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Devenir illustrateur ornemaniste à l’âge romantique : l’exemple d’Hercule Catenacci (1814-1884)

Yoann BRAULT

Ingénieur d’études, bibliothèque de l’Institut de France

NdA : Cette étude fait suite à une exposition organisée à la bibliothèque de l’Institut de France (oct.-déc. 2016).

En octobre 1923, Édouard Catenacci (1848-1925), inspecteur au service des Promenades de la ville de Paris, léguait par testament une partie de ses biens à l’Institut de France, dans le cadre d’une fondation créée en mémoire de son père, Hercule Catenacci. Le testateur chargeait en outre l’Institut de disposer librement « des éditions qu’il jugera rares ou de valeur que contient ma bibliothèque [… et] des dessins originaux, croquis de voyages […] aquarelles, estampes, gravures, tableaux, médailles, etc.1 » qu’il avait hérités de son père. Accepté en janvier 1926, ce legs offrit à la bibliothèque l’opportunité de recevoir environ deux mille cinq cents pièces qui vinrent étoffer de manière significative ses collections, notamment le fonds des manuscrits, qui hérita d’un riche ensemble de dessins et de la correspondance passive de l’artiste (environ deux cents lettres), le tout permettant d’embrasser la carrière d’un homme oublié du grand public comme des spécialistes2.

Grâce à ces témoignages précieux mais dispersés sur près d’un demi-siècle, peut-on reconstituer la trame d’une vie, apprécier le sens d’un œuvre ? La tâche n’est pas aisée, du fait de la nature de la documentation, à la fois largement graphique et qui semble refuser l’écrit. Surtout, le traitement du fonds, lors de son entrée dans les collections, pour lequel on a privilégié une approche thématique, a fini de brouiller les pistes.

En menant sur Hercule Catenacci une enquête biographique, nous ne cherchons pas à nous livrer à un jeu de réhabilitation. Si le rôle de ce « fécond imagier3 » nous semble devoir être réévalué, ce n’est pas pour promouvoir un auteur de plus dans le panthéon où siègent un Nanteuil, un Grandville ou un Doré. Personnage de second plan – pas vraiment artiste, mais homme de métier –, il semble pouvoir être rattaché à ce groupe disparate et mal connu sans lequel pourtant l’édition et la presse illustrées n’auraient pas été possibles, n’auraient pas eu le caractère exceptionnel qu’elles revêtirent en France au XIXe siècle. À travers l’évocation du parcours de Catenacci, nous voudrions documenter et appeler à une plus juste évaluation de la contribution de ce groupe au livre et à son histoire.

BOLOGNE, CORFOU, CONSTANTINOPLE, PARIS

Hercule – Ercole à l’état civil italien – naquit le 9 août 1814 à Ferrare. Il était l’un des cinq enfants4 de Maria Zanoni (v. 1793-ap. 1845) et de Luigi Catenacci (1779-1840) qui, fils d’un comptable ferrarais (Giovanni, né en 1745), eut une carrière d’employé aux écritures dans diverses administrations pontificales de la légation de Ferrare5. En tout état de cause, rien n’indique que le jeune Ercole, issu d’un milieu sans éclat, ait reçu une formation artistique dans le cadre familial6. On connaît en revanche son premier maître : Gaetano Domenichini (1794 ? -1864), professeur de dessin d’ornement à l’École des beaux-arts de Ferrare, mais également lithographe, buriniste et peintre7. Catenacci se perfectionna ensuite à Bologne, auprès d’Antonio Basoli (1774-1843), membre de l’Académie des beaux-arts de la ville, ornemaniste, védutiste et décorateur pour le théâtre8. De cette période de formation, Catenacci conserva deux perspectives scénographiques9 représentant une architecture « à l’antique », dans la manière du maître bolonais10, ainsi qu’un carnet sur les dernières pages duquel il colla une vingtaine de croquis à l’encre figurant des décors de scène dont plusieurs évoquent ceux d’Alessandro Sanquirico11. Ainsi, dès l’origine, la voie artistique qu’emprunta Catenacci n’était pas celle d’un figuriste. Il n’ambitionnait sans doute pas une carrière académique mais, réceptif au langage des styles et au pittoresque, il s’avançait plutôt dans celle d’un créateur de formes et de décors.

Catenacci avait seize ans et demi lorsque, le 3 février 1831, débuta le soulèvement mené par la Carbonaria, et dont Bologne fut le principal foyer. D’un « caractère vif et fougueux12 » selon un camarade d’études, acquis aux principes du libéralisme politique13, il participa à l’insurrection, sans que l’on sache toutefois dans quelle mesure. Brutale et rapide, la répression qui suivit contraignit les émeutiers à prendre le chemin de l’exil, notamment vers la France où, dans un premier temps, les organisations politiques républicaines les accueillirent en grand nombre14. Catenacci fut de ceux qui quittèrent leur patrie, mais c’est à Corfou, dépendant alors de la république des îles Ioniennes placées sous protectorat britannique, qu’il se réfugia15.

Le peu de sources dont on dispose sur cet épisode corfiote atteste toutefois que Catenacci demeura sur l’île entre deux et trois ans, travaillant vraisemblablement comme scénographe pour le théâtre San Giacomo, qui jouissait alors d’une certaine notoriété dans le paysage musical européen16. En témoigne un ensemble de trente-cinq bozzetti réalisés à la plume ou à l’aquarelle, dont un porte la mention « Catenacci invento17 » (ill. 1). Disséminés dans le fonds des manuscrits de l’artiste, mal identifiés, ces décors pour la scène, les uns dans un genre troubadour, les autres néoclassiques, sont malheureusement fort peu explicites. Seuls deux d’entre eux sont légendés : « Giardino magico per baletto la [illisible] in Corfù » et « Coradino in Corfù18 ». S’il n’a pas été possible d’identifier le premier sujet, le second est à mettre en rapport avec l’opéra éponyme d’Antonio Bartolomeo Bruni (1785). Enfin, l’une des aquarelles est datée (1831)19 et, lorsqu’ils existent, les filigranes du papier utilisé (T. Edmonds) portent les dates 1831, 1832 et 1833.

Illustration n° 1 : H. Catenacci, projet de décor d’opéra. Bibl. de l’Institut de France, ms. 4183 doss. 1, pièce 5.

Rien ne permet de déterminer la date et la raison pour laquelle Catenacci quitta Corfou pour les rives du Bosphore. On peut toutefois avancer qu’il avait rejoint Constantinople en 1835, date figurant sur le seul dessin millésimé de cette période20. Observons d’emblée que le contexte tant politique que culturel de cette nouvelle étape de son exil fut propice à un tournant dans la carrière de l’artiste. Sous le règne du sultan Mahmud II (1808-1839) en effet, la Sublime Porte s’était définitivement tournée vers l’Occident avec lequel elle renforçait ses relations diplomatiques. Profitant des conditions favorables qui leur étaient alors accordées, de nombreux ressortissants européens s’établirent dans l’empire devenu plus perméable aux transferts techniques et culturels. Parmi ces hommes figurait Henri Cayol (1805-1865) qui allait jouer un rôle pionnier dans le développement de l’imprimerie en Turquie. Né à Aubagne, ce brillant autodidacte, juriste de formation mais intimement lié au milieu artistique aixois21, avait été initié à la lithographie par son cousin germain, Jacques Caillol (1793-1862). Les deux hommes s’embarquèrent ensemble pour le Levant durant l’été 1830. Jacques se rendait en Moldavie22, mais Henri se fixa à Istanbul où, ayant appris le turc, il entra au service du serasker Hüsrev Pacha (v. 1756-1855). Ce dernier, suivant en cela l’exemple de son homologue égyptien, Mehmed Ali, élaborait alors un programme ambitieux d’édition. Pour les besoins exclusifs de l’armée, il fit installer au sein du ministère de la Guerre un atelier lithographique et en confia la direction au jeune Français. Le matériel avait été importé d’Europe et Hüsrev Pacha lui avait adjoint cinquante hommes que Cayol forma. L’entreprise fut un succès : dès 1831-1832, un premier livre sorti des presses lithographiques, orné de soixante-dix-neuf illustrations. Lorsqu’en 1836 Hüsrev Pacha se retira de ses fonctions, Cayol, par ailleurs gratifié d’une rente par le sultan, obtint un firman l’autorisant à s’établir à son propre compte23. On ignore de quelle manière les deux hommes entrèrent en relation mais, d’après l’imprimeur, Catenacci travailla à ses côtés durant « plusieurs années24 ». Sûrement initié à la gravure par ses professeurs, ce dernier n’avait sans doute jamais eu l’occasion de pratiquer la lithographie, technique encore récente que Cayol dut lui enseigner, et de fait, en 1841, Catenacci était qualifié de « dessinateur sur pierre25 ». Des premiers temps de leur collaboration nous conservons peu de traces : deux planches certainement destinées à l’édition scolaire, représentant une projection de figures géométriques, légendées en turc-ottoman et signées « Ercole Catenacci f.26 » ainsi qu’une épreuve, sans doute pour un papier à en-tête, représentant un panorama de la ville27.

