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Rébellions et gazettes. La médiatisation des guerres des paysans en Autriche (1626) et en Suisse (1653)

Andreas WÜRGLER

Université de Genève

La presse naissante du xviie siècle est connue pour son faible pour la guerre. Les gazettes remplissaient leurs pages de rapports de batailles et de sièges, de recrutements, déplacements et hébergements de troupes1. Même si la première gazette périodique imprimée fut publiée – en allemand – dès 1605 à Strasbourg, c’est pendant – et aussi, à cause de – la guerre de Trente Ans (1618-1648) que cette forme de diffusion régulière de nouvelles se répandit rapidement en Europe. La question de savoir, si cet intérêt pour la guerre des nouvellistes et des lecteurs s’étendait également aux guerres paysannes, n’a pourtant été posée, ni par l’histoire des médias, ni par l’histoire des révoltes2.

Cet article tentera donc de saisir les représentations, dans les gazettes imprimées, des rébellions rurales qualifiées de « guerres des paysans ». On aura préalablement tenté de clarifier les termes clés – « rébellion », « guerre des paysans », « gazette », « médiatisation » – et rappelé brièvement l’état des recherches concernant les deux cas retenus pour notre étude.

RÉBELLIONS ET GAZETTES

Le terme de « rébellion » est généralement utilisé comme expression générique pour une grande variété d’actes de protestation et de résistance à l’époque moderne. Il n’existe pas, dans l’historiographie germanophone, d’unité de doctrine quant au terme le plus apte à désigner les formes de contestation et de désobéissance contre des autorités princières ou républicaines, seigneuriales ou ecclésiastiques. On recourt souvent à des traductions ou des équivalents de termes juridiques latins (seditio, rebellio, tumultus) comme, en allemand, « Aufruhr », « Aufstand », « Empörung », « Spenn », « stöss », « Irrung », « Rebellion », « Revolte » ou, en français, « émotion », « trouble », « émeute », « sédition », « soulèvement », « rébellion », « révolte3 ». Dans l’Enzyklopädie der Neuzeit, Wolfgang Schmale souligne, en définissant la révolte (comme la rébellion) qu’elle recouvre « une variété mal définie de résistances contre diverses formes et types d’exercice du pouvoir. Les démarcations entre les termes “protestation”, “troubles”, “mouvements bourgeois, “émeute de subsistance”, “insurrection” et même “révolution” et “guerre des paysans”, sont flous. ». Le terme désigne « une agglomération de diverses formes de résistance et de protestation » dans lesquelles « la violence joue un rôle », sans « pourtant atteindre la dimension idéologique d’une révolution ou d’une guerre4 ». La tradition française souligne le facteur de violence. Pour Yves-Marie Bercé, il y a un « commun dénominateur de révolte et révolution, savoir la violence politique5 ». Selon Jean Nicolas, « La rébellion française… porte sur les aspects de la violence collective non canalisée6 » et pour Gauthier Aubert la révolte est « le fait de mener une action collective impliquant l’usage de la force physique7 ». Lorsque des rébellions mobilisaient les paysans en grand nombre – pour la Haute-Autriche en 1626, les sources parlent de plus de 100 000 hommes, et pour la Suisse en 1653, la littérature en mentionne plus de 80 0008 – elles avaient recours à la violence armée et suscitaient de véritables batailles contre les forces militaires du pouvoir ; alors, les contemporains ne parlaient pas seulement de « révoltes » ou de « rébellions », mais parfois, de « guerres des paysans9 ».

Les gazettes sont, au xviie siècle, le médium principal de diffusion des nouvelles. Typiquement, les gazettes allemandes, imprimées en caractères gothiques, comportaient quatre, huit ou douze pages au format in-quarto, avec des nouvelles organisées selon le lieu et la date d’émission. Sous le titre « De Venise » étaient regroupées les informations de la République de Saint-Marc, de l’Italie (du Nord) et surtout des Balkans, de l’Empire Ottoman et du proche Orient ; sous le titre « De Hambourg », les nouvelles du Saint-Empire et du « Nord », voire de la Russie et de la Scandinavie. Les articles rapportaient, dans une langue resserrée et accessible, les évènements politiques, militaires et diplomatiques et, de temps en temps, des catastrophes naturelles ou des faits divers. L’absence de commentaire, d’analyse et d’investigation s’explique par les restrictions des moyens de communication à l’époque moderne et par les différents régimes de censure, mais parfois aussi par un intérêt commercial qui visait une diffusion auprès des différents partis, et si possible au plus grand nombre10.

L’histoire des médias et précisément des gazettes imprimées a connu un essor remarquable depuis une vingtaine d’années11. Mais la médiatisation des révoltes ou guerres paysannes n’a pas réellement été traité sous cet aspect12. Le terme de « médiatisation » signifie d’abord simplement la relation d’un événement dans les médias, mais recouvre aussi son interprétation, et la commercialisation de son signalement à travers différents supports.

De l’autre côté, l’historiographie des révoltes, dès les années 1970, ne s’est guère occupée des questions médiatiques13. Parfois, les chercheurs utilisèrent des gazettes comme sources d’information, mais, à l’exception de la guerre des paysans allemands liée à la Réforme (1525)14, sans se poser de questions sur la dimension médiatique des contestations. Les études traitant explicitement de la médiatisation sont restées rares15.

Concernant les deux rébellions de 1626 et de 1653 en particulier, la situation historiographique est différente, en partie du fait de l’état des médias contemporains disponibles. Pour la Haute-Autriche, la révolte s’inscrivit dans le triple contexte d’une tradition de rébellions sociales, de la résistance réformée à la contre-réforme, et de la lutte contre « l’occupation » bavaroise16. L’historiographie locale utilisait les sources imprimées de l’époque, surtout les occasionnels et les gazettes, ainsi que les nouvelles à la main. Dans son ouvrage toujours incontournable sur la question, dont la deuxième édition date de 1904, Felix Stieve exprimait un certain mépris envers ces sources du journalisme primitif. Il leur attribuait un intérêt limité à l’écume des jours, sans effort de départ entre les rumeurs et les faits17. C’est précisément de ces sources-là que s’est occupé Georg Wacha dans son article de 1976 ; il a publié une édition partielle des nouvelles de la période de la révolte de 1626, imprimées dans l’espace germanophone, mais sans les analyser dans une perspective d’histoire des médias18.

La guerre des paysans suisses de 1653 s’inscrivait dans un contexte socio-économique et politique partiuclier : la dépression économique qui suivit la fin de la guerre de Trente Ans aggravait le mécontentement de la population rurale contre la pression fiscale et la centralisation dans la capitale. L’historiographie ne mentionne pas de nouvelles à la main ou de gazettes imprimées. Seuls les édits et quelques portraits imprimés des « meneurs » ont été utilisés à titre d’illustration, mais rarement accompagnés d’une analyse médiatique19.

LES « GUERRES DE PAYSANS »

Les études de cas proposées sont toutes deux liées à la guerre de Trente Ans. Les deux révoltes ont été qualifiées de « guerre de paysans » par les contemporains, ainsi que par les historiens autrichiens comme suisses, qui pouvaient ainsi présenter « leur » guerre des paysans à côté de celle des paysans allemands de 152520. Dans leur pays respectif, chacun de ces deux événements est passé pour la rébellion la plus massive, et a fait l’objet d’un intérêt historiographique dès le xviie siècle. Enfin, les deux rébellions furent réprimées par le pouvoir militaire et judiciaire, et laissèrent des traces importantes dans la mémoire collective.

