Une production hors normes à Paris au début du XVIe siècle : les livres mathématiques (1480-1550)
Henri-Jean Martin a souvent montré dans ses travaux l’importance de prendre en considération la dimension économique du livre, en soulignant que la publication d’un texte est généralement indissociable de l’intérêt financier que le libraire-imprimeur peut tirer de cette opération1. Le coût de production de l’ouvrage, et surtout la possibilité d’en écouler les exemplaires auprès d’un large public, sont parmi les principaux éléments pris en compte par le libraire. Les livres mathématiques sont intéressants à étudier sous cette perspective parce qu’ils sont doublement problématiques : d’une part, ils sont plus coûteux à produire, puisqu’ils nécessitent un matériel spécialisé, comme des schémas techniques et des caractères typographiques spéciaux ; d’autre part, ils sont plus difficiles à écouler, puisqu’ils s’adressent à un public restreint. L’étude de la production mathématique apparaît en ce sens comme un moyen d’interroger le fonctionnement du marché parisien à travers les difficultés qui se posent et les manières dont ces problèmes sont résolus.
Le recensement des livres mathématiques
Les mathématiques à la Renaissance comprennent un grand nombre de disciplines que nous pouvons répartir en trois principaux ensembles : les disciplines du quadrivium (arithmétique, géométrie, astronomie, musique), les sciences mixtes, intermédiaires entre les mathématiques et la physique (perspective, optique, cosmographie), et les travaux sur les proportions et le mouvement2. Dans la suite des travaux des philosophes anciens, les auteurs du début de la Renaissance estiment que seules les disciplines purement théoriques et philosophiques sont proprement mathématiques : une définition qui s’atténue progressivement dans la première moitié du xvie siècle. À la lumière de ce constat, on peut considérer que la production des imprimés mathématiques parisiens comprend quatre types de publications : les livres scolaires et savants, les arithmétiques marchandes, les éditions du Computus manualis d’Anianus et les éditions du Cœur de philosophie.
Les livres scolaires et savants sont presque tous en latin et représentent près de 80 % de la production mathématique parisienne connue. Cela s’explique en partie par le fait que les universitaires sont les principaux lecteurs de textes mathématiques, mais aussi parce que ces livres ont généralement été conservés dans des bibliothèques institutionnelles, et nous sont donc mieux parvenus. Ces livres scolaires et savants sont principalement imprimés pour les étudiants de la Faculté des arts (pour qui l’enseignement des mathématiques est en principe une obligation), pour les étudiants des facultés supérieures (inscrits dans les cursus de théologie, droit ou médecine) et pour des mathématiciens professionnels. Ils suivent une histoire éditoriale propre et sont souvent publiés par les mêmes réseaux de libraires-imprimeurs, qui détiennent le matériel nécessaire à l’impression de ces textes.
On ne connaît que trois éditions d’arithmétiques marchandes à Paris dans la première moitié du xvie siècle, représentées chacune par un seul exemplaire3. Elles sont toutes en français et publiées par des libraires-imprimeurs qui produisent pour un plus large public. Elles diffèrent des arithmétiques scolaires aussi bien sur le plan de leur forme que de leur contenu, puisqu’elles ne sont pas conçues pour mieux comprendre la philosophie, mais pour être des outils du quotidien. Par ailleurs, les arithmétiques marchandes ne présentent pas les mêmes difficultés de production que les textes plus avancés, notamment parce qu’elles peuvent être facilement commercialisées.
Les éditions du Computus manualis d’Anianus représentent environ 15 % de la production mathématique parisienne des années 1480-1550. Depuis le Moyen Âge, le calcul des fêtes liturgiques mobiles pose des problèmes à l’Église, parce qu’il nécessite des connaissances en astronomie et en arithmétique4. Des textes de comput sont donc rédigés pour expliquer ou simplifier ces calculs et sont aussi souvent enseignés à la Faculté des arts dans le cadre des cours de mathématiques5. Le Computus manualis d’Anianus, probablement rédigé au xive siècle6, est un ouvrage largement diffusé à Paris au début de l’époque moderne. Nous connaissons plus de trente éditions parisiennes de ce texte entre la fin des années 1480 et le début des années 1530, parmi lesquelles plusieurs ne sont connues que par un seul exemplaire. Toutes les éditions en sont en latin, donc probablement destinées aux clercs et aux étudiants.
Enfin, le Cœur de philosophie est un recueil anonyme en français de trois textes philosophiques et mathématiques : le Dialogue de Placides et Timéo, le Traité de la sphère de Nicole Oresme et une réécriture du Computus manualis7. L’origine de ce recueil n’est pas précisément connue : selon la préface, les pièces auraient été rassemblées et traduites pour Philippe Le Bel, mais dans les faits l’ouvrage résulterait plutôt d’une initiative contemporaine8. La première édition est donnée à Paris en 1504 par le libraire parisien Antoine Vérard, qui pourrait être à l’initiative du recueil9. Celui-ci connaît par la suite un succès progressif, avec une réédition en 1514, deux dans les années 1520 et quatre dans les années 1530. Il disparaît toutefois à partir des années 1540, avec l’émergence d’une littérature mathématique en français plus avancée.
