sparse in dolce falda / di viva neve, in ch’ io mi specchio et tergo »), Rvf 199, 1-5 (« O bella man, che mi destringi ’l core, / [...] / di cinque perle orïental’ colore »), Rvf 119, 1-2 (« Una donna piú bella assai che ’l sole, / et piú lucente »). Même le couple leggiadria e beltade trouvait son origine dans les vers 93-94 de la chanson Rvf 325 (« leggiadria né beltate / tanta non vide ’l sol, credo, già mai »). Je m’en tiens, selon l’usage établi, au texte critique du Canzoniere fixé par Gianfranco Contini (Torino, Einaudi, 1964).

5 Bien que Pétrarque eût privilegié la main comme sinecdoque du corps, il l’avait fait en la mettant au premier plan, souvent en qualité de seul membre cité (Rvf 38, Rvf 144, Rvf 181, Rvf 199, Rvf 257), ou bien comme simple pièce d’une énumération aux côtés des bras et des pieds (Rvf 37, Rvf 200, Rvf 208, Rvf 348).

6 Il faut préciser que trois poésies de Pétrarque s’étaient approchées du « canon long » (Rvf 200, Rvf 292, Rvf 348), mais aucune d’elles ne coïncide avec la disposition choisie par Trissino : Rvf 200 (main, bras, formes, yeux, sourcils, bouche-dents, front, cheveux), Rvf 292 (yeux, bras, mains, pieds, figure, cheveux, bouche-yeux [« lampeggiar d’angelico riso »]), Rvf 348 (yeux, figure, cheveux, bouche [sourire] mains, bras, pieds, corps [« persona »]).

7 « Egli contrasse il canone perentoriamente e lo strutturò secondo rigide corrispondenze interne : infatti 1. ridusse il numero dei membri nominati ad alcune parti scelte del viso (capelli, occhi, guance, bocca) più una parte anatomica selezionata fra collo, seno, mano ; 2. accentuò l’uso di metafore ben definite, preferendole all’impiego del nome proprio designante i membri elogiati ; 3. ridusse il numero delle motivazioni all’alternativa di splendore e colore e per quest’ultimo ai tre dati di giallo, rosso e bianco, con rarissime eccezioni (nero per le ciglia una volta sola) ; 4. ridusse il numero dei comparanti alla sola rosa per il rosso, ad oro ed ambra per il giallo, lasciando invece un più ampio ventaglio di possibilità per il bianco ; 5. sistematizzò i rapporti correnti fra le varie motivazioni di rosso, bianco e giallo e dei loro figuranti secondo due schemi fissi : o la ripetizione per × volte di una coppia o la disposizione dei dati secondo la collocazione asimmetrica di 2 : 1 ; 6. sistematizzò le relazioni fra le motivazioni, evitando sul piano delle motivazioni primarie del colore la combinazione omogenea (per es. fra rose e gigli), ma evitando nello stesso tempo su quello delle motivazioni secondarie l’incontro di una coppia eterogenea (per es. perle e gigli) », G. POZZI, Il ritratto della donna nella poesia d’inizio Cinquecento e la pittura di Giorgione, in « Lettere italiane », 1 (1979), pp. 309-41, pp. 313-14. Cf. aussi du même auteur, Codici, stereotipi, topoi e fonti letterarie, in Intorno al codice, Atti del III Convegno della Associazione Italiana di Studi Semiotici (Pavia, 26-27 septembre 1975), Florence, La Nuova Italia, 1976, pp. 37-76.

8 PIETRO BEMBO, Asolani, éd. critique de G. Dilemmi, Firenze, Accademia della Crusca, 1991, pp. 156-57. Pour d’autres textes de Bembo, je m’en tiens à l’édition des Rime e prose a cura di C. Dionisotti (Torino, Utet, 19662).