La rébellion des paysans de Haute-Autriche (1626)

La révolte haute-autrichienne est directement liée au déclenchement de la guerre de Trente Ans21. Ferdinand ii de Habsbourg (1578-1637), élu empereur le 28 août 1619, doit s’imposer à son rival réformé, Frédéric v de Palatinat (1596-1632), à la tête de la fronde bohémienne. Ferdinand s’allie avec Maximilien Ier (1573-1651), duc de Bavière, et lui cède, en 1620, sous forme de gage, la Haute-Autriche. Après de courtes résistances contre l’occupation bavaroise du territoire, le gouverneur Adam von Herberstorff (1585-1629), un noble autrichien de Styrie, consolide son autorité avec l’appui militaire de la Ligue catholique et commence, par ordre de l’empereur, à recatholiciser le pays dont la noblesse seigneuriale et les sujets paysans étaient à plus de 80 % protestants, et où la position institutionnelle de l’Église catholique était assez faible22. Refusant, en 1625, que des curés catholiques d’origine italienne remplacent leurs prédicateurs luthériens, des villageois chassèrent leur nouveau curé et assiégèrent le bailli. Contre une promesse de grâce, ils abandonnèrent le siège et se rassemblèrent sur ordre du gouverneur pour attendre les jugements. Celui-ci fit isoler 38 soi-disant meneurs et les fit, deux à deux, jouer leur vie aux dés. Deux furent pardonnés, mais 16 exécutés23. L’année suivante, des querelles identiques à propos des curés imposés suscitèrent la mobilisation générale : aux mois de mai et juin, des dizaines de milliers de paysans s’emparèrent des bourgs et villes – parfois avec la collaboration d’une faction citadine –, remportèrent des combats contre les troupes du gouverneur et assiégèrent Linz, la capitale de Haute-Autriche. Après la mort de deux chefs des paysans et l’échec du siège der Linz, le gouverneur reprit, fin juillet et en août, les villes de Steyr, Wels, Gmunden et Freistadt, avec l’appui des troupes impériales. Une trêve comportant une amnistie générale fut signée le 18 septembre. Mais le duc de Bavière envoya en novembre le général Gottfried Heinrich Grafzu Pappenheim (1594-1632), dont l’armée écrasa toute résistance et séjourna durant tout l’hiver.

Les événements, liés à la politique impériale et mêlés aux conflits confessionnels, firent grand bruit dans les médias. Gazettes imprimées et brochures occasionnelles traitèrent les évènements. Pour l’année 1626, on connaît une quinzaine de gazettes germanophones, produites dans onze villes différentes (plus trois villes inconnues). Des gazettes de Cologne, Rostock et Wolfenbüttel, aucun exemplaire de l’année 1626 n’est conservé, des gazettes de Nördlingen/Oettingen, Zurich et de deux autres villes dont on ignore les noms, on ne connaît que quelques numéros publiés avant le début de la révolte, mi-mai24.

Tableau n° 1 : Gazettes germanophones conservées, parues entre le 15 mai et le 31 décembre 162625.

« Gazette » deAnnées connuesPages par numéroNuméros existants du 16 mai au 31 décembreArticles
Stuttgart1619-1709832108
Hambourg1618-167842177
Vienne1622-170523130
Berlin1617-169112934
Sine loco1619-162641338
Francfort M1615-17794813
Strasbourg1605-1667428
Vienne1622-1699412
Total117310

Ces publications hebdomadaires auraient produit, en principe, environ 780 (soit 15 x 52) numéros de janvier à décembre, ou 465 numéros de mi-mai à décembre 1626. Or, seulement 212 (37 %) ont été conservés – pourcentage relativement élevé comparé aux estimations de 15 % pour toutes les gazettes germanophones du xviie siècle26. De ces exemplaires, seulement la moitié (117) parurent pendant la rébellion (mi-mai jusqu’à la fin d’année). Il n’y a que sept numéros parmi ces 117 qui ne comportent aucune mention des faits rebelles. Somme toute, on y trouve 310 articles concernant les actes de résistance sur une période de six mois et demi27. Ces chiffres soulignent que cette rébellion est devenue un événement médiatique, c’est-à-dire une série d’événements et d’épisodes liée, au moyen de la gazette, par des rapports continus et des termes assez stables comme « les paysans dans la Haute-Autriche », « les paysans rebelles du pays au-dessus de l’Enns » ou « la rébellion des paysans ».

Mais comment l’événement a-t-il été représentée ? En quels termes la résistance populaire fut-elle qualifiée ? Toutes les gazettes consentirent, dès le début, à nommer ces événements « rébellion » (« Rebellion », « Aufstand »), à identifier les paysans (« Bauern ») comme acteurs principaux28, et à mettre en avant le grand nombre des troupes rebelles : cela commence, au milieu du mois de mai, avec 6 000 révoltés, pour monter à 30 000 à la fin du mois et atteindre 100 000 en juin et 140 000 en juillet29. Un prétendu témoin oculaire traversant la région fit même l’addition des diverses armées paysannes pour arriver à la somme de 162 00030. Il est difficile de juger de ces chiffres. Désignent-ils la totalité des rebelles présents dans les différents camps et sièges ou la totalité des hommes présents sur un champ de bataille précis ? Toutefois, l’historiographie actuelle estime qu’il n’y eut jamais plus de 40 000 paysans mobilisés31. En tout cas, les chiffres sont impressionnants.

Certains articles représentent la violence des paysans rebelles qui ne faisaient que « dérober, incendier, assassiner32 », piller les monastères et massacrer les moines33. D’après la gazette de Stuttgart, les révoltés « saisissent les voyageurs et leur rasent les cheveux à la paysanne, comme ils firent à trois d’entre eux, échappés et arrivés à Linz. Cependant, ils laissent passer ceux qui sont capables de chanter des psaumes évangéliques34 ». D’après beaucoup de nouvelles, les insurgés bloquaient toute communication vers la Bohème, la Styrie et l’évêché de Salzbourg35. Les nouvellistes s’effrayaient des succès des rebelles qui, après quatre semaines, contrôlaient tout le pays, sauf Linz, la capitale, où s’était retiré le gouverneur, assiégé par 30 000 à 60 000 hommes dont 25 000 munis de mousquets. L’empereur Ferdinand ii dut reporter son voyage à Vienne au mois de septembre36.

Il y a en revanche d’autres rapports qui témoignent d’une certaine compréhension pour la cause révoltée. Ils soulignent le bon ordre des troupes paysannes qui connaissaient une structure de conseils et un règlement pour le ravitaillement37. Des extraits d’une lettre du champ de bataille écrite par un officier supposé qui avait été prisonnier des paysans, publiés dans la gazette de Berlin, louent la discipline, le courage et la sagesse militaire des paysans qui n’hésitaient pas à punir sévèrement les pillards dans leurs rangs38. Occasionnellement, les gazettes abordaient la question des causes du soulèvement – rétablissement de la religion protestante, libération de l’occupation bavaroise39 – et reproduisaient même le catalogue (abrégé) des doléances, selon lequel les rebelles se plaignaient : 1) de l’expulsion par le gouverneur des prédicateurs évangéliques, 2) de taxes exorbitantes pour les funérailles, 3) des impôts supplémentaires de 20 % à 30 % pour les protestants, 4) des homicides commis un an auparavant pour cause de religion (cf. le tirage au sort), 5) des taxes pour les garnisons, 6) du comportement des soldats étrangers qui volaient leurs chevaux, etc.40. Par conséquent, les paysans suppliaient humblement l’empereur et le duc de Bavière de les soulager de ces charges et de leur accorder : 1) la liberté de religion et le retour des prédicateurs 2) l’évacuation des soldats, 3) la suppression des impôts pour les garnisons, 4) une amnistie générale et la reconnaissance de l’Empereur comme leur seigneur légitime41.

S’agissant des motifs des insurgés, la presse se concentrait sur la religion et l’occupation, reprenant ainsi la teneur des slogans paysans écrits sur leurs drapeaux : « Dieu, libère-nous de la tyrannie et de la corvée bavaroise ; parce qu’il s’agit de sauver l’âme et les biens, nous consacrons nos corps et notre sang et nous prions Dieu de nous conférer le courage héroïque42 ».

A travers ces citations ceux qui lisaient et écoutaient les nouvelles imprimées pouvaient entendre quelque peu des voix rebelles. Mais la majorité des lignes consacrées aux troubles en Haute-Autriche était écrite par des observateurs certes anonymes, mais dont la perspective était proche de celle des autorités. Tout de même, ces quelques échos de voix paysannes permettent déjà de questionner la teneur des reportages. Car les doléances citées ne sont pas seulement celles des « paysans », mais elles sont énoncées par les « communes, les bourgeois et les paysans ». Les nouvellistes, par contre, ne parlaient que de la « rébellion paysanne » et des « paysans rebelles », tout en mentionnant la présence de bourgeois et de nobles parmi les révoltés. La terminologie et la désignation de la révolte demeuraient inchangées, y-compris dans les articles qui s’étonnaient des victoires militaires contre les troupes bavaroises. Ils les expliquaient par la probable présence, parmi les paysans, de quelques bourgeois et avocats urbains, de quelques anciens militaires (hollandais43) et de certains nobles (protestants) qui auraient su diriger les forces rurales44. L’historiographie, par ailleurs, confirme la composition sociale assez variée du mouvement45. Évidemment les rédacteurs des gazettes ne sentaient pas la nécessité d’expliquer cette différence entre les sources citées et les termes qu’ils utilisaient pour qualifier les événements.