La production des livres mathématiques à Paris
Nous recensons à ce jour 228 éditions mathématiques imprimées à Paris de 1480 à 1550. Elles représentent en moyenne 1,1 % de la production parisienne connue, pouvant, en fonction des périodes, varier de 0,6 % (1535-1540) à 2,1 % (1508-1515)10.
L’évolution de la production
La production mathématique parisienne scolaire et savante – qui représente la plus grande part des livres mathématiques imprimés à Paris – peut se répartir en trois périodes principales : une production mathématique avant tout locale (1480-1515), une production mathématique plus ouverte sur l’Europe (1516-1541), et une production mathématique qui se confond avec ce qui se fait dans l’ensemble de l’Europe (1542-1550).
Les premiers livres mathématiques imprimés à Paris dans les années 1480-1494 se situent dans la continuité des enseignements médiévaux : ils comprennent surtout des opuscules d’arithmétique et des traités de la sphère. Dans les années 1495-1502, cette production est renouvelée en raison de la publication de deux programmes d’enseignement des mathématiques plus approfondis : ceux de Jacques Lefèvre d’Étaples et Pedro Sánchez Ciruelo. Ces programmes donnent lieu dans les années 1503-1515 au développement de deux courants d’enseignement des mathématiques : d’une part un courant traditionnel et classique, principalement influencé par la pensée des philosophes anciens, et d’autre part un courant dérivé des travaux des calculatores du xive siècle, qui s’intéressent aux questions de proportions et de mouvement, et accordent, à la différence des anciens, une place centrale à la physique dans les études mathématiques11. Le premier courant est avant tout enseigné au collège du Cardinal-Lemoine, autour de Jacques Lefèvre d’Étaples et de ses disciples12, alors que le second est enseigné dans les collèges parisiens de tradition ibérique : ceux de Coqueret, Sainte-Barbe et Montaigu.
Les deux courants d’enseignement dépendent de l’activité d’une génération de professeurs qui préparent majoritairement leur doctorat et enseignent les arts libéraux dans les collèges parisiens. Dans la deuxième moitié des années 1510, la plupart d’entre eux quittent leur fonction pour se consacrer à d’autres activités. En conséquence, les deux courants se dissipent et la production de textes mathématiques scolaires ralentit. En parallèle, la nouvelle génération d’auteurs et professeurs commence à publier des textes mathématiques plus avancés, en phase avec les principaux débats de la Renaissance : les traductions d’Euclide, le mouvement des planètes, la huitième sphère, et autres13. Les années 1520 se caractérisent ainsi par un nombre plus restreint de publications mathématiques à Paris, mais aussi par une plus grande diversification de cette littérature désormais destinée aux mathématiciens de toute l’Europe.
Dans les années 1530, le Collège Royal est fondé et la production mathématique scolaire s’en trouve relancée. Les mathématiques sont doublement affectées par le développement de cette institution car elles sont enseignées à la fois dans les cours de mathématiques à proprement parler (Oronce Fine obtient la première chaire d’enseignement parisienne exclusivement consacrée aux mathématiques) et dans les cours de grec (des textes mathématiques classiques sont alors publiés dans des éditions bilingues). En parallèle, la production mathématique savante continue à s’enrichir : d’une part, la géométrie et la cosmographie, disciplines peu imprimées à Paris, y prennent une place plus importante ; d’autre part, les auteurs contemporains étrangers, dont les textes sont premièrement publiés ailleurs, commencent à être réédités dans les ateliers parisiens.
Les années 1540 annoncent une profonde reconfiguration de la production mathématique parisienne qui se poursuit dans la seconde moitié du xvie siècle. Premièrement, les auteurs contemporains étrangers deviennent majoritaires dans la production inédite. Ensuite, sur le plan formel, les livres mathématiques parisiens adoptent une présentation plus homogène, qui se rapproche des autres publications réalisées à Paris, mais aussi de ce qui se fait plus largement en Europe. Enfin, la littérature mathématique savante s’ouvre à un plus large public : dès lors, un plus grand nombre de textes mathématiques sont rédigés en français, ou traduits.
Les textes et les auteurs
Les trois textes mathématiques les plus réédités à Paris dans les années 1480-1550 représentent à eux seuls le tiers de la production mathématique scolaire et savante de la capitale : le De sphaera de Jean de Sacrobosco, largement diffusé dans le monde universitaire depuis le xiiie siècle14, la Sphaïra du pseudo-Proclus (aujourd’hui attribuée à Géminos de Rhodes) principalement imprimée pour les enseignements du Collège Royal, et les Éléments de géométrie d’Euclide, presque toujours publiés sous des formes partielles ou adaptées15.
