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Un éditeur et ses collaborateurs : quelques contrats autour de l’Encyclopédie méthodique

Rémi VERRON

Présentation générale. Une activité éditoriale très ambitieuse, marquée notamment par plusieurs éditions de l’Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers et par la diffusion de nombreux périodiques, dont le Mercure de France, rapportèrent de solide revenus à Charles-Joseph Panckoucke (1736-1798)1, revenus qu’il put réinvestir dans d’autres publications. Lui-même est notamment l’auteur d’un essai Sur l’usage de la raison (1753)2, d’un Traité historique et pratique des changes en 17603, d’un essai De l’homme et de la reproduction des différents individus paru l’année suivante4, d’un Discours philosophique sur le beau publié en 17795, d’une Nouvelle grammaire raisonnée en collaboration avec Ginguené, La Harpe et Suard en 17956, de mémoires sur différents objets d’administration et d’articles pour le Journal encyclopédique. Il traduisit des poésies de Lucrèce en 17687, la Jérusalem délivrée du Tasse (en collaboration avec Nicolas Étienne Framery)8 et le Roland furieux de L’Arioste…9

L’œuvre emblématique du siècle des Lumières est bien l’Encyclopédie, plus exactement l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers10. Elle fut très largement étudiée, tant en France qu’a l’étranger. Pour situer la première édition dite de Paris, le texte parut entre 1751 et 1765, les planches entre 1765 et 1772 ; vinrent ensuite le Supplément dit de Robinet vers 1776 et la Table analytique en 1780. On connaît trois éditions in-folio et deux éditions in-quarto du texte de l’Encyclopédie, avec des variations légères ou plus importantes par rapport à la première édition. En outre, cette œuvre monumentale inspira la production de nombreux autres titres, voire de collections entières. En 1778, alors que Charles-Joseph Panckoucke cherchait à distribuer un nouveau tirage de L’Encyclopédie, il apprit l’existence d’un projet d’édition complètement refondue sous la responsabilité de Déveria, libraire à Liège. D’abord associé à Devéria, Panckoucke prend bientôt le contrôle de l’entreprise : titulaire d’un privilège exclusif pour quarante ans11, il annonce en 1780 la publication d’une Encyclopédie par ordre de matières : il s’agit d’une

Bibliothèque complète des connoissances humaines distribuée en autant de dictionnaires que l’arbre des connoissances humaines a de branches essentielles et capitales, le recueil le plus riche, le plus vaste, le plus intéressant, le plus exact, & le mieux suivi qu’on a pu désirer (…). Chaque dictionnaire sera complet dans son genre, & comprendra tout ce qu’il y a de vrai, d’utile, de réel dans la science ou l’art qu’il a pour objet…12

La première des cent deux livraisons de l’Encyclopédie méthodique date de 1782, avec « le premier volume de la Jurisprudence ; le tome premier, première partie des Arts & métiers mécaniques ; et le tome premier, première partie de l’Histoire naturelle »13. La dernière livraison vint un demi-siècle plus tard avec l’achèvement d’une très riche Histoire naturelle. Cette série de quarante-deux dictionnaires, chacun en plusieurs volumes, forme donc une collection unique, où l’on trouve tout aussi bien un dictionnaire d’Agriculture en trois volumes (publié entre 1787 et 1816), un dictionnaire de Théologie en trois volumes (publié entre 1788 et 1790) et un dictionnaire des Forêts et bois de 1815 en un seul tome, que treize volumes d’un dictionnaire de Médecine (1787-1830). L’ensemble forme une masse de cent vingt-cinq mille pages de texte et de plus de six mille quatre cent trente planches. Pour la rédaction de son œuvre, Panckoucke dut recruter un très grand nombre d’auteurs (ce que Mme Tucoo Chala désigne comme « L’écurie Panckoucke »), avec lesquels il passe des contrats. On conserve au moins trois contrats relatifs à l’Encyclopédie méthodique dans des bibliothèques parisiennes, le premier avec Vial du Clairbois et Blondeau pour le dictionnaire de Marine, le second avec Bergier pour le dictionnaire de Théologie et le troisième pour celui de Musique. Les mentions « approuvé Dévéria » et « approuvé Plomteux », communes aux deux premiers contrats, témoignent de ce que les deux libraires sont associés à l’entreprise dès 1780-1781. Enfin, on sait qu’une vingtaine d’ateliers d’imprimerie travaillent, à travers Paris, à la fabrication de la collection14.