La rébellion des paysans suisses (1653)

La Confédération suisse de l’époque moderne a connu une forte tradition de mouvements populaires de formes très variées. La plus importante fut sans doute celle de l’année 1653. Son caractère extraordinaire se mesure à trois niveaux. D’abord la masse des participants – on parle de 80 000 paysans – mais avant tout le fait qu’ils se recrutaient dans quatre cantons différents. Car la révolte moderne typique se limitait à un canton – ou même une partie d’un canton. Deuxièmement, il est surprenant de voir à l’époque du confessionnalisme que deux de ces cantons étaient catholiques – Lucerne et Soleure – et deux réformés – Berne et Bâle. Le troisième facteur d’exception réside dans le programme des rebelles. Tandis que les révoltes habituelles se focalisaient sur des doléances économiques et des questions d’autonomie, le « pacte de Huttwil », auquel les députés des régions révoltées prêtèrent serment le 14 mai 165346, ne proposait rien de moins que de reconstruire une nouvelle Confédération suisse avec la participation égale des communes rurales aux décisions politiques de la Diète fédérale (assemblée délibérative et unique institution politique du Corps helvétique47). Les autorités contemporaines des cantons exprimaient le caractère exceptionnel de cette révolte en utilisant des termes comme « rébellion générale » (« Generalaufstand »), « conjuration générale » (« Generalverschwörung ») et même « révolution » (« Revolution »), tandis que l’ambassadeur de France parlait de « rébellion » et de « guerre des paysans48 ».

Illustration : Gazette de Berlin, n° 30 du 3 août 1626. Sept pages sur les douze du fascicule sont consacrées à la révolte.

Le conflit était une suite de la guerre de Trente Ans. En tant qu’« îlots de paix », les territoires suisses n’étaient pas touchés directement par les actions militaires – à l’exception des pays alliés des Grisons au sud-est et de l’évêché de Bâle au nord-ouest. Les Suisses profitaient d’une conjoncture de guerre tant qu’ils étaient engagés dans le commerce des mercenaires et des matériaux de guerre (chevaux, métaux, poudre), dans la vente des produits alimentaires ou dans le marché de crédit. La chute des prix provoqua une dépression économique après-guerre. Les autorités réagirent, à la fin de l’année 1652, par une dévaluation de la monnaie courante dans des conditions défavorables aux sujets ruraux. Le mécontentement s’organisa dès janvier 1653 dans le canton de Lucerne, et sétendit en mars dans les cantons voisins de Berne puis Soleure et Bâle. Le mouvement grandit au fur et mesure que les autorités cantonales refusaient de répondre aux doléances, surtout économiques. Les communes des quatre cantons se conjurèrent et élirent des députés qui se réunirent en assemblées générales pour prêter serment au pacte de Huttwil (abolition de la nouvelle monnaie, suppression des impôts indirects introduits ou augmentés pendant la guerre, accès facilité au commerce de blé, bétail, sel, vin, et poudre). En plus, ils exigèrent des changements politiques comme le droit de s’assembler librement et de signer des alliances, et des compétences supplémentaires de participation aux décisions politiques. Les négociations menées à plusieurs niveaux par les cantons non affectés par la révolte aboutirent à des « traités de paix » qui accordèrent généralement quelques demandes économiques, mais refusèrent en revanche les réformes politiques. Déçus de ces résultats, les paysans lucernois continuèrent leur résistance. En même temps, le gouvernement bernois profita du fait que les armées paysannes se dissolvaient pour lancer une campagne militaire, rompant le traité signé à Murifeld le 28 mai 1653. La défaite totale des révoltés, au mois de juin, fut suivie de l’exécution de 45 « meneurs », d’amendes contre plus de mille personnes, de l’abolition des droits et privilèges des villes, bourgs et communes. Malgré cet échec rébellionnaire, l’historiographie suisse insiste sur le fait que les gouvernements cantonaux n’osèrent plus prélever d’impôts de guerre ou introduire d’autres impôts directs jusqu’à la fin de l’Ancien régime49.

Même si deux des composants essentiels pour susciter l’intérêt de la presse périodique et du public – la contemporanéité avec la guerre de Trente Ans et l’enjeu confessionnel – manquent dans le cas suisse, ce conflit social majeur devint un événement médiatique. Surtout, les gazettes, mais aussi quelques brochures et canards illustrés, firent écho à la rébellion. En l’an 1653, 21 ateliers produisaient des gazettes imprimées dans l’espace germanophone. Pour les deux tiers de ces périodiques – ceux de Berlin, Brunswick, Erfurt, Cologne, Leipzig, Lucerne, Munich, Nördlingen, Rostock, Strasbourg, Stuttgart et Zurich – on ne connaît aucun fascicule. Nous sont parvenus des exemplaires de sept titres. On laissera de côté les deux titres domiciliés à Danzig avec un seul numéro paru avant que la rébellion ne soit traitée dans les gazettes.

Tableau n° 2 : Gazettes germanophones conservées, parues entre le 1er mars et le 31 octobre 165350.

« Gazette » deAnnées connuesPages par numéro (par semaine)Numéros existants du 1er mars au 31 octobreArticles
Hambourg i1618-16784 (12)10270
Vienne1622-17054 (8)6335
Hambourg ii1630-16754 (8)2431
Francfort1615-1779423
Sine loco1639-1659422
Total193141

Comme pour le cas autrichien, la question est de savoir en quels termes l’événement fut représenté dans les gazettes. Tandis que les nouvellistes germanophones identifiaient en général les « paysans rebelles » (« aufrührerische, rebellische Bauern ») comme acteurs de cette révolte – comme en 1626 –, ils hésitèrent pourtant à utiliser le substantif « rébellion » ou tout autre équivalent pour qualifier l’affaire. La Gazette de Paris, par contre, eut recours assez souvent aux termes de « rébellion », « troubles », « différans » ou « guerre civile ». Quant aux adjectifs, l’hebdomadaire parisien offrit un choix plus large allant de « rebelles », « révoltés » et « séditieux » à « soulevés », « mutinés » et « mécontents51 ». Le terme de « guerre de paysans » n’apparaît pas dans les gazettes, alors qu’on le trouve dans la correspondance diplomatique ou dans les sources paysannes, comme déjà signalé plus haut.

La description du conflit dans les gazettes est focalisée sur les événements : ce n’est qu’au mois de mars qu’elles commencèrent à prêter attention au mouvement qui avait débuté en janvier 1653 ; jusqu’à mi-mars, les nouvellistes écrivirent que des révoltés s’assemblaient et adressaient des plaintes aux gouvernements cantonaux ; les cantons envoyaient des médiateurs pour apaiser la colère paysanne. Au cours de la deuxième moitié du mois de mars, la dynamique s’accéléra : les rebelles lucernois s’emparèrent de quelques petites villes et bourgs du canton, ils bloquèrent les passages (ponts, cols, routes principales) pour contrôler toute circulation et ils mirent le siège devant la ville de Lucerne, la capitale52 ; les co-révoltés de Berne firent de même vers la fin du mois de mai53. Les articles parlèrent de « 26 points54 » à négocier entre les autorités et les insurgés, mais sans les spécifier ; ou bien, les rapports se contentèrent de nommer les points accordés, mais passaient sous silence les demandes rejetées, ne permettant pas aux lecteurs de comprendre les motifs des insurgés55. Le public put conclure, par la lecture des articles, qu’il s’agissait du prix du sel, de la dévaluation de la monnaie et des excès des baillis appelés « tyrans56 ». Les sièges, les escarmouches et les « batailles » furent relatés sommairement, avec des chiffres approximatifs de combattants et de morts (juin). Après la défaite paysanne, les articles abordèrent les interrogatoires, jugements et exécutions (juillet-août)57.