En dépit du poids de ces publications anciennes et médiévales dans la production parisienne, la plus grande part des textes mathématiques imprimés à Paris est moderne. Dans le premier quart du xvie siècle, les auteurs de ces textes modernes sont principalement des professeurs de collèges parisiens qui publient des livres pour leurs étudiants. Il s’ensuit que leurs textes ne sont souvent pas réédités après leur départ. Par ailleurs, près de la moitié des auteurs qui enseignent les mathématiques à Paris sont étrangers : espagnols (principalement), portugais, néerlandais, italiens et suisses.
Dans le deuxième quart du xvie siècle, les libraires-imprimeurs parisiens publient davantage de textes mathématiques de leur propre initiative. En parallèle, les auteurs qui publient des textes mathématiques sur place sont moins impliqués dans les choix formels de leurs publications – désormais relevant des habitudes des ateliers – même s’ils continuent à être régulièrement sollicités pour la révision des textes (Oronce Fine, souvent présent dans les ateliers, constitue une exception). Dans les années 1540, la production mathématique parisienne se trouve donc essentiellement entre les mains des libraires-imprimeurs.
Les libraires-imprimeurs
Plus de 90 libraires-imprimeurs participent à la production des 228 éditions mathématiques imprimées à Paris entre 1480 et 1550. La moitié de ces éditions est toutefois prise en charge par six d’entre eux, Henri Estienne, Jean Petit, Simon de Colines, Regnault Chaudière, Chrétien Wechel et Jean Loys. À l’inverse, une quarantaine de libraires-imprimeurs n’est impliquée que dans la publication d’un seul livre mathématique – souvent une édition du Computus manualis. Pour quelle raison la production mathématique est-elle aussi concentrée ?
Ce répertoire présente trois principales difficultés : le coût de fabrication des livres (en raison du matériel spécialisé à acquérir), l’écoulement des exemplaires (adressés à un public restreint) et la révision des informations techniques16. Ces difficultés découragent la plupart des libraires-imprimeurs de publier des textes mathématiques sur le long terme, tout en favorisant le monopole de ceux qui peuvent les imprimer et en tirer profit.
Les premières publications mathématiques en Italie au début des années 1470 posaient déjà des problèmes relatifs à l’acquisition des schémas techniques. Les libraires-imprimeurs laissaient alors de grands espaces blancs entre les paragraphes pour les introduire manuellement17. Dans les années 1480, ce problème est toujours présent à Paris, en particulier pour les représentations de l’abaque (le calcul avec les jetons) dans les arithmétiques scolaires18. Les libraires-imprimeurs parisiens commencent à acquérir des illustrations techniques à partir de la fin des années 1480 et surtout dans les années 1490 pour la publication des programmes de Lefèvre et Ciruelo.
Les caractères typographiques spéciaux constituent un autre problème. Dans les années 1480, la plupart des libraires-imprimeurs parisiens ne possèdent pas de chiffres arabes dans leur matériel, l’usage à Paris étant celui des chiffres romains. Des libraires-imprimeurs qui souhaitent publier des textes mathématiques doivent donc laisser des espaces blancs à la place des chiffres (mais les opérations mathématiques sont difficilement compréhensibles19) ou bien convertir les données en chiffres romains (ce qui n’est toutefois pas possible pour les textes d’algorithmique20). Dans les années 1510, la plupart des ateliers parisiens possèdent des caractères chiffrés, mais le problème se déplace avec l’apparition des caractères spéciaux : chiffres barrés en 151321 [ill. 1] et symboles astronomiques en 152122.
Par ailleurs, en raison de la restriction des publics, des libraires-imprimeurs qui publient déjà des livres mathématiques peuvent être amenés à abandonner ce domaine s’ils ne peuvent pas suivre les évolutions du marché ou s’ils ne souhaitent pas investir davantage dans une production spécialisée. De ce fait, Antoine Caillaut, qui publie la plupart des livres mathématiques à Paris dans les années 1480, abandonne au milieu des années 1490, lorsque Wolfgang Hopyl et Guy Marchant commencent à imprimer les programmes de Jacques Lefèvre d’Étaples et Pedro Sánchez Ciruelo. Dans le deuxième quart du xvie siècle, les libraires-imprimeurs qui ne sont pas spécialisés dans la publication des textes mathématiques sont de moins en moins nombreux dans le secteur.