La Marine. Parmi les vingt-six dictionnaires annoncés en 1780, celui de la Marine fut l’un des premiers achevés, entre 1783 (tome I) et 1787 (tome III). Le texte est enrichi de cent soixante-douze planches, publiées dans le tome V du Recueil de planches de l’Encyclopédie par ordre de matières (1787). Les deux auteurs, Honoré-Sébastien Vial du Clairbois et Étienne-Nicolas Blondeau, sont des praticiens : Vial du Clairbois15 (1733-1816) commence sa carrière dans la marine de commerce avant de passer à la Royale, où il devient en 1793 ingénieur-constructeur en chef. Membre de l’Académie de marine, il sera directeur des constructions au port de Lorient, puis de l’École spéciale du génie à Brest. Il est également un théoricien et un pédagogue, auteur d’un Essai géométrique et pratique de l’architecture navale (1776)16 et d’un Traité élémentaire de la construction des vaisseaux à l’usage des élèves de marine (1787)17. Il rédige une grande partie des textes sur la marine inclus dans le Supplément de l’Encyclopédie. Étienne-Nicolas Blondeau18 est, quant à lui, le rédacteur du Journal de marine ou Bibliothèque raisonnée de la science du navigateur publié de 1778 à 1780 à Brest chez Malassis, imprimeur ordinaire du roi et de la marine19. Membre de l’Académie royale de marine, il exerce comme professeur de mathématiques à Brest.

On notera que l’Académie de marine, créée en 1752, avait parmi ses missions celle de rédiger un dictionnaire spécialisé. Si cet ouvrage ne vit jamais le jour, on conserve aujourd’hui les comptes-rendus des séances de l’Académie sur ce projet, ainsi que l’ébauche d’un Vocabulaire qui devait également rester manuscrit. En tête du Tome I du Dictionnaire de marine de Panckoucke figure le Discours préliminaire de Vial du Clairbois, qui précise les conditions de préparation du texte : comme Vial et Blondeau, ainsi que les autres collaborateurs, sont tous membres de l’Académie de marine, on peut aujourd’hui affirmer que les travaux de celle-ci sont sans doute à l’origine d’une partie du Dictionnaire – même si la filiation n’est jamais expressément indiquée. L’article « Académie » se borne à donner les statuts, le règlement et l’histoire de la compagnie, et à rappeler que la rédaction d’un dictionnaire de marine figurait parmi ses obligations.

L’auteur et le travail de rédaction. Les deux auteurs cèdent « à M. Panckoucke et à ses ayant cause tous [leurs] droits quelconques » sur le Dictionnaire de Marine, et c’est Panckoucke qui en demande le privilège à son nom. La majeure partie du contrat concernant la Marine expose les choix de l’éditeur, mais le texte permet aussi de préciser la manière de travailler de Charles-Joseph Panckoucke. En effet, celui-ci fait « séparer et couper tous les articles de l’enciclopédie infolio et de son supplément » en dépeçant deux exemplaires, de manière à constituer deux jeux de l’ensemble des feuillets. Les articles sont reclassés par grands thèmes, ce qui permet de préparer le plan de la nouvelle collection « par ordre de matières » et d’évaluer l’importance matérielle de ses différentes composantes. Au fur et à mesure de l’avancement du travail, l’éditeur recevait les manuscrits des différents auteurs, avec des rapports sur l’état des travaux. Beaucoup parmi les collaborateurs souhaitaient étendre leurs textes, ce qui n’était pas sans faire problème et, par l’accroissement constant de la collection, suscitait des réclamations de la part des souscripteurs…20

Vial du Clairbois et Blondeau apparaissent d’autre part comme les maîtres d’œuvre de l’entreprise, selon un mode d’organisation que l’on retrouvera, notamment, pour le Dictionnaire de médecine : pour celui-ci en effet, si Félix Vicq d’Azyr recevra la responsabilité complète de la rédaction, c’est à lui de réunir une équipe de collaborateurs (une quinzaine au total), de leur répartir le travail et de les rétribuer. Si, dans le Dictionnaire de marine, l’article est simplement repris de l’Encyclopédie, il porte une astérisque simple, tandis qu’une astérisque double désigne un article original. Des dispositions spécifiques sont prises relativement à l’illustration.

