Conférence Barbier-Mueller 2013
OJ-italique-378
In extremis : la manière burlesque de Giovanni Francesco Ferrari
Parmi les recueils poétiques conservés dans le fonds Barbier-Mueller figure un singulier volume de cinquante-cinq textes burlesques, qui, jusqu’à présent, n’a pas retenu l’attention de la critique. Il s’agit de Le rime burlesche sopra varii, et piacevoli soggetti, indirizzate a diversi nobili Signori. Nuovamente composte & date in luce da M. Giovanfrancesco Ferrari. Con la tavola de’ Sommarij.1 L’ouvrage, imprimé en 1570 à Venise chez les héritiers de Melchiorre Sessa, a dû surprendre plus d’un lecteur pour son caractère aussi bien polyglotte que mal ficelé et parfois désordonné, tandis que les rares chercheurs qui mentionnent ce volume semblent l’avoir abandonné après l’avoir parcouru à la hâte.
En effet, si l’ouvrage figure depuis des siècles dans les répertoires et les catalogues des collections publiques et privées, il ne semble pas avoir suscité des critiques enthousiastes aussi bien à l’époque de sa première diffusion que chez les lecteurs d’aujourd’hui. Certes, dans des rares études récentes sur la poésie comique et burlesque de la Renaissance, on peut trouver des simples mentions de cet ouvrage de Ferrari, mais son contenu n’a jamais fait l’objet de recherches systématiques2. Pourtant, Le rime burlesche du Modénais ne sont pas sans intérêt car, au-delà de toute considération d’ordre esthétique, elles constituent un exemple patent des conséquences ultimes d’une vogue poétique qui a eu une vaste fortune tout au long de la première moitié du XVIe siècle, une « manière comique » caractérisée par un puissant expérimentalisme mis au service de la critique des milieux sociaux et culturels de l’époque.
L’année 1570, à savoir l’année de publication des Rime de Ferrari, marque un tournant fondamental pour l’histoire de la littérature parodique, satirique et burlesque, car comme le rappelle Danilo Romei dans un essai sur la poésie satirique des trois dernières décennies du Cinquecento, en cette même année l’un des satiristes les plus emblématiques de sa génération, Nicolò Franco, était exécuté par l’Inquisition romaine à la suite d’un long procès portant sur des écrits diffamatoires à l’égard du pape Paul IV. La mise à mort du poète-humaniste de Benevent inaugure, selon Romei, cet « âge de la prudence » « [che] si chiude emblematicamente con un rogo (l’eroico supplizio di Giordano Bruno, immolato in Campo di Fiori il 17 febbraio 1600) [... e] che si era aperta, proprio nel 1570, con un’impiccagione, quella di Niccolò Franco a ponte Sant’Angelo : supplizio sicuramente illustre, probabilmente meno eroico, ma di significato non meno esemplare »3.
Les Rime de Ferrari constituent alors une tentative in extremis d’actualiser, dans un contexte hautement surveillé tel que celui de la cour romaine de la Contre-Réforme, les expériences de Berni et de ses premiers imitateurs, mais aussi la pugnacité diffamatoire de l’Arétin, les expériences scatologiques et rageuses de Franco, les pointes salaces et irrévérencieuses de monseigneur Della Casa, l’expérimentalisme foisonnant de Doni et les exploits anti-pétrarquistes de certaines académies « padane ». Comme l’a observé Silvia Longhi, même au cours de la première moitié du XVIe siècle, les recueils de capitoli apparaissaient en général à titre posthume et rarement dans des volumes que l’on peut reconduire à un seul auteur et cela en raison des risques évidents engendrés par telles publications4. L’exercice apparaissait encore plus périlleux à l’époque de Ferrari, compte tenu des contenus subversifs qui avaient investi une partie de la production satirique et parodique antérieure, et des enjeux littéraires propres à tout dialogue à distance avec des modèles, des contenus et des modalités stylistiques considérés comme inappropriés par la nouvelle rhétorique post-tridentine.
Mais voyons de plus près dans quel contexte ces compositions poétiques ont germé et quelle fut l’attitude de Ferrari vis-à-vis d’une tradition dont la connotation transgressive était évidente, surtout eu égard au pétrarquisme omniprésent et aux institutions politico-culturelles établies, telles que la curie et la cour, mais aussi certains milieux académiques. On ne sait que très peu de choses sur Giovan Francesco Ferrari et, comme le rappelle Franco Pignatti, rédacteur de la fiche biographique figurant dans le Dizionario biografico degli italiani5 , la plupart des données le concernant sont extraites de ses œuvres ou d’ouvrages auxquels il a participé de façon ponctuelle, essentiellement par des textes de louange figurant en tant que pièces liminaires. Modénais d’origine, Ferrari avait mené une carrière curiale en tant que secrétaire de Guido Ascanio Sforza, évêque de Parme et légat pontifical à Bologne et en Romagne, jusqu’à la mort de ce dernier en 1564. Les compositions collectées dans son unique recueil poétique font état de ses relations au sein de la curie romaine et dans les cours « padane », des rapports que Ferrari semble prolonger bien au-delà de 1564, lorsqu’il n’apparaît plus au service permanent d’un membre du clergé, bien qu’il garde des liens privilégiés avec des officiers pontificaux et certains prélats, tels qu’Ippo-lito Capilupi et Rinaldo Corso. Ferrari fut épisodiquement appelé à composer des épigrammes en latin figurant dans des recueils poétiques postérieurs à 1572, il collabora avec Marc-Antoine Muret à l’occasion de la publication d’ouvrages à caractère funéraire6 et il eut un rôle non négligeable dans l’édition romaine de Lo stratogema di Carlo IX re di Francia contro gli Ugonotti rebelli di Dio et suoi de Camillo Capilupi, publié chez les héritiers d’Anton Blado, en 1572, dans lequel on tissait les éloges de la politique répressive de Charles IX au lendemain de la Saint-Barthélemy7. Le portrait de Ferrari émergeant des rares renseignements glanés dans ses œuvres et chez les érudits du XIXe siècle est celle d’un secrétaire-courtisan, bien introduit dans les milieux administratifs et curiaux romains, qui eut le loisir, surtout pendant sa retraite, de courtiser les muses toscanes et latines et de fréquenter les cercles savants des officieux des hauts prélats, surtout ceux qui provenaient de sa région natale, l’Émilie.
L’inventaire des dédicataires des « capitoli » figurant dans les Rime burlesche permet d’établir une géographie des réseaux sociaux de l’auteur. Parmi ses principaux interlocuteurs figurent en premier lieu des érudits de Modène, qui avaient cherché à relancer la vie culturelle de la ville après la fermeture religionis causa de l’académie modénaise fondée par Giovanni Grillenzoni, un cénacle qui voyait parmi ses membres illustres Ludovico Castelvetro et Filippo Valentini. Les personnalités évoquées dans les Rime appartiennent donc à la « deuxième génération » des érudits modénais qui s’étaient formée sur les écrits de Castelvetro, des savants comme Benedetto Manzuoli8, Orazio Grillenzoni9, sans doute le notaire Pipino Paganelli, mais aussi d’autres concitoyens, tel que Carlo Molza. Autour des années 1560, ces beaux esprits avaient tous pris les distances d’une académie désormais perçue comme un foyer d’hérésie, ainsi que de leurs fréquentations de jeunesse, mais ils gardaient des relations littéraires et amicales fortes, du moins selon ce que l’on déduit des écrits de Ferrari.