Les livres mathématiques sont enfin problématiques en raison des difficultés relatives à la révision des textes : relire des opérations mathématiques et des démonstrations exige une formation. Les auteurs sont parfois présents dans les ateliers ou envoient des étudiants pour réviser les épreuves, et reconnaissent que ces textes sont particulièrement complexes à relire23. De plus, même chez les libraires-imprimeurs les plus diligents, les opérations et tables de coordonnées peuvent présenter des différences d’une édition à l’autre. Lorsqu’il n’y a aucune révision de la part d’un auteur, les textes peuvent être très erronés. Les lecteurs le ressentent et en sont parfois mécontents : ainsi, un lecteur qui est peut-être Guillaume Postel note sur la page de titre d’un ouvrage, légère variation sur une sentence de Pline le Jeune, « qu’aucun livre n’est aussi inutile au point de n’avoir rien à offrir »24.
Les libraires-imprimeurs spécialisés dans la production des livres mathématiques sont protégés de ces difficultés parce qu’ils possèdent déjà le matériel nécessaire à l’impression de ces textes, sont connus des publics de ces livres et entretiennent des relations étroites avec les auteurs susceptibles de réviser leurs publications. Mais pourquoi choisissent-ils de se spécialiser dans ce domaine ?
Les principaux libraires-imprimeurs de textes mathématiques à Paris s’inscrivent dans des réseaux familiaux eux-mêmes spécialisés dans ce type de publications, les titres à imprimer et le matériel nécessaire à leur impression se transmettant par les femmes. L’appartenance à un réseau permet au libraire-imprimeur de bénéficier d’un matériel spécialisé qu’il partage au besoin avec son entourage, tout en garantissant que la publication de ces textes reste entre les mains d’un nombre restreint de collègues qui ne se concurrencent pas. La plus grande part de la production mathématique parisienne est ainsi successivement prise en charge par deux réseaux : d’un côté, celui qui se construit autour de la personne de Guyonne Viart, incluant Wolfgang Hopyl, Jean Higman, Henri Estienne, Simon de Colines, Regnault Chaudière et Claude Chaudière25 ; de l’autre, celui qui s’organise autour des sœurs Perette et Marie Aleaume, incluant Jean Loys, Guillaume Richard, Thomas Richard et Guillaume Cavellat26.
Des libraires-imprimeurs qui ne publient pas de textes mathématiques peuvent toutefois s’intéresser à cette production pour des questions stratégiques. Par exemple, le développement du courant des calculatores à Paris dans les années 1508-1515 provoque une augmentation de la demande de livres mathématiques et donc l’ouverture d’un nouveau secteur de marché. Plusieurs libraires-imprimeurs commencent à publier des textes mathématiques pour répondre à cette demande (principalement rue Saint-Jacques devant le cloître Saint-Benoît), et Jean Petit devient l’un des professionnels les plus productifs sur le sujet. Toutefois, la plupart de ces libraires-imprimeurs abandonnent la production des textes mathématiques après le départ des calculatores, ou publient seulement des ouvrages mathématiques adressés à un plus large public.
Les livres mathématiques peuvent enfin représenter pour les libraires-imprimeurs un moyen de mettre en avant les qualités techniques et esthétiques de leurs publications. Plusieurs ont ainsi commencé leur carrière en imprimant un texte mathématique ou se sont fait connaître par la publication de ces livres. Thomas Kees, par exemple, qui possède une importante série de bois astronomiques et astrologiques, est souvent sollicité par les libraires parisiens pour l’impression des textes sur le sujet : ces livres sont aussi parmi les seuls qu’il commercialise à son nom, en apposant sur la page de titre un bois historié à défaut de posséder une marque propre. Les libraires-imprimeurs qui publient des textes mathématiques pour montrer les qualités de leurs travaux sont souvent également les plus inventifs, et ceux qui marquent le plus l’histoire de cette production27.
Les livres mathématiques et leurs publics
La production des textes est largement influencée par les publics auxquels ils sont destinés. Les lecteurs (tels que les libraires-imprimeurs se les représentent) déterminent les ouvrages qui sont mis sur le marché et la manière dont ils sont imprimés. Toutefois, nous ne pouvons pas toujours approcher directement ces publics, parce qu’ils ne sont souvent pas désignés de manière explicite dans l’ouvrage : pour les étudier, nous devons donc nous intéresser à la manière dont les livres se présentent et aux exemplaires ayant appartenu à ces lecteurs.
Des lieux de publication spécifiques en fonction des publics
Les livres sont souvent publiés à proximité de leurs publics. De ce fait, les livres mathématiques scolaires et savants sont essentiellement imprimés dans le Quartier Latin (le quartier universitaire), alors que les livres destinés à un plus large public sont principalement imprimés dans l’Île de la Cité (au cœur de Paris).
Dans le premier quart du xvie siècle, les livres mathématiques scolaires et savants sont surtout publiés dans un quadrilatère du Quartier Latin comprenant la première moitié de la rue Saint-Jacques, la rue Saint-Jean-de-Latran, la rue Saint-Jean-de-Beauvais et le Clos-Bruneau. Les imprimeurs, quant à eux, se trouvent aussi dans le Quartier Latin, mais dans des espaces plus périphériques : au Petit-Pont, place Maubert, rue Clopin, rue Judas, rue des Carmes (devant le collège des Lombards) et au mont Saint-Hilaire. Dans le deuxième quart du xvie siècle, la rue Saint-Jean-de-Beauvais devient le principal pôle de commercialisation des livres mathématiques, avec la rue des Carmes et le mont Saint-Hilaire.