Mais c’était là sous-exploiter les talents artistiques de l’Italien, eu égard notamment aux opportunités qu’offrait alors l’élan orientaliste de l’art européen. Aussi, lorsque Cayol put fonder sa propre entreprise, lorsque, surtout, son cousin Jacques le rejoignit à Constantinople, l’activité de Catenacci évolua. Formé au védutisme, jouissant d’une parfaite connaissance des lieux et de leur potentiel pittoresque, tout concourrait à ce que Catenacci produisît des vues de la ville destinées à passer sous les presses lithographiques des deux Français. Ainsi conserve-t-on plusieurs dizaines de dessins préparatoires à ces vedute, dont certains portent, au revers, la mention « pour la lithogr.28 ». En plus d’en avoir légendé la plupart, Catenacci inventoria les vues qu’il avait exécutées durant cette période, lesquelles concernent cent deux sites et sujets29. Cette liste ainsi que les dessins qui nous sont parvenus attestent que Constantinople et ses faubourgs ne constituèrent pas l’unique horizon de l’artiste30, qui se rendit également en Anatolie (Bursa, Smyrne31), en Grèce, en Roumanie, en Hongrie et peut-être même à Malte32. Malgré la variété des sujets représentés, le fonds de gravures qui accompagnait le legs d’Édouard Catenacci ne compte que onze lithographies (ill. 2) réalisées d’après les vues de son père, toutes relatives à Constantinople, et publiées, on l’a dit, par les deux cousins, sans que l’on sache s’il s’agit là d’une partie ou de la totalité de l’œuvre orientaliste lithographié de l’artiste33.

L’activité de Catenacci, lors de ce long séjour turc, ne se résume pas à cette collaboration. Selon une nécrologie, il enseigna également l’architecture et la topographie dans un « collège militaire » de la capitale34. Cet établissement peut correspondre à Mekteb-i Ulûm-u Harbiye (littéralement : École des sciences militaires, fondée en 1834), ou à Mühendishâne-i Berrî-i Hümayun (École impériale des ingénieurs militaires, qu’il a par ailleurs dessinée à deux reprises)35. Confirmée par l’un de ses élèves, Arif Effendi36, cette position résulte des réformes de l’enseignement militaire engagées par Mahmud II qui rendit obligatoire l’apprentissage du dessin37.

Illustration n° 2 : H. Catenacci, Vue de l’entrée du Bosphore. Bibl. de l’Institut de France, Fol. N 251, pièce 56.

À la fin des années 1830, l’Italien francisa son prénom, signant parfois même « Hercule de Catenacci38 », identité que lui prêtent deux de ses relations39. Ce changement qui manifeste un désir d’assimilation, est à rapprocher d’une démarche décisive pour la suite de sa carrière. En juin 1841, en effet, Catenacci sollicita de ses proches plusieurs lettres de recommandation auprès d’artistes et d’imprimeurs-libraires parisiens. Arif Effendi, son ancien élève, l’introduisait ainsi auprès d’Eugène Kaeppelin, imprimeur-lithographe reconnu40 ; D. N. Isckender, libraire à Constantinople, le recommandait à Jean-Armand Pichon, ancien libraire-éditeur, et à Nicolas Edme Roret (1797-1860), taille-doucier et éditeur très entreprenant41 ; un certain Levaux-Martial (?) enfin, le confiait aux soins de Condé, « peintre décorateur des Menus Plaisirs du roi42 ». La position des destinataires et la nature des requêtes qui leur étaient adressées trahissent l’indécision de Catenacci quant aux fins de ce séjour parisien. Obtention d’une place chez un lithographe reconnu, introduction dans le milieu artistique de la capitale voire celui des scénographes, le candidat ne semble s’être interdit aucune option. En outre, ce séjour, lorsqu’il fut projeté au seuil de l’été 1841, devait être provisoire43. Catenacci différa sans doute son départ, quatre mois ayant passé avant qu’il ne sollicite d’Henri Cayol un nouveau parrainage adressé cette fois-ci au célèbre caricaturiste Benjamin Roubaud et, indirectement, au peintre paysagiste Émile Loubon44. Cette lettre ne nous en apprend guère plus sur les intentions de l’artiste qui, selon son auteur, « se rend[ait] à Paris pour y travailler et s’y perfectionner », sans qu’il soit désormais question d’un éventuel retour. À cet égard, il paraît troublant que, jouissant d’une situation respectable, Catenacci ait désiré s’exiler à nouveau, se privant de l’opportunité de faire carrière à Constantinople, à l’instar d’un Amadeo Preziosi (1816-1882) qui, installé depuis 1842 dans la capitale ottomane, y rencontrait un immense succès, tant auprès des Levantins que d’amateurs européens45. Paris, qui occupait une position centrale dans le monde des arts, exerça-t-il sur le Ferrarais son attraction puissante ? Le dessinateur et illustrateur Camille Rogier46, ami intime de Gautier et de Nerval, qui résidait à Constantinople au début des années 1840 où il fréquentait Cayol47, aurait-il encouragé Catenacci à tenter l’aventure ? Rien ne permet de l’affirmer hormis la concomitance de leurs séjours. Reste qu’à la différence de cet artiste qui, de retour dans sa patrie, publia un recueil de vingt-cinq lithographies orientalistes, avec une introduction signée Gautier48, Catenacci ne parvint jamais à s’imposer dans ce genre49.

Il arriva en France en décembre 1841 ou janvier 184250. On ne sait rien de ses premières années parisiennes, hormis que sa situation financière fut mauvaise car il ne put se rendre à Ferrare pour régler la succession de son père51. Le contexte de son installation était, il est vrai, peu propice au succès. Depuis la Restauration, en effet, les professions artistiques traversaient une crise de surnombre et de surproduction. Artiste immigré et marginalisé par rapport aux circuits légitimes de formation (École des beaux-arts, atelier d’un maître reconnu), sans réel appui et sans fortune, Catenacci avait peu de chances de percer. Il n’eut sans doute d’autre choix que celui de rejoindre le rang le plus humble des dessinateurs, celui, anonyme, des ornemanistes.

Ce domaine dévalué des arts graphiques, encore peu investi par Catenacci52, mais pour lequel il allait faire preuve de talent, pouvait offrir une rémunération immédiate et, à moyen terme, une reconnaissance susceptible d’ouvrir des portes et de faire avancer sa carrière. Vers 1844-1845, il collabora ainsi avec Henry Échillet, « dessinateur-écrivain, lithographe et chromolithographe53 », créant sans doute des cartes et des emballages à caractère publicitaire54. C’est encore vers cette époque qu’il fournit des modèles55 de feuilles d’éventail chromolithographiées56 pour Léger-Pomel, pionnier en la matière57, puis pour son successeur, Samuel Manassé dit Théodore Mayer, qui s’était également spécialisé dans la fabrication de cartonnages (ill. 3). C’est dans ce contexte que Catenacci fut amené pour la première fois à travailler pour la librairie, créant le modèle de couverture de Chants et chansons populaires de la France (1844)58. Cette perméabilité entre le monde des ornemanistes, des éventaillistes, et celui de l’édition n’était pas inhabituelle si l’on en croit le témoignage du caricaturiste Charles Philipon59.

Illustration n° 3 : H. Catenacci, épreuve pour une feuille d’éventail. Bibl. de l’Institut de France, Fol. N 252, pièce 52.

Malgré une situation financière et professionnelle instable, Catenacci semble avoir été enclin à pérenniser son séjour en France. En juillet 1845, en effet, il épousa Zoé Gatineau (1821-ap. 1884)60. Cette décision ne semble pas avoir reposé sur une stratégie matrimoniale particulière : la future, domiciliée à Étampes, était orpheline d’un menuisier61 et les témoins présents lors de la signature du contrat62 et de la célébration du mariage n’avaient aucun lien avec le milieu artistique ou celui du livre. Autre preuve de sa volonté de faire souche en France, Catenacci demanda sa naturalisation qu’il obtint par arrêté du 21 avril 184863.