Parmi les autres dédicataires des Rime figurent le savant Rinaldo Corso10, rattaché au puissant cardinal Girolamo da Correggio ; Corso est l’un des personnages-clés du recueil car il fut aussi l’auteur de deux capitoli et il joua le double rôle de tutelle littéraire et de reviseur des textes de Ferrari. À côté des ressortissants de l’Émilie, nous retrouvons un groupe de fonctionnaires, poètes, philosophes et érudits de toute provenance qui travaillaient pour des hauts prélats ou bien animaient de temps à autre la vie culturelle romaine. C’est le cas du susmentionné Nicolò Francò et de l’érudit napolitain Scipione Tetti, victime à son tour d’un procès inquisitorial à la suite duquel il sera condamné aux galères11. Nous trouvons également des serviteurs des Este et des Farnese, tel que Roberto Fontana, Girolamo Volpi et Lorenzo Gambara, mais également le philosophe Bernardino Telesio, le médecin Antonio Venturini, l’officier Tomaso Tomasi Gualterucci. La seule présence féminine est celle d’une certaine Olimpia Maglianese (sans doute la jeune Olimpia Orsini), à laquelle Ferrari adresse une composition In biasmo delli mali mariti12.
Dans l’ensemble, le réseau des relations établi par l’auteur semble des plus contradictoires : des personnalités hautes en couleur et en odeur d’hérésie – car déjà inquiétées par le Saint-Office – côtoient des curiaux et des membres de la noblesse romaine, ainsi que des philosophes et des médecins. Dans son éclectisme, cette brigade volontairement représentée comme une sorte de sodalitas de beaux esprits, fortement liés par des intérêts littéraires et professionnels, apparaît comme une tentative extrême de reconstituer une société savante informelle, libre des contraintes et du contrôle qu’on imposait déjà à cette époque aux académies officielles. Ce n’est sans doute pas un hasard si l’auteur choisit de faire figurer parmi ses correspondants les membres d’une académie burlesque dite Reame della fava, tels qu’un dénommé Hercole et un académicien évoqué par le sobriquet d’Universale. La sodalitas en question permet d’inscrire une démarche culturelle et poétique tout compte fait plutôt périlleuse dans un contexte que l’on perçoit encore comme relativement à l’abri des menaces qui planent, depuis quelques décennies, sur la production satirique et burlesque. De fait, l’auteur et son « éditeur scientifique » ne vont pas jusqu’à pousser la provocation au-delà du raisonnable et le recueil n’apparaît pas dans la Ville Eternelle, qui est pourtant le lieu privilégié de toutes les compositions, mais à Venise, au sein d’un atelier puissant et réputé. Dans la dédicace de Borgaruccio Borgarucci13 au comte de Thiene, on observe par ailleurs une certaine réticence à reconduire l’initiative éditoriale du volume à l’auteur ; elle est en effet assumée in toto par l’éditeur scientifique, qui ne cache pas son travail de promotion, lecture et révision des poèmes :
Et però, per le cause sudette, non è se non degno di lode, l’Auttore delle presenti RIME, lequali per se stesse sono così vaghe, così honeste, così piene di nobili soggetti, che sono veramente meritevoli di comparire davanti a tutti i più risvegliati & gentili spiriti. Ma perché le cose più sono vaghe, & più sono belle, più hanno bisogno d’esser locate & poste, tra persone, che di esse si dilettino, & che le possono dar chiarezza col splendor loro : quindi è, che havendo, con non piccola diligenza corrette, & ridotte alla vaga & bella forma, che si puo’ vedere, le Rime sudette ; a guisa di quella Nutrice, che non meno ama il figliuolo, c’ha allattato, che si faccia la Madre, che l’ha partorito [...].14
Borgarucci n’était pas nouveau à ce genre d’opérations, puisqu’il était un traducteur du latin réputé et un polygraphe au service de plusieurs imprimeurs-libraires vénitiens, ce qui explique sans doute l’autopromo-tion dont il fait état dans cet extrait. Quant au dédicataire, il s’agit sans doute du comte de Vicence Francesco Thiene, ce qui semble reconduire la lettre de dédicace aux stratégies professionnelles de Borgarucci plutôt qu’à celles de l’auteur. Borgarucci intervient également dans la distribution des pièces dans le volume, par ailleurs pas toujours de façon cohérente, car il ne semble tenir compte d’aucun ordre, ni d’une partition par typologie textuelle (satire regolari, capitoli en toscan, composition en dialecte, etc). Par ailleurs, la numérotation des capitoli est erronée, car absente dans au moins trois compositions qui ne portent aucun titre mais tout simplement l’indication des dédicataires ; il s’agit des pièces LI-LIII adressées à Tomaso Tomasi de Gualterucci15 et au médecin Antonio Venturini, des pièces qui ne figurent pas non plus dans la table de matière.
Pour sa part, Ferrari semble offrir ses exercices poétiques – sans doute sous forme de manuscrit – au modénais Bernardino Pio, ambassadeur des Gonzague à Rome, mais de façon presque détournée, car l’envoi au puissant ambassadeur figure à la fin, plutôt qu’en ouverture, du premier capitolo qui consiste en un éloge de la folie16. De même, tous les honneurs sont rendus à Rinaldo Corso17 , fidèle relecteur et sans doute inspirateur de la plupart de ces vers qui ne semblent pas avoir été composés pour la publication, du moins dans un premier temps, comme l’attestent les derniers vers du premier capitolo adressé à Bernardino Pio :
Io ’l libro ordinerò, ch’è sotto sopra,
Poi che ’l vostro desio pur hunc recurrit,
Et se volete, ancor v’indrizzo l’opra,
Ch’al fine al fine Omnis homo currit.18
Venons donc à la datation des pièces composant le volume. Selon Franco Pignatti les compositions figurant dans ce recueil seraient postérieures à 156719, mais plusieurs facteurs militent en faveur d’une retro-datation de certains textes. Tout d’abord, on observe que l’un des capitoli, celui intitulé Salutatione podagrosa, est adressé « Al suo Padrone »20, à savoir Guido Ascanio Sforza, un patron qui est appelé monseigneur et qui semble souffrir de la goutte. La composition est donc antérieure au mois d’octobre 1564, date du décès du prélat. Un autre élément qui permet d’antidater certains poèmes réside dans le fait que, en 1567, des dédicataires comme Rinaldo Corso avaient pris les ordres laissant derrière eux non seulement leur statut de laïcs, mais aussi toute compromission avec des personnages à l’orthodoxie plus que douteuse. Or ces dédicataires sont associés, dans ce recueil, à des réformés soupçonnés par l’Inquisition depuis belle lurette. Que l’on voie à ce propos la quatrième composition, le Ringratiamento salciccionico, overo Mortadellonico21 adressé à un ami dont le nom n’est pas mentionné. Sous prétexte de partager avec ses compagnons le don reçu par un ami lointain, à savoir une mortadelle, Ferrari évoque certaines de ses relations dans un poème entièrement bâti sur l’équivoque sexuelle ; le texte fait état du susmentionné Rinaldo Corso, d’un bolognais nommé Fantuzzo, de Giovanni Bellosio, du docte Scipione Tetti et de Nicolò Franco. Ce dernier avait déjà séjourné huit mois dans les prisons de l’Inquisition (entre 1558 et 1559) et, bien qu’à sa sortie du cachot il ait pu entrer au service du cardinal Giovanni Morone, il était considéré, à la fin des années 1560, comme un personnage suspect, un libelliste hargneux et obscène, qui nourrissait une haine profonde envers une partie de la curie pontificale. Au dernier pasquillante redouté par le clergé romain, Ferrari adressait également un Basciamento di mani22 dans lequel il se disait ami et serviteur de Franco, tout en s’adonnant à une profusion de remerciements burlesques, en partie inspirés par les œuvres du beneventano, dont on rappelait surtout la traduction en cours de l’Iliade. Comme nous le verrons, bien d’autres sujets scabreux se cachaient dans ce volume, sur lesquels je fournirai par la suite quelques précisions supplémentaires.
