Book Title

Gabriel Naudé entre bibliothèque docte et cabinet de curiosités

Sara DECOSTER

Assistante à la Bibliothèque de l’Université de Liège

Publié pour la première fois en 1627, l’Advis pour dresser une bibliothèque du jeune libertin érudit Gabriel Naudé a été largement commenté ; le traité possède en effet un statut presque mythique en tant que texte fondateur de la discipline bibliothéconomique1. Aussi E. Dacier n’avait-t-il pas tort lorsqu’il considérait que l’ouvrage restait pertinent, tant de siècles plus tard2. Mais, si Naudé a acquis une image de parangon, il ne représente pourtant qu’un modèle parmi d’autres dans un paysage bibliothéconomique non monolithique, dont il importera de tracer les contours.

Qualifié dès son vivant de « bibliothèque vivante » par le père Louis Jacob, correspondant de Peiresc, proche de Campanella et ami de Mersenne, qui lui dédie son Tractatus de Magnetis proprietatibus, Naudé s’investit pleinement dans les réseaux intellectuels du premier XVIIe siècle3. Influencé par Montaigne, Charron, Bodin et Cardan, il se choisit des maîtres de pensée tels que Pomponazzi et Cremonini. Sur un tel arrière-fond spirituel, la « tétrade » que forme le jeune bibliothécaire avec Gassendi, Diodati et La Mothe le Vayer constitue un noyau central du courant qu’on a coutume d’appeler « libertinage érudit »4. Cette pensée se lit clairement dans les Considérations politiques sur les coups-d’état, un texte d’un libertinisme politique radical qui témoigne d’un machiavélisme sans équivoque, que Naudé rédige à la trentaine5. Son esprit critique l’amènera dans la quête de la vérité qu’est Apologie pour tous les grands personnages qui ont esté faussement soupçonnez de magie (1625), où une confrontation rigoureuse des sources permet au jeune libertin de disculper des penseurs comme Pythagore, Raymond Lulle et Pic de la Mirandole de l’accusation de magie6.

Comme il arrivait souvent à ses compagnons de route libertins, Naudé va lier son sort à celui des grands seigneurs de son temps. Issu d’un milieu social relativement modeste, il entre dès l’âge de vingt ans au service de Henri II de Mesmes en tant que bibliothécaire, tout en poursuivant parallèlement des études de médecine. Pour parfaire sa formation, le jeune homme partira à Padoue (1626-1627). A son retour, il rédige son Advis, dédié à son protecteur chez qui il reprend ses fonctions. Il quitte définitivement le président de Mesmes en 1630 pour repartir en Italie avec le cardinal Bagni, en qualité de bibliothécaire. Après un court passage à la cour d’Antonio Barberini, il rejoint la France en 1642 sur les instances de Richelieu, qui meurt la même année. Naudé devient alors responsable de la bibliothèque de Mazarin, qui s’ouvrira aux savants dès 1643. Après les affres de la Fronde, il accepte l’opportunité d’entrer au service de Christine de Suède. Lors du retour au pouvoir de Mazarin, Naudé décide de retourner à Paris, mais il est rattrapé par la mort avant d’atteindre la ville7.

Naudé aura donc fait une brillante carrière de bibliothécaire. La théorisation élaborée dans l’Advis quand le jeune homme en est encore à ses premières armes, lui vaudra une certaine notoriété. En effet, l’ouvrage ne passe pas inaperçu, ce qui ne signifie pas qu’il faisait l’objet d’un engouement général. Jacques Dupuy, conforté dans son avis par Peiresc, juge le jeune homme « bien novice » dans son sujet, qu’il ne semble pas bien maîtriser car il n’a pas encore pu cueillir les fruits de l’entassement bibliographique8. Ses connaissances des réalités qu’il décrit restent d’ailleurs souvent purement théoriques. Naudé développe pourtant de façon précise les principes qui gouvernent la célèbre bibliothèque de Jacques-Auguste de Thou, riche de 9000 éditions9. De loin la plus connue du moment, cette bibliothèque s’inscrit dans une tradition robine de constitution d’importantes collections livresques, qui s’implantent dans l’espace urbain10. En même temps, des personnages moins influents, comme les notaires et les médecins, ont commencé à remplir leurs rayonnages. Par ailleurs, Naudé, qui n’était pourtant guère fortuné, a réussi à rassembler une bibliothèque personnelle remarquable11. Tel fut également le cas d’autres membres de la communauté intellectuelle qui se retrouvaient dans une situation semblable. De fait, les bibliothèques particulières connaissent une grande floraison à un moment où seule l’initiative privée répond aux profondes mutations que connaît l’univers livresque et intellectuel du XVIIe siècle12 : les bibliothèques universitaires n’ont pas su se renouveler en intégrant le savoir humaniste, qui était le fait d’une classe sociale certes cultivée, mais profondément ancrée dans les pratiques des affaires13, alors que les universités restent orientées vers une érudition médiévale. Les bibliothèques ecclésiastiques, de leur côté, sont rongées par les guerres religieuses. En même temps, l’invention de l’imprimerie a sensiblement modifié le rôle joué par le livre dans la vie du savant14 : s’il est vrai que cette innovation technique fixe le savoir dans un état non actualisé, il s’agit aussi d’un vecteur puissant de propagation de l’humanisme. Les textes du passé deviennent beaucoup plus accessibles grâce à la multiplication vertigineuse des exemplaires et peuvent ainsi devenir de vrais instruments de travail pour l’ensemble des lettrés.

Dans un tel contexte, Naudé décrira les règles de fonctionnement d’une grande bibliothèque, qui reste un élément de prestige intellectuel15. Or, les nouvelles élites financières qui émergent récupèrent le livre en tant qu’attribut de savoir. Elles le sortent de l’usage purement intellectuel, pour s’attacher davantage à son état et à ses conditions matérielles de conservation. C’est ainsi que naît le modèle bibliophilique, qui bénéficiera d’un élan particulier au cours d’un XVIIIe siècle parti à la recherche des livres « rares et curieux »16. Cette conception trouvera une concrétisation dans les bibliothèques de cabinet, dont Jean Viardot a établi la typologie et qui se distinguent par l’abandon de certains traits propres à la bibliothèque érudite : un choix de livres particuliers se substitue au rêve de l’universalité. Le cabinet se cantonnera dans une sphère d’intimité de jardin privé. Là où la bibliothèque docte privilégie l’utilité et une certaine austérité, le cabinet détermine d’autres critères orientés vers la beauté, dans un esprit d’esthétisme luxueux17.

Ce serait un leurre de donner des images trop contrastées de ces deux modèles, mais force est de remarquer, à la lecture du traité de Naudé, les références à des pratiques différentes des siennes. De fait, pour Naudé, le livre est « studiorum instrumenta » et non « ornamenta »18. Cette conception implique un usage de la bibliothèque directement lié à une activité intellectuelle d’un type profondément savant, de sorte que Naudé s’oppose à une vision plus bibliophilique du livre. Son témoignage reste néanmoins unique pour la période, comme le souligne Jean Viardot19. La réalité de la bibliothèque de cabinet se discerne d’ailleurs très difficilement en ce début de XVIIe siècle. Par contre, la place des cabinets de curiosités dans le paysage culturel de la connaissance est assurée de longue date. Or, ils comprenaient souvent des livres, de sorte qu’il est possible qu’ils soient à l’origine de certaines attitudes dénoncées par Naudé.

Nous nous proposons dans cet article de confronter les lignes de force de la pensée de Naudé aux pratiques de la société intellectuelle, qui s’illustrent notamment au sein des cabinets de curiosités. Notre analyse s’articulera selon trois axes : l’aspect public que Naudé accorde à la bibliothèque, le caractère universel de celle-ci et son fonctionnalisme sobre.

UNE BIBLIOTHÈQUE PUBLIQUE

L’idée centrale que Naudé développe dans son Advis consiste à vouer la bibliothèque au public. Elle est présente tout au long de l’ouvrage, mais explicitée seulement dans le neuvième et dernier chapitre (« Quel doit être le but principal de cette bibliothèque ») : ce but réside dans l’ouverture au public.

L’attention au public se reflète dans l’organisation même de la bibliothèque. Le système de classement sera analytique, selon les « facultés », parce que ce rangement est le plus intelligible pour les contemporains20. Pour cette même raison, Naudé fera relier ensemble les petites brochures de quelques feuillets traitant d’un même sujet21. Un catalogue bien conçu aidera le lecteur à faire du repérage. Les catalogues des autres bibliothèques ne sont pas uniquement utiles pour la gestion interne, mais permettent aussi de renseigner les utilisateurs22.

Cependant, ce serait un anachronisme d’interpréter l’exigence de Naudé qu’il faille donner accès «au moindre des hommes qui en pourra avoir besoin» comme une exhortation à la diffusion du savoir à travers toutes les couches de la société23. En ce début de XVIIe siècle, le public reste confiné dans les limites mentales du siècle, toujours caractérisé par un degré d’analphabétisme important24. En d’autres termes, le lectorat d’une bibliothèque ouverte à tous est nécessairement docte, composé de citoyens (potentiels) de la République des lettres25. Cette conviction, qui sous-tend l’ouvrage de Naudé, exprime plutôt la revendication d’une élite intellectuelle pas toujours aisée, au sens des analyses de K. Pomian, lequel a montré comment le nouveau vécu de l’invisible à la Renaissance a influencé la stratification sociale.