Le contrat précise par ailleurs la conception que Panckoucke a du « Discours préliminaire », lequel doit donner le plan de l’ouvrage, puis expliquer l’ordre des articles. L’éditeur expliquait, dans le Prospectus, que plusieurs lectures de la collection sont possibles, selon que l’on cherche la réponse à une question précise ou que l’on souhaite s’informer sur un sujet général en parcourant les principaux articles du dictionnaire y relatif. La publication d’une bibliographie est également prévue, en l’occurrence la «notice des principaux ouvrages de marine», Panckoucke souhaitant, selon la formule consacrée, donner une « bibliothèque » en un seul livre et faire de sa collection, selon la métaphore actuellement utilisée en informatique documentaire, un « portail » vers des recherches plus poussées ou plus spécialisées. Enfin, le contrat précise que « la nomenclature sera la plus complète qu’il sera possible », autrement dit, que la liste des entrées du Dictionnaire de marine sera la plus large : en cela, le Dictionnaire de marine n’est pas réellement représentatif de la collection, puisque tous les textes venant compléter le corps même des définitions furent effectivement imprimés, alors que bien d’autres parties de l’Encyclopédie méthodique ne contiennent qu’une brève introduction. Le Dictionnaire de musique s’ouvre ainsi sur un Discours préliminaire, mais il ne contient aucun autre document devant faciliter sa lecture, tandis que celui de Théologie possède un bref Avertissement et une longue Table analytique pour diriger les lecteurs dans l’étude de la théologie.

Ce Dictionnaire de théologie est l’œuvre de Nicolas-Sylvestre Bergier, et est composé de trois tomes publiés entre 1788 et 1790. Fort logiquement, aucune illustration n’accompagne les textes du chanoine de Notre-Dame, par ailleurs principal d’un collège et membre de deux académies, celle des Inscriptions et celle de Besançon. Bergier rédigera, d’après le contrat, « un discours préliminaire dans lequel il indiqu[era] l’ordre des mots de chaque partie du dictionnaire, comme si c’étoit un traité suivi ». Et, au tome III, on peut consulter une « Table analytique pour diriger les lecteurs dans l’étude de la théologie » qui répond au projet bibliographique de l’éditeur. De son côté, celui-ci s’engage sur le paiement des textes, qu’il s’agisse d’originaux ou de compilations. Les auteurs de la Marine et de la Théologie sont rétribués à mesure de la livraison de leurs feuillets, ils ont neuf mois à un an pour entreprendre le travail et livrer les premiers cahiers, voire un volume entier, et leur salaire sera réévalué en fonction du nombre exact de feuillets des nouveaux dictionnaires. En outre, chacun obtiendra un exemplaire complet de la collection, ainsi que plusieurs exemplaires de la partie qu’il aura rédigée21. Au total, on peut estimer que les deux membres de l’Académie de marine durent gagner vingt-quatre livres par cahier, alors que le chanoine de Notre-Dame de Paris recevait une somme de trois mille livres pour un volume contenant entre quatre-vingt-quinze et cent feuilles – soit un salaire de 30 à 32 livres, plus avantageux pour l’auteur du fait qu’il est seul. Dans le troisième contrat que nous allons évoquer, la somme de 48 livres est proposée à un unique rédacteur en 1812 – l’augmentation des tarifs est certaine, même s’il reste difficile de suivre l’évolution exacte durant une période particulièrement troublée.

La Musique. En 1812, Panckoucke est décédé depuis plus de dix ans, et sa succession a été prise par son gendre Henri Agasse. Le Dictionnaire de musique avait commencé à paraître en 1791, sous la direction de Framery et Guiguené22, et déjà, comme le précise le « Discours préliminaire »,

aucune des parties de l’Encyclopédie méthodique n’a éprouvé peut-être autant d’obstacles & de retards dans son exécution que celle-ci…

La rédaction générale en avait d’abord été confiée à Suard et à l’abbé Arnaud, mais elle fut interrompue par la disparition de ce dernier, alors même que

les occupations de M. Suard, étrangères à cet ouvrage, en se multipliant de plus en plus, l’empêchoient d’y donner une attention suivie.