Le titre de l’ouvrage, Rime burlesche, laisse songeur, car il évoque un recueil de pièces poétiques métriquement très variées ; or le volume ne contient que des compositions in terza rima plus ou moins longues. Ce choix se justifiait aisément par le contenu, par la tonalité facétieuse des textes et par l’autorité du modèle formel, dont la malléabilité avait été démontrée par les nombreux exemples fournis par Berni et ses imitateurs, et plus généralement par les auteurs satiriques23. Toutefois, d’autres possibilités métriques s’offraient à l’auteur, in primis le sonnet, et surtout le sonnet caudato, qui pouvait être employé pour des textes moyennement longs, tandis que le distique, le quatrain et le huitain isolé, s’ils se prêtaient bien au jeu de mots salace, à l’attaque féroce et instantanée et à l’invective épigrammatique, s’adap-taient mal à l’argumentation distendue, donnant lieu chez Ferrari à des divagations narratives24. L’auteur choisissait en outre d’adresser systématiquement chaque composition à un personnage réel ou présumé tel et rédigeait parfois des introductions élogieuses retardant l’entrée in media res, ce qui compromettait la « mise à feu » du jeu parodique25. Ce faisant, Ferrari s’inscrivait de façon parfois maladroite dans le sillage de l’Arioste satirique, qui n’hésitait pas à recourir à l’insertion de courts apologues afin de mieux illustrer son argumentation, et de Francesco Berni. Dans ses capitoli, ce dernier prévoyait une apostrophe initiale à un personnage donné seulement lorsque celle-ci était fonctionnelle à l’exemplification de la thématique choisie, tandis que Ferrari abondait outre mesure dans la digression élogieuse en inscrivant systématiquement ses efforts burlesques dans un contexte de relations savantes et curiales.
Dans l’ensemble, le volume se présente comme une sorte d’anthologie des principaux motifs satiriques et burlesques explorés par les auteurs de la première moitié du Cinquecento, un répertoire d’expédients comiques, scatologiques et paradoxaux donnant lieu à une variatio ad libitum de formules canoniques. Nous avons ainsi un lot de textes « in lode », dont la filiation à Berni et aux berneschi apparaît évidente, quelques satires à la manière de l’Arioste, des compositions articulées autour de la dérision d’une catégorie sociale déterminée (le pédant, le secrétaire, les courtisanes), des capitoli argumentatifs pro et contra une thématique donnée (le mariage, le vin, etc.), un autoportrait burlesque, des réécritures parodiques de textes anciens (telle les satires d’Horace) ou des parodies de textes stéréotypés (exhortations, avertissements, post scripta, etc.), ainsi que des capitoli paradoxaux dans lesquels on s’en prend à Cicéron, à Aristote et à Platon.
Si la plupart des typologies textuelles employées par Ferrari sont attestées chez les maîtres du genre burlesque (Berni, Della Casa, Firenzuola, et bien d’autres), certaines compositions apparaissent comme le fruit d’une hybridation de modèles divers. C’est le cas de quelques poèmes qui se présentent à un premier abord comme des satire regolari pour devenir, à un moment donné, des comédies dialectales ou des farces. C’est le cas de la Comedia mantovan à M. Rinaldo Corso26, dans laquelle on raconte une représentation théâtrale en reprenant partiellement les échanges en mantouan des zanni, tout en les alternant aux commentaires de l’auteur. Si dans certains cas le plurilinguisme n’est qu’une patine stylistique permettant de reproduire la polyglossie de la cour romaine (d’où le recours sporadique à l’emploi de l’espagnol, du romain, du florentin, du latin curial et du latin macaronique), dans d’autres cas l’écriture dans un dialecte padano (le modénais ou le bergamasque)27 ou dans la langue des repris de justice – la lingua zerga – est un élément constitutif de la composition et sans doute le facteur qui, plus que d’autres, marque l’expérimentalisme de Ferrari vis-à-vis d’une tradition burlesque qu’il n’arrive pas toujours à manier de façon convaincante. Les compositions qui emploient des langues étrangères, « spéciales » ou dialectales en tant qu’élément structurant du jeu comique sont celles qui en général ont retenu l’intérêt des linguistes, car dans ces textes Ferrari démontre une certaine habilité dans le maniement d’un patrimoine lexical diversifié, anticipant de quelques lustres la grande vogue de la poésie dialectale du XVIIe siècle. Naturellement, l’exercice rhétorique apparaît plus laborieux lorsqu’il est question de façonner un court capitolo en espagnol macaronique qui mime le parler de nombreux courtisans romains (il s’agit de la Semispagnolata adressée au portugais Marcos de Payva)28, tandis que lorsque Ferrari emploie le modénais dans le Rasunament int’al vras, e naturel linguaz de Modna sovra al Mal de Corp, alias al Fluss29, il apparaît assurément plus à l’aise. Cela dépend, naturellement, de l’ampleur du réservoir lexical de la langue maternelle, qui permet de bâtir l’éloge paradoxal de la diarrhée30, par rapport à une langue artificielle et métissée tel que le spagnolesco des personnages de la littérature satirique et dramaturgique de l’époque. Cela dit, l’insipide essai en espagnol apparaît aujourd’hui bien plus lisible que le capitolo en modénais ou les compositions en lingua furbesca31 intitulées respectivement La quinta pistola d’Horatio in cifra di Campo di Fiore et l’Instruttione nella medesima cifra32. Pour la rédaction de ces pièces, l’auteur avait puisé dans un petit répertoire lexical édité en 1545, à Ferrare, par Antonio Brocardo, à savoir le Nuovo modo de intendere la lingua zerga33, devenant ainsi l’un des principaux passeurs de cet argot fascinant et énigmatique au XVIIe siècle. Plus originale encore, l’emploi par Ferrari d’une langue spéciale tout-à-fait littéraire, le vernesco34, grâce à laquelle il rendait hommage à Berni qui l’avait inspiré tout au long de sa carrière, une langue burlesque tosco-romaine imagée et innovante qui avait donné lieu, autour des la moitié du Cinquecento, à une koiné hybride associant des phénomènes syntaxiques, grammaticaux et lexicaux propres au répertoire comique en prose.
Dans d’autres cas, l’emploi d’un ou de plusieurs dialectes dans des compositions à l’ossature toscane permettait une sorte de dramatisation de la juxtaposition de personnages de toute provenance (Florentins, Siennois, Bergamasques) dans un lent procès de dégradation des ces derniers en « types » allégoriques. À l’époque post-tridentine et dans le milieu romain, il était en effet plus aisé de mettre en scène des masques comiques, qui renvoyaient à des catégories sociales stéréotypées et à des aires linguistiques données, plutôt que de s’attaquer directement aux grands de la cour et aux milieux ecclésiastiques. La saison de la dénonciation anti-courtisane et des excès du clergé était désormais révolue et la critique du rapport de soumission des intellectuels aux grands mécènes, évoquée d’un ton ferme mais mediano par l’Arioste, ou bien crié à plein voix par Berni, n’était plus admise. Quant à la poésie du vitupère et à l’attaque ad personam qui avait caractérisé de nombreuses pasquinades, ainsi que les recueils priapiques et obscènes de Franco, elles étaient, autour de la septième décennie du XVIe siècle, désormais confinées dans la production clandestine. Après la publication des premiers index, la plupart des auteurs satiriques devenaient suspects ou étaient en train de le devenir, ce qui laissait une marge de manœuvre très limitée aux émules de Berni. Cela explique, chez Ferrari, d’une part la « stérilisation » apparente de la plupart des compositions à caractère équivoque, paradoxal et anti-aulique, et d’autre part sa prédilection pour une littérature comique qui rappelle les écritures performatives (farces et comédies), la littérature dialectale de divertissement produite en quantité par les imprimeurs vénitiens et la poésie comique narrative foisonnante d’apologues et d’anecdotes plaisants.