La grande majorité des articles représente plus ou moins ouvertement la perspective des autorités. Il n’y a que peu d’intérêt pour les motifs de révolte des paysans qui ne sont évoqués que de façon très rudimentaire. En revanche, les récits liés aux exécutions peuvent livrer des anecdotes susceptibles de se prêter à des lectures subversives, comme celle qui figure dans la Gazette de Paris rapportant une répression dont l’exemplarité fut contrariée par une tempête, qui emporta – signe divin ? – les têtes des rebelles décapités :

De Francfort, le 20 juillet 1653. On continue tous les jours, la punition des prisonniers rebelles en Suisse : Où n’aguéres il s’éleva vne si furieuse tempeste dans le Canton de Berne, que la pluspart des maisons de la ville en furent découvertes, les fenestres brisées, &, ce qui a surpris davantage, vn poteau enlevé, sur lequel plusieurs testes de ces rebelles estoyent exposées, en sorte que l’on n’en a pû rien retrouver58.

D’après les nouvellistes, les rebelles sont des paysans, en dépit du fait que les citadins de petites villes et des bourgades faisaient partie du soulèvement et qu’il y avait aussi des tensions dans les capitales de Lucerne, Berne et Bâle59. L’historiographie souligne d’ailleurs le grand nombre de taverniers et de scribes parmi les « meneurs » condamnés60.

COMPARAISON

Parmi les traits communs des deux guerres des paysans analysées, il faut tout d’abord retenir leur grand écho médiatique dans la presse contemporaine. Pendant la durée des actions rébellionnaires, les gazettes périodiques en parlèrent dans quasiment chaque numéro, ou chaque semaine, et ainsi répandirent ces nouvelles bien au-delà des lieux des événements. Cette médiatisation empruntait plusieurs supports et comportait, outre des gazettes imprimées, traitées ici, des gazettes manuscrites, des brochures, des feuilles illustrées61 et des chapitres dans les chroniques semestrielles de l’époque62.

Une analyse plus détaillée de la médiatisation des deux exemples révèle tout de même des différences. La révolte en Haute-Autriche suscita, dans la presse germanophone, deux fois plus d’articles que la révolte suisse. Il y a certes d’importantes lacunes touchant la conservation des séries de gazettes. Mais ce décalage s’exprime plus nettement encore dans la relation entre le nombre de numéros accessibles et le nombre d’articles sur la révolte en question : en 1626, les 122 numéros fournissent 336 articles, tandis que les 193 numéros de 1653 n’en fournissent que 141. La tendance journalistique progressive du xviie siècle à synthétiser plusieurs nouvelles dans un seul article peut exagérer ce décalage, mais elle n’explique pas toute la différence. À quoi faut-il l’attribuer ?

La géographie des nouvelles consacrées à ces deux rébellions est assez différente. Pour le cas autrichien, les lieux émetteurs des nouvelles – à bien distinguer des lieux d’édition des gazettes à proprement parler – étaient situés tout autour de la région rebelle du pays au-dessus de l’Enns : elles parvenaient de Vienne (137 nouvelles) à l’Est, de Prague (53) au Nord, et de Ratisbonne (37) à l’Ouest. De plus, il y avait des nouvelles qui provenaient de villes situées dans la région rebelle, comme Linz (19), Wels (5), Enns et Sankt Peter (1) ou, de manière plus générale, de Haute-Autriche (15). Les autres lieux émetteurs étaient situés plutôt à l’Ouest (Nuremberg 13, Passau et Salzbourg 5, Augsbourg 3, Munich et Lindau 2). De toute évidence, les flux d’information étaient variés et complexes.

Les nouvelles envoyées depuis ces villes étaient imprimées dans les gazettes allemandes publiées à Vienne (2), Berlin, Francfort, Hambourg, Strasbourg, Stuttgart, ainsi qu’une autre ville dont on ignore le nom. On pourrait y ajouter une gazette publiée à Amsterdam et une autre à Londres63. La structure géographique des informations imprimées était polycentrique et assez dispersée.

Pour la rébellion suisse par contre, un lieu émetteur monopolisa la circulation des nouvelles, tandis que les autres se révélèrent marginales : 137 nouvelles furent écrites de Bâle, 26 de la Suisse (en général), quatre de Francfort et du Rhin, trois d’Alsace, deux de Berne, de Saint-Gall et de la région du Main, et une seule de Cologne et de Paris. La position quasiment monopolistique de Bâle influença certainement la perspective d’après laquelle la révolte fut présentée dans la presse périodique.

Cette perspective bâloise se répandit dans toutes les gazettes analysées, y-compris dans les deux publiées à Hambourg, ainsi que dans celles de Vienne, Francfort et la ville inconnue. S’y ajoutèrent, au niveau européen, les hebdomadaires de Paris, Londres et Amsterdam.

La structure géographique des flux d’information est assez diverse dans ces deux cas. Le nombre déjà réduit de gazettes disponibles en 1653 – dû à la faible conservation des nombreux titres produits cette année – ajoute aux effets du quasi-monopole bâlois. Même si, dans le cas autrichien, les événements militaires provoquèrent un blocus des nouvelles de Linz dès juillet, et de Ratisbonne, Prague et Nuremberg dès la fin du mois d’août, les nouvelles passant par Vienne continuèrent. Pour 1653, Bâle fut la seule à fournir régulièrement des nouvelles, tandis que les autres apparaissaient surtout pendant les phases de grandes tensions.

Ce qui rend particulière la position de la ville rhénane est le fait qu’elle est directement impliquée dans la révolte. Les sujets du territoire, situé entièrement au sud de la capitale, s’étaient joints à la révolte des paysans des cantons de Lucerne, Berne et Soleure. Sa position sur les marges permit à la ville de communiquer librement vers le Nord où se situaient toutes les gazettes rapportant les événements. Cette position importante de Bâle quant au flux des informations n’était pourtant pas proportionnelle au rôle des sujets bâlois dans la révolte intercantonale, dont l’épicentre se trouvait sans doute dans les cantons de Lucerne (Entlebuch) et de Berne (Emmental). Ainsi les nouvelles provenant de Bâle exagérèrent – intentionnellement ou non – les actions bâloises au détriment des autres. En plus, la grande majorité des informations provenant de cette ville fut écrite par des auteurs – bien qu’anonymes – appartenant à l’élite bâloise, ce qui ressort de formules comme « nos paysans » et le fait que ces rapports énuméraient les noms de tous les magistrats bâlois qui tentaient une médiation, tandis que ceux des médiateurs des autres cantons n’étaient guère mentionnés64.

L’importance de la géographie pour la circulation des nouvelles se révèle également en Autriche. Les nouvelles émises directement dans la zone rebelle venaient surtout de Linz. Mais le siège de la ville par l’armée paysanne – commencé le 24 juin, terminé fin août – interrompit cette voie de communication dès le 25 juin, jusqu’à la fin du mois de novembre. C’est pourquoi la série de nouvelles de cette ville, écrites entre le 18 et le 25 juin et parues dans les gazettes de Berlin, Hambourg et Stuttgart ne reprit que lentement, à partir du 13 septembre, pour devenir plus régulière, seulement à la fin du mois de novembre65.

En général, les révoltés essayaient de contrôler des voies de communication. Beaucoup de gazettes mentionnent, en juin et juillet surtout, que les rebelles « ont bien occupé les cols et bloqué le Danube66 ». Les courriers ne pouvaient plus entrer dans la ville de Linz et les paysans saisirent même les lettres qui en sortaient67 ; en général, les insurgés ne laissaient plus passer ni personnes ni lettres par le Danube68.

En 1653, les paysans révoltés firent de même. Ils occupèrent les « châteaux, ponts et cols » pour contrôler l’espace et pour éviter que les autorités des cantons puissent communiquer69. Un cas particulier souligne l’importance de ces mesures. Les autorités bernoises avaient demandé, au mois de mars déjà, aux Conseils de Genève, de fournir des troupes pour apaiser la révolte. Les Genevois recrutèrent des soldats, organisèrent le passage par le territoire français et attendirent, dès le 13 avril, l’ordre de marche de Berne – mais celui-ci n’arriva que le 9 mai70.