La Renaissance a procédé à une nouvelle lecture des vestiges du passé et a engendré une nouvelle représentation très forte, chargée d’imaginaire, d’une Antiquité incarnant la perfection. Partant, elle a donné naissance à un nouveau vécu de l’invisible, accompagné de la création de nouveaux « sémiophores »26 : les objets sont chargés d’une nouvelle valeur, qui n’est plus celle de la chose mais de la représentation. Les vestiges de l’Antiquité ne sont plus des débris, mais ils transcendent leur valeur objective pour devenir des symboles d’un idéal auquel le sujet humain doit se référer. L’étude permettant de s’approprier ces pièces demande un savoir spécifique détenu par certaines catégories de personnes, de sorte que la proximité des savants avec l’Antiquité conduit à une réévaluation de leur statut. Un phénomène semblable s’observe pour la création artistique, considérée comme l’un des uniques moyens de dépasser le temps : un mécène peut espérer passer à la postérité à travers la gloire assignée à l’œuvre qu’il a soutenue27. Le prestige lié à ces nouveaux critères établit une nouvelle hiérarchie socio-culturelle valorisant le goût. Telle est la nouvelle doxa, partagée par les différents acteurs. Somme toute, l’art et la connaissance sont devenus des vecteurs majeurs d’un capital symbolique dont le pouvoir réside dans la valeur ajoutée liée à un signifié de supériorité. Dans ce contexte, la collection et la bibliothèque deviennent des matérialisations de capital culturel en tant qu’incarnations du savoir. Comme la richesse économique ne suffit plus pour gagner une position de prestige, les détenteurs de pouvoir et de capital économique entreprennent de collectionner livres et curiosités.

Dans la tradition de l’otium humaniste, l’étude fait partie de la recréation des élites. Le constat vaut tant pour la bibliothèque que pour le cabinet, souvent proches l’un de l’autre28, et qui constituent un lieu majeur des loisirs cultivés. Juste Lipse fait d’ailleurs référence au phénomène culturel de l’otium dans son traité De bibliothecis syntagma29. La contemplation esthétique dans un petit cabinet ou studiolo aménagé à cet effet constitue pour le souverain un mode d’évasion des contingences du monde et du gouvernement. Ces cabinets sont assimilables à des jardins secrets. Leur aménagement est très personnalisé, et l’étroitesse spatiale typique des cabinets les rend inappropriés pour l’accueil de visiteurs30. C. Davenne met d’ailleurs en évidence le caractère intime de tout lieu désigné comme « cabinet », que ce soit un cabinet de toilette, un cabinet de médecine ou un cabinet de curiosités dédié à la connaissance31.

Cette image de l’homme cultivé retiré dans un lieu idyllique en compagnie des Muses devient petit à petit un topos, et simultanément une norme. Un foisonnement de traités de savoir-vivre fixe l’image d’un homo universalis qui aime la culture et qui amasse de belles collections32. Sabba da Castiglione, apparenté à l’auteur du Cortegiano, va par ailleurs publier les préceptes pour l’aménagement d’un cabinet de curiosités33. Les premiers vrais cabinets apparaissent ainsi au XVe siècle en Italie, remplis d’objets symbolisant l’art, la curiosité et le travail intellectuel en général34.

Une fois posé le préalable de la valorisation, les collections peuvent aussi devenir un signe extérieur de richesse. Les lois du marché provoquent effectivement une hausse de prix dès qu’une catégorie d’objets se voit particulièrement valorisée. La charge symbolique de l’objet entraîne ainsi un accroissement de sa valeur économique. Par exemple, du moment que les estampes, longtemps considérées comme insignifiantes, seront reconnues comme dignes d’intérêt par le milieu intellectuel, les classes possédantes récupèrent cette passion, ce qui entraîne raréfaction et surenchérissement35. En conséquence, les savants se voient coupés de l’accès aux objets et à l’information véhiculée par ceux-ci. Le succès de la classe intellectuelle constitue donc en même temps sa condamnation, puisque la reconnaissance par les couches supérieures de la société passe à travers une réappropriation matérielle par l’élite de l’argent. D’où la revendication de Naudé, de collections accessibles à tous : il défend une classe intellectuelle parfois dépourvue de moyens financiers et dont les membres ne sont pas tous assez renommés pour être admis chez les grands du moment. Dans les années 1580 du moins, le problème semble même se poser dans la bibliothèque thuanienne, dont la devise « Ut prosint aliis » semble contraster avec une certaine exclusivité, relevée par I. De Smet et illustrée par un poème humoristique d’un lecteur déçu de se retrouver devant une porte fermée36. Aussi longtemps que les collections, livresques ou autres, restent cloisonnées dans la sphère privée, l’accès au savoir est toujours conditionné par la qualité des contacts. En effet, ce sont les couches supérieures de la société qui ont la possibilité de rassembler des collections, et leurs visiteurs appartiennent nécessairement à un cercle relativement restreint. Les lettrés dépendent donc des détenteurs de capital économique, d’autant que le coût du livre reste élevé37.

Le concept de la bibliothèque ouverte à tous commence à faire une percée avec la création d’institutions comme la Bodleian Library d’Oxford ou la Biblioteca Ambrosiana fondée à Milan par Borromée, qui se voulaient explicitement publiques. Ces exemples restent néanmoins extrêmement rares, et la majorité des bibliothèques privées n’étaient accessibles que de manière sélective. Si les savants renommés pouvaient généralement y accéder assez aisément, il n’en allait pas de même pour les intellectuels en devenir, pour lesquels l’accès au livre restait difficile. Les élites financières pratiquaient une gestion de l’ouverture traduisant une logique de maintien de pouvoir face à une réévaluation des positions sur l’échelle sociale38. L’ouverture au public fonctionne en fait comme un traité de paix sociale, en tant qu’accord sur la valeur des objets et sur leur signification, et dans un esprit d’intérêt réciproque39. Les élites intellectuelles ont besoin de la puissance économique des riches, qui peuvent d’ailleurs, le cas échéant, pourvoir à leur subsistance par le biais du mécénat40. Inversement, la fréquentation des savants donne aux riches une légitimation culturelle devenue indispensable. L’ouverture devient ainsi un moyen de gérer un capital social activant le capital symbolique potentiel de la collection.

Naudé est pleinement conscient de cette dépendance mutuelle. D’un côté, le jeune bibliothécaire dresse une argumentation destinée aux élites économiques et mettant en évidence le prestige culturel et symbolique que confère une bibliothèque. Il cite à cet effet la façon dont Pline parle de son entreprise historique : le projet de Pline et la bibliothèque du président de Mesmes manifestent le même but, à savoir, celui de « tirer de l’oubly » les grands hommes, pour que ceux-ci, qui n’auraient pas dû mourir, vivent éternellement41. Pour atteindre cet objectif, le président de Mesmes peut prendre l’exemple de tant d’autres grands personnages, ce qui lui confère, à lui aussi, une gloire éternelle. A ce propos, Naudé ne cite pas uniquement Thomas Bodley et Richard de Bury, mais aussi les rois d’Égypte et de Pergame, Luculle, Charlemagne, François Ier42.

La même argumentation se retrouve très exactement chez Gabriel Kaltemarckt donnant des conseils à l’électeur de Saxe Christian I sur la constitution d’une Kunstkammer susceptible de lui apporter une distinction qui trouve son exemplification dans le renom transséculaire des collections des rois d’Égypte et de Pergame43. Le raisonnement de Naudé est adopté par les classes possédantes, ce qui est illustré par le cas extrême de l’achat d’une bibliothèque pour que celle-ci figure dans l’inventaire après décès. En réalité, le détenteur de la bibliothèque ne doit donc pas nécessairement se servir de cette collection et peut en déléguer la gestion à un bibliothécaire employé, ce qui marque la dissociation entre le bénéficiaire du capital symbolique et l’objet qui en permet la constitution. L’image est cependant plus nuancée, comme le montrent Jacques-Auguste de Thou ou Mersenne, hommes très cultivés et d’une grande érudition. Séguier, dont la bibliothèque est facile d’accès, utilise ses livres et possède de réelles connaissances : sa bibliothèque fonctionne comme un véritable « centre de documentation »44. Cependant, en même temps, la galerie accueillant la bibliothèque, magnifiquement décorée d’allégories de la main de Simon Vouet, joue le rôle de salle de réception45. C’est là un indice que l’ouverture au public n’était pas forcément dénuée d’une certaine volonté d’ostentation. Les possesseurs des cabinets de curiosités avaient souvent, eux aussi, un intérêt réel pour leur collection, comme dans le cas de Rodolphe II, vrai connaisseur d’art et qui se plaisait à être entouré d’artistes46.

D’un autre côté, il est exclu pour Naudé que la possession de la bibliothèque constitue, en soi, le moyen d’une acquisition durable de capital culturel et d’une position socioculturelle équivalente. Pour lui, ce sont la qualité et l’utilité que le public va reconnaître à la bibliothèque qui deviennent le motif de distinction intellectuelle et culturelle. Il défend donc l’idée d’un pouvoir lié au jugement des lettrés, quelle que soit leur fortune : les savants participent à la génération de l’estime et du prestige, ce qui constitue un parti pris très fort dans le contexte de la mutation des stratégies de légitimation sociale.

C’est pourquoi son optique est diamétralement opposée à celle d’un cabinet fermé au public, destiné uniquement au plaisir de son riche propriétaire. En même temps, Naudé aurait certainement approuvé Francesco I de Medici qui décida d’abandonner son petit stanzino constitué au Palazzo Vecchio pour le placer dans la Galleria dei Uffizi, plus accessible au public. Si de tels exemples ne correspondent pas à l’image prototypique du cabinet comme un lieu clos, il s’agit d’une réalité à ne pas nier, d’autant plus que la recherche récente évolue vers une perception plus nuancée des cabinets, plus accessibles qu’on ne l’avait cru47.

