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Marielle Mouranche, dir., Histoire et richesses de la Bibliothèque de théologie protestante de Montauban

Toulouse, Service interétablissement de coopération documentaire, 2007, 143 p., ill. ISBN 978-2-9517097

Frédéric BARBIER

Nouans-les-Fnes

Les expositions organisées par les bibliothèques constituent souvent une mine d’informations pour le chercheur, et les catalogues qui en sont publiés ont vocation à entrer eux-mêmes dans les collections spécialisées en histoire du livre, histoire des idées et histoire des bibliothèques : ainsi du présent catalogue, qui retrace le devenir de la bibliothèque de la Faculté de théologie protestante de Montauban.

L’introduction rappelle brièvement l’histoire de cette institution : en pays réformé, l’enseignement est confié aux universités et autres établissements déjà existant, notamment les studia des ordres mendiants. Dans les pays catholiques, comme en France, des structures nouvelles sont créées sous forme de collèges ou d’académies (article 37 de l’édit de Nantes). L’Académie de Montauban est créée en 1598, et connaît rapidement un grand succès, mais les tensions avec le parti catholique et les jésuites entraînent son transfert à Puylaurens en 1659 (un gros bourg sur la route de Castres), avant sa fermeture en 1685. La continuité des académies françaises est alors assurée par celle de Lausanne. Après le décret de 1808, une Faculté de théologie protestante est ouverte à Montauban en 1810. L’introduction du catalogue présente l’évolution des chaires au cours du siècle, trace brièvement le portrait de quelques personnalités remarquables et revient sur la création et sur le fonctionnement du séminaire protestant de Montauban. Le succès de ces différentes créations s’explique par le fait que la Faculté de théologie protestante est le seul établissement d’enseignement supérieur de la ville

La loi de 1905 impose la privatisation de la Faculté de théologie : c’est pour maintenir les liens avec l’Université que celle-ci quitte Montauban pour Montpellier, où elle est installée en 1919 (Faculté libre de théologie protestante). Enfin, en 1972, les deux Facultés de Montpellier et de Paris constituent l’Institut de théologie protestante, tandis que la Faculté de Montpellier poursuit la publication de l’ancienne Revue théologique devenue en 1926 Études théologiques et religieuses.

L’histoire de la bibliothèque est l’objet d’un important chapitre. Le doyen Benjamin Sigismond Frossard vient à Paris en 1809 pour choisir des livres dans les bibliothèques du ministère de l’Intérieur et du Tribunat et les faire transporter à Montauban (1810). Un crédit annuel d’accroissement est prévu, tandis que des dons contribuent à l’enrichissement d’une collection à vocation encyclopédique installée dans une grande salle de lecture, laquelle sert aussi de magasin – une petite pièce contiguë est meublée d’armoires vitrées et accueille les volumes les plus précieux. Si la période 1820-1870 est plutôt marquée par un certain manque d’intérêt à l’égard de la bibliothèque, l’engagement de la Faculté devient plus réel à partir de 1873, dans le cadre de la relance de la politique en faveur des bibliothèques universitaires après la défaite de 1871 : la bibliothèque de Montauban constitue alors la section Théologie de la Bibliothèque universitaire de Toulouse. On estime les collections, à la fin du siècle, à quelque 26 000 volumes, dont 2300 thèses, et l’ensemble fait l’objet d’un important travail de réorganisation et de catalogage – fichier alphabétique auteurs et fichier systématique. Malgré bien des insuffisances, par exemple en ce qui concerne les conditions de conservation, la situation s’est ainsi sensiblement améliorée et la Faculté réfléchit précisément au réaménagement des locaux lorsque survient la loi de 1905.

La question des inventaires est bientôt posée, puisqu’il convient de distinguer les biens propres de l’ancienne Faculté des biens d’État : l’Université de Toulouse propose de laisser ses livres à la disposition de la nouvelle Faculté libre, de sorte que la bibliothèque, même si elle dépend de cette dernière, « reste toujours considérée comme une section de la Bibliothèque universitaire » (p. 35). L’ensemble, en 1913, représente 46 000 volumes. Mais la situation se complique encore avec le départ de la Faculté pour Montpellier, en 1919. Malgré les dispositions initialement prévues, le fonds est d’abord réparti en trois ensembles : une grande partie des livres reste à Montauban, dans le nouvel Institut Jean Calvin, tandis qu’une autre est transférée à Montpellier (à la Bibliothèque universitaire et à la Faculté de théologie), les opérations s’étendant sur plusieurs années. En 1971, les volumes déposés à la Bibliothèque universitaire de Montpellier feront l’objet d’un dépôt permanent à la Faculté libre de théologie. Parallèlement, la situation à Montauban se dégrade jusqu’à ce que, en 1939, le principe du transfert des 25 000 volumes à Toulouse soit acquis. Mais, si l’opération est rapidement réalisée, les volumes ne seront effectivement intégrés dans les collections toulousaines qu’en 1956. En définitive, ce n’est que depuis une dizaine d’années que l’Université de Toulouse et la Faculté libre de Montpellier se préoccupent de la conservation et de l’exploitation des anciens fonds de Montauban.

Le catalogue donne la liste des bibliothécaires de la Faculté de théologie à Montauban, ainsi que trois courtes notices sur des collectionneurs dont les livres sont passés dans les fonds montalbanais. Le catalogue de l’exposition elle-même comprend 73 notices détaillées qui permettent de se faire une idée des richesses des fonds aujourd’hui disponibles à Toulouse et à Montpellier : reliures précieuses et éditions anciennes, parmi lesquelles une quarantaine de Bibles en hébreu, l’édition originale de la Démonomanie de Bodin (1580), l’Institution de la religion chrétienne en français (1536), la Discipline des Églises réformées de France (1658) et un certain nombre d’éditions du XVIIe siècle provenant de Montauban ou de Puylaurens. Les titres ne relevant pas de la théologie sont moins nombreux, mais on y remarque le De Philologia de Guillaume Budé (1532), le Discours de la méthode de Descartes (1637) ou encore une collection complète de la Gazette depuis 1631. Sous une forme volontairement réduite, ce petit catalogue renseigne donc très utilement sur un fonds ancien trop longtemps négligé.