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Lietuviškai Biblijai – 400 metų. Biblijos vert˙ejas Jonas Bretkūnas. Tarptautin˙es parodos katalogas. – 400 Jahre litauische Bibel. Bibelübersetzer Johannes Bretke. Katalog der internationalen Ausstellung

Sudarytojos/zusammengestellt von Ona Aleknavičiene˙, Jolanta Zabarskaite˙, Vilnius, Lietuvos dailės muziejus, Sigitas, 2001, 158 p

István MONOK

Budapest

Le 24 août 1991, l’Union Soviétique reconnaissait l’indépendance de la Lituanie. Le recensement, la mise en valeur et la conservation de l’héritage culturel, puis sa transmission aux jeunes générations, sont dès lors devenus une question stratégique pour la culture nationale. Les recherches sur l’histoire de la littérature et des livres de la Lituanie se sont intensifiées, et on a commencé à publier des manuels d’histoire culturelle, chose évidemment impossible sous la domination soviétique. Dans nombre de cas, les chercheurs ont été amenés à renouer des fils brisés depuis le XIXe siècle : la monographie de Sigitas Narbutas sur les six premiers siècles de l’histoire de la littérature et de l’écriture en Lituanie, publiée en anglais et en lituanien (The mysterious island. A review of 13th-18th century literature of the Grand Duchy of Lithuania, Vilnius, Institute of Lithuanian Literature and Ethnology, 2000) n’offre pas seulement un nouveau tableau d’ensemble, mais propose des orientations pour de futures recherches. La chronologie de l’histoire littéraire vaut aussi pour l’histoire du livre : Moyen Âge (1251-1521), Renaissance (1522-1596), âge baroque (1597-1750), puis époque des Lumières (1751-1832).

La littérature lituanienne se développe alors que le pays passe sous diverses influences culturelles et politiques successives – danoise, prussienne, suédoise et russe. La Renaissance s’ouvre avec le premier livre imprimé à Vilnius (traité de Pranciškus Skorina sur le voyage, en russe), mais l’ambiance culturelle de la période est fondamentalement définie par la Réforme, comme dans les autres nations d’Europe centrale et orientale. Le premier livre en prussien et le premier en lituanien (tous deux des catéchismes protestants) sortent à Königsberg, pour le prussien, en 1545, pour le lituanien, en 1547. L’édition en fac-similé du catéchisme prussien a été donnée en 1995, avec une présentation de l’histoire de la culture et de la langue3. De son côté, Alfonsas Šešplaukis a analysé le premier livre publié en lituanien dans une édition trilingue4. L’exposition organisée à Vilnius à l’automne 2002 présentait au public l’œuvre de Johannes Bretke (1536-1602), premier traducteur lituanien de la Bible, les résultats des recherches sur ce personnage et le devenir de sa traduction jusqu’à sa parution sur Internet. Comme toujours, le catalogue se révèle plus riche : après une brève histoire de la Lituanie au XVIe siècle, la description détaillée des pièces exposées est introduite par trois grandes études bilingues (lituanien et allemand). Dans son portrait de Bretke, Jochen C. Range met à juste titre l’accent sur le fait que l’enfant, originaire du village de Bammeln, fait partie d’une famille prussienne d’origines bourgeoises ; devenu pasteur luthérien, il sera un représentant caractéristique des figures intellectuelles du temps, avec une tradition culturelle complexe et multinationale. Il a fait des études à Königsberg, puis à Wittenberg. A partir de 1563, le voici pasteur, et il prêche en allemand, mais aussi en lituanien. Il rédige un recueil de cantiques (en allemand et en lituanien, 1589), tandis que ses prédications lituaniennes sont publiées en 1591 à Königsberg. Il considère pourtant sa traduction de la Bible, entreprise dès 1580, comme son œuvre principale. Selon les experts, le Thesaurus lingvae lithuanicae du XVIe siècle peut être reconstitué sur la base de cette traduction. Bretke a en outre donné des œuvres historiques en allemand, en particulier des chroniques de Prusse.

Inge˙ Lukšaite˙ décrit le processus et les débats qui, au cours de la vie de Bretke, amènent la généralisation de l’orthodoxie luthérienne dans les territoires orientaux de la Prusse. Parallèlement à Luther, Andreas Osiander (1514- 1571) jouissait lui aussi d’une grande influence. A partir du milieu du siècle, on publie en pays balte des séries de catéchismes, de livres de cantiques ainsi que de recueils de liturgie ou de sermons. Ona Aleknavicˇiene˙ analyse l’héritage de Bretke aujourd’hui (« Der Weg des Johannes Bretke ins 21. Jahrhundert »). Ses œuvres principales (sa traduction de la Bible et sa Chronik des Landes Preussen) sont restées manuscrites. Ces manuscrits étaient connus et cités, en particulier le texte lituanien de la Bible, dès le XVIIe siècle, et Jacob Quandt (1686-1772) est le premier à les apprécier : dans la préface à l’édition de la Bible de 1735, il souligne les mérites de la traduction de Bretke. En 1816, Ludwig Jedemin Rhesa présente, à l’université de Königsberg, l’histoire de la Bible lituanienne : il y insiste sur le rôle de Bretke, dont peu de textes ont alors été publiés en recueils ou dans des chrestomathies. La publication de la traduction de la Bible par Bretke est enfin aujourd’hui en préparation : comme pour d’autres traducteurs de la Bible en Europe centrale, elle ne sera publiée qu’au XXIe siècle.

L’exposition présentait d’abord la vie et l’activité du pasteur érudit dans les pays baltes (« Pfarrer als Gelehrte und Schriftsteller auf dem Lande »), avant de revenir sur son œuvre historique (« Johannes Bretke als Geschichtsschreiber ») et de conclure sur la tradition de ses écrits pendant cinq siècles (« Die Bretkeforschung »).

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3 Pirmoji Prūsų knyga. The first Prussia book, éd. Mikelis Klusis, Bonifacas Stundžia, Vilnius, Pradai, 1995 (« Bibliotheca Baltica. B. Lithvania »).

4 Pirmoji lietuviška knyga naujujų tyrinėjimų šviesoje. The first Lituanian book in the Light of New Research. Das erste liauische Buch im Lichte der neueren Forschung, Kaunas, 1997.