UNE BIBLIOTHÈQUE UNIVERSELLE

Le caractère essentiel de l’ouverture au public génère la contrainte de l’universalité, au sens d’une couverture totale du savoir48. La grande bibliothèque docte du XVIIe siècle était une bibliothèque encyclopédique, à l’instar de la bibliothèque thuanienne, qui embrassait toutes les disciplines49. En effet, dans une bibliothèque de type « public », chacun doit trouver son compte. C’est pourquoi Naudé prône une bibliothèque « universelle », de type encyclopédique. Tout ouvrage, bon ou mauvais, est susceptible d’être recherché un jour par quelqu’un. Il ne faut donc « rien négliger de ce qui peut entrer en ligne de compte et avoir quelque usage, à l’égard de vous ou des autres »50. Quand le lecteur trouve finalement l’ouvrage tant convoité, la bibliothèque et son propriétaire seront hautement appréciés. En d’autres termes, les collections doivent être conçues en vue du contentement d’un nombre maximal de personnes.

Le caractère encyclopédique de la bibliothèque naudéenne se remarque très nettement dans le développement des collections. Tous les grands domaines du savoir seront couverts, le bibliothécaire y intégrant tous les livres des auteurs majeurs, dans un choix d’éditions de référence. Naudé est très attaché aux documents en langue originale, parce qu’il pense qu’ils donnent l’accès le plus direct et le plus fiable aux idées de l’auteur. Une bibliothèque ne peut cependant pas se passer de traductions, nécessaires pour ceux qui ne maîtrisent pas les langues étrangères51. Les textes primaires seront accompagnés des meilleurs commentaires. De plus, les meilleurs travaux sur divers sujets précis doivent intégrer les collections, qui seront complétées par un éventail de traités particuliers. Enfin, le bibliothécaire doit veiller à incorporer les matières généralement ignorées.

Naudé poursuit son rêve d’une bibliothèque encyclopédique de façon très conséquente. Comme la bibliothèque doit donner la vue la plus complète possible de la réalité et du développement du savoir, elle n’est pas uniquement le sanctuaire où se déploie la somme des connaissances, mais fournit aussi la matière des polémiques dans les différentes domaines. Elle accueille le savoir incertain, les assertions non prouvées, en tant que lieu symbolique et physique des débats de la recherche contemporaine. De façon plus générale, l’idée est à relier à la thèse centrale du libertinage érudit, dont Naudé fournit une traduction bibliothéconomique52. Le libertin est un sceptique au jugement critique et dont la pensée prend forme par la comparaison des différentes tendances. Comme le remarque Claude Jolly, cette attitude se détache du raisonnement scolastique des autorités pour s’inscrire dans une lignée plus moderne53.

C’est pourquoi Naudé laisse la parole aux anciens comme aux modernes. Il est convaincu de vivre dans un siècle riche en nouvelles découvertes54. Pourtant, il s’insurge aussi contre ceux qui sont si « embeguinez de tous les nouveaux livres, qu’ils négligent (…) les anciens », puisque les contributions des anciens au savoir sont restés inégalés dans plusieurs domaines55. De façon plus radicale, la bibliothèque de Naudé se doit d’inclure les idées fausses et même la magie, à laquelle Naudé s’oppose pourtant farouchement. Aussi chimériques et dangereuses que soient ces conjectures occultes, elles n’en sont pas moins les détails permettant l’accomplissement final du microcosme, comme les épines sont caractéristiques des roses56. Le même raisonnement s’applique aux hérétiques, aux religions nouvelles, dans un esprit irénique et tolérant, qui met en avant les qualités intrinsèques des hérétiques57. Par ailleurs, Naudé soutient que leurs raisonnements peuvent contenir des germes de vérité. De fait,

il y a bien de l’apparence (…) qu’excepté les passages controversez ils peuvent quelque fois bien rencontrer sur les autres, comme en beaucoup de traictez indifferents sur lesquels ils travaillent souvent avec beaucoup d’industrie & de félicité58.

L’idée sous-jacente est celle d’un travail scientifique sans a priori, prêt à examiner toutes les idées dont la valeur se déterminera dans la confrontation59. Une telle bibliothèque de type public, où tous les savants doivent trouver les différents textes pertinents sur leur sujet, devra aussi mesurer sa qualité en termes quantitatifs : ce mode de fonctionnement demande de très grandes quantités d’ouvrages60. De ce point de vue, Naudé s’oppose à Sénèque, pour qui l’excès nuit en tout, aussi en affaire de bibliothèques : Quo mihi innumerabilis libros & bibliothecas, quarum dominus vix tota vita sua indices perlegit. La parcimonie du stoïcisme s’applique au livre comme elle s’applique à l’alimentation, dont le but est d’assouvir la faim, ou à la boisson, qui ne sert qu’à apaiser la soif. Les livres possédés doivent être ceux qui sont lus, alors que les propriétaires des grandes bibliothèques ont une telle quantité de livres qu’une vie ne leur suffit pas pour lire ne fût-ce que tous leurs titres. Naudé invoque explicitement le public comme argument contre Sénèque : cette grande quantité de livres n’est préjudiciable que pour l’individu isolé ne partageant pas ces instruments de travail, ou pour celui qui cherche à briller à travers sa bibliothèque. Par contre, la communauté des savants dans son ensemble, l’humanité, a besoin de bibliothèques de la taille de l’Alexandrine, pour appréhender le savoir dans sa totalité. Les impératifs d’universalité et d’ouverture au public que Naudé fixe aux bibliothèques répondent à des logiques qui leur sont propres, mais se renforcent aussi mutuellement, trouvant l’une dans l’autre leur justification. L’universalisme n’est pas pour autant exclusif à Naudé : le XVIIe siècle est animé par l’esprit encyclopédique. L’idée d’universalité était déjà centrale chez Conrad Gesner, tout comme elle était largement présente dans l’Historia literaria de Francis Bacon.

Mais un autre lieu central pour la connaissance au XVIIe siècle, le cabinet de curiosités, ambitionne lui aussi d’embrasser l’univers dans sa totalité. Dans ces cabinets de curiosités, conçus comme un microcosme, toutes les parcelles de l’univers seront représentées. Le curieux s’intéresse à l’œuvre de Dieu et de la nature comme à l’œuvre humaine, aux naturalia tels que les pierres, les papillons et les insectes comme aux artéfacts tels que les médailles ou les tableaux. Les collections homogènes semblent avoir été des raretés, vu que le collectionneur du XVIIe siècle se plaçait généralement au-dessus de nos clivages disciplinaires, pour se plonger dans une prodigalité bien éclectique61. Un exemple éloquent est celui de Pierre Borel, médecin de Castres, qui a constitué une collection à dominante « histoire naturelle », ce qui se remarque dans la finesse de la classification62. Les raretés de l’homme, qui occupent la position première, sont suivis par les bêtes « à quatre pieds » et par les classes rattachées à l’élément aquatique, poissons, coquillages et « autres choses marines » telles que coraux. Les autres domaines du vivant sont représentés par des catégories comme celles des insectes et des serpents, et les classes fort détaillées des plantes et des racines, des feuilles, des fleurs, des semences… Le cabinet ne manque pas de pierres et de minéraux, mais comprend aussi antiquités et des artificialia tels que les instruments de musique et quantité de miroirs. Par ailleurs, ces objets viennent des horizons géographiques les plus lointains : les fruits viennent des Indes, du Canada et de Turquie. Somme toute, ce cabinet matérialise bien l’inscription qui se trouve à l’entrée: «microcosmum, seu omnium rariorum compendium »63.

De façon générale, le motif de l’abrégé du monde, ou de teatrum mundi, scande les descriptions de cabinets du XVIIe siècle64. Pour atteindre à cette universalité tant convoitée, les curieux utilisent des procédés de symbolisation et de rhétorique qui transforment la collection en miroir de l’univers. Le jeu d’allusions évoquera ce qu’il est impossible de présenter matériellement. Chez Borel, « quatre liqueurs en une fiole » métaphorisent les quatre éléments, évoqués dans l’inscription liminaire65. En Allemagne, l’imaginaire de la synecdoque rend possible la naissance de la vogue des Handsteine, artéfacts de différents spécimens minéraux formant des maquettes de paysages, dans laquelle une pierre pouvait même symboliser l’ouverture d’une mine66.

En fait, de telles constructions allant « des minéraux et des diamants aux rochers où ils sont enfouis » incluent un caractère tautologique67. D’une manière générale, au XVIe siècle, la répétition se trouve au cœur de l’épistémè axée sur la ressemblance, et ce modèle survit au début du XVIIe siècle. Le savoir repose sur l’interprétation et reste autoréflexif. Ces principes cognitifs se déploient de façon exemplaire dans les cabinets de curiosités : sur la base de la similitude, des liens purement allusifs se tissent parmi les objets des amateurs. Chaque renvoi qui s’établit fait en même temps référence à une multitude d’autres éléments. D’où la profusion des cabinets, où se crée un réseau polysémique dont la richesse sémantique donne le vertige68. Le cabinet s’offre ainsi à plusieurs lectures, dans son organisation physique, dont la structure contrainte et nécessairement linéaire d’un catalogue ne saurait rendre compte. Borel présente son cabinet sous l’angle des classes du règne de la nature, mais une présentation à travers les quatre éléments ou les quatre coins du monde aurait été tout aussi pertinente69. Le spectateur se perd devant ce théâtre de désordre. Pourtant, une structure narrative implicite ouvre une perspective d’unification à travers un programme éventuellement de nature iconographique. La collection englobe le tout, à travers un agencement déterminé par son propriétaire, qui suggère un jeu d’analogies. Chacun de ses ordres possibles est fonction de l’unité fondamentale sous-jacente. L’amateur peut ainsi régner sur l’univers, suggérant tour à tour l’intermittence des quatre éléments ou des saisons. Cette fantaisie de domination de l’ordre de la nature est très séduisante pour les représentants du pouvoir temporel70.