LES DÉBUTS DANS L’ÉDITION ET LA PRESSE ILLUSTRÉES

Travailler pour le livre – si tant est que sa manière plût aux éditeurs – constituait une opportunité appréciable pour un artiste évoluant en marge du cadre académique. En outre, depuis les années 1830, la conjoncture était plutôt favorable. La crise qui avait touché le secteur du livre, au début du règne de Louis-Philippe, avait eu en effet pour conséquence de transformer les stratégies éditoriales. La librairie s’était orientée vers un public élargi qu’elle avait tenté de gagner par divers moyens dont et surtout celui de l’image, qui avait envahi peu à peu le livre et la presse. Ainsi, dès les années 1840, la culture de l’imprimé devint une culture de l’immédiatement visible où le trait et la couleur, anticipant la lecture, devaient inciter à l’achat. Une évolution technique essentielle était venue soutenir cette évolution : la gravure sur bois « debout64 ». Mise au point par les Arméniens, mais développée en Angleterre, cette manière de graver au burin sur une plaque de poirier ou de buis, taillée perpendiculairement aux fibres du bois, assurait au graveur la possibilité d’une reproduction fidèle du dessin. Par ailleurs, à la différence de la taille-douce ou de la lithographie, elle permettait l’impression simultanée – car typographique – du texte et de la gravure, sans contrainte d’emplacement puisque la vignette pouvait être mise dans la forme de caractères et imprimée avec la même presse. La vignette xylographique permettait ainsi d’annuler l’opposition entre l’illustration en taille-douce, véritable tableau dans la page, et les ornements typographiques, gravés au couteau sur bois de fil. L’organisation du livre devint plus libre, susceptible de novations et d’audaces. La relation entre le texte et l’image était désormais fondée sur la contiguïté, l’interprétation, le dialogue immédiat65.

La première intervention significative de Catenacci comme illustrateur fut pour La Noblesse de France aux croisades (1845) dont il dessina la couverture66 (ill. 4). Il travailla ensuite pour Henri Louis Delloye, entre juin et septembre 1846, mais le décès précoce de l’éditeur mit fin à leur collaboration67. La difficulté était sans doute de réussir à imposer son nom parmi la pléthore de dessinateurs qui, en attente d’une meilleure position, cherchaient à se placer dans la presse ou la librairie. Pour y parvenir, Catenacci dut démarcher les éditeurs et guetter les opportunités, comme il le fit, en vain, lorsque son compatriote Giuseppe Pomba publia le premier numéro d’Il Mondo illustrato68. Il pouvait également user d’intermédiaires reconnus, tel l’illustrateur Charles Lallemand qui, sollicité, lui répondit : « j’ai vu plusieurs de ces messieurs les éditeurs à qui j’ai parlé de vous, mais comme toujours, ils désirent voir quelque chose fait pour leur genre de publication69. » Catenacci fut plus heureux avec Henri Brevière, l’un des graveurs sur bois les plus renommés et les plus prolifiques de la période romantique, qui le mit en relation avec Achille Deville. Celui-ci préparait une publication sur le château de Gaillon70, financée par le ministère de l’Instruction publique, et pour laquelle son auteur commanda à Catenacci un dessin « au simple trait, très soigné, très pur et d’une exactitude scrupuleuse » des stalles du chœur d’hiver de l’abbatiale Saint-Denis71. L’artiste donna tant de satisfaction72 que Deville lui demanda deux autres relevés73 et lui promit une lettre d’introduction auprès du chef du bureau chargé des publications scientifiques du ministère74. Cet épisode fut décisif dans la carrière de Catenacci en tant qu’illustrateur, puisque son relevé lui ouvrit les portes du Salon75, et qu’il tira de sa collaboration avec Deville une reconnaissance et une position quasi officielles. En 1851, en effet, Auguste Philibert Chaalons d’Argé qui occupait un poste dans l’administration, conseillait à Louis Perret d’engager Catenacci, « dessinateur très habile qui a fait des ouvrages très remarquables », pour l’illustration de ses Catacombes de Rome76. De même, au début des années 1850, Catenacci fut pressenti pour illustrer un ouvrage de Jean-Baptiste Antoine Lassus, financé là encore par le ministère, mais le projet n’aboutit pas77. Enfin, quelques années plus tard, le ministère le recommanda à l’abbé Cochet78 qui, dans sa correspondance, qualifiait l’artiste de « dessinateur du gouvernement79 ». L’érudit, qui préparait la publication d’une étude sur les sépultures antiques et du Haut Moyen Âge de Normandie80, n’hésita pas à confier à l’illustrateur son matériel archéologique pour qu’il fût dessiné et gravé à Paris81. Cette fois encore, la réception du travail de Catenacci fut élogieuse : « Je vous remercie de tout mon cœur de vos charmants dessins qui par leur finesse sont au-dessus de tous les éloges82. » L’abbé Cochet, soutenu par le ministère, et l’illustrateur reconduisirent leur collaboration avec le même bonheur pour un Tombeau de Childéric Ier, dans la préface duquel l’auteur reconnut : « c’est aux artistes que je dois le plus grand mérite de mon livre et l’expression la plus vive de ma reconnaissance. Sans leur concours généreux et dévoué, il m’eut été à jamais impossible de mener à bien une entreprise aussi coûteuse et aussi difficile83. »

Illustration n° 4 : (Ci-dessus et ci-contre) H. Catenacci, modèle et couverture de La Noblesse de France aux croisades. Bibl. de l’Institut de France, ms. 4190 doss. 1 D, pièce 63.

Tandis qu’au mitan du siècle Catenacci semblait s’installer plus confortablement dans son métier, il diversifia sa pratique en travaillant pour les périodiques illustrés dont le nombre avait si heureusement augmenté dans les dernières années du règne de Louis-Philippe84. Entre 1850 et 1855, il donna ainsi quarante-cinq dessins pour Le Musée des familles, tant vues de monuments que représentations de meubles, d’objets d’art et modèles d’ornements. Plus modeste semble avoir été sa production en matière d’illustrations originales. En 1851, il participa toutefois à deux publications : le Voyage autour de mon jardin85 pour lequel il composa de délicates vignettes de chapitre86 et, publiée par H. Lebrun, La Hongrie ancienne et moderne87 dont il composa le faux-titre et quatre illustrations. L’année suivante, il donna pour le même éditeur le dessin de la page de titre de l’Imagerie moderne : album de salon et de la chaumière, dont seul le premier numéro parut88.

CATENACCI VIGNETTISTE

La seconde partie des années 1850 constitue un moment clef dans la carrière de Catenacci. Le dessinateur, dont l’art était parvenu à son plein épanouissement, redoubla d’activité, allant jusqu’à entreprendre le marché anglais durant l’été 1856. À son retour de Londres, le graveur sur bois Adolphe François Pannemaker lui écrivit : « Que dites-vous des Anglais ? Sont-ils gens de goût, ont-ils eu celui de vous apprécier ? […] Je vous vois donc revenu avec une foule de commandes toutes plus belles les unes que les autres89. » De fait, il fut mandé par les relieurs londoniens Leighton, Son & Hodge pour donner des modèles de décor de cartonnages dorés et estampés à froid90. Si l’on ignore quelles suites Catenacci donna à ces projets, on sait en revanche qu’au même moment, en France, les commandes affluaient tandis qu’il atteignait la renommée dans le monde de l’édition, principalement en tant qu’ornemaniste. L’historien et critique d’art Jean Germain Désiré Armengaud fut alors l’un des premiers à célébrer publiquement « son talent [qui le plaçait] au premier rang dans le genre de l’ornementation91 », tandis que l’homme de lettres Théodore Labourieu voyait en lui « le fécond imagier qui, sur un livre, nous fait découvrir tout un poème où l’ornementation rivalise d’attrait avec le style et la pensée de l’écrivain92 ». Trois clients importants, dont les commandes sont documentées par une correspondance substantielle, ont sans doute beaucoup contribué à l’établissement de cette renommée durant ces années décisives : Alfred Mame, Ambroise Firmin Didot et Armengaud.

Installé depuis 1796 à Tours, le rameau le plus illustre de la famille Mame doit surtout son essor et sa notoriété à Alfred, associé à l’affaire familiale dès 183393. Ayant obtenu la direction totale de la société en 1845, ce dernier mit en application ses vues audacieuses en créant, selon une conception d’industrie verticale, une gigantesque usine qui intégrait tous les stades et procédés d’élaboration et de distribution du livre. Parallèlement, Mame chercha à s’entourer d’hommes de haute valeur avec lesquels il engagea de longues et confiantes collaborations. Catenacci fut de ceux-là qui, au regard de la singularité de leurs talents, travaillèrent pour un créneau cher à l’éditeur : les livres de bibliophilie qui, présentés aux Expositions universelles auxquelles Mame attachait la plus grande importance, étaient destinés à servir le prestige de l’entreprise. Ainsi de La Touraine94, ouvrage pour lequel Catenacci dessina les encadrements, les lettres ornées ainsi qu’un frontispice et une planche d’armoiries chromolithographiées95 (ill. 5). Présenté à l’Exposition de 1855, l’ouvrage se vit attribuer la grande médaille d’honneur et passa pour le chef-d’œuvre de typographie et d’illustration de son siècle. Par ailleurs, ayant su tirer parti de l’abandon de l’ancienne liturgie gallicane au bénéfice du rite romain – ce qui nécessitait de réimprimer les missels, graduels, bréviaires, et de concevoir de nouveaux livres de prières pour servir la piété des fidèles –, Mame réussit à obtenir sinon le monopole, du moins la plus grande part de ce marché. Catenacci fut largement associé à cette entreprise jusqu’à la fin des années 1860, intervenant spécialement en vue de l’Exposition de 1862 où furent présentés un Livre d’heures selon le rit romain, un Paroissien romain et un Livre de mariage96 au sujet duquel Alfred Mame écrivit : « Nous sommes on ne peut plus satisfaits de vos dessins. Celui de la célébration du mariage dépasse comme goût et élégance tout ce que vous avez fait pour nous97. »

Illustration n° 5 : (Ci-dessus et ci-contre) H. Catenacci, modèle et frontispice de La Touraine. Bibl. de l’Institut de France, ms. 41902 pièce 22.