À cela s’ajoute la fréquentation directe de certains ouvrages en prose émanant des milieux académiques des villes de la plaine du Pò, et je pense essentiellement à la production des milieux érudits de Plaisance et de Padoue qui s’étaient partagés entre production « élévée » et production comique, aussi bien en latin qu’en dialecte ou en toscan. Comme le rappelle Romei dans l’étude susmentionnée, c’est justement dans les villes padane et à Venise qu’on élabore encore dans les années 1550-1560 une littérature comique en vers et en prose ouvertement hostile au canon bembien. J’ai déjà eu l’occasion de parler de la production anonyme de l’académie des Hortolani et je n’y reviens pas, sinon pour souligner l’influence certaine des textes en prose du mystérieux Grappa dans l’ouvrage de Ferrari35, une influence dont on retrouve les traces évidentes dans le « canon burlesque » adopté, dans la couleur linguistique de certaines compositions, ainsi que dans certains mécanismes burlesques débouchant sur le double sens et le renversement parodique des œuvres de Pétrarque et de Bembo.
Nonobstant la censure, dans l’index romain de 1559, des capitoli de Berni et de Della Casa – une censure qui sera annulée par l’index de 1564 qui proscrivait en bloc tous les livres obscènes – , ces deux auteurs semblent inspirer la plupart des poèmes « in lode », du moins du point de vue stylistique et lexical. Ainsi les textes In lode della torta, In lode delli carciofi36 rappellent des compositions de Berni à caractère équivoque comme le capitolo dell’orinale ou celui des cardi37, ou encore le Capitolo del forno de monseigneur Della Casa. En outre, Berni, Firenzuola et Bini fournissaient à notre auteur une série de variations hilarantes de l’éloge paradoxal des maladies telles que la peste, la syphilis et la gale, des sujets que la génération des satiristes des années 1550 adopta aussi bien dans des poèmes en latin que dans des œuvres en prose. Pour sa part, Ferrari nous offre un petit lot de textes situés par son éditeur au cœur du volume : il s’agit des capitoli In lode della pelatina, alias pelarella, Contra la barba, In lode della rogna38, auxquels il faut ajouter la Salutatione podagrosa portant sur la goutte, et deux poèmes qui vantent les bienfaits des maladies, In lode della indispositione et In lode dello stare ammalato39, florentine du XVe siècle, ainsi que les poèmes du non-sens de Burchiello, pullulent de personnages souffrant de maladies particulièrement gênantes, car elles affectent surtout des parties du corps ou des fonctions corporelles que l’on préfère maintenir à l’abri du regard et des commentaires des autres. De même, la satire des médecins, des chirurgiens et des apothicaires offrait aux satiristes un vaste répertoire de textes stéréotypés – tels que les recettes et les livres de remèdes – et des termes techniques qui se prêtaient à merveille à la moquerie des savoirs théoriques et abscons. La plupart des motifs satiriques propres à la ridiculisation du corps médical nous la retrouvons dans la satire du pédant, l’un des filons les plus prolifiques de la littérature comique renaissante, et également chez Ferrari qui tourne en dérision des affections embarrassantes, telles la pelade et la gale. La diffusion massive, au cours du XVIe siècle, de la syphilis dans tous les milieux sociaux avait favorisé l’essor d’une littérature burlesque sur le mal napolitain qui servait à contrebalancer – dans le domaine de la poésie de l’équivoque – les écritures comiques à sujet homosexuel. On assiste ainsi à une sorte de joute à distance entre les partisans des pratiques homosexuelles, qui se disaient à l’abri de toute contagion, et les partisans des amours hétérosexuels, qui exhibaient comme des titres de noblesse les effets délétères de la syphilis, dont la pelade. Ferrari semble jouer sur les deux registres lorsqu’il nous offre des vers qui blâment ou qui exaltent les amours homosexuelles, ce qui confirme le statut fictionnel de tels partis pris40. Il en va de même pour les compositions qui fonctionnent par couplets, à savoir les textes pro ou contra un sujet donné, parmi lesquels figure celui sur le vin41, une diatribe toute rhétorique qui réserve quelques surprises au lecteur attentif. Comme je viens de l’évoquer plus haut, cette paire de capitoli met en scène une sorte d’académie fictive, le « royaume de la fève », qui vient de bannir l’un de ses membres après une sorte de procès interne, en raison de son penchant pour le culte de Bacchus ; le malheureux écrit alors aux juges du royaume afinde plaider sa cause et surtout les vertus bénéfiques du vin. Or, les arguments en faveur du précieux liquide puisent essentiellement à une seule et unique source qui, bien qu’à caractère paradoxal, n’a rien à voir avec la tradition poétique burlesque italienne, à savoir les Paradoxes en prose d’Ortensio Lando. Ce dernier avait adapté en langue vernaculaire un genre humaniste en vogue dès le début du siècle et tout à fait alternatif à la poésie parodique. Si l’on compare la deuxième moitié du capitolo de Ferrari avec le VIIe paradoxe de Lando, L’ivresse vaux mieux que la sobriété, on observe une singulière correspondance dans l’emploi des exempla se référant à l’usage du vin à l’Antiquité :
Voglion costor, che ’l gran Platon trovasse
Per le virtù del Vin, quelle sue Idee,
Et che per ciò divin si nominasse.
Et per certo <ben> tal nome a lui si dee,
Poi ch’égli il vero fondamento pone
De lo ’ngegno nel Vin, ch’altri si bee.
Ritrovò inoltre tante cose buone,
Li numeri, le leggi, & d’Amor scrisse,
Et quella sua bell’Institutione.
Et che sapean di Vin le Muse, disse,
Cioè, che per voler esser un vero
Poeta, fia mestier, bene bibisse.
Per questo fù sì grande il patre Homero,
Per questo Horatio tanto ben garbare
Seppe di Poesia ’l maestro intiero.
Mal’atti son gli abstemij al generare,
Et senza forza sono, & senz’ardire,
Manenconiosi, & poco usan campare.
Ch’il Vino e vecchi fa ringiovenire,
Tutte l’età rallegra, & tutti e sessi,
Cuoce le crudità, fa ben dormire.
Fà raddrizzar tutti i nervi rimessi,
Incita l’appetito, e insomma giova
Al corpo, a sensi, & a gli spirti oppressi.
Chi è poltrone, & vuol far qualche pruova
Da valente, ricorra a la bottiglia,
Né però questo al mondo è cosa nuova.
Leggendosi in Homero, che consiglia
Hecuba Hettorre al ber, poich’ella sente,
Che beendo ei fa pruove a meraviglia.
Et Mitridate valorosamente
Per quarant’anni l’hebbe co i Romani
Sempre stando in zicocca, e allegramente.
Et Plutarco dicea, che gli Spartani
Lavavano nel Vino i lor bambini
Per far lor soda la pelle, & più sani.