Somme toute, Naudé partage avec son siècle, en particulier avec les cabinets de curiosités, cette aspiration au savoir total. En même temps, force est de constater une profonde divergence dans les conceptions de l’universalité. Le microcosme du cabinet de curiosités prend forme à travers un assemblage d’objets représentant toutes les composantes du monde71. Les antiquités, les médailles, les estampes se juxtaposent aux pierres, aux papillons, aux insectes, mais aussi aux basilics et aux roses de Jéricho72. C’est que les manifestations les plus rares et les plus bizarres des différentes parcelles du monde sont considérées comme un summum de leur genre et deviennent ainsi emblématiques du tout73. Aussi longtemps que règne la ressemblance, chaque élément du microcosme possédera son équivalent au niveau du macrocosme74.

Naudé, par contre, suit un programme listant les auteurs incontournables, et il se propose de réunir les meilleurs écrits sur les différents sujets : le contenu de sa bibliothèque est en quelque sorte préétabli. Pierre Borel, lui, possède dans sa collection des poissons étranges et fascinants, comme les rémora, dont il était supposé qu’ils étaient capables d’arrêter les navires, ou un marteau de mer à la physionomie inouïe75. L’opposition entre Naudé et Borel est profonde : un Naudé collectionneur aurait trouvé logique de rassembler l’ensemble des espèces de poissons, des plus communes aux plus exceptionnelles. La plupart des cabinets sont très éloignés de ces conceptions, à cause de leur organisation nébuleuse.

Même s’il faut nuancer le propos, comme le montrent les exemples d’Aldrovandi et de Linné, qui ont adopté des conceptions plus systématiques, la disposition énivrante d’un cabinet de curiosités est de façon générale diamétralement opposée à l’esprit des prescriptions classificatoires naudéennes. Le jeune bibliothécaire rejette les buffets de rangement de La Croix du Maine, ainsi que le classement « de la Morale, des Sciences, & de la Dévotion », car il est d’avis que « la Mesmoire artificielle gaste & pervertit la naturelle »76. Lorsque l’esprit doit entrer dans le moule d’un schéma trop sophistiqué, le risque de surcharge est immanent à la réflexion. En conséquence, Naudé préconise un rangement par facultés, et les diverses disciplines doivent être subdivisées selon leurs composantes organiques, dont le bibliothécaire devra avoir une certaine connaissance. Les livres sur un même sujet se trouvent rangés ensemble, dans un ordre qui va du général au particulier. L’organisation répond à une très grande systématicité, contrairement aux associations enchantées des cabinets de curiosités.

Cet agencement est conçu pour alléger la mémoire, quand les cabinets de curiosités, souvent associés aux théâtres mnémotechniques, forment l’itinéraire sinueux d’un parcours visuel permettant de retrouver les concepts de la connaissance selon que l’œil se repose sur les différents objets, conformément aux théories de Cicéron. Cet entraînement de la mémoire s’oppose à la bibliothèque de consultation, qui rend l’oubli licite, de par son ordre rigoureux. La bibliothèque de Naudé évite le surpoids mémoriel pour retrouver la source appropriée qui fera, elle, l’objet d’une analyse philologique, ou qui sera confrontée à d’autres sources. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre l’importance des dictionnaires et des ouvrages de synthèse. L’être humain n’a pas le temps de tout étudier en approfondi. Les ouvrages de synthèse permettent de baliser le terrain pour celui qui veut s’appliquer réellement à une recherche plus pointue, mais ils donnent aussi l’occasion à certaines personnes de parler d’un sujet sans avoir lu davantage. Par ailleurs, puisqu’il n’est pas

permis à un chacun (…) de pouvoir travailler à ses propres frais (…) sans rien emprunter d’autruy,

un peu d’imitation ne fait sans doute pas de mal, du moins aux dires de Naudé77. De façon plus générale, toute la bibliothèque de Naudé constitue une incarnation physique de l’ouvrage de synthèse ou de consultation. C’est dans ce contexte qu’il faut replacer ses paroles, quand il dit que le propriétaire d’une bibliothèque file le bonheur parfait,

puis qu’il se peut à bon droit nommer (…) cosmopolite ou habitant de tout le monde, qu’il peut tout sçavoir, tout voir, & ne rien ignorer, bref puis qu’il est maistre absolu de ce contentement, qu’il le peut mesnager à sa fantaisie, le prendre quand il veut, (…) sans travail & sans peine il se peut instruire78.

Cette phrase rend un épicurisme épistémologique proche de celui des cabinets de curiosités, qui permettent de faire le tour du monde à l’intérieur d’une chambre, comme le dit Trichet :

Toi qu’un désir es point d’avoir la cognoissance/ Des secrets merveilleux de tous les élémens/

Sans aller plus avant tu peux à suffisance/ Te rendre satisfaict & abbréger le temps/ Qu’il faudroit à parcourir le monde/ Pour voir les raretés de la terre et de l’onde79.

Naudé, par contre, exprime l’angoisse épistémologique, mis en évidence par J.-M. Goulemot en même temps que l’épicurisme épistémologique80. Cette idée devient encore plus claire quand le jeune libertin érudit affirme

que la briefveté de nostre vie & la multitude des choses qu’il faut aujourd’huy sçavoir pour estre mis au rang des hommes doctes ne nous permettent pas de pouvoir tout faire de nous mesme81.

De fait, la connaissance totale est devenue une utopie, quand l’époque assiste à une explosion du savoir, exaltant les « progrès de l’esprit humain »82. Le revers de la médaille, c’est que tout ce savoir, accumulé dans d’énormes quantités de livres qui s’impriment chaque jour, devient de moins en moins maîtrisable83.

Voilà pourquoi Naudé conçoit la bibliothèque comme un réservoir de connaissances, à portée de main, où le savant pourra retrouver l’information qu’il ne sait plus mémoriser.

Il est donc essentiel pour Naudé que toute la communauté intellectuelle puisse vite se repérer dans la bibliothèque pour trouver l’ouvrage approprié pour ses études. Ce mode d’organisation freine la très haute personnalisation propre aux cabinets de curiosités, où les amateurs peuvent disposer des objets à leur guise. Naudé limite la liberté du propriétaire, l’ordre étant prédestiné de la même façon que le contenu : il ne s’agit pas de la jouissance intellectuelle du propriétaire, mais du confort des visiteurs. Ce sont les lettrés qui fournissent les critères d’évaluation des ouvrages et de la bibliothèque. Le premier conseil de Naudé pour le choix des acquisitions est de demander l’avis de ceux qui s’y connaissent, c’est-à-dire les gens de lettres84. Cette procédure implique une reconnaissance explicite de l’expertise des savants, qui possèdent de ce fait un pouvoir propre, reflété dans cette bibliothèque où ils occupent la position centrale.

UNE BIBLIOTHÈQUE DESTINÉE À L’ACTIVITÉ SAVANTE

La bibliothèque de Naudé apparaît comme un lieu hautement systématique. Cet aspect de sa pensée n’a pourtant guère suscité la polémique parmi les chercheurs, qui soulignent le caractère austère de la bibliothèque, fait d’un libertin érudit, vivant dans l’abstinence et dont les excès sont de nature exclusivement philosophique et spirituelle85. Une telle ascèse est évidemment difficilement compatible avec les cabinets de curiosités, qui se mettaient en scène dans le luxe. Par contre, pour Naudé, qui se serait abstenu de rédiger le huitième chapitre de son ouvrage sur la décoration, l’ornementation est secondaire, comme tout ce qui relève du monde des apparences. Dans le choix des livres, le contenu prime : c’est une erreur de donner la préférence aux gros volumes aux dépens de petits bouquins, parfois autrement plus intéressants86. Le jeune bibliothécaire s’oppose au luxe matériel dans sa bibliothèque à l’esthétique sobre. Il s’oppose à l’abondance des cabinets et refuse les entassements d’une multitude d’objets tels que des statues dont le nez ou l’oreille sont cassés87. De même faut-il (d’après lui) limiter la part du budget consacrée à la reliure, pour investir plutôt dans l’achat de livres.

Pourtant, Naudé attache une certaine importance à la reliure. A un premier stade, il est clair qu’il rejette les frivolités, quand le jeune bibliothécaire affirme qu’il est préférable d’avoir

grãde quantité de livres fort bien reliez à l’ordinaire, que d’en avoir seulement plein quelque petite chambre ou cabinet de lavez, dorez, reglez, & enrichis avec toute sorte de mignardise, de luxe & de superfluité88.

Par contre, il accepte les reliures en basane, en veau ou en maroquin, sur lesquels quelques fleurons ou un filet sont appliqués. Il comprend, avec Typotius : « Ignota populo est & mortua pene ipsa virtus sine lenocinio »89. Nous ne vivons point dans un monde idéal, et mieux vaut être conscient de l’inévitable participation de la présentation extérieure à tout jugement.