9 Pour les textes de Boccace, l’édition de référence est Tutte le opere di Giovanni Boccaccio, a cura di V. Branca, Milan, Mondadori, 1963 ss. Voici le modèle le plus proche de Boccace : « i biondi capelli, a qualunque chiarezza degni d’assomigliare, sanza niuno maesterio, lunghissimi, parte ravolti alla testa nella sommità di quella, con nodo piacevole d’essi stessi, vede raccolti ; e altri più corti, o in quello non compresi, fra le verdi frondi della laurea ghirlanda più belli sparti vede e raggirati ; e altri dati all’aure, ventilati da quelle, quali sopra le candide tempie e quali sopra il dilicato collo ricadendo » (Comedia delle Ninfe fiorentine XII 7). Il faut comparer cette description avec celle de Pétrarque où domine la légèreté, avec « l’aura » comme protagoniste : « Aura che quelle chiome bionde et crespe / cercondi et movi, et se’ mossa da loro, / soavemente, et spargi quel dolce oro, / et poi ’l raccogli, e ’n bei nodi il rincrespe » (Rvf 227, 1-4). Sur la présence du motif de l’aura chez ces deux poètes, cf. G. CONTINI, Préhistoire de l’AURA de Pétrarque [1957], in ID., Varianti e altra linguistica, Torino, Einaudi, 1970, pp. 193-99 ; V. BRANCA, Boccaccio medievale, Firenze, Sansoni, 19866, pp. 323-24), et B. SPAGGIARI, Il tema ‘west-östicher’ dell’aura, in « Studi Medievali », XXV (1984), pp. 2-110.

10 Voir S. J. CAMPBELL, Pietro Bembo e il ritratto nel Rinascimento, in Pietro Bembo e l’invenzione del Rinascimento, a cura de G. Beltramini, D. Gasparotto, A. Tura, Vénise, Marsilio, 2013, pp. 84-90. Cf. aussi R. BRAGANTINI, Premesse su alcune convenzioni della descrizione letteraria cinquecentesca, in Letteratura italiana e arti figurative. Actes du XIIe Congrès de l’Associazione Internazionale per gli Studi di Lingua e Letteratura Italiana, a cura di Antonio Franceschetti, Firenze, Olschki, 1988, pp. 585-95.

11 « Gli schemi simmetrici composti da Bembo e Ariosto riportano naturalmente a prospettive che si ispirano alla proporzionalità, un’idea dominante nell’epoca che chiamiamo Rinascimento » (POZZI, Il ritratto cit., p. 328).

12 Pour le texte du Roland furieux, je m’en tiens à l’édition de Cesare Segre (Milan, Mondadori, 1976).

13 P.RAJNA, Le fonti dell’Orlando furioso, Firenze, Sansoni, 19002, p. 183.

14 « La superficie del corpo [...] coinciderebbe con quella del canone breve non ci fosse il ricordo del piede. Invece l’enumerazione contiene elementi propri del canone lungo : naso, braccia ; insomma è un canone lungo ma ellittico. L’elemento strutturante è dato dalle metafore, le quali, per via di richiami interni, risultano disposte secondo uno schema regolare (2.-6 ; 3.-8. ; 4.-9.). Questo schema ris-ponde, non nel numero, ma nella morfologia alla struttura medesima dell’ottava [...]. Ai due estremi [...] abbiamo due elementi incornicianti, l’uno che riassume l’insieme, l’altro che designa la sola parte fuori dello spazio del canone breve, il piede » (POZZI, Il ritratto cit., pp. 325-26).

15 Fredi Chiappelli avait déjà noté comment « Nelle strutture architettoniche dell’icona dominano le metafore che evocano, per lo più con graziosa preziosità, materiali durevoli : oro i capelli, terso avorio la fronte, perle i denti », Ariosto, Tasso e la bellezza delle donne, in Filologia e critica. Omaggio a Lanfranco Caretti, Rome, Salerno Editrice, 1985, pp. 325-41, p. 330.