Au milieu du XIXe siècle, la réputation de la maison Firmin-Didot n’était plus à faire. En 1855, Ambroise publia en petit format les œuvres complètes d’Horace, édition qui fut saluée par les amateurs. Composés dans le même esprit, deux ouvrages suivirent : un Virgile (1858) et un Anacréon (1864). Ces trois opus forment ce que les catalogues de la firme appelleront la « collection elzévirienne98 ». Catenacci qui, avec La Touraine, avait donné la mesure de ses prédispositions en matière d’ouvrages de bibliophilie, fut chargé de dessiner la page de titre et les culs-de-lampe de ces deux nouvelles publications99. Par ailleurs, durant les années 1857-1863, il travailla pour un projet similaire qui ne vit jamais le jour100 : les œuvres complètes de Racine pour lesquelles faux-titre, page de titre, vignettes de chapitre, culs-de-lampe et encadrements, le tout d’une délicatesse et d’un goût remarquables, ne passèrent jamais le stade de la gravure, sans que l’on connaisse la raison de cet abandon101. Enfin, autre morceau de choix, Catenacci réalisa une somptueuse page de titre et les encadrements Renaissance d’une réédition des Costumes anciens et modernes (1859-1860) de Cesare Vecellio102 (ill. 6).

Armengaud, enfin, contribua avec Alfred Mame et Ambroise Firmin Didot à asseoir la réputation du dessinateur en lui confiant la réalisation d’un programme ambitieux de vignettes et d’encadrements103 (ill. 7) de ses Galeries publiques de l’Europe (1856)104. Il fit de nouveau appel à Catenacci pour Les Chefs-d’œuvre de l’art chrétien (1858)105 et pour Les Reines du monde par nos premiers écrivains (1862)106 qui, tout en reprenant une partie du décor des Galeries, offre deux belles vues de Venise et de Caen. Si Armengaud protesta toujours de son admiration pour l’artiste (l’exemplaire que Catenacci possédait des Galeries porte l’envoi autographe de l’auteur « À Monsieur Catenacci, mon très honorable ami et mon plus utile collaborateur107 »), il lui reprocha à l’occasion la richesse de sa manière : « Vous êtes trop vigoureux, et vous avez trop d’imagination, et si vous ne faisiez pas part de mon souhait à votre dame, je voudrais vous savoir châtré par moitié. […] ce que vous avez fait est délicieux, mais c’est trop riche […]. La sobriété est aussi une qualité108. » De fait, parcourir l’œuvre de Catenacci en matière de vignettes, c’est faire le constat d’un style foisonnant, d’une singulière plasticité, qui illustre sa capacité à inventer sans jamais se copier. Cette faculté, Catenacci en fit la démonstration dans le domaine, notamment, des lettres ornées et des iconophores. En 1855, en effet, J. Claye édita un Spécimen de lettres ornées dessinées par Catenacci et gravées sur bois par Pannemaker109, dont l’élégance, riche mais sévère, se distingue des chantournements compliqués, empruntés à l’art rocaille, d’un abécédaire publié par H. Lebrun110. De même la grâce non dénuée d’humour des lettres ornées d’Une imprimerie en 1867111, où une armée de putti s’active dans l’atelier, tranche avec la gravité mâle des iconophores du Nouveau Dictionnaire de Bescherelle112.

LE TEMPS DE LA FORTUNE ET DU SUCCÈS

Catenacci sut habilement monnayer son art à mesure que sa notoriété s’affirmait. Ainsi, si Delloye avait déboursé 25 F pour un fleuron en 1846, il en coûtait 100 F à Mame en 1861. Pour La Touraine, ce dernier dépensa jusqu’à 1 600 F en dessins, tandis qu’un encadrement du Livre d’heures revenait à 105 F et même 140 F pour le Livre de mariage dont Catenacci factura 420 F le titre et le faux-titre. Ces pratiques de négociant n’allaient pas sans accrocs, Armengaud les lui reprocha longuement :

Illustration n° 6 : (Ci-dessus et ci-contre) H. Catenacci, modèle et page de titre de Costumes anciens et modernes. Bibl. de l’Institut de France, ms. 4190 doss. 1 C, pièce 46.

Illustration n° 7 : (Ci-dessus et ci-contre) H. Catenacci, modèles pour les culs-de-lampe des Galeries publiques de l’Europe. Bibl. de l’Institut de France, ms. 41902, pièces 81-93.

Je professe pour vous, mon cher artiste, une trop sérieuse affection pour ne pas devoir vous dire que vos clients s’en vont disant que vous faites payer vos travaux exhorbitamment cher (…). Ce n’est pas moi qui, traité par vous comparativement avec une certaine modération, vous ai fait cette réputation, ce n’est pas moi non plus qui blâme votre manière d’agir, je la trouve au contraire excellente au point de vue de vos intérêts matériels, seulement je ne la crois pas de nature à devoir prospérer longtemps. Je considère comme une exception les travaux de ces temps passés et le prix qu’ils ont obtenu. Tout a augmenté, je le reconnais, excepté le prix des livres et je puis vous assurer que l’éditeur qui ne surveille pas ses dépenses court risque ou plutôt est certain de manquer son but. Or, pour conclure, je dis que vous êtes trop cher, que généralement on s’en plaint et que je trouve ce système d’opérer contraire au fond à vos intérêts bien compris, voilà l’opinion de l’ami. Pour ce qui m’est personnel, j’ai peine à comprendre qu’en me faisant payer une bordure 100 F qu’autrefois vous exécutiez pour 30, 40 ou 50 F (vos notes sont là), vous vous soyez prêté, ainsi que vous le dites, aux exigences de mon opération, et que vous ayez fait à la sympathie, à l’amitié, à l’art de grandes concessions, il est des faits qui parlent plus haut que certaines protestations. Quoi qu’il en soit, je crains fort, et je le dis avec regret, que nous soyons arrivés ensemble à la fin de nos travaux, rien n’est désormais possible alors que je ne puis obtenir pour 70 F le dessin de bordures de cette dimension. C’est s’arrêter trop tôt pour une publication du genre et de l’importance de la mienne, mais enfin il faut bien vouloir, dit la sagesse, ce qu’on ne peut pas empêcher. J’en éprouve un vif regret, je le répète, c’est l’hommage que je rends à votre talent113

Autre témoignage des prétentions immodérées du dessinateur, celui de Giuseppe Pomba qui, en 1861, hésitait à engager son journal, Il Mondo illustrato, dans une dépense de 150 F pour « un dessin qu’ici [à Turin] un médiocre artiste nous fait pour 20 ou 25 F, bien entendu sans cadre, sans ornement, et sans le talent qui vous distingue114 ». Ces tarifs, comparés à ceux signalés par Philippe Kaenel115, classent indubitablement Catenacci au rang des illustrateurs nantis, d’autant qu’il s’était rapidement employé à diversifier son activité, accroissant sensiblement son revenu.

Entre 1855 et 1865 environ, Catenacci créa, en effet, un nombre considérable de modèles de titres de bourse, destinés à être gravés116. Ces certificats, prétextes à un fastueux décor, représentèrent une aubaine pour leur créateur : en 1862, le modèle destiné à la Société autrichienne des chemins de fer lui rapporta 2 200 F et celui de la Société générale de crédit immobilier, 2 500 F117. À deux reprises également (en 1857 et en 1862), le contrôleur général de la Banque de France invita Catenacci à la création de nouveaux modèles de billets, l’invention du procédé photographique ayant permis aux faux-monnayeurs de produire des contrefaçons118. Le domaine des arts appliqués ne lui était pas plus étranger. Il créa ainsi des feuilles et des montures d’éventails pour la maison Brissot frères, célèbres fabricants du boulevard de Bonne-Nouvelle119, dessina des médailles pour la maison Stern, passage des Panoramas120, donna des modèles de bijoux pour l’orfèvre Gabriel Jarry (aîné)121. Enfin, durant la décennie 1860, Catenacci reçut des commandes prestigieuses : vers 1860, il dessina pour l’ébéniste Molker « du mobilier […] pour les salons de l’empereur de Russie122 » ; en 1866, il travailla pour Jules Gastinne-Renette, célèbre armurier parisien, à qui il donna des dessins d’ornement pour des armes blanches et à feu123 dont un fusil, sans doute destiné à Napoléon III, qui fut exposé124. L’abbé Sire, enfin, qui constituait à Rome une collection de traductions de la bulle Ineffabilis Deus, commanda la version française enluminée à Catenacci. Ce travail, achevé en juin 1867125, valut à son auteur d’être élevé au grade de commandeur de l’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand126.

