Michaela Scheibe, Rekonstruktion einer Pietistenbibliothek. Der Büchernachlass des Johann Friedrich Ruopp in der Bibliothek der Franckeschen Stiftungen
Halle, Tübingen, 2005, Verlag der Franckeschen Stiftungen Halle im Max Niemeyer Verlag Tübingen, XI-227 p. (« Hallesche Quellenpublikationen und Repertorien », 8)
István MONOK
Budapest
Les grandes bibliothèques essayent régulièrement d’analyser les collections privées incorporées dans leur fonds et d’écrire leur histoire. En 1698, un orphelinat a été fondé à Halle par August Hermann Francke (1663-1727), qui, très vite, devient une institution multiforme : à côté de l’orphelinat proprement dit, la fondation comprend bientôt une école primaire et des écoles pour la formation technique, puis, plus tard, on y assure l’enseignement secondaire et les études de théologie. Une bibliothèque est créée, une imprimerie est mise en route, ainsi que différents autres ateliers artisanaux. Cette structure a subsisté jusqu’à aujourd’hui : après la chute du mur de Berlin, la Frankesche Stiftung a été réorganisée par Paul Raabe, ancien directeur de la Bibliothèque de Wolfenbüttel : si l’orphelinat est désormais remplacé par une école maternelle, la bibliothèque a été reconstituée, les publications ont repris et la Fondation a réactivé son réseau de relations internationales. Le Centre de recherche sur le piétisme (Zentrum für Pietismusforschung) est une entreprise commune de la Fondation et de l’université de Halle-Wittenberg.
La bibliothèque comprend nombre de collections privées, dont Brigitte Klosterberg cite quelques-unes dans sa préface : Friedrich Breckling (exilé des Pays-Bas, 1629-1711), Justus Luder (superintendant de Halberstadt, ?-1708), Carl Hildebrand de Canstein (éditeur de la Bible, 1676-1719), Andreas Achilles (théologien, 1656-1721) et Heinrich Milde (slaviste, 1676-1739). Parmi ces fonds, un des plus riches est celui du professeur en théologie Johann Friedrich Ruopp (1672-1708). Dans son étude sur la reconstitution de la bibliothèque Ruopp, Michaela Scheibe présente d’abord la vie ce personnage : né à Strasbourg, il fait ses études au célèbre gymnase créé par Jean Sturm, puis entreprend sa philosophie à l’université de Strasbourg tout en commençant à rédiger des poèmes qui lui valent le titre de poeta laureatus. En 1697, il commence sa théologie à Strasbourg, sous la direction de Johann Joachim Zentgraf, puis il suit à Leipzig les cours de Johann Benedikt Carpzov : une formation stricte de théologie orthodoxe luthérienne, abordant successivement Martin Chemnitz (1522-1586), Johann Gerhard (1582-1637), Johann Schmidt de Strasbourg (1594-1658) et Sebastian Schmidt, l’exégète strasbourgeois (1617-1696). Mais, en 1698, Ruopp quitte Leipzig pour s’inscrire à l’université piétiste de Halle, fondée seulement quatre ans auparavant. Il y a comme professeurs Francke lui-même, Joachim Justus Breithaupt (1658-1732) et Paul Anton (1661-1730). Parallèlement à ces études, il aide Francke à l’orphelinat. Fin 1699, il rentre à Strasbourg, où il enseigne un temps, avant de devenir pasteur. Le piétisme touche précisément alors l’université de Strasbourg, et Ruopp jouit très vite d’un grand renom auprès de cercles plus favorables au changement. Mais pasteurs et enseignants novateurs doivent bientôt quitter l’Alsace et Ruopp revient à Halle (1705), où il décède peu après.
Nous possédons deux catalogues de sa collection : au total, trois cent cinquante-neuf volumes légués par lui à la bibliothèque de la Fondation. La collection est récente – le nombre des livres publiés avant 1650 ne dépasse pas trente-six. En dehors des langues bibliques, Ruopp lisait le français et l’allemand, ce qui est reflété par la composition linguistique de sa bibliothèque : 43% de titres en latin, 42% en allemand, 7% en français. Au niveau du contenu, c’est une bibliothèque spécialisée en théologie (trois cent un titres), et dans une bien moindre mesure en poésie, en rhétorique et en histoire. Ruopp possédait la littérature sur la Bible (soixante-treize titres), mais aussi de la polémique, des titres concernant l’éducation spirituelle, etc. Aujourd’hui, la bibliothèque ne conserve qu’une partie de ces livres (il en manque quatre-vingt-douze), car la Fondation avait pour habitude de vendre ou d’échanger les doubles. Michaela Scheibe présente les deux catalogues, fait le travail d’identification et étudie les notes manuscrites présentes dans les volumes. L’ouvrage se clôt par des index et des fac-similés des catalogues déjà connus.