16 « I rilevati fianchi e le belle anche, / e netto più che specchio il ventre piano, / pareano fatti, e quelle coscie bianche, / da Fidia a torno, o da più dotta mano » (ARIOSTO, Orlando furioso XI 69, 1-4).

17 « Era il bel viso suo, quale esser suole / da primavera alcuna volta il cielo, / quando la pioggia cade, eaun tempo il sole / si sgombra intorno il nubiloso velo. / E come il rossignuol dolci carole / mena nei rami alor del verde stelo, / così alle belle lagrime le piume / si bagna Amore, e gode al chiaro lume » (ARIOSTO, Orlando furioso XI 65) ; « le poppe ritondette parean latte / che fuor dei giunchi allora allora tolli. / Spazio fra lor tal discendea, qual fatte / esser veggiàn fra piccolini colli / l’ombrose valli, in sua stagione amene, / che ’l verno abbia di nieve allora piene » (ARIOSTO, Orlando furioso XI 68, 3-8).

18 La mention de perles et rubis a lieu une seule fois dans les Rerum vulgarium fragmenta, dans le sens générique de ‘choses précieuses’ (Rvf 263, 9-10 : « Gentilezza di sangue, e l’altre care / cose tra noi, perle e rubini ed oro »).

19 « Molte altre cause ancor spesso infiammano gli animi nostri, oltre alla bellezza : come i costumi, il sapere, il parlare, i gesti e mill’ altre cose, le quali però a qualche modo forse esse ancor si potriano chiamar bellezze » (BALDASSARE CASTIGLIONE, Il cortegiano I 53).

20 Il l’avait fait en se souvenant non seulement, comme le pensait Dionisotti, du sonnet 156 de Pétrarque : « Amor, Senno, Valor, Pietate et Doglia / facean piangendo un più dolce concento » (Rvf 156, 9-10), mais aussi du sonnet 292 : « Due gran nemiche inseme erano agiunte / Bellezza et Honestà » (Rvf 292, 1-2), et d’un vers du Triumphus pudicitie : « v’era con Castità somma Beltate » (90).

21 « Alta virtute e bel sembiante adorno » (BEMBO, Rime 4, 5) ; « Giunta a somma beltà somma onestade » (BEMBO, Rime 5, 12) ; « sì ricca fu di senno e di beltade » (BEMBO, Rime 162, 64).

22 « Dove trovò le rose et le viole / per far la bocca angelica soave ? » (GIUSTO DE’ CONTI, 10, 10-1) ; « Dolci coralli et perle, onde escon molti / dolci sospiri, e ’l parlar dolce et adorno » (GIUSTO DE’CONTI, 164, 5-6) ; « Ma son di più dolceza le parole ; / che zucchero, armonia, mele et moscato / par ch’escan dalle labbra di corallo. / Qui nascono le rose et le viole, / qui si vede l’avorio et il cristallo » (GIUSTO DE’CONTI, 165, 9-13).

23 « Labella quid coraläs / rubore praenitentia / [...] / Quid margaritas dentium / praecandidorum proloquar ? » (POLITIEN, In puellam 40-46). Toujours en latin, mais en prose, Piccolomini avait associé corail et cristal (un comparant fréquent dans la littérature médiévale française) : « Quid labia corallina et cristallinos referam dentes et omnes oris tui partes, unde melliflua manant verba » (ENEA SILVIO PICCOLOMINI, De duobus amantibus, description de Lucretia).