Mais occuper quelques ponts et cols ne suffisait apparemment pas pour contrôler le flux des messages et la médiatisation de la révolte. Les paysans suisses n’avaient pas accès aux presses. Les imprimeries étaient localisées dans les villes capitales, hors de leur influence. Ils n’avaient pas les moyens de diffuser par l’imprimé les motivations des actions rebelles, tandis que les autorités imprimaient des édits et informaient les gazettes européennes à travers les nouvelles passant par Bâle. Les paysans percevaient ce déséquilibre et s’en lamentaient. Un des meneurs motiva sa fuite avec l’argument qu’il voulait « aller là où il y a des imprimeries71 ».

Pour les révoltés autrichiens en 1626, la situation était a priori semblable. Les villes occupées comme Steyr, Enns, Wels et Gmunden n’hébergeaient pas, en 1626, d’imprimerie72. Et celle de Linz n’était pas accessible aux rebelles. Malgré cela, les insurgés autrichiens furent beaucoup mieux représentés dans les gazettes, ainsi qu’on l’a vu, par exemple par des listes assez détaillées de leurs doléances, ou par des résumés de leurs motifs et de leurs actions.

Comment expliquer cette différence de traitement ? Une première réponse pourrait être la plus grande attention suscitée pour le cas autrichien, qui rend plus probable la multiplicité des points de vue. Ce surcroît d’attention a plusieurs causes. D’un côté, le lien direct avec la guerre de Trente Ans garantissait à cette révolte, qui éclata dans le territoire situé au cœur du pouvoir des Habsbourg, une certaine visibilité. Même si les paysans attaquaient le gouverneur bavarois, l’empereur était directement touché. Il mobilisa des troupes impériales – qu’on alla chercher en Styrie et Basse-Autriche jusqu’en Hongrie, Silésie et Pologne – pour mater la révolte. De plus, les élites politiques de la Haute-Autriche s’étaient liées, en 1619-1620 à la révolte bohémienne, ce qui ajoutait une dimension supplémentaire au conflit. L’enjeu confessionnel entraînait aussi un intérêt plus large. Le facteur religieux, ainsi que celui de l’occupation, dépassaient le facteur socio-économique (charges pesant sur les sujets) et étatique (formation de l’État central au détriment des États territoriaux) mis en avant par certains courants de l’historiographie rappelant la longue série de révoltes en Haute-Autriche aux xvie et xviie siècles73. Parmi les demandes les plus souvent évoquées dans la presse figurait celle de la « libération de la religion évangélique74 » qui se maintint jusqu’à la fin : ils « veulent la religion ou vivre et mourir ensemble75 ». Ce sont surtout les périodiques protestants de Berlin et de Stuttgart qui spécifiaient de manière relativement détaillée, les doléances paysannes, tandis que l’hebdomadaire catholique de Vienne se contentait de mentionner des plaintes, mais sans livrer le contenu de ces demandes76. Les mêmes feuilles protestantes qui avaient rapporté l’introduction de la (contre-)réforme catholique par le gouverneur dès 162577. Des paysans dans l’Emmental (Suisse) et près d’Ulm (Allemagne) témoignent dans leurs écrits personnels de leur perception confessionnelle du conflit à travers les gazettes78.

La médiatisation de la rébellion fut renforcée par de nombreuses feuilles occasionnelles et brochures publiées durant la période de conflit. En juin, par exemple, une brochure intitulée Doléances des paysans rebelles reprit les plaintes déjà insérées dans les gazettes – avec quelques modifications cependant. Ces modifications sont tout d’abord des raccourcis, parfois tendancieux car la brochure élimine l’adjectif « évangélique (« tous les prédicateurs évangéliques » se transforme en « des prédicateurs79 »). Leur confrontation avec la version des doléances qui avait été envoyée au gouverneur, conservée aujourd’hui aux archives de Munich, montre que les gazettes étaient beaucoup plus proches que les brochures de « l’original80 ».

Quant aux atrocités, elles sont attribuées aux deux partis. Les paysans, rapportaient les premières nouvelles dans la gazette catholique de Vienne, auraient causé « grand dommage en dérobant et incendiant » et auraient « tyrannisé les curés catholiques81 ». Mais la presse rapportait des comportements encore plus brutaux de la part des troupes d’invasion bavaroise et impériale. Le colonel impérial Löbl aurait non seulement, avec son armée, massacré des centaines de paysans, mais leur aurait « coupé le nez et les oreilles82 ». Les troupes du colonel Holstein auraient même « rôti des enfants83 ».

CONCLUSION

Pour conclure, il faut tout d’abord retenir que les deux rébellions paysannes furent de vrais événements médiatiques, malgré le fait que l’historiographie – des médias et des rébellions – ne reconnut pas le grand intérêt qu’y portèrent les nouvellistes et le public de l’époque. La médiatisation des guerres paysannes se faisait – en plus des gazettes considérées ici – par des occasionnels, des chroniques semestrielles, des feuilles illustrées84.

Les gazettes, contraintes par la rapidité d’exécution, ainsi que par les risques de censure, n’étaient pas portées à l’analyse, mais s’efforçaient de fournir les « faits véritables » aussi rapidement que possible. Par conséquent, elles se spécialisaient dans la description de surface des événements. Elles soulignaient les actions visibles et surtout les actions « criminelles » des rébellions : siège des capitales, occupation des points de passages, assemblées politiques. L’analyse explicite est absente, mais elle se devine à travers la sélection des faits relatés et les termes employés.

Dans les deux cas examinés, les médias s’accordèrent immédiatement sur l’usage du terme de « rébellion », mais n’utilisèrent qu’exceptionnellement le terme « guerre des paysans » qui, par contre, eut la faveur de l’historiographie rétrospective. Quant à l’exemple autrichien, les causes repérées de l’affaire sont la religion et l’occupation bavaroise. Mais ces deux motifs cachent en même temps les enjeux plus complexes de cette guerre : les tensions socio-économiques entre les populations rurales et les seigneurs territoriaux, intensifiées par les tentatives du pouvoir archiducal d’établir un État moderne, plus centralisé, au détriment de la noblesse seigneuriale et aux frais des paysans. Ce sont exactement ces tensions qui provoquaient de nombreuses révoltes avant et après 1626. Pour les seigneurs nobles majoritairement protestants, la religion servait d’idéologie, qu’ils partageaient avec la majorité de leurs sujets paysans et qui les séparait du prince catholique – l’empereur et archiduc d’Autriche Ferdinand ii ou son « remplaçant », le prince électeur bavarois Maximilien ier et son gouverneur converti Herberstorff. Seules de petites notices dans les gazettes permettraient à des lecteurs attentifs de s’interroger sur d’autres causalités. Vers la fin des actions militaires, la gazette de Vienne écrivit que les paysans catholiques commençaient à se séparer des paysans non catholiques85. Cette phrase implique qu’il y avait, avant ce moment-là, une coopération des sujets des deux confessions – un fait qui ne figurait pas dans les gazettes, mais qui est confirmé par l’historiographie86. Cette information contredit l’interprétation exclusivement religieuse du conflit. Une pareille simplification se cache également derrière le terme rébellion « des paysans » car, on l’a vu, les révoltés se recrutaient également parmi les bourgeois et les nobles.

Les tensions entre l’empereur et le duc de Bavière sont totalement banalisées par les gazettes. Car les médiateurs impériaux avaient conclu une paix avec les rebelles et promis un pardon général, mais le duc de Bavière – le vrai maître du pays au-dessus de l’Enns – ne la respecta pas et s’engagea dans une campagne sanglante.

S’agissant de la révolte suisse, on constate la même orientation donnée aux événements – assemblées, prises d’armes, négociations. L’attention se focalisa sur les actions violentes ainsi que sur la répression militaire et pénale. Le point de vue général qualifia les comportements paysans de « désobéissance » et de « rébellion » et ne s’intéressa pas réellement aux motifs du conflit. Tandis que le lecteur de 1626 pouvait au moins saisir les principaux points de mécontentement et les doléances les plus importantes, celui de 1653 ne trouva que des allusions vagues et génériques concernant les demandes rebelles, et bien des récits soulignant la peur et l’angoisse causées par la révolte.

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1 Jürgen Wilke, Nachrichtenauswahl und Medienrealität in vier Jahrhunderten : eine Modellstudie zur Verbindung von historischer und empirischer Publizistikwissenschaft, Berlin et al., Walter de Gruyter, 1984, p. 124-131.