Les trois arithmétiques marchandes sont quant à elles publiées dans l’Île de la Cité : deux sont imprimées rue Neuve-Notre-Dame et l’autre rue de la Juiverie28, deux rues très proches qui se rencontrent sur le Marché-Palu. Un seul libraire situé dans l’Île de la Cité publie un livre mathématique savant, Galliot Du Pré, mais ce dernier travaille alors avec Jean Petit, installé rue Saint-Jacques29.
Les éditions du Computus manualis et du Cœur de philosophie sont imprimées aussi bien dans le Quartier Latin que dans l’Île de la Cité, parfois dans le cadre d’une collaboration entre des libraires-imprimeurs situés dans les deux quartiers : cette répartition montre que ces ouvrages s’adressent à un lectorat qui n’est pas précisément défini. Les libraires-imprimeurs qui assurent l’édition de ces textes publient parfois des livres mathématiques scolaires et savants, surtout pendant la période des calculatores. En revanche, ces textes ne sont pas pris en charge par les professionnels spécialisés, appartenant à un réseau et connus pour la publication de textes mathématiques avancés.
Les choix de mise en page, le reflet d’un public
Lorsqu’un libraire-imprimeur publie un texte, il peut suivre un modèle déjà existant ou bien l’imprimer en s’appuyant sur son propre modèle de mise en page – dans certains cas, un auteur peut aussi fournir un manuscrit déjà mis en page. Les choix formels des publications (format, caractères typographiques, illustrations, etc.) ne sont pas laissés au hasard mais pensés en fonction des attentes du public.
Un libraire-imprimeur peut parfois introduire une nouveauté, mais il n’a pas de garantie quant au succès de celle-ci. Par exemple, en 1489, Wolfgang Hopyl publie l’édition princeps parisienne du De sphaera de Jean de Sacrobosco en caractères romains30, suivant peut-être en cela le modèle vénitien d’Erhard Ratdolt, dont il utilise la deuxième édition31. Toutefois, les caractères romains ne sont régulièrement utilisés dans les éditions du De sphaera qu’à partir des années 1520. Entre-temps, les libraires-imprimeurs qui reprennent le modèle d’Hopyl utilisent des caractères gothiques, et Hopyl lui-même utilise les gothiques pour ce texte à partir des années 1490.
Le libraire-imprimeur qui souhaite avant tout commercialiser des livres doit donc s’en tenir aux valeurs sûres. Dans les années 1503-1515, la production mathématique parisienne se répartit en deux ensembles immédiatement repérables : les livres destinés aux enseignements traditionnels et classiques des mathématiques suivent un modèle plus italien et humaniste (même si des particularités parisiennes subsistent), alors que ceux destinés aux enseignements des calculatores suivent un modèle plus ibérique et médiéval, souvent avec une disposition du texte en deux colonnes et une page de titre en rouge et noir.
Les livres qui échappent aux conventions doivent aussi retenir notre attention parce que ces choix sont généralement réfléchis. Par exemple, en 1514, Juan Martinez Siliceo, initialement rattaché au courant des calculatores, publie une arithmétique théorique et pratique qui se rapproche par sa forme des publications d’Henri Estienne32. Ce choix est probablement celui de l’auteur qui fait l’éloge dans son introduction des travaux de Lefèvre d’Étaples et Josse Clichtove. En outre, nous savons que Siliceo était très présent dans les ateliers typographiques parisiens, puisqu’il fit graver les premiers caractères mathématiques spéciaux connus à Paris et une marque d’auteur à ses initiales33. Sur le long terme, l’arithmétique de 1514 est le seul ouvrage issu du courant des calculatores qui continue à être publié à Paris après la dissolution des deux courants.
Les recueils comme un moyen d’accès aux programmes d’enseignement
Les recueils contemporains des éditions nous permettent dans certains cas de comprendre comment l’enseignement des mathématiques s’organisait à Paris. Par exemple, dans les années 1480-1494, les textes mathématiques compris dans des recueils scolaires sont presque toujours placés en dernière position34 : dans la continuité des enseignements médiévaux, les mathématiques apparaissent comme des disciplines complémentaires au cursus commun35.