24 L’exemple de Bembo avait été suivi aussi par quelques prosateurs : GALEAZZO FLAVIO CAPELLA : « le candide perle ordinatamente rinchiuse entro il bel corallo » (Della eccellenza et dignità delle donne, Rome, Francesco Minizio Calvo, 1525), ALFONSO MANTEGNA : « si vedea la dolcissima bocca che, con breve spazio, chiudevano duo margini di sottili coralli e di vivi e preziosi rubini, nel cui aprirsi e nel soavemente chiudersi, si scorgeano due filze di minutissime ed elette perle de’ quali mai l’Oriente ebbe cosa ch’a loro valore si pareggiasse – tra’ quali si formano concenti di tanta dilettevole e celeste armonia ch’avrìan forza di render molle ogni ferigno e scabroso core e di far il mar turbato, tranquillo e quieto » (épître à Laure Terracina, datée de 1551 et publiée en annexe aux Quinte Rime della Signora Laura Terracina detta Phebea nell’Academia de gl’Incogniti, appresso Giovanni Andrea Valvassorio detto Guadagnino, 1552, 62-69) et STEFANO GUAZZO : « Né si è punto scordata di dare un bello e ordinato numero di candidissime perle in guardia alla vostra picciola bocca, fregiata di preziosi coralli » (La Civil conversazione, Livre IV, 1574-1579).

25 Par exemple, TRISSINO : « Poiché quell’harmonia / giù nel mio cuor discese, / ch’uscio fra ’l meço di coralli e perle » (Rime 13, 40-42), MOLZA : « Tra due coralli perle bianche e folte ; / parlar, che stringe a l’amorose some » (Rime 141, 5-6), ARIOSTE : « Son di coralli, perle, avorio e latte, / di che fur labra, denti, seno e gola » (Rime 33, 9-10), BANDELLO : « da un fil di perle orïentali steso / sotto coralli di natìo colore » (Rime 55, 7-8) et « faceva allor uscire / tante dolcezze e tali, / e non so che da quelli / coralli schietti e belli, / vago uscio a vere perle orïentali » (Rime 95, 45-49).

26 On y fait allusion respectivement à la figure, aux cheveux, aux dents, aux lèvres, aux yeux et à l’ensemble.

27 LUIGI DA PORTO : « E fra perle e rubini uscir parole, / che l’amar mi fer dolce, e ’l martir leve » (Rime 54, 12-13), FRANCESCO MARIA MOLZA : « Chi le perle, i rubini, o l’auree chiome / lodar s’udrà » (Rime 185, 12-13), « Quivi si forman i beati accenti / fra bianche perle, e bei rubini ardenti » (Stanze sopra il ritratto della Signora Giulia Gonzaga 28, 7-8), LUIGI ALAMANNI : « Mira perle e rubini, ond’escon fuore / le dolci note, e le sanguigne rose / che l’Arabia e i Sabei vincon l’odore » (Elegia Già si muove a tornar nel suo bel nido 40-42), FRANCESCO BECCUTI (IL COPPETTA) : « rubini fra cui nasconde Amor le bianche perle » (Rime d’Amore V 123, 5), BERNARDINO ROTA : « carcer di perle e di robin la bocca » (173, 10), AGNOLO FIRENZUOLA : « Mirate il volto, e vedrete le rose / In bianca neve rider tuttavia, /ele perle e i rubini aprir la via / ai bei pensier che in lei bontate pose » (Rime amorose 3, 5-8), BERNARDO TASSO : « A quella bocca, che perle e rubini / avanza di vaghezza e di colore » (Rime III 67, Per la Signora Donna Iulia Gonzaga 136-37), PIETRO ARETINO : « ha l’angelico suon ne le parole / che parton tra le perle e tra i rubini » (Stanze per Madonna Anzela Serena 2, 7-8) ; GALEAZZO DI TARSIA : « De la bocca le perle ed i rubini » (Canzoniere 33, 11), ERASMO DA VALVASON : « Mòstravi de la bocca, altero nido / d’angelica eloquenza, i novi onori, /evi giura l’essempio suo verace / che rubin, perle, o preziosi odori / non ha la ricca Aurora in alcun lido » (chanson Sopra una gentildonna che si vagheggiava in uno specchio 71-75), ASCANIO PIGNATELLI : « Spiegate o Donna i bei rubini accensi / su le candide perle » (Rime 13, 9-10), TORQUATO TASSE : « Labbra vermiglie e belle / che sete sì adorata e dolce via / d’angelica armonia ; / bianche perle e rubini, / dove frange ed affrena / Amor la voce di dolcezza piena » (Rime 304, 1-5), « e quella bocca in cui natura pose / quasi caro tesor perle e rubini » (Rime 899, 3-4).

