Book Title

Judit V. Ecsedy, Melinda Simon, Kiadói és nyomdászjelvények Magyarországon, 1488-1800 = Hungarian Printers’ and Publishers’ Devices, 1488-1800

Budapest, Balassi Kiado Orszagos Szechenyi Könyvtar, 2009, 203 p. ISBN 978-963-506-797-8

Gabor Balazs

Jean-Dominique Mellot

Le livre de Judit V. Ecsedy (conservateur à la Bibliothèque nationale Széchenyi de Hongrie) et de Melinda Simon (maître de conférences à l’université de Szeged) en dit plus que son titre ne nous le suggère. Dans la préface, qui est bilingue comme le reste de l’ouvrage, les deux auteurs, au miroir du sujet choisi, retracent utilement et à grands traits l’histoire de l’imprimerie et de la librairie hongroises. Ce sujet, il est vrai, n’est pas totalement inconnu du public savant européen, notamment grâce aux ouvrages et aux articles de Gedeon Borsa (dont la Clavis typographorum librariorumque Italiae. 1465-1600, en particulier, a un rayonnement international) et aux travaux en anglais et en français d’István Monok.

Le traitement très avisé du sujet n’est pas fait pour nous étonner dans la mesure où Mme Ecsedy, membre éminent du « cercle Borsa » du département d’Histoire du livre de la Bibliothèque nationale de Hongrie, est aussi l’auteur de A Könyvnyomtatás Magyarországon a kézisajtó korában, 1473-1800 (Histoire de l’imprimerie hongroise), qui est sans doute l’ouvrage moderne de référence sur le sujet.

Une des grandes qualités du livre, pour les lecteurs profanes comme pour les spécialistes de l’histoire du livre, tient au fait que les auteurs possèdent manifestement une connaissance internationale de leur sujet. Aussi ne se contentent-elles pas de donner des descriptions et des illustrations pour présenter les différentes marques et devises répertoriées. Elles ont aussi enquêté sur leurs origines : d’où proviennent les différents motifs, devises et images utilisés par les imprimeurs et les libraires hongrois des premiers siècles du livre imprimé ? Sans grand étonnement, elles remontent pour ce faire à la grande époque de la Réforme, aux Pays-Bas et, pendant toute la période concernée, au monde germanique. Il suffit au lecteur de feuilleter les index de cet ouvrage pour se rendre compte que, mis à part les humanistes et les réformateurs hongrois, la plupart des noms cités sont allemands. L’histoire du livre, au-delà du propos érudit et bibliophilique, remplit ici sa mission, qui est de contribuer à mettre en lumière l’histoire sociale d’un pays, d’un lieu, d’une époque donnée à travers les témoins que sont les imprimés.

Or, dans cette région de l’Europe que les historiens locaux préfèrent nommer « Europe centrale de l’Est », incluant Tchéquie, Pologne et Hongrie historique, le « service du livre » n’était pas seul à être germanique, c’était également le cas de la clientèle et du marché des grandes villes. De même, il saute aux yeux en parcourant les données de ce livre que, pendant la domination ottomane (1526/1541-1697), les territoires non occupés, c’est-à-dire la Hongrie royale et la principauté de Transylvanie, ont joué un rôle prépondérant en matière non seulement d’histoire du livre hongrois, mais aussi, bien évidemment, d’histoire du pays lui-même. Cette époque, caractérisée par la carence d’un pouvoir central, a été par suite marquée par la moindre importance locale du régime des privilèges, des autorisations royales, et plus généralement de l’encadrement des métiers du livre.

On peut relever toutefois la structure un peu confuse de l’ouvrage, avec une division des chapitres par siècles, et à l’intérieur de chaque siècle par ordre alphabétique, ce qui n’est pas toujours clair et semble quelque peu artificiel, mais les index (noms, lieux géographiques et même devises) sont d’une aide précieuse pour compenser ce léger défaut.

Pour qui utilise l’ouvrage non comme une encyclopédie mais comme un livre à lire en entier, il est pareillement regrettable que les textes explicatifs se répètent ou réitèrent des informations déjà données dans la préface et peu étoffées. La méthode est compréhensible à l’égard du public hongrois, qui a la possibilité d’élargir ses connaissances à travers des ouvrages moins spécialisés. Mais, s’adressant à un public un peu plus large (et le choix, très heureux, du bilinguisme prouve que les auteurs visent ce but), l’ouvrage aurait gagné à livrer sous chaque notice des informations légèrement plus approfondies sur chaque imprimeur/libraire concerné. Bien que les historiens des « petits pays » se croient souvent obligés d’écrire, même pour les thématiques les plus spécialisées, des livres « attrape-tout », ici en revanche – à part la préface – on a plutôt affaire à un travail « pointu », clairement destiné à des spécialistes et, qui plus est, à un travail utile et de grande qualité.