Durant ces années où Catenacci confortait sa position professionnelle, financière et sociale, il sut tisser des relations de confiance avec ses clients. Alfred Mame, qui lui savait gré de son « talent merveilleux », appréciait tout autant son « exactitude [qui] n’est pas la qualité ordinaire des artistes127 ». En outre, son jugement faisait autorité, ce qui lui valut d’être régulièrement consulté sur la valeur de tel ou tel graveur et, rapidement, d’être commis au choix et à la direction des xylographes chargés d’exécuter ses modèles128. Sitôt sa réputation établie, son avis fut sollicité, soit en tant qu’artiste, à l’instar de l’éditeur Amyot qui, en 1861, lui adressait un nommé Coirat pour lui « soumettre quelques-unes de ses esquisses et recevoir les conseils de l’éminent artiste qu’il admire autant que moi, ce qui n’est pas peu dire129 », soit en tant que praticien comme le fit Samuel Coblence, promoteur de la galvanoplastie en France, qui recherchait le suffrage de Catenacci pour homologuer un nouveau procédé : « Voici deux épreuves d’après le dessin au crayon que vous m’avez fait. Dites-moi si vous reconnaissez bien votre main. Votre lettre me servira à décider les artistes qui hésiteraient à se servir d’un procédé qui n’aurait pas reçu l’approbation d’un maître aussi autorisé que vous130. »

En définitive, à l’orée des années 1860, Catenacci était un artiste installé, une sommité dans sa profession, qui pouvait afficher désormais sa réussite131. Aussi, en juin 1861, son épouse et lui firent l’acquisition d’un immeuble de rapport, passage Saint-Dominique, puis, en mars 1862, d’un terrain contigu, avenue de La Bourdonnais, sur lequel on vit s’élever bientôt « une bonne construction », comprenant un rez-de-chaussée sur niveau de caves et cinq étages132. Catenacci, en gestionnaire avisé, y occupait un appartement au quatrième, tandis que le reste des deux immeubles était loué avec un rapport supérieur à 7 000 F par an133.

LES DERNIÈRES ANNÉES

Pourtant, à compter du milieu des années 1860, Catenacci semble s’être détourné peu à peu de la vignette originale134 pour se consacrer principalement à l’illustration de reproduction. À partir de 1862 en effet, il alimenta de ses dessins nombre de périodiques tels Le Magasin pittoresque, Le Tour du monde, nouveau journal des voyages ou, plus tard, Le Journal de la jeunesse. Parallèlement, il travailla à deux ouvrages de vulgarisation largement illustrés : Les Merveilles de la céramique135 et Les Armes et les armures136, avant d’orienter sa production, durant les quinze dernières années de sa vie, vers les livres d’étrennes dont le marché était en forte croissance, travaillant notamment pour la maison Hachette137. Ce retournement assez soudain du caractère de son œuvre, s’opposant à la créativité inépuisable dont Catenacci avait fait preuve durant les deux décennies précédentes, ne laisse pas de surprendre. Reste que cette évolution s’accompagna d’une nouvelle méthode de travail, l’artiste ne dessinant désormais que d’après photographies. Ainsi, en 1882, Édouard Charton engageait son illustrateur à lui proposer des dessins dont il choisirait les sujets en les trouvant « dans les grands dépôts de photographies du Magasin [pittoresque]138 ».

Si, en renonçant à l’illustration originale et en optant pour une production calibrée qui, malgré sa qualité, peut décevoir, Catenacci ne sacrifia pas ses facultés de créateur à la routine. Il exposa en effet au Salon à deux reprises : un Souvenir d’Italie (1869) et La Rue aux Fèvres à Lisieux (1870). En 1872, ce furent des « miniatures » de sa composition que le public put admirer dans une librairie de Laval, sur l’initiative de Henri de La Broise, érudit et collectionneur, qui observa : « Je suis heureux de vous dire, Monsieur, qu’il n’y a eu qu’une voix pour louer le goût de vos compositions, ainsi que leur fraîcheur et leur délicatesse139. » En outre, dans les années qui suivirent, Catenacci exécuta nombre d’aquarelles140 qui, à en croire une nécrologie, « étaient justement appréciées141 ». Durant cette dernière période, il semble avoir suivi – bien que modestement – l’exemple d’un Jean Gigoux ou d’un François-Louis Français qui, enrichis grâce aux vignettes, s’étaient élevés à la peinture. Néanmoins, il ne parvint jamais à se hisser au sommet du grand art et à la peinture d’histoire, se tournant d’emblée vers le paysage et la nature morte. Sans doute d’ailleurs, dans un monde artistique qui méprisait la pratique industrielle, commerciale et populaire de l’illustration, n’aurait-il jamais pu, comme Gustave Doré, obtenir de reconnaissance officielle et se fondre véritablement dans ce milieu qu’il tentait tardivement d’intégrer.

La dichotomie qui caractérise, à partir des années 1870, l’activité graphique de Catenacci, partagée entre le dessin de reproduction d’une part et l’aquarelle originale d’autre part, semble refléter la distinction qu’il faisait lui-même entre son « métier » d’illustrateur et son « œuvre » en tant qu’artiste. Aussi, comment ne pas rapprocher ce dédoublement, perceptible dans les dernières années de sa carrière, du processus observé par Philippe Kaenel, qui souligne la spécialisation progressive et la professionnalisation de la pratique de l’illustration au cours de la seconde moitié du siècle142 ?

De la même manière que cet auteur relève que « certains [illustrateurs], à défaut d’une véritable reconnaissance institutionnelle, accèdent parfois à l’aisance et à la notoriété143 », Catenacci, devenu illustrateur par nécessité économique plutôt que par vocation, s’est très honorablement élevé dans la société et s’est enrichi. En 1845, son contrat de mariage indiquait, en effet, que chacun des futurs époux apportait 3 000 F144. Près de quarante ans plus tard, lors de la liquidation-partage de communauté, la fortune du couple était estimée à plus de 250 000 F145, c’est-à-dire qu’elle avait été multipliée par plus de quarante-et-une fois depuis l’époque de leur mariage ! Enfin, Catenacci tomba assez rapidement dans l’oubli, mais il n’en demeure pas moins que sa disparition fut signalée dans plusieurs articles de presse à plusieurs reprises et qu’il fit l’objet d’une longue notice dans le Dictionnaire illustré des contemporains, ce dont peu d’illustrateurs eurent le privilège146. Du reste, s’il est difficile de reconnaître en Catenacci le génie d’un Grandville ou d’un Doré, au moins doit-on admettre que ce bon faiseur a contribué avec un goût sûr et une application constante à l’esthétique de son époque.

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1 Arch. de l’Institut de France, C 25.

2 Observons par exemple qu’il n’a pas fait l’objet de notice dans le Dictionnaire des illustrateurs, pourtant très complet, de Marcus Osterwalder.

3 Théodore Labourieu, L’Art du dix-neuvième siècle, Paris, 1858, p. 104.

4 Bibl. de l’Institut de France (désormais BIF), ms. 4181 pièces 58 et 38. Notoriétés (30 juillet 1815 et 23 septembre 1816). Archivio Storico Comunale di Ferrara, Censimenti della città, année 1812, vol. 2, p. 15, et année 1835, vol. 2, p. 8.

5 BIF, ms. 4181, pièce 59. Certificat (31 juillet 1825).

6 Ibid., ms. 4182, pièce 62 : lettre autographe signée (désormais l.a.s.) de G. Finotti (26 août 1842) : « … tu pourras ainsi être en état de donner quelque secours à ta famille qui en a tant besoin. »

7 Cette information figure dans les deux catalogues du Salon où Catenacci exposa. Pierre Sanchez et Xavier Seydoux, Les catalogues des Salons, Dijon, L’échelle de Jacob, 2005, t. IX, Salon de 1869, n° 416 et Salon de 1870, n° 490.

8 Fabia Farneti, Eleonora Frattarolo et Andrea Emiliani, Antonio Basoli, 1774-1848 : ornatista, scenografo, pittore di paesaggio : il viaggiatore che resta a casa, Bologne, Pinacoteca Nazionale, 2008.

