Book Title

The Commenwealth of books. Essays and studies in honour of Ian Willison, éd. Wallace Kirsop

Melbourne, Centre for the Book, Monash University, 2007, 271p

Diana COOPER-RICHET

Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines

Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines

Ce recueil d’hommages à Ian Willison, dont la carrière s’est entièrement déroulée à la British Museum Library, devenue British Library, se compose de quinze articles de spécialistes du livre, parmi lesquels de nombreux historiens, une seule femme, Sarah Tyacke, un Allemand, tous les autres étant originaires du Royaume-Uni ou de son Commonwealth – le livre a été publié en Australie – et des États-Unis. A cet égard, il est dommage que la France, si chère au cœur d’Ian Willison, pays dans lequel il compte de très nombreux amis, ne soit pas représentée dans cet ouvrage.

Ian Willison a largement participé à la conception du volume, comme au choix des contributeurs. Son ouverture d’esprit, son intérêt pour les approches synthétiques, se reflètent bien dans la grande variété des thématiques abordées. L’article de David MacKitterick souligne l’importance prise par l’historiographie française chez le jeune Willison. La lecture, en français12, un jour de 1959, de l’ouvrage de Lucien Febvre et Henri-Jean Martin, L’Apparition du livre, provoqua, chez ce jeune intellectuel britannique à l’affût de nouvelles approches, un véritable choc intellectuel, tant celle proposée par les deux historiens français lui sembla stimulante. Ian Willison s’intéressa, très tôt, à l’histoire du livre dans les pays du Commonwealth, avant de commencer à plaider en faveur d’une histoire internationale du livre permettant de dépasser les clivages nationaux.

Le recueil comporte plusieurs chapitres sur des aspects de l’histoire du livre dans les pays anglophones. Simon Eliot plaide, dans « Whither book history in UK, and beyond ? », comme celui qui fut, et est encore, son maître, en faveur d’une histoire du livre qui dépasse les frontières. Keith Maslen, dans « The history of print culture in New-Zeland : report on recent experience », évoque les développements récents de la discipline en Nouvelle-Zélande. Terry Belanger s’attarde, dans « The rare book programme at Columbia University, 1972- 1992 », sur une formation dispensée à New-York, pendant une vingtaine d’années, autour des livres rares. Wallace Kirsop, quant à lui, dans « Scholarship, collecting and libraries in the Old and New World. A personal journey », revient sur son propre parcours dans l’univers du livre. Tous ces articles témoignent, par leur présence même, de l’intérêt qu’Ian Willison porta à ces différentes parties du monde et des liens qu’il y tissa.

Parmi d’autres études, celle portant sur les répercussions des genres littéraires (J. Paul Hunter, « Making books, generating genres ») est intéressante dans la mesure où elle n’aborde pas le genre littéraire par le biais du seul auteur, mais tente d’explorer la façon dont les genres naissent, sont utilisés, modifiés, voire transformés, pour devenir des textes. Dans ce processus complexe, le rôle des éditeurs, des imprimeries, mais aussi des libraires, des représentants et plus particulièrement des lecteurs est analysé avec finesse. J. Paul Hunter en arrive à la conclusion que le genre littéraire est moins figé qu’il n’y paraît et avance l’idée selon laquelle, faire des livres génère des genres.

Les écrits blasphématoires (Michael F. Suarez, « “The most blasphemous book that ever was published”. Ridicule, reception and censorship in XVIII th Century England »), tout comme les collections de Thomas Grenville et de Lord Amherst entrées à la British Library (Richard Landon), de même que le travail d’écriture du poète Yeats, que sa quête de perfection et de pureté conduit à remanier sans fin ses poèmes, amène Warwick Gould à se demander s’il ne faudrait pas aller vers une histoire des différents « états » ou « versions » d’un manuscrit d’écrivain.

L’ouvrage contient beaucoup d’autres contributions, parfois très originales, comme cette réflexion sur la constitution de ce « bâtard avec pedigree », selon l’expression de Graham Shaw, que sont les collections asiatiques de la British Library, dont l’enrichissement est désormais terminé, voire cette interrogation en allemand13, de Bernhard Fabian, sur les « sciences, dites de la culture » et sur leur apport aux humanités. Dans « Impediments to scholarship : printing and publishing at the close of the Twentieth Century », Peter Davison analyse les difficultés rencontrées par l’édition savante, à la fin du XXe siècle, à travers l’exemple des œuvres complètes de George Orwell.

Enfin, ni la question des archives, de leur importance pour l’histoire du livre et des difficultés de leur conservation (Sarah Tyacke), ni même l’apport essentiel que peuvent présenter les grands ouvrages bio-bibliographiques, comme la Bibliography of the English Language (BEL) dont l’éditeur, Robin Alston par ailleurs auteur de l’article, estime qu’elle constitue une « fenêtre sur l’histoire culturelle pour la période allant de l’invention de l’imprimerie à 1800 » et par-là même un apport considérable à l’histoire du livre, ne sont oubliés.

Par nature hétéroclite, les recueils d’hommages ont tous, pourtant, une certaine forme de cohérence interne qui tient à la personne à laquelle ils sont offerts, a fortiori, lorsque celle-ci en a inspiré l’organisation. Ian Willison, qui a dédié sa vie à l’histoire du livre, tant au Royaume-Uni, que dans sa dimension universelle, voit ici, ses très nombreux collègues, et souvent amis, lui rendre hommage et témoigner de la place qu’il a occupé dans ce domaine de la recherche, de sa volonté d’innover et de travailler en réseau.

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12 Le livre ne sera traduit en anglais qu’en 1979.

13 La seule etude du volume dans une langue autre que l’anglais.