L’abbé Feytou est donc associé au projet en 1788, tandis que Ginguené succède à Suard « pour la partie historique ». Les sources principales sont le Dictionnaire de musique de Rousseau et certains articles de l’Enyclopédie, tandis que collaborent au projet des hommes « dont l’autorité ne sauroit être récusée, & dont le nom seul garantit le mérite de leur travail » – et l’on sait que les articles « clavecin » et « forte-piano » sont de Hüllmandel, l’article « violon » de Chabanon, l’article « cor » de Framery et Le Brun (ce dernier est cor de l’Opéra), et l’article « harmonica » de Deudon. Même si « l’engagement formel » est pris « de terminer ce dictionnaire d’ici à la fin de 1791 », il faudra attendre 1818 pour voir sortir le tome second, dirigé Framery, Ginguené et de Momigny23. Le contrat passé en 1812 pour relancer l’entreprise met en évidence le souci d’efficacité de l’éditeur, à la recherche d’un texte rapidement disponible susceptible de mettre un terme aux retard de son Dictionnaire.

Il conviendrait de comparer ces textes avec ceux d’autres contrats passés par Charles-Joseph Panckoucke. L’éditeur indique avoir passé au moins cinq contrats avec les auteurs successifs de la partie Médecine, dont la parution en treize forts volumes s’est étalée de 1787 à 1830, de sorte que l’on évaluer à une quarantaine le nombre des contrats relatifs à l’Encyclopédie méthodique24. D’autres documents analogues aux nôtres sont conservés hors de France : le contrat sur l’Agriculture, passé entre Charles-Joseph Panckoucke et Fougeroux de Bondaroy, est actuellement dans une bibliothèque des Pays-Bas, tandis que treize autres se trouvent dans des bibliothèques d’outre-Atlantique25. Les droits et devoirs de l’éditeur sont très semblables, voire identiques à ceux du contrat de Marine, et on y retrouve les mêmes dispositions prévues tant pour le contenu et les sources que pour la livraison des manuscrits et la rétribution des auteurs.

D’une manière plus générale, nos contrats sont caractéristiques d’une époque de transition pour l’édition française, et de réorganisation des rapports entre l’auteur et le libraire – bientôt l’éditeur. La librairie d’Ancien Régime s’achève en partie avec l’Ancien Régime politique, la Société des auteurs est créée en 1790 à l’initiative de Beaumarchais tandis que la Communauté des libraires est dissoute et que le régime des privilèges disparaît. Les contrats manuscrits qui sont aujourd’hui conservés nous informent sur les relations entre éditeur et auteur autour de 1800, à une époque où s’organise lentement le marché de l’édition moderne. Ils éclairent d’un jour nouveau la lecture des différents dictionnaires composant l’Encyclopédie par ordre de matières.

ÉDITION DES CONTRATS

1- Contrat entre Nicolas-Etienne Blondeau, Honoré-Sébastien Vial du Clairbois et Charles-Joseph Panckoucke le 15 octobre 1780 à Brest, 4 p.

Service Historique de la Marine à Vincennes, MS 563 (3)

1) Nous, Blondeau et Vial nous engageons de fournir au S. Panckoucke, libraire, un dictionnaire complet de marine qu’il fera imprimer à ses frais et dépens, dans le format in quarto, caractère de Cicero, et conforme au dictionnaire de phisique de M. Brisson qui est actuellement sous presse, sous le titre suivant, Dictionnaire universel et raisonné de marine par MM. Blondeau et Vial, avec un faux titre, intitulé Encyclopédie méthodique ; le dictionnaire de Marine devant faire corps et suite avec l’Encyclopédie méthodique dont le dit S. Panckoucke est actuellement occupé.

2) Nous aurons la liberté de prendre en totalité ou en partie les articles de Marine contenus dans l’Enciclopédie in folio et dans son supplément, nous réservant le droit d’y faire les additions, changemens, retranchemens que nous jugerons convenables, comme aussi de conserver tout ce qui nous paraîtra bon.

3) On mettra une étoile simple à la tête des articles où nous aurons fait des changemens et une double étoile à la tête de ceux qui seront entièrement nouveaux : de plus nous aurons soin de citer très exactement les auteurs des articles empruntés et en général les sources ou nous aurons puisé. Chaque article sera marqué de la lettre initiale du nom de celui qui l’aura travaillé.