Un grand savant comme Scaliger considérait la reliure de cuir comme une nécessité et s’irritait face à un exemplaire non relié90. Dès 1577, un édit avait été pris contre le luxe, stipulant qu’

à l’esgard des livres, il est permis d’en dorer la tranche à l’ordinaire et de mettre un filet d’or seulement à la couverture, avec une marque au milieu de la grandeur d’un franc au plus91.

Une telle mesure est révélatrice de la culture du goût qui s’était installée autour du livre au XVIe siècle, menant notamment à une personnalisation des exemplaires, aussi chez les érudits fortunés92. Si, au XVIIe siècle, la reliure en cuir est relativement commune93, la vogue des reliures à la Du Seuil marque un retour à une simplicité accrue94. A l’époque de Naudé, ce regain d’austérité deviendra un trait distinctif de la noblesse95.

L’exemple du président de Thou illustre bien cette évolution : le grand robin abandonne les somptueuses reliures à la fanfare aux alentours de 157796. Si, dans la bibliothèque thuanienne, la prédominance est, de façon générale, accordée à la qualité intrinsèque des écrits, l’aspect physique du livre reste important. Les sommes consacrées à la reliure dans la bibliothèque thuanienne constituent une source d’éblouissement chez les contemporains97. Jacques-Auguste de Thou possède de nombreux types différents de reliures, à la grecque, à semé, etc., qui peuvent remplir des fonctions diverses : la reliure permettra notamment de distinguer une édition, une langue ou un auteur spécifiques98. Dans ce contexte, il importe de remarquer l’importance qu’accorde le président de Thou à l’état de ses exemplaires. Ce grand seigneur avait en effet un rapport « complet », avec le livre, objet de connaissance à charge esthétique.

En ce qui concerne Naudé, il prise la sobriété, même en admettant une certaine décoration. Pourtant, le jeune bibliothécaire touche à plusieurs reprises la question de la reliure dans son ouvrage : c’est que, en réalité, la fonction de la reliure dépasse la simple ornementation. Dans la bibliothèque murale, où les livres se présentent par leurs dos, sa fonction décorative est évidente tant pour chaque exemplaire que pour la bibliothèque dans son entièreté. Cette double dimension ornementale joue chez Jacques-Auguste de Thou, qui avait des reliures décorées au pochoir, donc peu coûteuses mais aux couleurs resplendissantes99. Néanmoins, la reliure possède une autre fonction, primordiale, quoique largement négligée par les commentateurs de Naudé. Celui-ci confie ses livres à un relieur pour « entretenir tout en l’estat nécessaire à l’ornement du lieu & à la conservation des volumes »100. De fait, son premier précepte bibliothéconomique concerne le bon entretien des exemplaires : un relieur sera chargé de recoudre les tranchefils pour empêcher le morcellement des exemplaires, et de rassembler les petits écrits en recueils, pour éviter leur dispersion. Naudé est pleinement conscient qu’une bonne politique de conservation est essentielle à la constitution d’une bibliothèque, et la reliure acquiert dans cette perspective un statut utilitaire. Elle contribue en outre à la bonne organisation de la bibliothèque, puisqu’elle permet de relier ensemble divers écrits sur un même sujet, et donc de faciliter l’orientation des lecteurs.

L’ORNEMENTATION DU LIEU

L’utilité constituera toujours l’impératif par excellence pour l’organisation du local même de la bibliothèque. Naudé rejette le luxe des lambris dorés, des matériaux coûteux comme le marbre et l’ivoire, et des rayonnages en cèdre. Il argumente d’ailleurs qu’une telle apparence n’est plus de mise, ce qui n’est pas innocent comme affirmation : l’aspect physique de la bibliothèque naudéenne se caractérise par une simplicité toute pragmatique. Les planches seront pourvues de « quelque petite serge, bougran ou canevas accommodé à l’ordinaire avec des cloux dorez ou argentez », qui sert de protection contre la poussière101. Le dispositif combine utilité et une certaine esthétique, aux dires de Naudé.

Les objets d’ornementation constituent sans doute une clé de passage entre cabinet de curiosités et bibliothèque – choisie ou non –, car leur emplacement peut paraître naturel dans la sphère bibliothéconomique comme dans celle du collectionnisme, au sens large. Le catalogue rédigé par Christopher Merrett en 1600 pour le musée du London College of Physicians illustre bien le rapprochement possible entre les différents types d’institutions. Le document compte 43 pages, dont 40 sont consacrés aux livres102. Pour le reste, les médecins possédaient des instruments chirurgicaux et d’autres outils liés à la fonctionnalité du collège, mais aussi des œufs d’autruche, des potirons et différentes curiosités marines.

Du côté des bibliothèques, naturalia et artificialia ont pleinement droit de cité au XVIIe siècle. Les papillons séchés ne détonnent pas, les médailles et les estampes sont largement répandues. Les médailles, d’une importance capitale pour un cabinet de curiosités, possédaient un vrai rôle documentaire, ne fût-ce qu’à cause de leur valeur iconographique. Naudé accepte cet état de choses. S’il est d’avis qu’il est inutile d’encombrer la bibliothèque de toutes sortes de vieilleries et d’antiquités en morceaux103, il y admet plusieurs autres types d’objets qui y trouveront leur emplacement dans un but bien réfléchi. D’une part,

les instruments de mathématiques, globes, mappemonde, sphères, peintures, animaux, pierres, & autres curiositez tant de l’art que de la nature, qui s’amassent pour l’ordinaire de temps en temps & quasi sans rien mettre & desbourser104.

D’autre part, les portraits des grands esprits du passé sont tenus pour très utiles. Leur but décoratif ne fait aucun doute, témoin leur insertion dans le chapitre sur l’ornementation de la bibliothèque. Pourtant, les choix dans ce domaine forcément lié au paraître sont révélateurs d’un réel souci d’utilité, dans une tradition remontant, selon Antoine Schnapper, à Varron, avec les Hebdomades ou le Livre des images105. Elles contribuent en effet à l’élévation de l’esprit: les grandes figures du passé possèdent une valeur exemplaire, constituant une source d’inspiration pour les recherches du savant. Telle est aussi la conviction de Naudé, qui a pu prendre l’exemple sur les 134 tableaux accrochés chez de Thou, mais aussi sur Peiresc, dont la bibliothèque donne à voir la physionomie de savants et des représentants du pouvoir spirituel et temporel, avec Urbain VIII, Pinelli, Barclay, Holstenius, Aléandre, Charlemagne… De même, à la Bodleian Library, une frise de portraits sert de points de repère106.

La présence d’instruments de mathématiques et de globes dans les bibliothèques est ancienne, mais leur statut devient progressivement plus complexe pour dépasser la simple décoration. Aux XVe et XVIe siècles, la Sorbonne possédait des instruments, tels qu’un astrolabe et un équatoire, qui étaient parfois empruntés107 : le prêt fournit un indice d’une autre approche, plus fonctionnelle, de ces outils, qui s’instrumentalisent à nouveau. Souvent considérés comme des pièces de collection par les amateurs de cabinets, les instruments ne sont pourtant pas répertoriés dans le catalogue de la bibliothèque108. En d’autres mots, ils ne sont pas considérés comme des pièces constitutives du fonds. Pour l’homme du XVIIe siècle, de tels objets se situent en fait dans le prolongement des livres dans l’univers de la connaissance109. Dans le domaine de la géographie, les globes terrestres et célestes, les cartes, les plans de villes, les tableaux évoquant le voyage, etc., fournissent des informations additionnelles à celles des livres. De même, les papillons séchés et les pierres, les « curiosités de l’art et de la nature » des recommandations de Naudé110, peuvent posséder une valeur illustrative pour les études et compléter la connaissance livresque. La notion de l’utilité se retrouve à travers la volonté d’une observation plus complète du monde111.

Les objets énumérés par Naudé sont aussi parfaitement à leur place dans les cabinets de curiosités. Reprenons l’exemple de Pierre Borel : outre son considérable assortiment de curiosités naturelles, il possède un grand nombre de tableaux représentant entre autres des hommes illustres et des paysages, des cartes géographiques et des instruments tels que microscope, thermomètre et boussole112. De façon générale, les instruments scientifiques sont largement attestés : ils se retrouvent notamment dans les collections de Trichet et de Bédon, lequel a des baromètres, des pendules et des instruments mathématiques, à côté de globes de Mercator et de Blaeu113. En ce qui concerne les portraits, une collection très connue est celle de Paolo Giovio, qui ne concernait pas seulement auteurs et savants, mais aussi des chefs militaires et des dignitaires des pouvoirs spirituel et temporel. La France du début du XVIIe siècle connaît d’éminents collectionneurs de portraits comme Catherine de Médicis et Henri IV114.

Si les objets décoratifs admis par Naudé peuvent occuper leur place dans un cabinet, l’inverse n’est pas nécessairement vrai, les curiosités se réduisant parfois à des objets médiocres. La nature pléthorique du cabinet se marie assez mal avec les conceptions studieuses de Naudé, qui prône la sobriété et n’approuverait sans doute pas la présence de basilics ou de cornes de licorne. A son opposé, les curiosités d’un Pierre Borel touchent à la magie : ne possède-t-il pas un dragon, un chat à deux têtes, de l’or liquide, une mèche inextinguible et même un livre qui change d’aspect et de contenu à chaque fois qu’il est ouvert ?115 Les cabinets de curiosités témoignent certes de la fascination pour le savoir et la découverte, mais, selon la formule de Gaston Bachelard décrivant l’esprit préscientifique du XVIIe siècle, « loin d’aller à l’essentiel, [ils] augmente[nt] le pittoresque »116. Loin d’être des lieux permettant une recherche cohérente, ils affichent d’abord un caractère de sociabilité mondaine.