2 Cf. pour cette problématique : Andreas Würgler, « Medien in Revolten – Revolten in Medien. Zur Medialität frühneuzeitlicher Bauernrevolten und Bauernkriege », dans Die Stimme der ewigen Verlierer ? Aufitände, Revolten und Revolutionen in den österreichischen Ländern (ca. 1450-1815), éd. Peter Rauscher et Martin Scheutz, Vienne, Böhlau ; Munich, Oldenbourg, 2013, p. 273-296 (Veröffentlichungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung ; 61).

3 Wolfgang Schmale, « Revolte », dans Enzyklopädie der Neuzeit, xi, Stuttgart et Weimar, Metzler, 2010, p. 145-152.

4 Wolfgang Schmale, « Revolte », art. cit. [note 3], p. 145-152.

5 Yves-Marie Bercé, Révoltes et révolutions en Europe moderne (xvie-xviiie siècles), Paris, CNRS éditions, 2013, p. 8.

6 Jean Nicolas, La rébellion française. Mouvements populaires et conscience sociale (1661-1789), 2e éd., Paris, Gallimard, 2008, p. 38.

7 Gauthier Aubert, Révoltes et répressions dans la France moderne, Paris, Armand Colin, 2015, p. 4.

8 Pour 1626 : cf. infra ; pour 1653 : Yves-Marie Bercé, Révoltes…, op. cit. [note 5], p. 207.

9 Pour « rébellion » cf. infra. Pour « guerre des paysans » (« Bauernkrieg ») cf. Gazette de Hambourg, n° 47, 1626, extrait d’une lettre écrite de la Haute-Autriche du 15 novembre 1626 ; gazette de Vienne, n° 10, 1626, nouvelle de Vienne du 12 décembre 1626. Comme les différentes gazettes de l’année 1626 ont des titres parfois identiques (trois « Relation » publiées dans trois villes différentes), voire pas de titre du tout (celles de Berlin, Stuttgart et Strasbourg), elles seront citées sous la forme « gazette de Berlin ». Par convention, on en citera le numéro, si possible la date, le lieu d’émission et la date de la nouvelle. Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg von 1653. Politische Sozialgeschichte – Sozialgeschichte eines politischen Ereignisses, Tübingen, Bibliotheca academica Verlag, 1997 (Frühneuzeit-Forschungen ; 3), p. 252 (terme utilisé par les révoltés, mais non par les autorités).

10 Wolfgang Behringer, Im Zeichen des Merkur. Reichspost und Kommunikationsrevolution in der Frühen Neuzeit, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2003 (Veröffentlichungen des Max-Planck-Instituts für Geschichte ; 189) ; Andreas Würgler, Medien in der Frühen Neuzeit, Munich, Oldenbourg, 2013, (Enzyklopädie deutscher Geschichte ; 85), p. 35-39, p. 104-108 ; Andreas Würgler, « National and Transnational News Distribution 1400-1800 », dans European History Online (EGO), éd. Leibniz Institute of European History (IEG), Mainz, 2012-11-26, [en ligne :] http://www.ieg-ego.eu/wuerglera-2012-en [page consultée le 12 juillet 2017].

11 Pour l’espace germanophone : Andreas Würgler, Medien… op. cit. [note 10] ; pour la France : Dictionnaire des journaux 1600-1789, éd. Jean Sgard, Paris, Universitas, 1991 ; Stéphane Haffemayer, L’information dans la France du xviie siècle : La Gazette de Renaudot de 1647 à 1663, Paris, Honoré Champion, 2002 ; pour l’Europe en général : Andreas Würgler, « National and Transnational News Distribution… », art. cit. [note 10] ; News networks in early modern Europe, éd. Joad Raymond et Noah Moxham, Leyde et Boston, Brill, 2016.

12 Malgré un titre prometteur, Werner Faulstich, Medien zwischen Herrschaft und Revolte. Die Medienkultur der Frühen Neuzeit 1400-1700, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1998, ne traite pas réellement le sujet annonçé.

13 Yves-Marie Bercé, Histoire des Croquants : étude des soulèvements populaires au xviie siècle dans le sud-ouest de la France, 2 vol., Genève, Droz, 1974 (Mémoires et documents publiés par la Société de l’École des chartes ; 22) ; Winfried Schulze, Bäuerlicher Widerstand und feudale Herrschaft in der frühen Neuzeit, Stuttgart Bad-Cannstadt, Frommann-Holzboog, 1980 ; Jean Nicolas, La rébellion française…, op. cit. [note 6] ; Gautier Aubert, Révoltes…, op. cit. [note 7], p. 162-164.

14 Peter Blickle, Die Revolution von 1525, Munich ; Vienne, Oldenbourg, 1975.

15 Pour les révoltes urbaines : Andreas Würgler, Unruhen und Öffentlichkeit. Städtische und ländliche Protestbewegungen im 18. Jahrhundert, Tübingen, Bibliotheca academica Verlag, 1995 (Frühneuzeit-Forschungen ; 1) ; Andreas Würgler, « Revolts in Print : Media and Communication in Early Modem Urban Conflicts », dans Urban Élections and Decision-Making in Early Modern Europe, 1500-1800, éd. Rudolf Schlögl, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars Publishing, 2009, p. 25-275 ; Daniel Bellingradt, Flugpublizistik und Öffentlichkeit um 1700: Dynamiken, Akteure und Strukturen im urbanen Raum des Alten Reiches, Stuttgart, Franz Steiner Verlag, 2011 (Beiträge zur Kommunikationsgeschichte ; 26) ; David Petry, Konfliktbewältigung als Medienereignis. Reichsstadt und Reichshofrat in der Frühen Neuzeit, Berlin, Akademie Verlag, 2011 (Colloquia Augustana ; 29) ; pour les révoltes rurales : Andreas Würgler, Unruhen und Öffentlichkeit…, op. cit. [note 15] ; Andreas Würgler, « Medien in Revolten… », art. cit. [note 2] ; From Mutual Observation to Propaganda War. Premodern Revolts in their Transnational Representations, éd. Malte Griesse, Bielefeld, Transcript, 2014 ; Stéphane Haffemayer, « Entre révolte et révolution : enjeux de médiatisation autour des Rustauds (1525), Rochelois (1542) et Pitaux (1548) », Le Temps des médias, 26-1, 2016, p. 231-251.

16 Karl Eichmeyer, Helmuth Feigl, Rudolf Walter Litschel, Weilss gilt die Seel und auch das Guet. Oberösterreichische Bauernaujstände und Bauernkriege im 16. und 17. Jahrhundert, Linz, Oberösterreichischer Landesverlag, 1976 ; Hermann Rebel, Peasant Classes. The Bureaucratization of Property and Family Relations under Early Habsburg Absolutism 1511-1636, Princeton (NJ), Princeton University Press, 1983 ; Martin Scheutz, « Ein tosendes Meer der Unruhe ? Konflikte der Untertanen mit der Obrigkeit in Ostösterreich und angrenzenden Regionen vom Spätmittelalter bis zum Ende der Fruhen Neuzeit » dans Die Stimme der ewigen Verlierer ? Aujstände, Revolten und Revolutionen in den österreichischen Ländern (ca. 1450-1815), éd. Peter Rauscher et Martin Scheutz, Vienne, Böhlau ; Munich, Oldenbourg, 2013, p. 67-118 (Veröffentlichungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung ; 61).

17 Felix Stieve, Der oberösterreichische Bauernaufstand des Jahres 1626, 2 vol., Linz, Mareis, 1904-1905 (éd. orig. 1891), p. xxxiii-xxxiv.

18 Georg Wacha, « Allhie seyn wir leyder in Jammer und Noth : Zeitungsberichte aus Linz vom Beginn des Dreissigjährigen Krieges und vom Bauernaufstand des Jahres 1626 », Historisches Jahrbuch der Stadt Linz 1975, 1976, p. 101-214.