4) Comme le S. Panckoucke fait actuellement séparer et couper tous les articles de l’Enciclopédie in folio et de son supplément et qu’il doit nous remettre ceux de Marine, nous ne commencerons notre travail que lorsqu’il nous aura fait cette remise, et de ce jour, dans l’espace de trois années nous nous obligerons de fournir au S. Panckoucke et successivement de manière que l’impression n’en soit pas interrompuë, la totalité de ce Dictionnaire de Marine qui ne pourra contenir que trois volumes in quarto, de quatre vingt dix à cent feuilles.

5) Nous fournirons les desseins de l’ouvrage dont le S. Panckoucke nous fera le remboursement sur nos quittances; nous indiquerons aussi toutes les planches qui devront entrer dans l’ouvrage, que le S. Panckoucke fera graver à ses frais.

6) Nous cédons à M. Panckoucke et à ses ayans cause tous nos droits quelconques sur le dictionnaire de Marine, consentant qu’il en demande le privilège en son nom.

7) Nous mettrons à la tête du premier volume un discours préliminaire qui contiendra le plan de notre ouvrage, qui sera suivi d’une explication de l’ordre dans le quel les articles doivent être lus, comme si c’eut été un traité métodique. L’ouvrage sera terminé par une notice des principaux ouvrages de Marine. La nomenclature de l’ouvrage sera aussi la plus complète qu’il sera possible.

Et Moi, Charles Panckoucke je promets et m’engage

1) De payer à MM. Blondeau & Vial la somme de vingt quatre livres pour chaque feuille in quarto du dit Dictionnaire de marine soit que les articles soient entièrement nouveaux soit qu’ils soyent copiés en totalité ou en partie du Dictionnaire enciclopédique in folio et de son supplément.

2) Je ferai mes payemens comptant aux d. S. Blondeau et Vial au fur et à mesure qu’ils me remettront les cahiers estimans au préalable a peu près ce qu’ils pourront fournir à l’impression et réglans exactement ce qu’ils auront rendu lorsque l’impression en sera faite pour ajouter au montant des cahiers suivans ce qui pourrait leur revenir, ou leur faire une retenuë s’il y avait lieu.

Les premiers cahiers doivent me parvenir au plus tard au mois de juillet prochain.

3) Je donneray de plus aux d. S. un exemplaire complet de la d. Enciclopédie et six exemplaires du dictionnaire de Marine s’il ne contenait que deux volumes et neuf s’il en fournit trois.

Fait triple à Brest le quinze octobre 1780. Approuvé Plomteux, approuvé Deveria.

[Signé] Panckoucke ; Vial du Clairbois ; Blondeau.

2- Contrat entre Nicolas-Syslvestre Bergier et Charles-Joseph Panckoucke, Paris, 10 janvier 1781.

Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, CP 4005 n°37 f. 58.

Monsieur l’abé Bergier, chanoine de Notre-Dame, d’une part et M. Panckoucke, libraire de Paris, d’autre part sont convenus de ce qui suit.

Mr l’abé Bergier se charge de revoir, corriger, completter toute la partie de l’Encyclopedie concernant la théologie, la critique sacrée, l’histoire ecclésiastique, dont il composera un seul dictionnaire, lequel fera partie de l’Encÿclopedie par ordre de matières dont le s. Panckoucke est actuellement occupé, il mettra à la tête du premier volume un discours préliminaire dans lequel il indiquera l’ordre des mots de chaque partie du dictionnaire, comme si c’étoit un traité suivi.

Ce dictionnaire sera composé de quatre à cinq volumes in quarto au plus, de quatre vingt quinze à cent feuilles, caractère du dictionnaire de phÿsique de Mr Brisson, qui est actuellement en vente.

Mr Panckoucke lui paÿera chacun de ces volumes la somme de trois mille livres savoir quinze cens livres comptant, en lui remettant la copie entière d’un volume, et les autres quinze cens livres, en trois Billets à ordre à quatre, huit et douze mois. Il en sera de même pour tous les volumes, plus il lui sera donné un exemplaire complet de l’Encÿclopédie méthodique et six exemplaires séparés du Dictionnaire théologique, le tout broché.

Mr l’abé Bergier remettra un volume en 1782, le deu[x]ième en 1783 et ainsi de suite.

Fait double à Paris 20 janvier 1781. Approuvé Devéria ; approuvé Plomteux.

[Signé] Bergier, chan. ; Panckoucke

3- Contrat entre Pierre-Louis Ginguené et Henri Agasse, Paris, 10 mars 1812.