L’édition commentée par Jacques Lefèvre d’Étaples du De sphaera de Sacrobosco, publiée par Wolfgang Hopyl en février 1495 (n.st.), annonce un enseignement des mathématiques plus approfondi à Paris36. Toutefois, dans un premier temps, cet enseignement reste encore en marge de celui des autres disciplines. En effet, presque tous les exemplaires connus de cette édition sont reliés à la suite d’un autre ouvrage, le Textus abbreviatus de Thomas Bricot sur la Physique et la Métaphysique d’Aristote, publié par Hopyl en novembre 149437. Les deux livres sont donc probablement enseignés ensemble, suivant les indications des statuts universitaires de 1452 : aucun étudiant ne sera admis en licence sans avoir étudié la Métaphysique « et quelques livres mathématiques »38.
Les mathématiques commencent à devenir un enseignement à part entière à partir de 1496 avec la publication d’un recueil éditorial de Lefèvre contenant quatre textes sur l’arithmétique et la musique. Ils sont précédés de préfaces qui se répondent et qui suggèrent l’existence d’un enseignement des mathématiques s’étendant sur la durée, avec des renvois vers les textes vus « en ces jours » ou « ces derniers jours »39. En 1500, le De sphaera édité par Lefèvre est lui aussi associé à d’autres textes sur la géométrie et les instruments astronomiques : dès lors, toutes les disciplines du quadrivium sont représentées dans le programme40. En 1503, Lefèvre et ses disciples publient un manuel quadrivial plus avancé, essentiellement constitué de textes modernes sur l’arithmétique, la géométrie et l’astronomie41. L’enseignement de ces textes demeure toutefois dépendant de la présence des auteurs dans le collège : après leur départ, seule la partie arithmétique est rééditée42.
L’émergence d’un public : les lecteurs de textes mathématiques en français
Les textes mathématiques savants en français sont presque inexistants à Paris avant les années 1540. Premièrement, parce que les auteurs sont réticents à l’idée de publier des textes mathématiques dans une langue qui n’est pas aussi technique et réglementée que le latin43. Ensuite, parce que le public parisien ne semble lui-même pas manifester un intérêt particulier pour ces textes : le Cœur de philosophie – avant tout apprécié pour ses illustrations historiées – est le seul texte mathématique en français à être régulièrement réédité à Paris.
Seuls deux auteurs proposent avant les années 1540 des textes mathématiques avancés en français : Charles de Bovelles et Oronce Fine. Le premier publie la Géométrie française en 1511, et le second publie la Théorie des ciels en 152844. Tous deux prennent toutefois des précautions. En particulier, Bovelles fait précéder son texte d’une préface en latin, et publie l’ensemble chez Henri Estienne, connu avant tout pour ses publications savantes. Fine, quant à lui, soumet la publication de son texte à Jean Pierre de Tours et Simon du Bois, connus pour leurs impressions en français. Ces derniers utilisent même pour ce livre des caractères bâtards, propres à l’édition vernaculaire. En revanche, Fine ne signe pas l’ouvrage de son nom, et n’est reconnaissable que par sa devise.
Dans les années 1540, le rapprochement des mathématiques savantes et utiles rend les auteurs plus ouverts à la publication des ouvrages destinés à un plus large public. De plus, la plupart des lettrés parisiens ont bénéficié du développement de l’enseignement des mathématiques à Paris, et peuvent donc s’intéresser à des textes plus avancés. En 1542, la Géométrie française est rééditée par Bovelles et Fine, et la production des textes mathématiques en français est relancée : en 1550, ces ouvrages sont déjà nombreux à Paris45. Dans le même temps, les éditions du Cœur de philosophie ne sont plus imprimées à partir des années 1540. L’émergence d’un lectorat pour les textes mathématiques avancés en français semble donc résulter avant tout du déplacement de l’intérêt d’un public déjà existant : au milieu du xvie siècle, le contexte de publication des textes mathématiques à Paris est profondément reconfiguré.
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1 H.-J. Martin, L’Apparition du livre, Paris, Albin Michel, 1958 ; Id., « Comment mesurer un succès littéraire. Le problème des tirages », La Bibliographie matérielle, dir. Jacques Petit, éd. Roger Laufer et Jeanne Veyrin-Forrer, Paris, Éd. du CNRS, 1983, p. 25-42.
2 Sur l’organisation des disciplines mathématiques à la Renaissance : Jean-Marc Mandosio, « Méthodes et fonctions de la classification des sciences et des arts (xve-xviie siècles) », Nouvelle Revue du seizième siècle, 20-1, 2002, p. 19-30 ; Id., « Entre mathématiques et physique : Note sur les sciences intermédiaires à la Renaissance », dans Comprendre et maîtriser la nature au Moyen Âge. Mélanges d’histoire des sciences offerts à Guy Beaujouan, Genève, Droz, 1994, p. 115-138 ; Angela Axworthy, Le mathématicien renaissant et son savoir : Le statut des mathématiques selon Oronce Fine, Paris, Classiques Garnier, 2016 ; Shinichiro Higashi, Penser les mathématiques au xvie siècle, Paris, Classiques Garnier, 2018.