19 Hans MühlesteinDer grosse schweizerische Bauernkrieg, Zurich, Unionsverlag, 1977 [éd. orig. 1942] ; Niklaus Landolt, Untertanenrevolten und Widerstand auf der Basler Landschaft im 16. und 17. Jahrhundert, Liestal, Verlag des Kantons Basel-Landschaft, 1996 ; Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9] ; André Holenstein, « Der Bauernkrieg von 1653. Ursachen, Verlauf und Folgen einer gescheiterten Revolution. Mit kommentierter Transkription des Bundesbriefes », Berner Zeitschrift für Geschichte und Heimatkunde, 66-1, 2004, p. 1-43 ; Danièle Tosato-Rigo, La chronique de Jodocus Jost. Miroir du monde d’un paysan bernois au xviie siècle, Lausanne, SHSR, 2009.

20 Pour les enjeux historiographiques, Peter Blickle, Der Bauernkrieg. Die Revolution des Gemeinen Mannes, Munich, C. H. Beck, 1998, p. 7-11, 104-128.

21 Le récit suit Felix Stieve, Der oberösterreichische Bauernaufstand… ,op. cit. [note 17] ; Karl Gutkas, Die Bauernkriege in Österreich, St. Pölten, Niederösterreichisches Pressehaus, 1974, p. 43-45 ; Karl Eichmeyer, Helmuth Feigl, Rudolf Walter Litschel, Weilss gilt die Seel und auch das Guet…, op. cit. [note 16] ; Martin Scheutz, « Ein tosendes Meer… », art. cit. [note 16].

22 Thomas Winkelbauer, Ständefreiheit und Fürstenmacht. Länder und Untertanen des Hauses Habsburg im konfessionellen Zeitalter, 2 vol., Vienne, Ueberreuter, 2003, i, p. 68.

23 Karl Gutkas, Die Bauernkriege in Österreich… op. cit. [note 21], p. 43 ; Martin Scheutz, « Ein tosendes Meer… »,art. cit. [note 16], p. 95.

24 Les gazettes germanophones du xviie siècle conservées à Brême (Deutsche Presseforschung) sont accessibles en ligne sur le site de l’Université de Brême : http://brema.suub.uni-bremen.de/zeitungen17 [page consultée le 13 juillet 2017] ; on utilisera l’acronyme « Z17 » pour signaler ce site « Zeitungen des 17. Jahrhunderts ».

25 Toutes accessibles sur Z17 [note 24], sauf celle de Berlin, consultable à travers le ZEFYS (= Zeitungsinformationssystem) de la Staatsbibliothek zu Berlin, Preussischer Kulturbesitz : http://zefys.staatsbibliothek-berlin.de/kalender/year/1626/ [page consultée le 14 juillet 2017]. Pour les descriptions des gazettes, Else Bogel et Elger Blühm, Die deutschen Zeitungen des 17. Jahrhunderts : Ein Bestandsverzeichnis mit historischen und bibliographischen Angaben, 3 vol., Brême, Schünemann, 1971-1985 ; Else Bogel, Schweizer Zeitungen des 17. Jahrhunderts. Beiträge zur frühen Pressegeschichte von Zürich, Basel, Bern, Schaffhausen, St. Gallen und Solothurn, Brême, Schünemann, 1973.

26 Andreas Würgler, Medien… op. cit. [note 10], p. 105.

27 Les chiffres établis d’après Z17 [note 24], Else Bogel et Elger Blühm, Die deutschen Zeitungen…, op. cit. [note 25], Wolfgang Behringer, Im Zeichen des Merkur…, op. cit. [note 10], p. 414 et ZEFYS [note 24]. L’édition de Georg Wacha, « Allhie seyn wir… », art. cit. [note 18] ne présente que 59 nouvelles (plusieurs articles des gazettes de Stuttgart et de Berlin y manquent).

28 Cf. la nouvelle de Vienne du 23 mai 1626 dans les gazettes de Vienne, n° 6 1626 et de Berlin, n° 23, 1626.

29 Cf. note 34 et : gazette de Berlin, n° 23, 1626, nouvelle de Ratisbonne du 27 mai 1626 ; gazette de Berlin, n° 25, 1626, nouvelle de Vienne du 6 juin 1626 ; gazette de Berlin, n° 29 1626, nouvelle de Vienne du 2 juillet 1626.

30 Gazette de Berlin, n° 24, 1626, nouvelle d’Autriche du 30 mai 1626.

31 Thomas Winkelbauer, Ständefreiheit…, op. cit. [note 22], p. 70.

32 Gazette de Stuttgart, n° 23 du 10 juin 1626, nouvelle de Vienne du 27 mai 1626.

33 Gazette de Stuttgart, n° 23 du 10 juin 1626, nouvelle de Prague du 13 juin 1626 ; Gazette de Stuttgart, n° 24 du 17 juin 1626, nouvelle de Vienne du 3 juin 1626 ; Gazette de Vienne, n° 6 1626, nouvelle de Vienne du 27 mai 1626.

34 Gazette de Stuttgart, n° 23 du 10 juin 1626, nouvelle de Vienne du 3 juin 1626.

35 Par exemple : gazette de Stuttgart, n° 23 du 10 juin 1626, nouvelle de Prague du 13 juin 1626 ; gazette de Berlin, n° 29, 1626, nouvelle de Ratisbonne du 28 juin 1626 ; gazette de Francfort n° 28, 1626, nouvelle de Vienne du 1er juillet 1626.

36 Gazette de Berlin, n° 27, 1626, nouvelle de Prague du 20 juin 1626.

37 Nouvelle de Vienne du 1er juillet 1626 dans les gazettes de Francfort, n° 28, 1626 et de Stuttgart, n° 28 du 15 juillet 1626 ; gazette de Berlin, n° 29, 1626, nouvelle de Vienne du 2 juillet 1626.

38 Gazette de Berlin, n° 24, 1626, nouvelle d’Autriche du 30 mai 1626 et extrait d’une lettre concernant la rébellion.

39 Gazette de Stuttgart, n° 23 du 20 juin 1626, nouvelle de Prague du 13 juin 1626.

40 Liste des doléances des communes, des bourgeois et des paysans du pays au-dessus de l’Enns, dans la gazette de Stuttgart, n° 24 du 17 juin 1626 ; cf. gazette de Berlin, n° 25, 1626, nouvelle de Passau du 8 juin 1626.

41 Gazette de Stuttgart, n° 24 du 17 juin 1626 ; gazette de Vienne, n° M6 1626, nouvelle de Vienne du 27 mai 1626.

42 « Von’s Bayers Joch und Tyranney/ Und seiner grossen Schinderey / Mach uns O lieber Herrgott frey : Dieweil es nun gilt Seel und gut / So solls auch gelten Leib und Blut / O Herr verley uns Heldenmut », gazette de Stuttgart, n° 23 du 10 juin 1626, nouvelle de Vienne du 27 mai 1626.

43 Gazette de Berlin, n° 29, 1626, nouvelle de Vienne du 4 juillet 1626.

44 Gazette de Stuttgart, n° 21 du 27 mai 1626, nouvelle de Ratisbonne du 26 mai 1626 ; gazette de Stuttgart, n° 22 du 3 juin 1626, nouvelle de Prague du 30 mai 1626 ; gazette de Stuttgart, n° 27 du 8 juillet 1626, nouvelle de Linz du 20 juin 1626 ; gazette de Hambourg, n° 27, 1626, nouvelle de Linz du 22 juin 1626.

45 Thomas Winkelbauer, Ständefreiheit…, op. cit. [note 22], p. 70 ; Martin Scheutz, « Ein tosendes Meer… », art. cit. [note 16], p. 99-100.

46 André Holenstein, « Der Bauernkrieg… », art. cit. [note 19].

47 Andreas Würgler, Die Tagsatzung der Eidgenossen. Politik, Kommunikation und Symbolik einer repräsentativen Institution im europäischen Kontext, Epfendorf, Bibliotheca academica Verlag, 2013, (Frühneuzeit-Forschungen ; 19).

48 Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9], p. 13, 160. Pour « guerre des paysans » : Jean de La Barde (ambassadeur de France en Suisse) à Argenson (ambassadeur de France à Venise), de Soleure (en Suisse) du 10 juillet et du 9 octobre 1653, dans Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France depuis les traités de Westphalie jusqu’à la Révolution française. 30. Suisse, éd. Georges Livet, Paris, CNRS, 1983, i, p. 19-21 ; les rebelles, mais non les autorités suisses, parlaient du « Purenkrieg », selon Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9], p. 252.