Bibliothèque historique de la Ville de Paris, ms 20 Parent de Rosan f. 212-213

Les soussignés messieurs Pierre-Louis Ginguéné, membre de l’Institut, demeurant à Paris, rue du Cherche-midi n° 19, d’une part, et Henri Agasse, imprimeur libraire breveté et patenté à Paris et demeurant rue des Poitevins n° 6 de l’autre part, sont convenus ce qui suit :

– Art. 1er. Mon dit sr Ginguené s’engage à prendre le plus tôt possible la continuation du Dictionnaire de musique faisant partie de l’Encyclopédie méthodique par ordre de matières in 4°, dictionnaire qu’il avait commencé conjointement avec M. Framery, correspondant de l’Institut.

– Art. 2me. Le dictionnaire, en y comprenant ce qui a été imprimé du premier volume, formera deux et tout au plus trois volumes, et mon dit sieur Ginguené tâchera de le réduire à deux volumes, si cette réduction est praticable sans rien omettre d’essentiel sur l’art de la musique

– Art. 3me. Comme il sera nécessaire de joindre au dictionnaire dont il est ici question quelques planches pour les exemples qui y sont cités, mon dit sieur Ginguené en remettra la copie qui sera gravée et imprimée aux frais du sieur Agasse, comme faisant partie des dépenses relatives à ce dictionnaire, lesquelles sont toutes à la charge dudit sieur Agasse.

– Article quatre. Pour accélérer son travail, mon dit sieur Ginguené prendra des coopérateurs qu’il jugera les plus instruits pour donner au présent dictionnaire de musique, toute la perfection dont il est susceptible, mais il est expressement convenu que dans ce cas mon dit sieur Agasse n’aura affaire qu’à mon dit sieur Ginguené pour tout ce qui concerne le prix des manuscrits, la composition, la correction des épreuves, l’impression et la publication du dictionnaire, et que mon dit sieur Ginguené traitera en son propre et privé nom avec ses collaborateurs.

– Art. 5me. Comme mon dit sieur Ginguené se charge spécialement des fonctions de rédacteur de ce dictionnaire ainsi que de revoir la copie de ses colaborateurs et les épreuves, et pour lui faciliter d’ailleurs les moyens de satisfaire aux engagements qu’il contractera envers ses collaborateurs, mon dit sieur Agasse lui payera tout compris soixante douze francs pour le prix de la feuille imprimée à deux colonnes du caractère et du format in-4° employés pour le commencement de ce dictionnaire. Le payement aura lieu à partir de la feuille P, quatrième signature, du tome premier de ce dictionnaire, feuille qui suit immédiatement la dernière feuille imprimée. Le payement sera effectué ainsi qu’il suit : à chaque publication d’un demi-volume, mon dit sieur Agasse soldera le demi-volume en dix de ses billets d’égale valeur à l’ordre de mon dit sieur Ginguené, le premier de ces billets sera stipulé payable du quatrième mois de la dite publication et ainsi de suite de mois en mois.

– Art. 6me. Mes dits sieurs Ginguené et Agasse feront un compte à part de ce qui peut rester dû sur ce qui a été publié et imprimé du Dictionnaire de musique jusqu’à ce jour, c’est-à-dire jusque comprise la feuille O, quatrième signature, du tome premier de ce dictionnaire.

– Art 7me. Relativement à l’article six du présent traité, il convient d’observer que Mr Framery a remis a mondit sieur Agasse qui lui en a donné le reçu daté du vingt sept décembre dernier, un carton contenant des articles faits à peu près sur toutes les lettres par feu M. Framery, et que celui-ci destinait à être inséré dans le dit Dictionnaire de musique. Monsieur Agasse a transmis le contenu au dit Ginguéné, qui le reconnaît. À cet égard, mon dit sieur Ginguéné s’engage à faire emploi de ces articles autant qu’il le jugera convenable d’après l’examen qu’il en aura fait. Lors de la publication de chaque demi-volume, il sera fait un relevé des articles de feu M. Framery qui y auront été admis et mon dit sieur Agasse personnellememnt tiendra compte de leur prix à droit soit à ma dite dame Framery soit aux ayant [droit] de feu son mari. Le payement en sera effectué d’après le certificat de mon dit sieur Ginguéné constatant l’étendue et l’évaluation de ces articles, en feuille du format et du caractère dudit Dictionnaire de musique. Le prix de ces feuilles réglé en plus et en moins du taux de quarante huit livres par feuille convenu entre MM. Framery et Charles Joseph Panckoucke par acte sous seing privé du 20 octobre mil sept cens quatre vingt huit, le nouveau prix sera déduit de celui de soixante-douze francs convenu par feuille dans le présent traité. En conséquence, mon dit sieur Ginguené n’aura à répéter pour son propre compte que l’excédent du prix de chaque feuille qui aura été payée aux ayant droit à la succession de M. Framery.