9 BIF, ms. 4183 dossier 3, pièces 20-21.

10 Antonio Basoli, Francesco Cocchi, Raccolta di prospettive serie, rustiche, e di paesaggio […] inventate da Antonio Basoli guelfese, Bologne, 1810, pl. XVI et Antonio Basoli, Collezione di varie scene teatrali per uso degli amatori, e studenti di belle arti date in luce da Antonio Basoli, Bologne, 1821, pl. XL.

11 BIF, ms. 4184 C, non folioté.

12 Ibid., ms. 4182, pièce 62. L.a.s. de G. Finotti (26 août 1842).

13 Dix-sept ans plus tard, Catenacci déclarera être « issu d’une famille qui a combattu avec un dévouement infatigable sous les drapeaux de la République française » et protestera de ses « opinions libérales », « principes pour lesquels j’ai toujours lutté et souffert ». Arch. nat., BB11 602. L.a.s de Catenacci (19 mars 1848).

14 Gianfrancesco Borioni, « Le patriotisme nomade : les exilés des États pontificaux de 1820 à 1838 », Revue d’histoire du XIXe siècle, n° 28, 2004, p. 15-29.

15 BIF, ms. 4182, pièce 132. L.a.s. d’A. Menafoglio (12 mai 1843) : « … ayant eu l’heur de vous connaître à Corfou comme une personne d’honneur et cordiale. »

16 Konstantinos Kardamis, « Nobile Teatro di San Giacomo di Corfù : an overview of its significance for the Greek ottocento », Newsletter n° 99 (2006) de la Donizetti Society, http://www.donizettisociety.com (page consultee en ligne en mai 2017).

17 BIF, ms. 4183 dossier 1 (22 pièces), dossier 3 (pièces 9, 10, 12, 13, 16, 19 à 21), dossier 4 (pièces 10, 12 et 13), ms. 4185, dossier 1 (pièces 4 et 5).

18 Ibid., ms. 4185 dossier 1, pièces 4 et 5.

19 Ibid., ms. 4183 dossier 3, pièce 10.

20 Ibid., ms. 4186 B1, pièce 6. Dessin représentant la mosquée Nusretiye dans le quartier de Tophane.

21 Il fut proche dans sa jeunesse du compositeur Félicien David (1810-1876), du peintre Émile Loubon (1809-1863) et du caricaturiste Benjamin Roubaud (1811-1847). BIF, ms. 4182, pièce 25. L.a.s. d’H. Cayol (17 février 1845).

22 Chambre de Commerce et d’Industrie de Marseille Provence, MF 2311, fol. 4. Délivrance de passeport (6 juillet 1830).

23 Grégoire Zellich, Notice historique sur la lithographie et sur les origines de son introduction en Turquie, Constantinople, A. Zellich fils, 1895, p. 43-54 ; Charles Violette, « Comment Henri Cayol a introduit la lithographie à Constantinople », Comœdia, 29 juillet, 1908, p. 2 ; Clifford Edmund Bosworth et al., The Encyclopaedia of Islam, Leyde, E. J. Brill, 1989, vol. VI, p. 802 ; Johann Strauss, « Le livre français d’Istanbul (1730-1938) », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, 87-88, 1999, p. 277-301.

24 BIF, ms. 4182, pièce 23. L.a.s. d’H. Cayol (17 octobre 1841).

25 Ibid., pièce 86. L.a.s. de D. N. Isckender (17 juin 1841).

26 BIF, Fol. N 254*, pièces 777-778.

27 Ibid., Fol. N 251, pièce 51.

28 Ibid., ms. 4185 et 4186 passim.

29 Ibid., ms. 4186 doss. 6 (pièce non foliotée).

30 Le Monde illustré, p. 391 (21 juin 1884).

31 Il évoque lui-même un épisode de sa présence à Smyrne, où il sauva à la vie à deux marins de l’escadre de la Méditerranée, vraisemblablement durant la seconde guerre égypto-ottomane (1839-1841). Arch. nat., BB11 602. L.a.s. de Catenacci (19 mars 1848).

32 BIF, ms. 4185 doss. 1, pièce 6. Vue de La Valette.

33 BIF, Fol. N 251, pièces 51 à 69. Témoignant de millésimes variés, elles portent diverses adresses : « Imp.ie Lithograph.e de Caillol et Cayol à Constant.ple », « Lith. de Jacq. Caillol et Henr. Cayol rue Coulé Capsou, Galata, Constantinople », « Imprimerie Lithogr. de J.es Caillol et H.ri Cayol, vis-à-vis le Patriarchat Arménien, Galata, Constantinople », « Lith. de Jacques Caillol, Galata, Constantinople », « Lith. de Jacques Caillol, Constantinople ».

34 Le Monde illustré, 21 juin 1884, p. 391.

35 BIF, ms. 4186 doss. 4, pièce 3 et doss. 19, pièce 7 pour les dessins et Fol. N 251 pièce 66 bis pour la lithographie.

36 Ibid., ms. 4182, pièce 8 (17 juin 1841). Il n’a pas été possible d’identifier ce personnage qui poursuivit sa formation à Paris auprès d’Eugène Kaeppelin et revint à Istanbul où, en 1841, il était employé comme lithographe (par Henri Cayol ?).

37 Avigdor Levy, « The Officier Corps in Sultan Mahmud’s II New Ottoman Army, 1826-39 », International Journal of Middle East Studies, vol. 2 (1971), p. 21-39 ; Odile Moreau, L’empire ottoman à l’âge des réformes. Les hommes et les idées du « Nouvel Ordre » militaire, 1826-1914, Paris, Maisonneuve & Larose, 2007, p. 58-72 ; Johann Strauss, « L’image moderne dans l’empire ottoman : quelques points de repère », dans La multiplication des images en pays d’Islam : de l’estampe à la télévision. Actes du colloque de l’Université du Bosphore (25-27 mars 1999), éd. Bernard Heyberger, et Sylvia Naef, Würzburg, Ergon Verlag, 2016, p. 105-129.

38 BIF, ms. 4186 doss. 6, pièce 16.

39 Ibid., ms. 4182, pièces 84-86 et 98. L.a.s. de D. N. Isckender et Levaux-Martial (?) (17 et 15 juin 1841).

40 Ibid., pièce 8. L.a.s. d’Arif Effendi (17 juin 1841) : « Je ne doute pas qu’il ne trouve dans votre atelier quelque travail et surtout une bonne direction. Si vous pouvez le mettre en rapport avec quelques bons artistes de Paris pour le paysage, les ornements, l’architecture & c vous le verrez rapidement profiter de leurs conseils et produire de bons résultats. Enfin, je pense que vos connaissances de l’art & des artistes vous pourrez lui être d’une immense utilité. »

41 Ibid., pièce 85-86. L.a.s. de D. N. Isckender (17 juin 1841).

42 Ibid., pièce 98. L.a.s. de Levaux-Martial (?) (15 juin 1841) : « Je vous prie d’avoir la complaisance de faire connaître à Monsieur Hercule de Catenacci porteur de la présente tous les artistes distingués qui se trouvent pour le moment à Paris, étant lui-même artiste, ayant un beau talent. »

43 BIF, ms. 4182, pièces 8 et 86 (17 juin 1841). Arif Effendi demanda en effet à Kaeppelin « de faire passer un exemplaire [de son traité de lithographie] par le retour de M. Hercule Catenacci ». Quant à D. N. Isckender, il évoque un séjour de « trois ou quatre mois ».

44 Ibid., pièce 23. L.a.s. d’H. Cayol (17 octobre 1841) : « Je vous le présente comme artiste et comme ami. Si vous pouvez lui être utile en lui procurant du travail et des connaissances, vous m’obligeriez. Comme il s’occupe de paysage et que mon ancien ami M. Émile Loubon est devenu supérieur en ce genre, je vous serai aussi obligé en cas qu’il fût à Paris de vouloir bien lui faire faire sa connaissance et lui présenter mes amitiés et mes félicitations sur ses succès. »

45 Caroline Juler, Les orientalistes de l’école italienne, Courbevoie, ACR, 1994, p. 126-133.

46 François Pouillon, « Un ami de Théophile Gautier en Orient, Camille Rogier. Réflexions sur la condition de drogman », Bulletin de la Société Théophile Gautier, 12, 1990, p. 55-87

47 BIF, ms. 4182, pièce 23. L.a.s. d’H. Cayol (17 octobre 1841) : « M. Camille Rogier qui est ici depuis quelque temps… »

48 Camille Rogier, La Turquie, mœurs et usages des Orientaux au dix-neuvième siècle. Scènes de leur vie intérieure et publique, harem, bazars, cafés, bains, danses et musique, coutumes levantines, etc., dessinés d’après nature par Camille Rogier, avec une introduction par Théophile Gautier, et un texte descriptif, Paris, chez l’auteur, 1846.