Pourtant, il n’est pas impossible que tel cabinet favorise la recherche scientifique : on sait que Rodolphe II a réuni un ensemble impressionnant d’instruments et attiré par ce biais des scientifiques de premier ordre, comme Tycho Brahé117. Guy Patin souligne combien leur « secours réciproque oblige presque toujours de joindre les cabinets d’Antiquité aux bibliothèques »118. Et Leibniz prônera, à propos des pièces de collection de Pierre le Grand, qu’elles ne doivent pas être de simples curiosités, mais un moyen de promouvoir les arts et les sciences119. Ce constat explique la proximité spatiale souvent observée entre le cabinet et la bibliothèque : à Bologne, le cabinet d’Antonio Giganti jouxte la bibliothèque et accueille des tables, et Giganti expose des spécimens naturels dans sa bibliothèque120.

La bibliothèque idéale de Naudé, de son côté, a un mode d’organisation et de fonctionnement systématique, et son objet central est de constituer un lieu de travail pour les savants. Si elle reste lieu de rencontres et d’échanges, elle cesse d’être d’abord lieu du paraître et de la distinction. Il est logique que Naudé y prône une décoration sobre, ne retenant que les objets ayant partie liée avec le savoir que le lecteur cherche dans les livres, et non pas les ornements luxueux et superficiels. Au demeurant, un trop grand éclat baroque pourrait détourner le lecteur studieux de son travail121. Ses conceptions s’opposent donc au modèle du cabinet prototypique, c’est-à-dire un amalgame de raretés bizarres rassemblé dans la perspective du plaisir privé d’un individu, qui s’y isole dans un luxe jaloux.

Le modèle bibliothéconomique naudéen préside au processus d’institutionnalisation progressive des musées, qui se forment sur le modèle des bibliothèques122. Dans le domaine des sciences naturelles, une manifestation précoce d’un musée public apparaît en Italie : en 1603 en effet, le studio d’Aldrovandi est transféré au Palazzo Pubblico, qui ne devient pas uniquement le réceptacle de cette collection désormais accessible à tous, mais aussi un lieu de recherches123. Et les collections particulières seront, en 1662, considérées comme un « sépulcre » constituant un obstacle à la « libre communication » de l’art124.

Ces évolutions, qui se dessinent à partir des cabinets de curiosités, sont en parfait accord avec les idées de Naudé. L’essentiel réside pour lui dans l’attitude adoptée vis-à-vis du savoir : la recherche savante, dont la bibliothèque et la collection constituent les instruments, devient une activité scientifique dégagée de sa dimension ludique et mondaine. Naudé adopte ainsi une vision professionnalisante qui s’éloigne fortement de l’idéal de l’honnête homme encore prégnant au XVIIe siècle. Le lettré se distingue du collectionneur riche, qui sélectionne sur la base de critères liés aux apparences mais non recevables pour le savant, lequel revendique une place centrale dans le nouveau paysage intellectuel. En résumé, la bibliothèque de Naudé se construit autour du noyau sémantique « docte », au sens où elle est complètement organisée en fonction des activités des lettrés. Il est essentiel que les savants aient accès aux matériaux nécessaires pour continuer leur travail de recherche : d’où la nécessité d’ouvrir la bibliothèque au public, en plus du programme d’une collection encyclopédique susceptible de répondre aux besoins de tous ses lecteurs. Ce choix reflète la tension née petit à petit entre une certaine forme de dilettantisme et l’activité proprement scientifique. L’opposition de Naudé aux pratiques existantes annonce le nouveau phénomène qui se profile à l’horizon, à savoir l’autonomisation de la science moderne.

____________

1 Nous utilisons l’édition anastatique de 1990 (1644) : Gabriel Naudé. Advis pour dresser une bibliothèque. Reproduction de l’édition de 1644, précédée de « L’Advis, manifeste de la bibliothèque érudite », par Claude Jolly, Paris, Aux amateurs de livres, 1990.

2 Émile Dacier, « En lisant Gabriel Naudé », dans Archives et bibliothèques, 193, 1, pp. 5-9.

3 Robert Lenoble, Mersenne ou La naissance du mécanisme. Paris, Vrin, 1971, p. 44. Le Traicté des plus belles bibliothèques publiques et particulières, qui ont esté, et qui sont à présent dans le monde, de Louis Jacob (Paris 1644, pp. 548-550), est cité par Lorenzo Bianchi, Rinascimento e libertinismo : studi su Gabriel Naudé, Napoli, Bibliopolis, 1996, p. 208.

4 René Pintard, Le Libertinage érudit dans la première moitié du XVIIe siècle, Genève, Slatkine, 2000, pp. 127-129. Sur la notion de libertinage érudit et le courant des lumières radicales proche du libertinage érudit, voir aussi : Jean-Pierre Cavaillé, « Libertinage, irréligion, incroyance, athéisme dans l’Europe de la première modernité (XVIe-XVIIe siècles) », dans Jean-Pierre Cavaillé, dir., Libertinage, irréligion : tendances de la recherche 1998-2002. (Les dossiers du Grihl ). URL : http://dossiersgrihl.revues.org/document279.html. Consulté le 10 avril 2009. Jean-Pierre Cavaillé, « Libertinage ou Lumières radicales », dans Catherine Secrétau, Tristan Dragon, Laurent Bove, dir., Qu’est-ce que les Lumières “radicales”? Libertinage, athéisme et spinozisme dans le tournant philosophique de l’âge classique. (Cauté !), Paris, Éd. Amsterdam, 2007, pp. 61-74. Françoise Charles-Daubert, Les Libertins érudits en France au XVIIe siècle, Paris, PUF, 1998 (« Philosophies », 106). Tullio Grégory, Genèse de la raison classique de Charron à Descartes, Paris, PUF, 2000 (« Épiméthée »). Jonathan I. Israël, Radical enlightenment : philosophy and the making of modernity 1650- 1750, Oxford, Oxford Univ. Press, 2001.

5 Lorenzo Bianchi, « Libertinisme et conservatisme politique : le cas de Gabriel Naudé », dans Tijdschrift voor de Studie van de Verlichting en van het Vrije Denken, 2001, 14/15, p. 395. Lorenzo Bianchi, Rinascimento e libertinism, 1996, pp.109-142. Louis Marin a fourni une étude approfondie des Considérations politiques sur les coups-d’état, dans sa préface à cet ouvrage : Louis Marin, « Pour une théorie baroque de l’action politique », dans Gabriel Naudé, Considérations politiques sur les coups d’État, Paris, Éd. de Paris, 1988. L. Marin va à la recherche de l’aspect baroque de la pensée politique de Naudé. Les idées très subversives que celui-ci développe relèvent d’un savoir interdit. Le secret qui pèse sur ce point sera brisé par la publication de l’ouvrage, même si celui-ci, qui aurait été imprimé en douze exemplaires seulement, est destiné au plaisir exclusif du maître de Naudé, le cardinal Bagni. Les analyses de Marin ont fait l’objet d’une étude par Jean-Pierre Cavaillé, qui a travaillé lui-même sur la notion de dis(simulation) dans l’œuvre de Naudé : Jean-Pierre Cavaillé, « Simulation et dissimulation chez Louis Marin », dans Secret et mensonge. Essais et comptes rendus. (Les dossiers du Grihl), 2007. URL : http://dossiersgrihl.revues.org/ document405.html. Consulté le 28 mai 2009. Jean-Pierre Cavaillé Dis/simulations : Jules-César Vanini, François La Mothe Le Vayer, Gabriel Naudé, Louis Machon et Torquato Accetto : religion, morale et politique au XVIIe siècle. Paris, Honoré Champion, 2002. Le versant bibliothéconomique de cette pensée politique a été étudié par Robert Damien, Bibliothèque et État : naissance d’une raison politique dans la France du XVIIe siècle, Paris, PUF, 1995 (« Questions »).

6 Lorenzo Bianchi, Rinascimento e libertinismo, ouvr. cité, p. 35.

7 Des détails biographiques sont fournis par : Jack A. Clarke, Gabriel Naudé : 1600-1653, Hamden, Archon, 1970. James V. Rice, Gabriel Naudé : 1600-1653, Baltimore, J. Hopkins Press ; London, Humphrey Milford ; Paris, Les Belles Lettres, 1939, pp. 9-46. Claude Jolly, « L’Advis, manifeste de la bibliothèque érudite », dans Gabriel Naudé, Advis pour dresser une bibliothèque, ouvr. cité, pp. xi-xiv.

8 Robert Damien, Bibliothèque et État, ouvr. cité, p. 48. Jacques Revel, « Entre deux mondes : la bibliothèque de Gabriel Naudé », dans Marc Baratin, Christian Jacob, dir., Le Pouvoir des bibliothèques : la mémoire des livres en Occident, Paris, Albin Michel, 1996, p. 244 (« Bibliothèque Albin Michel histoire »).

9 Antoine Coron, « Ut prosint aliis : Jacques-Auguste de Thou et sa bibliothèque », dans Claude Jolly, dir., Histoire des bibliothèques françaises : les bibliothèques sous l’Ancien Régime : 1530-1789, Paris, Promodis, Éd. du Cercle de la librairie, 1988, p. 107.