28 Dans ce cas, le modèle adopté presque à l’unanimité avait été « rose sparse in dolce falda / di viva neve » (Rvf 146, 5-6).

29 L’adjectif avait qualifié aussi le front : « quella fronte, più che’l ciel serena » (Rvf 220, 8), et l’« air » (Rvf 126, 10 ; Rvf 196, 1 ; Rvf 208, 8 ; Rvf 292, 8), tandis qu’une seule fois, et hors de l’acception ‘sérénité’, les yeux avaient été mis en rapport avec la clarté du jour : « que’ duo lumi, / che quasi un bel sereno a mezzo ’l die / fer le tenebre mie » (Rvf 37, 43-45).

30 Voir M. DE LAS NIEVES MUÑIZ MUÑIZ, Sulla tradizione della ‘descriptio puellae’ e sull’Amaranta di Sannazaro, in « Rinascimento meridionale », 2 (2011), pp. 21-57.

31 Cariteo fut le plus précoce mais aussi le plus proche de Pétrarque, excepté pour la substitution de la voix par les cheveux et le visage « Et vidi i raggi d’oro a mezzo giorno / sovra ’l candido collo andare errando, / ch’asserenavan l’aere d’ogn’intorno » (Endimione, madrigal, 1, 7-9), « Dal vostro volto roseo, almo, perfetto, / si rasserena l’aere d’ogn’intorno » (Endimione son. 29, 3-4).

32 BERNARDO TASSO, Rime 78, 1-4.

33 BERNARDO TASSO, Rime 140, 7-8.

34 BERNARDO TASSO, III 52, 1-4.

35 TEBALDEO, Ultima silloge per Isabella d’Este, 325, 8.

36 Poesie di Francesco Maria Molza colla vita dell’autore scritta da Pierantonio Serassi, Società Tipografica de’ Classici Italiani, 1808, pp. 241-42.

37 Il suffira de rappeler ce sonnet de LUIS DE GÓNGORA : « Mientras por competir con tu cabello, / oro bruñido el Sol relumbra en vano, / mientras con menosprecio en medio el llano / mira tu blanca frente al lilio bello ; / mientras a cada labio, por cogello, / siguen más ojos que al clavel temprano, / y mientras triunfa con desdén lozano / de el luciente cristal tu gentil cuello ; / goza cuello, cabello, labio y frente, / antes que lo que fue en tu edad dorada / oro, lilio, clavel, cristal luciente / no sólo en plata o víola troncada / se vuelva, mas tú y ello juntamente / en tierra, en humo, en polvo, en sombra, en nada ».

38 « Come talora al caldo tempo sòle / semplicetta farfalla al lume avezza / volar negli occhi altrui per sua vaghezza, / onde aven ch’ella more, altri si dole » (Rvf 141, 1-4).

39 « Ed ella ne l’usata sua figura / tosto tornando, fecemi, oimè lasso, / d’un quasi vivo et sbigottito sasso » (Rvf 23, 78-80) ; « Però mi dice il cor ch’ io in carte scriva / cosa, onde ’l vostro nome in pregio saglia, / ché ’n nulla parte sí saldo s’intaglia / per far di marmo una persona viva » (Rvf 104, 4-8), « et le rose vermiglie infra la neve / mover da l’òra, et discovrir l’avorio / che fa di marmo chi da presso ’l guarda » (Rvf 131, 9-11) ; « Et ciò non fusse, andrei non altramente / a veder lei, che ’l volto di Medusa, / che facea marmo diventar la gente » (Rvf 179, 9-11), « L’ombra sua sola fa ’l mio cor un ghiaccio, / et di bianca paura il viso tinge ; / ma li occhi ànno vertú di farne un marmo » (Rvf 197, 12-14) ; « Medusa et l’error mio m’àn fatto un sasso / d’umor vano stillante » (Rvf 366, 111-12).