3 Art et science d’arithmétique, Paris, Jean Jehannot et veuve Trepperel, [1512-1517], in-12 ; Arithmétique corrigée, Paris, Guillaume Nyverd, c. 1515, in-8 ; Art et science d’arithmétique, Paris, Pierre Sergent, [1547], in-8.
4 David-Eugène Smith, Le Comput manuel de magister Anianus, Paris, E. Droz, 1928.
5 Olaf Pedersen, « The Corpus Astronomicum and the Traditions of Medieval Latin Astronomy: A Tentative Interpretation », Colloquia Copernicana III, dir. Owen Gingerich et Jerzy Dobrzycki, Wroclaw, Ossolineum, 1975, p. 59-76.
6 David-Eugène Smith, Le Comput manuel de magister Anianus… op. cit.
7 Sur les textes du Cœur de philosophie, Christine Silvi, « Du manuscrit au premier imprimé : le cas, exemplaire, du Placides et Timéo », dans Les sciences et le livre : formes des écrits scientifiques des débuts de l’imprimé à l’époque moderne, dir. Joëlle Ducos, Paris, Hermann, 2017, p. 25-46.
8 Ibid.
9 Ibid.
10 D’après les données d’ISTC et BP16 relatives à la production parisienne des années 1480-1500 et 1501-1550.
11 Mathématiques et théorie du mouvement, xive-xvie siècles, dir. Joël Biard et Sabine Rommevaux, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2008 ; William A. Wallace, « The Calculatores in Early Sixteenth-century Physics », The British Journal for the History of Science, 4-3, 1969, p. 221-232 ; Calixto P. Calderon, « The 16th century Iberian calculatores », Revista de la Unión Matemática Argentina, 35, 1990, p. 245-258.
12 Richard Oosterhoff, Making Mathematical Culture: University and Print in the Circle of Lefevre d’Étaples, Oxford, OUP, 2018.
13 Sur ces débats : Isabelle Pantin, La poésie du ciel en France dans la seconde moitié du xvie siècle, Genève, Droz, 1995.
14 Lynn Thorndike, The Sphere of Sacrobosco and its Commentators, Chicago, University of Chicago Press, 1949.
15 Cf. Odile Kouteynikoff, François Loget et Marc Moyon, « Quelques lectures renaissantes des Éléments d’Euclide », dans Les ouvrages de mathématiques dans l’histoire. Entre recherche, enseignement et culture, dir. Eveline Barbin et Marc Moyon, Limoges, PULIM, 2013, p. 13-28.
16 I. Pantin, « Les problèmes spécifiques de l’édition des livres scientifiques à la Renaissance : l’exemple de Guillaume Cavellat », dans Le livre dans l’Europe de la Renaissance. Actes du xxviiie colloque international d’études humanistes de Tours, juillet 1985, dir. Pierre Aquilon, Henri-Jean Martin et François Dupuigrenet Desroussilles, Paris, Promodis, 1988, p. 240-252.
17 Jean de Sacrobosco, De sphaera, Ferrare, André Belfort, 1472, in-4 ; Id, [Venise, Florentius de Argentina, ante 8 V 1472], in-4.
18 [Georges de Hongrie], Ars numerandi compendium, [Paris, Antoine Caillaut, 1482-1483], in-4 ; Id., Arithmetica quadripartita, [Paris, Antoine Caillaut et Louis Martineau, 1482-1485], in-4.
19 [Georges de Hongrie], Ars numerandi… op. cit.
20 Jean de Sacrobosco, De sphaera, Paris, Wolfgang Hopyl, 1489, in-4.
21 Juan Martinez Siliceo, Liber de arithmetice practice, Paris, Thomas Kees pour Jean Petit et Jean Lambert, 1513, in-fol.
22 Alcabitius, Isagoge, Paris, Simon de Colines, 1521, in-fol.
23 Jean de Sacrobosco, De sphaera, éd. et comment. Jacques Lefèvre d’Étaples, Paris, Wolfgang Hopyl, 1495, in-fol., f. A1v. ; Juan Martinez Siliceo, Arithmetica in theoricen et praxim, éd. Oronce Fine, Paris, Henri Estienne, 1519, in-fol., f. L6.
24 « Nullus usque tam inutilis liber est quin aliqua parte prosit », dans : Thomas Bradwardine, Geometria speculativa, éd. Pedro Sánchez Ciruelo, Paris, Jean Marchant pour Jean Petit, 1511/2, in-fol., Bibliothèque Mazarine, 2° 4621-9, f. A1r.
25 Guyonne Viart épouse successivement Jean Higman (premier associé d’Hopyl), Henri Estienne (second associé d’Hopyl) et Simon de Colines (associé d’Estienne). La fille de Guyonne Viart et Jean Higman, Geneviève Higman, épouse Regnault Chaudière (associé de Colines), et ils ont pour fils Claude Chaudière. Cf. Philippe Renouard, Imprimeurs parisiens, Paris, M. J. Minard, 1965, p. 77-78, 88-89, 140-141, 204, 206-207.