49 Il faut peut-être rattacher à cette période une huile toile, de facture médiocre, représentant une mosquée. BIF, Objet 1000.

50 BIF, ms. 4182, pièce 99. L.a.s. de G. Luzzi (15 février 1843).

51 Id.

52 Rappelons que son premier professeur, Domenichini, enseignait le dessin d’ornement. Par ailleurs, lors de son séjour à Constantinople, Catenacci releva quelques décors. BIF, Ms 4186 doss. 6, pièces 4 à 6.

53 Bottin du commerce, années 1844 et 1845. L’atelier était alors situé 7 rue Saint-Denis.

54 Catenacci créa à cette occasion une carte de visite lithographiée dont nous conservons quelques exemplaires qu’il corrigea lors de son installation rue Taitbout (BIF, Fol N 254**). C’est une réduction légèrement simplifiée d’une carte créée par le graveur Antonio Acquaroni (v. 1800-1874) dont Catenacci conservait un exemplaire (4° N 202, pièce 45). Le modèle manuscrit de cette carte (« rue St Denis, 7 ») est dessiné au revers d’une carte publicitaire chromolithographiée, malheureusement très lacunaire, portant la mention, restituable en partie, « [… lith]ographique [rue Saint-]Denis, 7 […] [DESSIN]ATEURS [ECRI]VAINS [PAR]IS ». BIF, ms. 4183, doss. 2, pièce 1.

55 BIF, ms. 4191 2.

56 Ibid., Fol. N 252, pièces 37 à 67. Deux éventails de ce type, vraisemblablement créés par son père, ont été légués au Musée des Arts décoratifs par Édouard Catenacci (inv. 25593 et 25594).

57 En 1828, Léger-Pomel fut le premier à créer des feuilles d’éventail chromolithographiées. Grand-Carteret, John, Vieux papiers, vieilles images, cartons d’un collectionneur, Paris, A. Le Vasseur, 1896, p. 286.

58 Fol. N 252, pièce 61.

59 BnF, ms. n.a.fr., 27281. L.a.s. de Ch. Philipon (4 janvier 1854) : « Je fis des éventails, des vignettes pour la librairie et des caricatures lithographiées. »

60 Arch. dép. de l’Essonne, 4E 1294, acte n° 25 (12 juillet 1845).

61 Ibid., 2E67 166. Inventaire après décès de Louis Antoine Théodore Gatineau (15 juin 1843).

62 Ibid., 2E67 174. Contrat de mariage (6 juillet 1845).

63 Arch. nat., BB11 602. Jointe au dossier, une lettre du préfet de police de Paris, Pierre Carlier, adressée au Garde des Sceaux propose une remise des droits de naturalisation arguant qu’en plus d’une « position précaire », Catenacci « professe des opinions politiques modérées et a combattu en juin 1848 dans les rangs de la garde nationale. Des certificats réguliers attestent même que cet étranger, sous-lieutenant dans sa compagnie, a été blessé dans le faubourg Saint-Denis » et qu’ « il est digne par sa conduite et sa condition précaire de la bienveillance du gouvernement ».

64 Rémi Blachon, La Gravure sur bois au XIXe siècle. L’âge du bois debout, Paris, l’Amateur, 2011.

65 Michel Melot, « Le texte et l’image » et Ségolène Le Men, « La vignette et la lettre », Histoire de l’édition française, t. III, Paris, Promodis, p. 287-327.

66 BIF, ms. 4190 doss. 1 D, pièce 63. Paul Roger, La Noblesse de France aux croisades, Paris, Derache et Dumoulin, et Bruxelles, Vandale, 1845.

67 Ces dessins, relatifs à sainte Catherine de Sienne, sainte Julienne et sainte Clotilde ne furent sans doute jamais publiés et ne lui furent réglés par la veuve de l’éditeur qu’en 1851. BIF, ms. 4182, pièce 47 (29 juin-29 septembre 1846, 9 novembre 1851).

68 Ibid., pièce 149. L.a.s. de G. Pomba (2 décembre 1846).

69 Ibid., pièce 95 (11 février 1845). Lallemand lui demanda toutefois « un croquis avancé d’un paysage représentant quelque chose qui ressemble aux Charmettes où se promenaient J.-J. Rousseau avec Mme de Warens, vous me laisserez la place pour mettre les figures ».

70 Achille Deville, Comptes de dépenses de la construction du château de Gaillon, Paris, Imprimerie nationale, 1850.

71 BIF, ms. 4182, pièce 49 (28 août 1848). Deville offrit 300 francs pour le dessin et 50 francs pour les frais de déplacement et recommanda : « Je dois vous rappeler que ces dessins doivent être faits avec la plus grande exactitude, dans tous leurs détails, et prêts à être reproduits par la gravure […] Je ne dois pas vous cacher que plusieurs dessins du même ouvrage sont confiés aux artistes les plus habiles et que dans l’intérêt de la publication et dans celui de votre nom, il faut vous efforcer de ne pas rester en arrière. Vous mettrez votre nom au bas des dessins. » Id. pièce 50 (4 septembre 1848).

72 BIF, ms. 4182, pièce 55. L.a.s. d’A. Deville (24 avril 1849) : « J’espère que le graveur, qui aura fort à faire, répondra à la beauté de vos travaux. Ces planches-là vous feront honneur, beaucoup d’honneur. Je dois bien des remerciements à M. Brevière pour m’avoir mis en relation avec un artiste comme vous. » Ms. 4182, pièce 58. L.a.s. d’A. Deville (21 août 1849) : « Je lui [Brevière] recommande d’apporter le plus grand soin à ce travail et de faire tous ses efforts pour ne pas rester au-dessous de la finesse, de la délicatesse, de la pureté de trait de votre magnifique dessin […] Priez M. Brevière de ménager le plus possible votre dessin, ayant grand désir de le conserver plus tard, quand il sera sorti de ses mains. » Deville rendit hommage à l’artiste dans l’introduction de son ouvrage : « Nous avons pu recomposer cette admirable pièce de menuiserie grâce au dessinateur qui nous a prêté le secours de son talent, si fin et si précieux. » Achille Deville, op. cit., p. LXXVI.

73 BIF, ms. 41872, fol. 57-65. Relevés et croquis relatifs aux stalles de l’ancienne chapelle du château de Gaillon.

74 Ibid., ms. 4182, pièce 53. L.a.s. d’A. Deville (15 mars 1849).

75 Ce dessin fut remarqué par Abel Lahure à l’occasion du Salon de 1853 (section architecture). Il en fit l’éloge dans la Revue des Beaux-Arts, Paris, 1853, p. 270.

76 BIF, ms. 4182, pièce 29. L.a.s. d’A. Ph. Chaalons d’Argé (16 septembre 1851).

77 Ibid., pièce 96. L.a.s. de J.-B. A. Lassus (s. d.)

78 Ibid., pièce 36. L.a.s. de J. B. D. Cochet (21 décembre 1854) : « Depuis longtemps le ministère m’a autorisé à vous choisir comme dessinateur. »

79 Ibid., pièce 37. Enveloppe postale à l’adresse de Catenacci (6 février 1857).

80 Jean Benoît Désiré Cochet, Le tombeau de Childéric Ier, roi des Francs…, Paris, Derache, 1859.

81 BIF, ms. 4182, pièce 36. L.a.s. de J. B. D. Cochet (21 décembre 1854).

82 Ibid., pièce 35. L.a.s. de J. B. D. Cochet (12 septembre 1855).

83 Jean Benoît Désiré Cochet, op. cit., p. XX.

84 Jean Watelet, « La presse illustrée », Histoire de l’édition française, t. III, Paris, Promodis, p. 329-341.

85 Alphonse Karr, Voyage autour de mon jardin, Paris, L. Curmer et V. Lecou, 1851.

86 BIF, ms. 4190 doss. 1 B, pièces 85-90.

87 J. Boldenyi, La Hongrie ancienne et moderne. Histoire, arts, littérature, monuments, Paris, H. Lebrun, 1851.

88 BIF, ms. 41902, fol. 24.

89 Ibid., ms. 4182, pièce 209 (8 octobre 1856).

90 Ibid., pièce 83 (29 août 1856).

91 Jean Germain Désiré Armengaud, Les Galeries publiques de l’Europe, Paris, J. Claye, 1856, p. 431.

92 Théodore Labourieu, L’Art du dix-neuvième siècle, Paris, 1858, p. 104.

93 Association Hôtel Mame-centre culturel et Institut Mémoires de l’édition contemporaine, Mame. Angers-Paris-Tours, deux siècles du livre, Tours, 1989, p. 25 et sq.