40 « Et cosí bella riede / nel cor, come colei che tien la chiave. / Ma ’l soverchio piacer, che s’atraversa/alamia lingua, qual dentro ella siede, / di mostrarla in palese ardir non ave » (Rvf 143, 10-11) ; « I’ nol posso ridir, ché nol comprendo : / da ta’ due luci è l’intellecto offeso, / et di tanta dolcezza oppresso et stanco » (Rvf 198, 12-14) ; « Lacci Amor mille, et nesun tende invano, / fra quelle vaghe nove forme honeste / ch’adornan sí l’alto habito celeste, / ch’agiunger nol pò stil né ’ngegno humano » (Rvf 200, 5-8) ; « pensando nel bel viso piú che humano / che pò da lunge gli occhi miei far molli, / ma da presso gli abbaglia, et vince il core » (Rvf 127, 46-48).

41 TEBALDEO, Rime IX. Nous retrouvons des idées semblables dans un sonnet de ANGELO DI COSTANZO : « Qual chiaro vetro, o limpid’ acqua e pura / in cui raggio di sol fiere e resplende, / la luce c’ha da quel porge et estende / in qual che parte a lui dappresso oscura, / tal il mio cor, nel qual per mia ventura / questo mio novo sol traluce e splende, / de l’alte qualità che da lui prende / il fosco ingegno mio pinge e figura » (Rime 38, 1-8), et surtout dans un autre GALEAZZO DI TARSIA : « Se restasse di voi sembianza intera / nelle carte, ne’ marmi o ne’ colori, / tal fora a minor parte degli onori, / che va di mille e mille palme altera / L’alta, che pinge e cria, bellezza vera, / oro, stelle, onda, ciel, perl’erbe e fiori, / vien rado fuor : ché ne’ natii splendori / indarno l’arte d’aguagliarla spera. / Un allentar di spirto, un cenno a pena / non cape già nei marmi, e ne lo stile / non è d’Apelle, ma d’Omero incarco. / Ma se vien nel real petto gentile / Amor, e v’apre il cor con larga vena, / chi può dir come invola e tende l’arco ? » (36, 5-14).

42 Pour le texte et pour la numération des Rime, voir l’édition de Bruno Basile (Rome, Salerno Editrice, 1994).

43 « Quando le chiome d’or caro e lucente / saranno argento, che si copre e sprezza, /edela fronte, a darmi pene avezza, / l’avorio crespo e le faville spente, / e del sol de’ begli occhi vago ardente / scemato in voi l’onor e la dolcezza, / e ne lo specchio mirerete un’altra, / direte sospirando : – eh lassa, quale / oggi meco penser ? perché l’adorna / mia giovenezza ancor non l’ebbe tale ? / A questa mente o ’l sen fresco non torna ? / Or non son bella, alora non fui scaltra » (BEMBO, O superba e crudele 3-14).

44 Quelques observations, bien que limitées aux cheveux, se trouvent dans A. P. MACINANTE, « Erano i capei d’oro a l’aura sparsi ». Metamorfosi delle chiome femminili tra Pétrarque e Tasso, Rome, Salerno Editrice, 2011, p. 79. Pour la Gerusalemme liberata, je m’en tiens à l’édition de Lanfranco Caretti (Milan, Mondadori, 19882).

45 Fucilla avait proposé FRANCESCO CEI : « Delle due stelle anzi dua sol non occhi » (Sonecti, capituli, canzone, sextine, stanze et strambocti, Giunta, 1503), cf. Bricciche ariostesche (Italica, 1933), in J. G. FUCILLA, Studies and Notes, Naples-Rome, Istituto editoriale del Mezzogiorno, 1953, p. 143.