10 Jean Viardot, « Livres rares et pratique bibliophilique », dans Henri-Jean Martin, Roger Chartier, dir., Histoire de l’édition française. 2, Le livre triomphant : 1660-1830, Paris, Promodis, 1984, pp. 448-450. Henri-Jean Martin, Livre, pouvoirs et société à Paris au XVIIe siècle (1598-1701), nelle éd., Genève, Droz, 1999, p. 480 (« Titre courant »). Lucien Febvre, Henri-Jean Martin, L’Apparition du livre, Paris, Albin Michel, 1958 (« L’évolution de l’humanité », 49).

11 Estelle Bœuf, La Bibliothèque parisienne de Gabiel Naudé en 1630, Genève, Droz, 2007.

12 Jacques Revel, « Entre deux mondes », art. cité, pp. 245-246.

13 Yves Gingras, Peter Keating, Camille Limoges, Du scribe au savant : les porteurs du savoir de l’Antiquité à la révolution industrielle, Paris, PUF, 2000, pp. 179-209.

14 Elizabeth L. Eisenstein, La Révolution de l’imprimé à l’aube de l’Europe moderne, nelle éd., Paris, Hachette, 2003 (« Littératures »). Marshall McLuhan, La Galaxie Gutenberg : la genèse de l’homme typographique, Paris, Gallimard, 1977.

15 Jean Viardot, « Livres rares et pratique bibliophilique », art. cité, p. 448.

16 Jean Viardot, « Naissance de la bibliophilie : les cabinets de livres rares », dans Claude Jolly, dir., Histoire des bibliothèques françaises : les bibliothèques sous l’Ancien Régime : 1530-1789, ouvr. cité, p. 269.

17 Jean Viardot, « Livres rares et pratique bibliophilique », art. cité, p. 456.

18 Naudé, Advis, p. 16.

19 Jean Viardot, « Naissance de la bibliophilie », art. cité, p. 275 ; id., « Livres rares et pratique bibliophilique », art. cité, p. 457.

20 Naudé fournit peu de détails sur la façon dont nous devons interpréter le mot « faculté ». Le sens le plus commun est été celui de « facilité », ou de « puissance » (dictionnaires de Furetière (1690), de Richelet (1680) et de l’Académie (1695). Dans ce même ordre d’idées, le Dictionnaire de l’Académie mentionne le sens de « talent ». Le mot « faculté » possède le sème actuel de « capacité ». Les trois dictionnaires attestent aussi un usage largement équivalent au sens institutionnel que nous connaissons aujourd’hui : il s’agit du « corps des docteurs d’une discipline » (Richelet). La sémantique du mot est donc à relier aux divisions disciplinaires, et c’est ce classement que Naudé préconise.

21 Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 78.

22 Ibidem, pp. 157-158.

23 Ibidem, p. 151.

24 Pendant la période 1686-1690, le pourcentage d’hommes capables de signer est de 29%. Chez les femmes, le nombre de signatures chute à 14%. Voir : Roger Chartier, « Les pratiques de l’écrit », dans Georges Duby [et al.], dir., Histoire de la vie privée. 3, De la Renaissance aux Lumières, Paris, Seuil, 1999, p. 112.

25 Claude Jolly a fait la même remarque concernant la bibliothèque de Thou, dans « L’Advis,… », art. cité, p. x.

26 Krzysztof Pomian, Collectionneurs, amateurs et curieux : Paris, Venise : XVIe-XVIIIe siècle, Paris, Gallimard, 1987 (« Bibliothèque des histoires »), pp. 37-51.

27 Ibidem, pp. 47-51.

28 Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment : collectors and collections from the sixteenth to the nineteenth century, London, Yale Univ. Press, 2007, p. 35.

29 Adalgisa Lugli, Naturalia et mirabilia : les cabinets de curiosités en Europe, Paris, A. Biro, 1988, p. 96. Paul Nelles, « Juste Lipse et l’Alexandrie : les origines antiquaires de l’histoire des bibliothèques », dans Le pouvoir des bibliothèques, ouvr. cité, p. 230.

30 Adalgisa Lugli, Naturalia et mirabilia, ouvr. cité, pp. 32 et 79-86.

31 Christine Davenne, Modernité du cabinet de curiosités. (Histoires et idées des arts), Paris, L’Harmattan, 2004, pp. 89-93.

32 Germain Bazin, Le Temps des musées, Liège, Desoer, p. 56. Adalgisa Lugli, Naturalia et mirabilia, ouvr. cité, pp. 75-93. Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité.

33 Adalgisa Lugli, Naturalia et mirabilia, ouvr. cité, p. 86-88. Germain Bazin, Le Temps des musées, ouvr. cité, pp. 56-57.

34 Patrick Mauriès, Cabinets de curiosités, Paris, Gallimard, 2002, p. 52.

35 Krzysztof Pomian, Collectionneurs, amateurs et curieux, ouvr. cité, p. 55.

36 Ingrid De Smet, Thuanus : the making of Jacques-Auguste de Thou (1553-1617), Genève, Droz, 2006, p. 192 (« Travaux d’Humanisme et Renaissance », 418).

37 Dominique Varry, «Grandes collections et bibliothèques des élites», dans Claude Jolly, dir., Histoire des bibliothèques françaises : les bibliothèques sous l’Ancien Régime : 1530-1789, ouvr. cité, p. 236.

38 Sur l’accès au livre, Henri-Jean Martin, Histoire et pouvoirs de l’écrit, Paris, Librairie académique Perrin, 1988, pp. 324-328 (« Histoire et décadence »).

39 Jean Viardot accentue cette idée de pacte dans « Livres rares et pratique bibliophilique », art. cité, p. 448.

40 Alain Viala, Naissance de l’écrivain : sociologie de la littérature à l’âge classique, Paris, Minuit, 1985.

41 Naudé, Advis, ouvr. cité, pp. 9-10. La citation provient des Epistulae V, 8 : Mihi pulchrum in primis videtur, non pati occidere quibus aeternitas debeatur.

42 Naudé, Advis, ouvr. cité, chapitre I.

43 Barbara Gutfleisch, Joachim Menzhuasen, « ‘How a cabinet should be formed’ : Gabriel Katltemarckt’s advice to Christian I of Saxony on the formation of an art collection, 1587 », dans Journal of the history of collections, 1989, 1, p. 7.

44 Yannick Nexon, « La bibliothèque du chancelier Séguier », dans Claude Jolly, dir., Histoire des bibliothèques françaises, ouvr. cité, p. 149. André Masson cite aussi la Rymaille des plus céllèbres bibliothières de Paris, qui dit : « A celle de Séguier, chancelier, / Pauvre et riche y vont étudier » (André Masson, Le Décor des bibliothèques du Moyen-Âge à la Révolution, Genève, Droz, 1972, p. 95 (« Histoire des idées et critique littéraire », 125).

45 André Masson, Le Décor des bibliothèques, ouvr. cité, p. 97. Yannick Nexon, « La bibliothèque du chancelier Séguier », art. cité, p. 149.

46 Pascal Griener, « Meesters en verzamelaars in Europa », dans Ronald Recht [et al.], Het meesterlijke atelier : Europese kunstroutes : 5de – 18de eeuw, Catalogus Europalia. Tentoonstelling, Paleis voor Schone Kunsten, Brussel, 05.10.2007 – 20.01.2008, Brussel, Mercatorfonds, 2007, pp. 238-243.

47 Arthur, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité, p. 64.

48 Le lien entre l’aspect public de la bibliothèque et la contrainte de l’universalité est rendu très explicite par Ugo Rozzo, « L’Advis di Gabriel Naudé e la nascita della biblioteconomia », dans Bibliofilia : rivista di storia del libro e di bibliografia 97, 1, p. 70.

49 Antoine Coron, « Ut prosint aliis », art. cité.

50 Naudé, Advis, ouvr. cité, chapitre V.

51 La traduction va progressivement acquérir ses titres de noblesse au cours du XVIIe siècle et être reconnue par l’Académie. En termes numériques, le latin domine initialement, aussi après l’invention de l’imprimerie dont on a souligné l’importance pour la codification des langues vernaculaires. Entre 1481 et 1500, le latin est encore la langue cible de 47% des traductions. Le Grand Siècle, dans lequel vit Naudé, assistera à une multiplication de textes des Anciens rendus dans la langue française, qui jouit d’un prestige considérable en tant que nouvelle langue universelle. Le latin reste cependant important comme langue de débat scientifique, notamment dans la correspondance. Sur le thème de la traduction : Christian Ballu, Les Traducteurs transparents : la traduction en France à l’époque classique, Bruxelles, Éd. du Hazard, 2002. Frédéric Barbier, « L’invention de l’imprimerie et l’économie des langues en Europe au XVe siècle », dans Histoire et civilisation du livre, 2008, 4, p. 39. Roger Zuber, Les « Belles infidèles » et la formation du goût classique : Perrot d’Ablancourt et Guez de Balzac, Paris, Armand Colin, 1968.

52 Lorenzo Bianchi, « L’Avis pour dresser une bibliothèque de Gabriel Naudé : prolégomènes pour une bibliothèque libertine ? », dans Littératures classiques, 2008, 66, pp. 137-139. Lorenzo Bianchi, Rinascimento e libertinismo, ouvr. cité, pp. 203-251. Françoise Charles-Daubert, Les Libertins érudits en France au XVIIe siècle, ouvr. cité, en particulier pp. 32-36. Jacques Denis, Sceptiques ou libertins de la premiere moitié du 17e siècle : Gassendi, Gabriel Naudé, Gui-Patin, Lamothe-Levayer, Cyrano de Bergerac, Caen, Le Blanc-Hardel, 1884, p. 17. Tullio Grégory, Genèse de la raison classique, ouvr. cité. Claude Jolly, « L’Advis, manifeste de la bibliothèque érudite », art. cité, pp. xix-xx. René Pintard, Le Libertinage érudit, ouvr. cité, en particulier pp. 454-456.