[...]42
et chez Lando :
Vuole similmente il divino Platone ch’egli fusse un vero formento dell’ingegno, per la virtù del quale forse che esso ritrovò le idee e i numeri, scrisse le leggi, scrisse d’amore, e instituì si ben ordinata republica. Vuole ancora Platone che le muse sentissero l’odore del vino, e di qui avenire che chi non beve non possa neanche versi comporre alti e numerosi. Ma lasciamo andare il comporre de’ versi ; che può far di buono colui che vino non beve ? Esso in prima non è ben atto a generare, è privo di ardire e di forze, ha la vertù concottrice debile e inferma e presto muore [...]. [Il vino] è buono ancora secondo Galeno per mitigare l’acerba natura de’ rabbiosi vecchi ; l’animo per lui di più gradimenti eccita, il corpo per lui tutto si ricrea, e i spiriti pigliano vigore. Ben conobbe tante virtù Ecuba appresso di Omero, essortando Ettore il figliolo a ricrearsi col bere da’ duri travagli nella battaglia sostenuti.43
Par la suite, Lando remarquait :
Nota Plutarco nella vita di Licurgo che appresso de’ Spartani e fanciulli si lavassero col vino per fargli vigorosi, pieni di spirito, sani e con la pelle più soda.44
Ceci n’est pas le seul emprunt de Lando figurant dans les Rime de Ferrari. Dans le tableau des correspondances qui suit figure la liste des paradoxes landiens qui ont inspiré des compositions du Modénais :
Paradosso III : Meglio è d’esser ignorante che dotto / Mieux vaut être ignorant que savant
Capitolo LV. In lode dell’ignorantia. A M. Benedetto Manzuolo.
Paradosso IV : Meglio è d’esser cieco che illuminato / Mieux vaut être aveugle que voyant
Capitolo XXX, In commendatione dell’esser cieco. A M. Francesco Fortini
Paradosso V : Meglio è d’esser pazzo che savio / Mieux vaut être fou que sage
Capitolo I : In lode della pazzia. A M. Bernardino Pia
Paradosso VII : Esser miglior l’imbrachezza che la sobriertà / L’ivresse vaut mieux que la sobriété
Capitolo VI : In lode del vino. Alli Signori Giudici del Reame della Fava.
Paradosso IX : Meglio è viver mandato in esiglio che nella patria longamente dimorare / Mieux vaut vivre en exil que demerurer longuement dans la patrie
Capitolo XXXVIII : In lode delli fuor’usciti. Al Sig. Giambellardino Napoliello
Paradosso XII : Meglio è di piangere che ridere / Mieux vaut pleurer que rire
Capitolo XIX : Contra al ridere. A M. Scipione Incogniti.
Paradosso XIX : Meglio è d’essere in prigione che in libertà / Mieux vaut être en prison qu’en liberté
Capitolo XXXIX : In lode della prigione. A M. Paolo Grillenzoni.
Paradosso XXII : Meglio è non aver servidori che averne / Mieux vaut ne pas avoir de serviteurs que d’en avoir Capitolo XV : In lode dello star senza servidori. A Carlo Molza.
Paradosso XXVIII : Che l’opere quali al presente abbiamo sotto il nome di Aristotele non sieno di Aristotele / Que les oeuvres que nous connaissons à présent sous le nom d’Aristote ne sont pas d’Aristote
Capitolo VIII : Contra a l’opere dette di Aristotile. A M. Giovanni Bellosio
Paradosso XXIX : Che Aristotele fusse non solo un ignorante ma anche le più malvagio uomo di sua età / Qu’Aristote était non seulement un ignorant mais aussi l’homme le plus mauvais de son époque
Capitolo L : Contra Aristotile. A M. Bernardino Thilesio.
Paradosso XXX – Che M. Tullio sia non solo ignorante de filosofia, ma di retorica, di cosmografia e dell’istoria / Que Cicéron ignore non seulement la philosophie, mais la rhétorique, la cosmographie et l’histoire
Capitolo XLIX : Contra Cicerone. A M. Scipione Theti.
Mais voyons de plus près quelques exemples de ces emprunts. Le texte de Ferrari Contra a l’opere dette di Aristotile, n’est rien d’autre qu’une « mise en vers » du paradoxe XXVIII intitulé Que les œuvres que nous connaissons à présent sous le nom d’Aristote ne sont pas d’Aristote45. Or, si dans le cas du poème sur le vin et l’ivresse les références aux écrits de Lando étaient fidèles, certes, mais tout compte fait épisodiques et neutralisées par la réponse versifiée des juges du Reame della fava, dans le poème sur l’attribution de certaines œuvres à Aristote, en revanche, la matière landienne constitue la seule et unique source du texte. En effet, on observe une concordance parfaite des auctoritates et des exempla mentionnés par les deux auteurs (Strabon, Plutarque, Lentulo Simplicius, Cicéron), y compris dans leur succession, et l’apport de Ferrari se limite aux seuls tercets d’incipit et d’explicit. Or, le paradoxe du Milanais Ortensio Lando sur les écrits d’Aristote dont la paternité posait problème s’insérait dans une querelle humaniste qui avait fait couler beaucoup d’encre autour de 1553, opposant des philologues de renom tels que Celio Secondo Curione, Mario Nizzolio et Marcantonio Maioragio46. Quant au dédicataire du capitolo de Ferrari, il s’agit d’un certain Giovanni Bellosio, déjà mentionné dans d’autres pièces comme un proche de Rinaldo Corso, dont je n’ai pas pu identifier avec certitude le rôle dans les milieux humanistes du temps. Il est donc probable que l’adaptation poétique du célèbre paradoxe de Lando soit à mettre en relation avec d’autres membres de l’entourage de l’auteur, in primis Rinaldo Corso, qui avait fréquenté Lando vers la moitié des années Quarante, lorsqu’il côtoyait les hétérodoxes vénitiens et le cercle de Barbara da Correggio et Veronica Gambara. Singulièrement, Ferrari ne dissimule pas ses « larcins » sous des titres de complaisance et ne maquille aucunement les emprunts d’un ouvrage produit par un auteur à l’index depuis la moitié des années 1550, ce qui laisserait penser à une protection ecclésiastique accordée à Ferrari par certains amis romains. Or, pour incroyable que cela puisse paraître, une fois endossé l’habit ecclésiastique en 1567, Rinaldo Corso devenait inquisiteur apostolique, ce qui signifie que celui qui fut le relecteur du recueil de Ferrari et avait été un proche de Lando – qui l’avait à son tour évoqué dans son Commentario delle più notabili, & mostruose cose d’Italia47– était bien placé au sein de l’administration inquisitoriale. Corso ne pouvait pas ignorer la provenance douteuse de certains emprunts figurant dans l’œuvre de Ferrari, ni sous-évaluer leur dangerosité, ce qui explique sans doute l’impression vénitienne du volume, mais aussi le fait qu’il soit passé à travers les mailles de la censure.