94 Jean-Jacques Bourassé, La Touraine, histoire et monuments, Tours, Mame, 1855.

95 BIF, ms. 41902, pièces 22-23.

96 Ibid., ms. 4190 doss. 3 F : vignettes relatives au Livre d’heures ; doss. 1 C : vignettes relatives au Paroissien romain ; doss. 3 E : vignettes relatives au Livre de mariage.

97 BIF, ms. 4182, pièce 115. L.a.s. d’A. Mame (23 novembre 1861). Mame adressa à l’artiste quatre exemplaires brochés et un cinquième relié (BIF, Md 1513) au sujet duquel il écrivit « Nous espérons que la reliure sera de bon goût et qu’elle ne déparera pas à vos yeux les charmantes compositions que renferme ce livre. » Ms. 4182, pièce 123 (12 juillet 1862).

98 André Jammes et Françoise Courbage, Les Didot. Trois siècles de typographie et de bibliophilie. 1698-1998, Paris, Agence culturelle de Paris, 1998, p. 63-65.

99 BIF, ms. 4190 doss. 1 D, pièce 41. Modèle de la page de titre du Virgile ; doss. 3 D. Culs-de-lampe de l’Anacréon. Compte tenu de la parenté de style, il est possible que Catenacci soit aussi l’auteur de la page de titre de l’Horace, mais celle-ci n’est pas signée ; la nécrologie parue dans la Revue de l’art français (juillet 1884, p. 108) la lui attribue. Alfred Firmin-Didot offrit à Catenacci un exemplaire de son Virgile en « témoignage d’estime et de considération ». BIF, Md 1553 et ms. 4182, pièces 66-67. L.a.s. d’A. F. Didot (19-20 août 1863).

100 BIF, ms. 4182, pièces 64-65. L.a.s. d’A. F. Didot (4 juillet 1857-16 février 1863).

101 Ibid., ms. 4190 doss. 3 B. On conserve également un report sur bois blanchi pour un cul-de-lampe (Fol. N 254** pièce 3).

102 Ibid., doss. 1 C, pièce 46. Ce livre a été réédité en 1863, précédé d’un « Essai typographique et bibliographique sur l’histoire de la gravure sur bois » par Ambroise Firmin Didot.

103 Ibid., doss. 2, pièces 81 à 93. Culs-de-lampe ; ms. 4190 doss. 1 C, pièces 90-92. Encadrements.

104 Jean Germain Désiré Armengaud, Les Galeries publiques de l’Europe, Paris, J. Claye, 1856.

105 Id., Les Chefs-d’œuvre de l’art chrétien, Paris, C. Lahure, 1858.

106 Id., Les Reines du monde par nos premiers écrivains, Paris, C. Lahure, 1862.

107 Id., Les Galeries publiques de l’Europe, Paris, J. Claye, 1856. BIF, Fol. Rodocanachi 38.

108 BIF, ms. 4182, pièce 12. L.a.s. de J. G. D. Armengaud (s. d.)

109 Ibid., ms. 4189, doss. 4. Modèles pour le Spécimen.

110 Le livre d’or des petits enfants, Paris, H. Lebrun, 1862.

111 Paul Dupont, Une imprimerie en 1867, Paris, P. Dupont, 1867.

112 Louis-Nicolas Bescherelle, Nouveau dictionnaire national, Paris, Garnier, 1887.

113 BIF, ms. 4182, pièce 9. L.a.s. de J. G. D. Armengaud (12 mai 1855).

114 Ibid., pièce 158. L.a.s. de G. Pomba (mai 1861).

115 Philippe Kaenel, Le métier d’illustrateur 1830-1880. Rodolphe Töpffer, J.-J. Grandville, Gustave Doré, Paris, Messene, 1996, p. 85-88.

116 T. du Pasquier, « Hercule Catenacci, illustrateur de titres anciens », Le Collectionneur français, n° 212-214, mai-août 1984.

117 BIF, ms. 4182, pièce 171 (17 mai 1862) et pièce 208 (25 août 1862).

118 BIF, ms. 4182, pièce 198 (10 janvier 1857) et pièces 125-126 (28 mai-3 juin 1862).

119 Ibid., ms. 4191 doss. 2 A, pièce 26.

120 Ibid., ms. 4182, pièces 189 et 192. L.a.s. de Stern (16 octobre 1858 et 9 avril 1872).

121 Ibid., pièce 90. L.a.s. de G. Jarry (26 mai 1862) ; ms. 4189 doss. 3 D, pièces 17, 18, 19 et 22. Modèles de broches.

122 Une table que possédait Catenacci, créée à cette occasion, fut léguée par son fils au Musée des Arts décoratifs. Arch. de l’Institut de France, C 25.

123 BIF, ms. 4182, pièces 73-75. L.a.s. de J. Gastinne-Renette et mémoires des modèles exécutés par Catenacci (18 avril 1866 et s. d.) ; ms. 4189 doss. 2 A. Modèles de décors.

124 Ce fusil de chasse « destiné à l’empereur » fut présenté lors de l’Exposition universelle de 1867. Le Magasin pittoresque, tome XXXV, juin 1867, p. 203-205.

125 BIF, ms. 4182, pièce 5. L.a.s. de G. Aloisi Masella (25 juin 1867).

126 Ibid., pièce 22. Enveloppe postale (s. d.)

127 Ibid., pièce non numérotée. L.a.s. d’A. Mame (s. d. [1862]).

128 Ibid., pièces 102-105 et 113, 118. L.a.s. d’A. Mame (7 octobre 1854-19 février 1855, 14 octobre 1861, 9 janvier 1862).

129 Ibid., pièce 6. L.a.s. de P. F. Amyot (3 mai 1861).

130 Ibid., pièce 33. L.a.s. S. Coblence (19 juin 1868).

131 En 1863, son ami Antonio Ronna lui écrivait : « Je sais que vous êtes devenu riche comme Crésus. Je m’en réjouis avec vous, parce que c’est l’œuvre de votre talent, de votre industrie ». BIF, ms. 4182, pièce 173 (14 février 1863).

132 Arch. nat., MC, CII, 947 (17 juin 1861) et 951 (15 mars 1862). Les deux ventes ont été faites moyennant 43 000 et 16 000 F. Aujourd’hui, ces immeubles sont situés respectivement au 22 rue Augereau et au 77 avenue de La Bourdonnais.

133 Archives de Paris, D1 P4 1876 et 589. Calepins de révision du cadastre.

134 Toutefois, en 1866, Henri Plon, s’adressa à Catenacci pour réaliser les encadrements du Voyage en Lorraine de S.M. L’impératrice de Félix Ribeyre. BIF, ms. 4182, pièces 147-148 (26 septembre 1866-25 mai 1867).

135 Albert Jacquemart, Les Merveilles de la céramique, Paris, L. Hachette, 1866. BIF, ms. 4182, pièces 88-89. L.a.s. d’A. Jacquemart et liste des œuvres à reproduire (23 octobre-26 novembre 1865) ; ms. 4191 doss. 5. Modèles des illustrations.

136 Paul Lacombe, Les Armes et les armures, Paris, L. Hachette, 1868. BIF, ms. 4182, pièce 93. L.a.s. de P. Lacombe (s. d.) ; ms. 4189 doss. 2 A. Modèles des illustrations.

137 Aimé Humbert, Le Japon illustré, Paris, Hachette, 1870 ; Francis Wey, Rome, description et souvenirs, Paris, Hachette, 1873 ; Jules Gourdault, L’Italie, Paris, Hachette, 1877 ; Louis Rousselet, L’Inde des rajahs, Paris, Hachette, 1877 ; Charles Yriarte, Les bords de l’Adriatique et le Monténégro, Paris, Hachette, 1878 ; Marie de Ujfalvy-Bourbon, De Paris à Samarkand…, Paris, Hachette, 1880 ; Désiré Charnay, Les anciennes villes du Nouveau Monde, Paris, Hachette, 1884.

138 BIF, ms. 4182, pièce 31. L.a.s. d’É. Charton (24 août 1882).

139 BIF, ms. 4182, pièce 92. L.a.s. d’H. de La Broise (7 avril 1872).

140 Ibid., ms. 4191 doss. 3 et 4.

141 Le Monde illustré, p. 391 (21 juin 1884).

142 Philippe Kaenel, Le métier d’illustrateur 1830-1880. Rodolphe Töpffer, J.-J. Grandville, Gustave Doré, Paris, Messene, 1996.

143 Ibid., p. 333.

144 Arch. dép. de l’Essonne, 2E67 174. Contrat de mariage (6 juillet 1845).

145 Ibid., 2E82 256. Liquidation et partage entre Zoé et Édouard Catenacci (10 novembre 1884).

146 Émile Saint-Lanne, Dictionnaire illustré des contemporains, Paris, 1891.