49 Le récit d’après Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9]; André Holenstein, « Der Bauernkrieg… », art. cit. [note 19]. Pour Bâle : Niklaus Landolt, Untertanenrevolten…, op. cit. [note 19].

50 Accessibles sur Z17 [note 30]. Le seul numéro d’une « Einzelzeitung des 17. Jahrhunderts » indiqué par le Z17 n’est pas pris en considération, parce qu’il ne s’agit pas d’une gazette. Pour les descriptions, cf Else Bogel et Elger Blühm, Die deutschen Zeitungen…, op. cit. [note 25]. Comme pour l’année 1626, on cite les gazettes par le lieu de production, pas par leur titre.

51 Gazette de Paris, n° 35-142, 1653.

52 Gazette Hambourg i, n° 13 (jeudi) 1653, nouvelle de Bâle du 14 mars 1653. La même nouvelle se trouve dans les gazettes de Hambourg ii, n° 12 (samedi) 1653 ; de Vienne n° 1699 (samedi) 1653 et de Londres, n° 184, 1653.

53 Gazette de Vienne, n° 478 (mercredi) 1653, nouvelle de Bâle du 4 juin 1653.

54 Gazette de Hambourg i, n° 13 (jeudi) 1653, nouvelle de la Suisse du 27 mars 1653 ; gazette de Hambourg i, n° 16 (mardi) 1653, nouvelle de Bâle du 24 mars 1653.

55 Gazette de Vienne, n° 477 (mercredi) 1653, nouvelle de Bâle du 23 mai 1653.

56 Gazette de Hambourg i, n° 12 (samedi) 1653, nouvelle de la Suisse du 7 mars 1653.

57 Gazette de Hambourg i, n° 31 (samedi) 1653, nouvelle de la Suisse du 26 juillet 1653 ; gazette de Hambourg i, n° 33 (samedi) 1653, nouvelle de la Suisse du 26 juillet 1653 ; gazette de Vienne, n° 488 (mercredi) 1653, nouvelle de Bâle du 8 août 1653.

58 Gazette de Paris, n° 99 du 9 août 1653, p. 810. La même nouvelle se trouve dans les gazettes de Hambourg i, n° 30, 1653 et de Vienne, n° 485, 1653.

59 Niklaus Landolt, Untertanenrevolten…, op. cit. [note 19], p. 632-636 ; Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg… ,op. cit. [note 9], 608, 612-613.

60 Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9], p. 281-286, 509-511, 528-529.

61 Pour 1626, voir la bibliographie donnée par Felix Stieve, Der oberösterreichische Bauernaufstand…, op. cit. [note 17], ii, p. 276-285 ; à compléter avec John Roger Paas, The German political broadsheet 1600-1700, vol. iv : 1622-1629, Wiesbaden, Harrassowitz, 1994. Pour 1653, Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrzeg…, op. cit. [note 9], p. 652, et le site de la Zentral- und Hochschulbibliothek Luzern, http://www.sondersammlungen.zhbluzern.ch/bk_dokumente.htm [page consultée le 12 juillet 2017].

62 Par exemple Relationis Historicae Semestralis Continuatio Jacobi Franci Historische Beschreibung aller gedenckwürdigen Historien,so sich hin und wider in Europa […] vor und hierzwischen nechstverschiener Franckfurter Fastenmess biss auff Herbstmess dieses 1626. Jahrs verlauffen und zugetragen […], Francfort-sur-le-Main, Godofredus, 1626, p. 39-44, 53-54, 61, 73-76 [VD17 39 :124460U].

63 Courante uyt Italien…, dans Delpher, [en ligne :] http://www.delpher.nl/nl/kranten/ [page consultée le 12 juillet 2017] ; pour celle de Londres : Universal Short Title Cataloque USTC, [en ligne :] http://ustc.ac.uk/index.php/record/3012529 et http://ustc.ac.uk/index.php/record/3012727 et http://ustc.ac.uk/index.php/record/3012726 [pages consultées le 12 juillet 2017].

64 Andreas Würgler, « Rebellion or Revolution », dans Years of News, éd. Brendan Dooley et Paola Molino, sous presse.

65 Nouvelles de Linz dans les gazettes de Hambourg et de Stuttgart, n° 27-52, 1626.

66 Gazette de Berlin, n° 29, 1626, nouvelle de Vienne du 1er juillet 1626.

67 Gazette de Berlin, n° 26, 1626, nouvelle de Ratisbonne du 6 juin 1626.

68 Gazette de Stuttgart, n° 28 du 15 juillet 1626, nouvelle de Vienne du 1er juillet 1626.

69 Nouvelle de la Suisse du 21 mars 1653 dans la gazette de Hambourg i, n° 13, 1653, et dans la gazette de Hambourg ii, 13, 1653.

70 Jean Dunant, « Guerre des paysans (1653), Berne demande le secours de Genève », Le Brécaillon, 26, 2005, p. 42-55, 51 ; 27, 2006, p. 48-67, p. 50-54.

71 Cité dans Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9], 487.

72 Norbert Bachleitner, Franz M. Eybl et Ernst Fischer, Geschichte des Buchhandels in Österreich, Wiesbaden, Harrassowitz, 2000, p. 63.

73 Le motif socio-économique est l’endettement massif des paysans au début du xviie siècle suite à la croissance des charges administratives et des impôts, Hans Sturmberger, Adam Graf Herberstorff. Herrschaft und Freiheit im konfessionellen Zeitalter, Vienne, Verlag für Geschichte und Politik, 1976, p. 263-271 ; Hermann Rebel, Peasant Classes…, op. cit. [note 16] ; Martin Scheutz, « Ein tosendes Meer… », art. cit. [note 16], p. 74, 77-80.

74 Les rebelles « praetendieren die Befreyung der Evangelischen Religion » : gazette de Stuttgart, n° 21, 27 mai 1626, nouvelle de Prague du 30 mai 1626. La date du 27 se réfère au calendrier julien, celle du 30 au calendrier grégorien.

75 Gazette de Stuttgart, n° 47 du 25 novembre 1626, nouvelle du 8 novembre 1626.

76 Dans la gazette de Stuttgart, n° 21, 22, 23, 24, 34, 35, 38, 47, 48, 50 ; gazette de Berlin, n° 23, 24, 25, 30 ; gazette de Vienne, n° M6, A10, B10.

77 Cf. les articles reproduits chez Georg Wacha, « Allhie seyn wir… », art. cit. [note 18], p. 162-165.

78 Danièle Tosato-Rigo, La chronique de Jodocus Jost…, op. cit. [note 19], p. 57-58.

79 Beschwerniss Puncten / Der rebellischen Bawren ob der Enss / was sie begehren / und warumb sie Rebellieren / wie sie sich auch je lenger je mehr verstercken. Dessgleichen / von Belagerung der Staedte Luenen / Camen / unnd Unna / auch wie sie sich zum Theil ergeben haben. Francfort-sur-le-Main, Sigmund Latomus, juin 1626 [VD 17 3 : 605198S]. Liste des doléances dans la gazette de Stuttgart, n° 24 du 17 juin 1626 et dans la gazette de Berlin, n° 27, 1626.

80 Quellen zur Geschichte des deutschen Bauernstandes in der Neuzeit, éd. Günther Franz, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1963, n° 50, p. 113-116.

81 Gazette de Vienne, n° N6 du 27 mai 1626 et M6 du 23 mai 1626.

82 Gazette de Stuttgart, n° 31 du 5 août 1626, nouvelle de Vienne du 29 juillet 1626 ; gazette de Stuttgart, n° 32 du 12 août 1626, nouvelle de Nuremberg du 4 août 1626.

83 Gazette de Stuttgart, n° 43 du 28 octobre 1626, nouvelle de Vienne du 21 octobre 1626.

84 Pour 1626 : Martin Scheutz, « Ein tosendes Meer… », art. cit. [note 16] ; pour 1653 : Hans Mühlestein, Der grosse schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 19] ; Andreas Suter, Der schweizerische Bauernkrieg…, op. cit. [note 9].

85 Gazette de Vienne, n° D10 1626, nouvelle de Vienne du 5 septembre 1626.

86 Hans Sturmberger, Adam Graf Herberstorff…, op. cit. [note 73], p. 269.