D’autres compositions renvoient directement à des Paradoxes de Lando, tel celui In lode della prigione qui adapte des passages du paradoxe XXIX, Mieux vaut être en prison qu’en liberté48 , sans pour autant reprendre ouvertement le contenu confessionnel de ce dernier, qui rappelait l’emprisonnement de maintes réformés dont l’esprit restait toutefois libre de croire à la vrai religion. Il en est de même pour les paradoxes XXII, Mieux vaut ne pas avoir des serviteurs qu’en avoir, et XXX, Que Cicéron ignore non seulement la philosophie, mais la rhétorique, la cosmographies et l’histoire49, tandis que le deuxième paradoxe contre Aristote, intitulé Qu’Aristote était non seulement un ignorant mais aussi l’homme le plus mauvais de son époque50 apporte bon nombre de matériaux polémiques qui seront par la suite traités de manière burlesque dans la composition Contra Aristotele adressée à Bernardino Telesio51. Dans ce cas précis Ferrari ne se réfère pas, comme le laisse entendre Antonio Corsaro, à Francesco Berni, auteur à son tour d’un Capitolo in laude d’Aristotele adressé à un cuisinier52, car la verve éclectique de l’argumentation, le ton dérisoire et facétieux et le sens de la répartie du chef de file des poètes « per burla » lui faisaient défaut. De même, le capitolo contre le rire renvoie au paradoxe XII, Mieux vaut pleurer que rire, un texte largement inspiré de l’Areneus de Celio Secondo Curione53. Dans l’ensemble, Ferrari semble s’approprier les textes landiens qui portaient atteint aux fondements de la scholastique et du cicéronisme, parcourant ainsi le chemin d’une critique radicale de matrice érasmienne qui correspond, mutatis mutandis, à la mise en discussion du « canone bembesco » sur le versant de la littérature en langue vernaculaire. Cela dit, il est difficile d’évaluer l’adhésion réelle de l’auteur à une révision fondamentale des piliers de la culture philosophique et rhétorique de son temps sous l’égide des écrits d’Érasme, de Curione et de Lando. Certes, les œuvres de ces humanistes avaient circulé largement dans les milieux savants et chez des proches de Ferrari qui avaient à une époque partagé les mêmes inquiétudes religieuses ; toutefois, à la lecture de ce recueil on a l’impression – et à ce stade des recherches il ne peut s’agir que d’une impression – que Ferrari utilise le livre des Paradossi de la même manière que le petit dictionnaire de la langue zerga, les capitoli de Berni, Della Casa, Firenzuola et les satires de l’Arioste, à savoir en tant que répertoire d’occasions polémiques et burlesques. Cette impression est toutefois contrebalancée par l’exceptionnalité aussi bien quantitative que qualitative des emprunts landiens à une époque où il valait mieux occulter certaines lectures que les exhiber. Les compositions burlesques plus traditionnelles, les pièces en dialecte et les satires plus narratives, façonnées sur l’exemple de l’Arioste, tendent en revanche à mitiger l’effet déflagrant de la critique landienne au sein d’un recueil qui finit par noyer dans le désordre tout facteur potentiellement transgressif. Dans certains cas, l’auteur cherche à réduire la portée potentiellement transgressive d’une argumentation par des références d’une orthodoxie sans faille. Dans le capitolo In lode dell’ignorantia adressé à Benedetto Manzuolo, il s’approprie certains passages de l’un des paradoxes les plus radicaux de Lando, celui intitulé Mieux vaut être ignorant que savant, dans lequel le Milanais poussait l’interpréta-tion paulinienne et des Pères de l’Église dans un sens sceptique, antiaristotélicien, proche de l’évangélisme valdésien54. Après avoir proposé une série de cas exemplaires illustrant la vanité du savoir pour le savoir, l’auteur condamne, dans le sillage de l’Ariosto, « il saper troppo », cette curiosité démesurée et pernicieuse qui aurait conduit Luther à mettre en doute la parole de Dieu, telle qu’elle avait été transmise depuis des siècles. Le poème se réfère directement à un passage très connu de la sixième satire de l’Arioste adressée à Pietro Bembo, dans laquelle nous lisons :
Se Nicoletto o fra Martin fan segno | |
d’infedele o d’eretico, ne accuso | |
il saper troppo, e men con lor mi sdegno : | 45 |
perché, salendo lo intelletto in suso | |
per veder Dio, non de’ parerci strano | |
se talor cade giù cieco e confuso.55 |
Et chez Ferrari :
Fu il saper troppo quel, che nocque tanto,
Non han cent’anni, al paese Alemano,
Ch’era pria sì devoto, & così santo.
Nè solo fù cagion del Luterano
Perfido error, ma di quante heresie
Sono mai state nel gregge Christiano.
Che la scienza madre di bugie
E talmente al Signore in odio,easchivo,
Che le resiste per tutte le vie.56
Cette digression sur « il saper troppo » intervient à un momentcharnière de la composition, car elle se situe immédiatement après l’évocation du caractère infernal du savoir et la dénonciation de ces pédants diaboliques qui à Rome ont pris l’habit ecclésiastique :
Cervelli inquieti, che van sempre a volo
Nati per altrui dar pene, & martori,
Vero infernal diabolico stuolo.
Per questo io credo, ch’in Roma i Dottori
Usin berrette a croce, & la gonnella,
Per non havere a divenir peggiori.
Perché s’afatto de le lor cervella
S’impadronisse il diavol, tutto quanto
Il mondo andria a guazzetto, qual frittella.57
Ainsi, après la revendication de la primauté du catholicisme sur toute autre confession, la critique des savants abandonne toute référence aux milieux curiaux tout en assumant des argumentations plus anodines tirées du texte de Lando.
En conclusion, à la question cruciale de savoir si oui ce recueil poétique cache un message hétérodoxe, on ne peut que répondre par un « oui, mais non », car bien que l’on puise dans une tradition humaniste d’inspiration hétérodoxe (Érasme, Curione, Lando), parfois doublée d’un anticléricalisme courant au sein même de la cour de Rome, on corrige le tir par des déclarations d’allégeance à l’orthodoxie, tout en diluant la portée polémique du discours paradoxal dans la multiplicité de stratagèmes burlesques et dans une disposition désordonnée des différents capitoli. Cela ne fait que confirmer ma première intuition, à savoir l’emploi des Paradossi de Lando en tant que répertoire de motifs polémiques permettant d’étoffer par des nouveaux contenus des compositions « in lode » d’ascendance bernesque. En somme, les Rime burlesche de Ferrari touchent aussi bien aux prototypes satiriques et burlesques de la première moitié du XVIe siècle qu’à l’expérimenta-lisme plus mûr des milieux culturels padani, tout en puisant dans la tradition humaniste en prose. De ce fait, elles se situent comme un fruit tardif d’une vogue poétique jadis subversive, mais aussi comme la tentative ultime de transmettre aux nouvelles générations des satiristes, empêtrés dans les diktats de l’honnête dissimulation, une voie alternative au repliement dans la poésie du renoncement ou du divertissement anodin.
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1 Ce texte est la version écrite et annotée de la conférence prononcée à Genève, le 13 mai 2013, sur invitation de la Fondation Barbier-Mueller pour l’étude de la poésie italienne de la Renaissance.
2 La plupart des critiques ont recours en effet aux renseignements glanés au xviiie siècle par Girolamo Tiraboschi, Biblioteca modenese o notizie della vita e delle opere degli scrittori natii degli stati del serenissimo signor Duca di Modena..., t. II, in Modena, presso la Società tipografica, 1782, p. 272-273.
3 Danilo Romei, Poesia satirica e giocosa nell’ultimo trentennio del Cinquecento, in Banca dati Nuovo rinascimento, http://www.nuovorinascimento.org, 21 agosto 1998, p. 1 ; cf. Ironia e irrisione, chap. V de Storia letteraria d’Italia, nuova edizione a c. di Armando Balduino, Il Cinquecento, a c. di Giovanni da Pozzo, Padova, Piccin-Vallardi, 2006, t. III, p. 1655-1688.
4 Silvia Longhi, Lusus. Il capitolo burlesco nel Cinquecento, Padova, Antenore, 1983, p. 29-39.
5 Franco Pignatti, Ferrari, Giovan Francesco,in DBI, 46, 1996 (désormais en ligne à l’adresse http://www.treccani.it/enciclopedia/giovan-francesco-ferrari_(Dizionario-Biografico)/)
6 Parmi les compositions occasionnelles de Ferrari figure en outre un poème en toscan rédigé à l’occasion de la mort de Francesco Maria Molza qui n’a pas retenu l’attention de la critique (incipit : « Gentil mio Molza, ogni ora », in Poesie di Francesco Maria Molza colla vita dell’autore scritta da Pierantonio Serassi, Milano, Società tipografica dei classici italiani, 1808, p. 466).