53 Claude Jolly, « L’Advis, manifeste de la bibliothèque érudite », art. cité, p. xv. Silvana Paula Vidal étudie en particulier la bibliothèque naudéenne comme une réorganisation des connaissances, engagée dans le mouvement encyclopédique. Par sa contribution active au développement du savoir, le projet de Naudé se différencie ainsi de la conception médiévale de la bibliothèque, qui n’était qu’un lieu de conservation. Voir: Silvina Paula Vidal 2002. «Organización del conocimiento en los albores de la Modernidad : los comienzos de la biblioteconomía en el Advis pour dresser une bibliothèque de Gabriel Naudé », communication au colloque El libro en el protopaís (1536-1810) : tradición clásica, cosmovisión eclesiástica e ilustración, Biblioteca nacional, Buenos Aires (Argentine).

54 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, pp. 69-70.

55 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 79.

56 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 50.

57 Hartmut Stenzel, « Gabriel Naudé et l’utopie d’une bibliothèque idéale », dans Volker Kapp, éd., Les Lieux de mémoire et la fabrique de l’œuvre, Tübingen, Gunter Narr, 1993, p. 108 (« Biblio 17 », 80). Robert Damien, Bibliothèque et État, ouvr. cité, pp. 69-77.

58 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, pp. 53-54.

59 Ugo Rozzo, « L’Advis di Gabriel Naudé e la nascita della biblioteconomia », dans Bibliofilia : rivista di storia del libro e di bibliografia, 1995, 97 : 1, pp. 70-71. Bernard Teyssandier, « L’ethos érudit dans l’Avis pour dresser une bibliothèque de Gabriel Naudé », dans Littératures classiques, 2008, 66, pp. 125-127.

60 Robert Damien accentue l’importance de l’invention de l’imprimerie, condition sine qua non pour les conceptions développées par Naudé : Robert Damien, Bibliothèque et État, ouvr. cité, p. 73.

61 Antoine Schnapper, Le Géant, la licorne et la tulipe : collections et collectionneurs dans la France du XVIIe siècle. 1, Histoire et histoire naturelle, Paris, Flammarion, 1988, pp. 8-10 (« Art, histoire, société »).

62 Ce cabinet a été étudié par Krzysztof Pomian, Collectionneurs, amateurs et curieux, ouvr. cité, pp. 61-65.

63 Pierre Borel, Les Antiquités de Castres avec le rôle des principaux cabinets et autres raretés de l’Europe, nelle éd., Genève, Minkoff, 1973, p. 132 (1èreéd., 1649).

64 Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité, p. 56.

65 Pierre Borel, Les Antiquités de Castres, ouvr. cité, p. 148.

66 Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité, p. 59.

67 Michel Foucault, Les Mots et les choses : une archéologie des sciences humaines, Paris, Gallimard, 1966, p. 36 (« Tel »).

68Ibid., pp. 32-59.

69 Krzysztof Pomian, Collectionneurs, amateurs et curieux, ouvr. cité, p. 62.

70 Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité, p. 56.

71 Adalgisa Lugli, Naturalia et mirabilia, ouvr. cité.

72 Antoine Schnapper, Le Géant, la licorne et la tulipe, ouvr. cité.

73 Jean Viardot, « Livres rares et pratique bibliophilique », art. cité, p. 462.

74 Michel Foucault, Les Mots et les choses, ouvr. cité, p. 46.

75 Pierre Borel, Les Antiquités, ouvr. cité, p. 134.

76 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p.130.

77 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, pp. 62-63.

78 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, pp. 16-17.

79 Adalgisa Lugli, Naturalia et mirabilia, ouvr. cité, p. 10.

80 Jean-Marie Goulemot, « Bibliothèques, encyclopédisme et angoisse de la perte : l’exhaustivité ambiguë des Lumières », dans Le Pouvoir des bibliothèques, ouvr. cité, pp. 289-291.

81 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 62.

82 Jean Dagen, L’Histoire de l’esprit humain dans la pensée française de Fontenelle à Condorcet, Paris, Klincksieck, 1977 (« Bibliothèque française et romane », Série C, Études littéraires, 60).

83 Roger Chartier, Culture écrite et société : l’ordre des livres, Paris, Albin Michel, 1996, p. 108 (« Bibliothèque Albin Michel. Histoire »).

84 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 20.

85 Richard H. Popkin, The History of scepticism from Erasmus to Descartes, New York, Evanston ; London, Harper Torchbooks, 1968, p. 90. Jean Viardot souligne le caractère austère de cette bibliothèque (« Livres rares et pratique bibliophilique », art. cité, pp. 450 et 456-457). Robert Damien, Bibliothèque et État, ouvr. cité, pp. 151-157.

86 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 72.

87 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p.146.

88 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, pp.104-105.

89 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p.142.

90 Anthony Grafton, « Le lecteur humaniste », dans Histoire de la lecture dans le monde occidental, dir. Guglielmo Cavallo, Roger Chartier, Paris, Seuil, 1997, p. 226.

91 Gilles Barber, « La reliure », dans Histoire de l’édition française, ouvr. cité, t. II, p. 164.

92 Anthony Grafton, « Le lecteur humaniste », art. cité.

93 Gilles Barber, « La reliure », art. cité, p. 171. De même, Roger Chartier constate qu’aux alentours de 1750, les livres simplement brochés ne représentent que 5% du contenu des bibliothèques parisiennes (Roger Chartier, Lectures et lecteurs dans la France de l’Ancien Régime, Paris, Seuil, 1987, p. 181 (« L’univers historique »).

94 Une reliure « à la Du Seuil » était caractérisée par un encadrement intérieur et par des fleurons aux angles. Ces reliures, revenues à la mode, étaient en fait une réminiscence du XVIe siècle. Roger Devauchelle, La Reliure : recherches historiques, techniques et biographiques sur la reliure française, Paris, Éd. filigranes, 1995.

95 Gilles Barber, « La reliure », art. cité, p. 164.

96 Antoine Coron, « Ut prosint aliis », art. cité, p. 121. Pour une description des reliures de J.-A. de Thou, ibidem, pp. 120-121.

97 Ibidem, p. 117.

98 Et donc pas de typologie par sujets, comme on l’a avancé dans le passé. Antoine Coron, « Ut prosint aliis », art. cité, p. 123.

99 Ibidem, p. 121.

100 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p.146.

101 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 148.

102 William Hunter, « The cabinet institutionalized : the Royal Society’s ‘repository’ and its background », dans Oliver Impey, Arthur Macgregor, éd., The Origins of museums : the cabinet of curiosities in sixteenth and seventeenth century Europe. Oxford, New York, Clarendon Press, Oxford Univ. Press, 1985, p. 162.

103 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 146.

104 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 148.

105 Antoine Schnapper, Le Géant, la licorne et la tulipe, ouvr. cité, p. 124.

106 André Masson, Le Décor des bibliothèques, ouvr. cité, p. 113. Henri-Jean Martin donne d’autres descriptions d’objets présents dans les bibliothèques du XVIIe siècle, dans son Livre, pouvoirs et société…, ouvr. cité, p. 480.

107 Pierre Gasnault, « Les collections et leurs enrichissements », dans Histoire des bibliothèques françaises, ouvr. cité, t. II, p. 350, note 8.

108 Jeanne Vieilliard, « Instruments d’astronomie conservés à la bibliothèque du collège de la Sorbonne au XVe et au XVIe siècles », dans Bibliothèque de l’École des Chartes, 1973, 131 : 2, p. 587.

109 Pierre Gasnault, « Les collections et leurs enrichissements », art. cité, p. 335.

110 Gabriel Naudé, Advis, ouvr. cité, p. 148.

111 Antoine Schnapper, Le Géant, la licorne et la tulipe, ouvr. cité, pp. 112-118.

112 Pierre Borel, Les Antiquités, ouvr. cité, pp. 147-149.

113 Antoine Schnapper, Le Géant, la licorne et la tulipe, ouvr. cité, p. 114.

114 Ibidem, pp. 126-127.

115 Pierre Borel, Les Antiquités, ouvr. cité, pp. 133-149.

116 Gaston Bachelard, La Formation de l’esprit scientifique, nelle éd., Paris, Vrin, 1989, p. 34.

117 Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité, p. 214.

118 Antoine Schnapper, Le Géant, la licorne et la tulipe, ouvr. cité, p. 122.

119 Oleg Neverov, « ‘His Majesty’s cabinet’ and Peter I’s Kunstkammer », dans The Origins of museums, ouvr. cité, p. 56.

120 Arthur MacGregor, Curiosity and enlightenment, ouvr. cité, p. 35.

121 Robert Damien, Bibliothèque et État, ouvr. cité, p. 157.

122 Henning Bock, « Collections privées et publiques : les prémices du musée public en Allemagne », dans Les Musées en Europe à la veille de l’ouverture du Louvre, dir. Édouard Pommier, Paris, Musée du Louvre, Klincksieck, 1995, p. 67.

123 Paula Findlen, Possessing nature : museums, collecting and scientific culture in Early Modern Italy, Berkeley, Los Angeles, London, Univ. of California Press, 1994, pp. 24-25.

124 Les Musées en Europe, ouvr. cité, p. 15.