– Art. 8me. Mon dit sieur Ginguené s’engage à remettre a mon dit sieur Agasse, le Vocabulaire du Dictionnaire de musique, lorsque ce Dictionnaire sera terminé, et ce vocabulaire fera partie du vocabulaire général de tous les dictionnaires de l’Encyclopédie méthodique par ordre de matières.

– Art. 9me. Mon dit sieur Agasse remettra à Monsieur Ginguéné tant pour lui que pour ses collaborateurs dix huit exemplaires complet dudit Dictionnaire de musique broché et sans frais.

– Art 10me. Au moyen des arrangemens stipulés par le présent traité, mon dit sieur Ginguéné tant en son nom qu’au nom de ses collaborateurs cède et transporte à mondit sieur Agasse et à ses ayant [droit] tous ses droits sur le Dictionnaire de musique, et garantit mon dit sieur Agasse de toute réclamation à ce sujet. Il a été cependant convenu que dans le cas où mon dit sieur Ginguéné jugerait à propos de faire usage de quelques articles de son dit Dictionnaire de musique pour être intercallé dans quelque autre ouvrage de sa composition, il aura la faculté, mais à la condition d’en modifier la forme autant que possible.

Fait double à Paris sous seing privé le dix mars mil huit cent douze. Approuvé l’écriture ci dessus et des autres parts.

Pour copie conforme Henri Agasse.

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1 Suzanne Tucco-Chala, Charles-Joseph Panckoucke et la librairie française (1736-1798), Pau, Marrimpouey jeune, Paris, J. Touzot, 1977. C’est l’ouvrage le plus complet sur l’éditeur, et l’on peut y suivre la parution de l’Encyclopédie méthodique entre 1780 et 1798. Voir les références bibliographiques et archivistiques complémentaires dans Frédéric Barbier, Lumières du Nord…, Genève, Librairie Droz, 2002, pp.  408-410.

2 Usage de la raison, ou Réflexions sur la vie et les sentiments des anciens philosophes, Amsterdam, aux dépens de la Compagnie, 1753, 12°. D’une manière générale, sur le rôle de certains libraires des Lumières comme auteurs, voir Sabine Juratic, « Du livre à l’écriture : libraires-auteurs de l’âge des Lumières en France », dans Revue française d’histoire du livre, 2002, 114-115, pp.  181-204.

3 Traité théorique et pratique des changes…, Lille, Panckoucke, Paris, Saillant et Mérigot père, 1760, 12°.

4 De l’homme, et de la réproduction des différens individus. Ouvrage qui peut servir d’introduction & de défense à l’Histoire naturelle des animaux par M. de Buffon, Paris, [Charles-Joseph Panckoucke], 1761, 12°. La notice de la BnF précise que l’ouvrage a été en réalité publié à Lille « d’après la permission tacite accordée les 7 et 14 août 1760 à Charles-Joseph Panckoucke (BnF, ms. fr. 21992, n° 41) et d’après les matériel et usages typogr. ainsi que le papier (Auvergne) ».

5 Discours philosophique sur le beau, [s.l., s.n., s.d.], 8°.

6 Charles Joseph Panckoucke, Grammaire élémentaire et mécanique à l’usage des enfans de 10 à 14 ans, et des écoles primaires, par le cit. Charles Panckoucke, Paris, Pougin, 1795, 8° ; 2e éd., Vve Panckoucke, An VII. Traduction allemande, Neue Grammaire raisonnée zum Gebrauche für eine junge Person herausgegeben und mit vielen Abhandlungen von den Bürgern Laharpe, Suard, Ginguené, Aubert und andern versehen, trad. de la 2e éd. fr. par C. W. F. Penzenkuffer, Nürnberg, Raspe, 1798, 8°.