7 En 1574, cet ouvrage est publié en version bilingue à Genève par Jacob Stoer sous le titre Lo stratagema di Carlo IX, re di Francia contro gli Ugonotti rebelli di Dio e suoi : descritto dal signor Camillo Capilupi ; e mandato di Roma al signor Alfonzo Capilupi. Ce stratageme est cy après mis en françois avec un avertissement au lecteur et, toujours à la même enseigne et la même année, en version française sous le titre Stratageme, ou la ruse de Charles IX (cfr. GLN 15-16, http://www.ville-ge.ch/musinfo/bd/bge/gln/).
8 Cfr. Marco Cavarzese, Manzuoli, Benedetto,in Dizionario Biografico degli Italiani, 69, 2007 (désormais en ligne à l’adresse http://www.treccani.it/enciclopedia/benedetto-manzoli_(Dizionario-Biografico)/).
9 Fils de Pietro Giovanni Grillinzoni, Orazio fut jugé en 1555 par l’Inquisition pour ses idées religieuses (cfr. Matteo Al Kalak, La città di tutte l’heresie : attuazione e divulgazione del Concilio di Trento a Modena, 1563-1627, Modena, Poligrafo Mucchi, 2005, p. 109).
10 Cfr. Giovanna Romei, Corso (Macone), Rinaldo, in Dizionario Biografico degli Italiani, 29, 1983 (désormais à l’adresse http://www.treccani.it/enciclopedia/rinaldo-corso_(Dizionario-Biografico) et Monica Bianco, « Rinaldo Corso e il “Canzoniere” di Vittoria Colonna », Italique,I (1998), p. 36-45.
11 Sur cet érudit bibliophile voir surtout Pierre Louis Ginguené, Histoire littéraire d’Italie, II éd., Paris, chez L. G. Michaud, 1824, t. VIII, p. 385-389 et le chapitre VIII (Scipione Tetti : dalla cerchia di Sirleto alle galere pontificie) du volume de Luciano Canfora, Il Fozio ritrovato. Juan de Mariana e André Schott, Bari, Edizioni Dedalo, 2001, p. 61-66.
12 Giovan Francesco Ferrari, LE RIME /BVRLESCHE / SOPRA VARII, ET / piaceuoli soggetti, indirizzate à / diuersi nobili Signori. / NVOVAMENTE COMPOSTE / & date in luce / Da M. Giouanfrancesco Ferrari / Con la Tauola de’ Sommarij./ CON PRIVILEGIO. / IN VENETIA / Appresso gli Heredi di Marchiò Sessa./ MD LXX, in-8°,. ff. H3v-I3r ; (dorénavant simplement Rime burlesche).
13 Cfr. Luigi Firpo, Borgarucci, in Dizionario Biografico degli Italiani, 12, 1971 (désormais à l’adresse http://www.treccani.it/enciclopedia/borgarucci_(Dizionario-Biografico).
14 Rime burlesche, f.Cr-v.
15 Tommaso Tomasi Gualteruzzi fut secrétaire apostolique sous Sixte V.
16 In lode della pazzia. A M. Bernardino Pia. Capitolo I, in Rime burlesche, ff. A1r-A5v.
17 In commendatione del libro. A M. Rinaldo Corso, Capitolo II., ibid., f. 5v et sqq.
18 In lode della pazzia...., ibid., f. A5v.
19 « Probabilmente ad anni anteriori al soggiorno romano sono da ascrivere data la vicinanza non solo geografica di Modena e Correggio -contatti con personaggi della corte correggesca, come il letterato e giurista Rinaldo Corso e il poeta Girolamo (o Giovanni Girolamo) Catena, presenti poi a Roma negli anni 1560-70 al servizio del cardinale Girolamo da Correggio. Ma l’accenno nel cap. XXX delle Rime ai “dotti sermoni” del Corso fa collocare questi versi dopo il 1567, anno in cui quest’ultimo abbracciò lo stato ecclesiastico. Al Corso, inoltre, come risulta dal cap. II, il F. fece leggere i suoi versi in vista della stampa, prima che fossero affidati alla revisione professionale del curatore ed editore di testi B. Borgarucci, la cui attività è documentata in quegli anni a Venezia” (F. Pignatti, art.cit.).
20 Rime burlesche, Cap.. XXXVI [mais XXXV], ff. K2v-K5r.
21 Ibid., ff. B2v-B5r.
22 Ibid., ff. G1r-G2v.
23 Ferrari devait avoir sous la main des anthologies burlesques éditées par Giunti en 1548 et 1555 (Il primo libro dell’opere burlesche, di m. Francesco Berni, di m. Gio. della Casa, del Varchi, del Mauro, di m. Bino, del Molza, del Dolce, et del Firenzuola..., Firenze, [Bernardo Giunta il vecchio], 1548 et Il primo [-secondo] libro dell’opere burlesche di Francesco Berni, di Gio. della Casa, del Varchi, del Mauro, di m. Bino.. Ricorretto, e con diligenza ristampato, Firenze, Bernardo Giunta 1555) et par Sansovino (Sette libri di satire..., Venezia, Francesco Sansovino, 1560). Sur le choix du « capitolo in terza rima » chez les satiristes de la fin du xvie siècle en tant qu’option métrique d’autorité et tout compte fait « conservatrice », voir D. Romei, art. cit., p. 13.
24 À ce propos Silvia Longhi observe : « Senza questa spinta autoselettiva, pervicacemente orientata alla fusione e alla mescolanza, sarebbe assai problematico valutare due esperimenti burleschi notevolmente più tardi, e ormai inconciliabili con i canoni che ci sono familiari. Intendo le Rime burlesche del modenese Giovanfrancesco Ferrari (1570), massiccia raccolta di cinquantatre capitoli, strutturata talora come novelle o addirittura come scene di commedia, e aperti alla mimesi linguistica dei più disparati dialetti e gerghi. E le Piacevoli rime di Cesare Caporali (1585)... » (op. cit., p. 241). À des nombreuses reprises, l’auteur introduit des divagations narratives tirées de textes bien connus tels que le Morgante de Pulci ou les Facetie, fabule, e motti del piovano Arlotto, jetant ainsi des jalons entre la production burlesque du centre-nord de l’Italie du Cinquecento et la littérature facétieuse florentine du xve siècle.
25 Sur le capitolo en forme d’épître voir encore D. Romei : « Agli incerti confini tra poesia burlesca e satira ‘regolare’ si era installato fin dall’inizio il capitolo in forma d’epistola (o ‘lettera in capitoli’, come l’aveva detto il Berni), che continua ad approfittare del suo ibrido statuto per spaziare tra soluzioni difformi », art. cit., p. 16.
26 Rime burlesche, ff. I8v-K2r.
27 Cfr. Per qual cagione li bergamaschi parlino sempre Bergamascamente. A M. Virgilio Bergamasco (ibid., K5r-K7r) et Rasunament int’al vras, e naturel linguaz de Modna sovra al Mal de Corp, alias al Fluss. A un so amig Mudneis (ff. M8v-N2v).
28 Ibid.. ff. I7v-I8r.
29 Cap. XLVI [mais XLV], ibid., ff. M8v-N2v.
30 Sur la littérature modénaise du XVIe siècle voir surtout Testi antichi in modenese dal secolo XIV alla metà del secolo XVII, editi da Francesco L. Pullè, Bologna, Romagnoli dell’Acqua, 1591 (sur Ferrari surtout les p. XLIX-L et 55-65).