26 Ces derniers sont liés aux sœurs Perette et Marie Aleaume, qui épousent respectivement Jean Loys et Guillaume Richard, puis en secondes noces Thomas Richard et Guillaume Cavellat. Cf. Philippe Renouard, Imprimeurs parisiens… op. cit., p. 70, 286, 370.
27 Nous pouvons aussi penser à Erhard Ratdolt. Cf. Gilbert R. Redgrave, Erhard Ratdolt and His Work at Venice : A Paper Read Before the Bibliographical Society (November 20, 1893), Londres, Chiswick Press, 1894.
28 Art et science d’arithmétique… op. cit., [1512-1517] ; Arithmétique corrigée… op. cit. ; Art et science d’arithmétique… op. cit., [1547].
29 Johann Stöffler, Ephemeridum (1532-1555), Paris, Jean Petit et Galliot du Pré, 1533, in-4.
30 Jean de Sacrobosco, De sphaera… op. cit., 1489.
31 Id., De sphaera, Venise, Erhard Ratdolt, 1485, in-4. Ratdolt donne une première édition de ce traité en 1482, mais Hopyl s’appuie sur la deuxième édition.
32 Juan Martinez Siliceo, Arithmetica in theoricen et praxim, Paris, Thomas Kees pour Hémon Le Fèvre, 1514, in-4.
33 Philippe Renouard, Les marques typographiques parisiennes des xve et xvie siècles, Paris, Honoré Champion, 1928, n° 601. Les initiales de l’auteur sont ensuite remplacées par d’autres motifs.
34 Paris, Bibliothèque de l’Arsenal, 4 BL 5180 ; Bibliothèque Mazarine, Inc 412 ; Bibliothèque Sainte-Geneviève, OEXV 810 (3) RES ; Troyes, Bibliothèque municipale, Inc 294/300.
35 Guy Beaujouan, « Le quadrivium et la Faculté des arts », L’enseignement des disciplines à la Faculté des arts (Paris et Oxford, xiiie-xve siècles), dir. Olga Weijers et Louis Holtz, Turnhout, Brepols, 1997, p. 185-194.
36 Jean de Sacrobosco, De sphaera… op. cit., 1495.
37 Thomas Bricot, Textus abbreviatus in cursum totius physices et metaphysicorum Aristotelis, Paris, Jean Higman et Wolfgang Hopyl, 1494, in-fol. ; Jean de Sacrobosco, De sphaera, Paris, Wolfgang Hopyl, 1495, in-fol. Paris, BnF, RES M 55, RES M 58 ; Bibliothèque Mazarine, Inc 750 ; Bibliothèque interuniversitaire de médecine et santé, 1398 ; Albi, Bibliothèque municipale, Inc 150 ; Clermont-Ferrand, Bibliothèque municipale et interuniversitaire, I 222.
38 Chartularium Universitatis Parisiensis, T.4., éd. Henri Denifle et Émile Chatelain, Paris, Delalain, 1889, p. 729.
39 Jordan de Nemore, Elementa arithmetica, Paris, Jean Higman et Wolfgang Hopyl, Paris, 1495, in-fol.
40 Jean de Sacrobosco, De sphaera, éd. Jacques Lefèvre d’Étaples, Paris, Wolfgang Hopyl, 1500, in-fol.
41 Jacques Lefèvre d’Étaples, Epitome in libros arithmeticos Severini Boetii, comment. Josse Clichtove, Paris, Wolfgang Hopyl et Henri Estienne, 1503, in-fol.
42 Id., Paris, Henri Estienne, 1511, in-fol. ; Id., Paris, Simon de Colines, 1522, in-fol.
43 Paul Oscar Kristeller et Edward P. Mahoney, « The scholar and his public in the late Middle Ages and the Renaissance », dans Medieval Aspects of Renaissance Learning: three essays, [rééd.] New York, Columbia University, 1992, p. 1-25.
44 Charles de Bovelles, Géométrie française, Paris, Henri Estienne, 1511, in-4 ; Oronce Fine, La théorie des ciels, Paris, Simon du Bois et Jean Pierre de Tours, 1528, in-fol.
45 Charles de Bovelles, Géométrie française, Paris, Simon de Colines, 1542, in-4 ; Id., Paris, Regnault et Claude Chaudière, 1547, in-4 ; Dominique Jacquinot, L’usage de l’astrolabe, Paris, Jean Barbé, Jacques Gazeau, Vincent Sertenas, 1545, in-4 ; Jean de Sacrobosco, La sphère, trad. Martin Perer, Paris, Jean Loys, 1546, in-8 ; Alessandro Piccolomini, La sphère du monde, trad. Jacques Goupyl, Paris, Guillaume Cavellat, 1550, in-4.