Books and the sciences in history
éd. Marina Frasca-Spada, Nick Jardine, Cambridge, Cambridge University Press, 2000, XIV-438 p. ISBN 0-521-65939-6
Juliette GUILBAUD
Rassemblant les contributions de vingt historiens des sciences, de la littérature, de la philosophie et de la philosophie des sciences, cet ouvrage propose un éclairage intéressant sur les liens unissant histoire des sciences et histoire du livre, que vient enrichir près d’une centaine d’illustrations.
Ce n’est en effet qu’au cours du XXe siècle, que l’histoire des sciences s’est consolidée et affirmée comme discipline propre. D’abord seulement l’objet de travaux bibliographiques, elle s’est transformée et enrichie, à l’instar de l’histoire du livre, pour enfin être intégrée à des domaines plus larges, telle l’histoire sociale ou culturelle. La prise en compte croissante, par la recherche, des lecteurs et de leur rôle – un temps négligé dans les développements de l’histoire du livre – trouve un écho dans l’histoire des sciences, soucieuse de mieux connaître le public des ouvrages scientifiques.
Dès lors se fait jour l’interaction entre ces deux domaines historiques, qui ne cessent de se stimuler l’un l’autre. Le développement du paratexte, par exemple, en marge (ou en bas de page) des écrits scientifiques publiés, offre autant de liens au(x) lecteur(s), de passerelles vers les autres sciences. Le livre, comme unité matérielle, peut même devenir objet scientifique en soi, tels les ouvrages illustrés d’histoire naturelle qui se présentent en somme comme une collection virtuelle, reflet de ce que le scientifique a pu jusque-là offrir, avant qu’il n’utilise le livre comme support et faire-valoir du résultat de ses travaux.
Afin de rendre l’ensemble des exposés accessible, tant à l’historien, au scientifique, qu’au lecteur profane, les éditeurs ont pris le parti d’une présentation chronologique des contributions, en trois parties. La première, «Triumphs of the book », parcourant la longue période qui sépare la Renaissance carolingienne de la fin de l’époque baroque, met l’accent sur le maintien relatif d’un système d’études classiques, dans le cadre du développement des universités. Vient ensuite une partie consacrée au temps du « learned and conversable reading », large XVIIIe siècle (1688-1815), qui voit évoluer les usages du livre, émerger la notion de public et se développer l’aspect commercial du marché du livre. Les dernières contributions, sous le titre « Publication in the age of science », se penchent sur les innovations scientifiques de la première moitié du XIXe siècle, qui contribuent à la production et à la diffusion de masse des livres. Ce sont également les années 1840-1850 qui voient l’avènement et la consolidation, à travers le livre, de la science comme discipline institutionnalisée : l’heure est au développement d’une presse spécialisée, rendant compte des travaux menés et faisant même autorité en la matière. Les temps actuels, ceux de la fragmentation des sciences et de la révolution électronique, posent de nouvelles interrogations sur le sens de cette interaction entre histoire des sciences et histoire du livre.