7 Traduction libre de Lucrèce, avec un discours préliminaire, Paris, Amsterdam, Châtelain, 1768, 2 tomes en 1 vol., 12°.

8 Le Tasse, Jérusalem délivrée…, nouvelle traduction, Paris, l’auteur, Hôtel de Thou, 1785, 5 vol., in-24. La BnF conserve l’exemplaire de La Harpe, avec des notes mss de celui-ci.

9 L’Arioste, Arioste. Roland furieux, trad. Panckoucke et Framery, Paris, Plassan, 1787, 10 vol., in-24 ; nelle éd. nouvellement revue et corrigée, avec une notice sur la vie de L’Arioste, Paris, P. Masgana, 1842, 2 tomes en 1 vol., 12°.

10 Robert Darnton, L’Aventure de l’Encyclopédie : un best-seller au siècle des Lumières : 1775-1800, trad. fr., nelleéd., Paris, Seuil, 1992 (« Points Seuil », 159).

11 Privilège relatif à la publication d’une Encyclopédie méthodique ou par ordre de matières pour quarante ans, daté du 20 juin 1780 (Archives de Paris, 6 AZ 787, carton 126-2).

12 On trouve ordinairement le Prospectus général relié dans le tome premier de la partie Beaux-Arts : Encyclopédie méthodique. Beaux-arts, t. I, réd. Watelet et Levesque, Paris, Panckoucke, Liège, Plomteux, 1788.

13 Voir l’Avis sur la première livraison de l’Encyclopédie par ordre de matières qu’on trouve dans le même volume de la partie Beaux-Arts.

14 Parmi lesquels Demonville, la veuve Hérissant, Laporte, Simon, Stoupe, etc.

15 Édouard Gouep, Henri de Mannoury d’Ectot, La France biographique illustrée, Les Marins, Paris, 1877, 2 vol. Voir aussi la Biographie universelle…, nelle éd., 1851, t. XLIII, pp.  275-276

16 Essai géométrique et pratique sur l’architecture navale, à l’usage des gens de mer, Tome I [-II], Brest, R. Malassis, 1776, 2 vol., 8°.

17 Traité élémentaire de la construction des vaisseaux, à l’usage des élèves de la marine, Paris, Clousier, 1787, 4° ; 2eéd., Paris, Magimel, an XIII-1805.

18 Suzanne Tucoo-Chala, ouvr. cité, « L’écurie Panckoucke et son chef », pp.  129-190, et notamment p. 140 (notes 65 à 73).

19 Journal de marine, ou Bibliothèque raisonnée de la science du navigateur, Brest, R. Malassis, 1780, 8 part. en 1 vol., 4°. Blondeau a également donné une courte pièce, le Voyage de Moncacht-Apé, pour servir de suite ou de pendant aux Voyages de Guliver, Berne, Société typographique, 1778, 8°.

20 Dans le Prospectus de son Encyclopédie par ordre de matières, Charles-Joseph Panckoucke annonça un nombre précis de volumes pour chacune de ses parties. La volonté de nombreux auteurs d’augmenter leurs textes l’obligeait à annoncer une hausse du nombre de volumes, une augmentation du nombre des livraisons et un achèvement de l’encyclopédie toujours repoussé.

21 Posséder un exemplaire complet de l’Encyclopédie par ordre de matières signifiait en 1782 posséder cinquante volumes in-4° et cinquante ans plus tard, au terme de cette aventure éditoriale, cela revenait à détenir cent soixante volumes de texte in-4° et cinquante autres de planches…

22 Encyclopédie méthodique. Musique. Tome premier, réd. Framery, Ginguené, Paris, Panckoucke, Liège, Plomteux, 1791.

23 Ces trois noms sont donnés sur la page de titre du Dictionnaire de musique, tome II.

24 Un demi-siècle sépare la parution du premier volume de celle du dernier, de sorte que les quelque cent auteurs (au minimum) de l’Encyclopédie méthodique n’ont certainement pas survécu à sa fabrication et ont vu soit les débuts de l’entreprise soit son achèvement. À la désignation d’un nouveau collaborateur, l’éditeur devait passer un contrat avec l’auteur, sans négliger le fait que trois éditeurs se sont succédés à la tête de l’entreprise…

25 Robert Darnton, ouvr. cité, pp.  454-455. Le contrat de la partie Agriculture est aujourd’hui à la Bibliothèque de l’Université d’Amsterdam, Schenking Diederichs. La série de treize contrats complémentaires appartient à la Kenneth Spenser Research Library (Lawrence, Kansas).