31 Sur le furbesco ela lingua zerga voit surtout Franca Ageno, « Un saggio di furbesco del Cinquecento », Studi di filologia italiana, 17, 1959, p. 221-237 ; Ivano Paccagnella, Il fasto delle lingue. Plurilinguismo letterario nel Cinquecento, Roma, Bolzoni, 1984, p. 93-99.
32 Rime burlesche, ff. I5r-I6r et ff. I6r-I7r.
33 Antonio Brocardo, Nuouo modo de intendere la lingua zerga. Cioe parlare forbescho. Nouellamente posto in luce per ordine di alfabeto. Opera non men piaceuole che utilissima, Ferrara, per Giovanmaria di Michieli, & Antonio Maria di Siuieri compagni, 1545. Cf. Franca Ageno, « A proposito del “Nuovo modo de intendere la lingua zerga », Giornale storico della letteratura italiana, 135, 1958, p. 370 et sqq. Sur le rôle de passeur de Ferrari pour ce qui concerne la fortune de la lingua zerga au xviie siècle, que l’on voit ces quelques lignes de Laura Cerretini « Ma tra queste tre raccolte principali, che, nel loro insieme, coprono l’ultimo scorcio del XV secolo, e la codificazione lessicale che si ha appunto con il Nuovo Modo nel 1545, esiste tutto un materiale e una terminologia che non si può ricondurre all’una o all’altra delle fonti esaminate. La stessa situazione si presenta anche subito dopo l’uscita del Nuovo Modo, anche se solo per una ventina d’anni, dal momento che, con i tre componimenti gergali inclusi da Giovan Francesco Ferrari nelle sue Rime, stampate nel 1570, inizia la vera e propria fortuna del repertorio, che, come vedremo, toccherà i suo vertici più alti nel secolo seguente » (« Il gergo nella letteratura del Cinquecento : definizione e nota storica », in Il Rogiolo. Rivista telematica, 1, marzo 1998, http://www.humnet.unipi.it/rogiolo/rivista/gergo.html).
34 Vernesco al Signor Meo. Cap. XXXVIII [mais XXXVII], in Rime burlesche, ff. K7r-L1v.
35 Je pense surtout au Ringratiamento Salciccionico, ouero Mortadellonico.Adunsuo amico. Cap. IV, ff. B2v-B5r, qui s’insipre naturellement du capitolo In lode della salsiccia d’Agnolo Firenzuola, mais aussi du Comento du Grappa (cf. Ludi esegetici, 3 : Cicalamenti intorno al sonetto ’Poi che mia speme è lunga a venir troppo’ ; Comento nella canzone del Firenzuola ’In lode della salsiccia’ ; testi proposti da Franco Pignatti, Manziana, Vecchiarelli, 2009). Sur le Comento du Grappa voir mon article « Commentar grossamente e per burla : il Comento del Grappa sopra la Canzone in lode della salsiccia », in Il poeta e il suo pubblico. Lettura e commento dei testi poetici nel Cinquecento, Genève, 15-17 mai 2008, Genève, Droz, 2012, p. 293-310.
36 In lode delli carciofi. A M. Marc’Antonio Priore de’ Rossi. Capitolo XXX [mais XXIX], in Rime burlesche, ff. I1r-I3r ; In lode della torta. A M. Roberto Fontana. Cap. III, ibid., ff. A7r-B2r. Il existe une version manuscrite de cette composition In lode della torta, ainsi que de celle contre la barbe et des deux capitoli sur le vin, à la Biblioteca Apostolica Vaticana – cod. Capp. 152, ff. 100-106 – dans laquelle ne figure pas la mention de l’auteur (cf. I codici capponiani della Biblioteca Vaticana descritti da Giuseppe Salvo Cozzo scrittore aggiunto della medesima biblioteca, Roma, Tipografia Vaticana, 1897, p. 155).
37 In Francesco Berni, Rime, a cura di Danilo Romei, Milano, Mursia, 1985, p. 45-48 et 52-54.
38 Cf. In lode della pelatina, alias pelarella. Alla Signora Alessandrina, etc. Cap. XXII, in Rime burlesche, ff. F2v-F5r ; Contra la barba. Ad un suo amico. Cap. XXIII, ff. F5r-F7r ; In lode della rogna. Al maestro di Casa de i Librai. Cap. XXIV, ibid., ff. F7r-F8v.
39 In lode della indispositione. A M. Hortensio Grillenzoni. Cap. XLVII [mais XLVI], ff. N2v-N4v ; In lode dello stare ammalato. A M. Angelo Mandosio. Cap. XLVIII [mais XLVII], ff. N4v-N6r.
40 Voir à ce propos les deux compositions sur la pelade et sur la barbe mentionnées plus haut ou encore le capitolo sur la mortadelle.
41 In lode del vino. Alli Signori Giudici del Reame della Fava. Cap. VI, in Rime burlesche, ff. B6r-B7v ; Risposta delli signori giudici. A M. Hercole asserto Re della Fava. Contra al vino, Cap. VII, ibid., ff. B8r-C2r.
42 Ibid., f. B7r-v.
43 Ortensio Lando, Paradossi / Paradoxes, éd. bilingue, texte établi par A. Corsaro, trad. de M.-F. Piéjus, Paris, Les Belles Lettres, 2012, p. 52-53.
44 Ibid., p. 54.
45 Contra a l’opere dette di Aristotile. A. Giovanni Bellosio. Cap. VIII, in Rime burlesche, ff. C2r-C4r ; O. Lando, Paradossi / Paradoxes, cit., p. 162-165.
46 Le « plagiat » opéré par Ferrari avait été déjà démasqué par Antonio Corsaro dans ses notes au paradoxe XXVIII (ibid., p. 307-308), dans lesquelles on rappelle également les principaux acteurs de la mise en discussion de la paternité de certaines œuvres d’Aristote. Toutefois, Corsaro ne procède pas à un relevé systématique des concordances entre le texte de Lando et les Rime du Modénais, ce qui ne permet pas d’apprécier à sa juste valeur l’entité des emprunts et leur nature.
47 Commentario delle piu notabili, et mostruose cose d’Italia, et altri luoghi, di lingua aramea in italiana tradotto, nel qual s’impara, et prendesi istremo piacere. Vi si è poi aggionto un breue catalogo delli inuentori delle cose, che si mangiano, et si beueno, nouamente ritrouato, et da m. Anonymo di vtopia, composto, s.l.n.t., 1548.
48 Cf. In lode della prigione. A M. Paolo Grillenzoni. Cap. XL [mais XXXIX], in Rime burlesche, ff. L3r-L5r ; Meglio è d’essere in prigione che iin libertà, O. Lando, Paradossi / Paradoxes, cit., p. 105-109.
49 Ibid., p. 122-125 et 176-186
50 Ibid., p. 166-175.
51 Contra Aristotile. A M. Bernardino Thilesio. Cap. LI [mais L], ff. O4r-O6r.
52 F. Berni, Rime, cit., p. 149-152.
53 O. Lando, Paradossi / Paradoxes, cit., p. 78-79 et notes p. 448-251.
54 Sur l’éloge paradoxal de l’ignorance au XVIe siècle, aussi bien dans les écrits en prose d’Érasme que chez Agrippa ou Ortensio Lando, on renvoie à Maria Cristina Figorilli, Meglio ingnorante che dotto. L’elogio paradossale in prosa nel Cinquecento, Napoli, Liguori, 2008.
55 Ludovico Ariosto, Satira VI, vv. 43-45.
56 In lode dell’ignorantia. A M. Benedetto Manzuolo. Cap. LII [mais LIV], ff. P4v-P7r (ici f. P5v).
57 Ibid.