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Dans la tourmente révolutionnaire : Les bibliothèques de Strasbourg et leurs catalogues

Marie-Claire BOSCQ

Docteur de l’Université Versailles-Saint-Quentin

Avec le découpage territorial de la France décidé par l’Assemblée Constituante1, Strasbourg est devenu le chef-lieu du nouveau département du Bas-Rhin, composé des quatre districts de Strasbourg, Haguenau, Wissembourg et Benfeld. Les bibliothèques religieuses de ces différents districts vont dès lors enrichir la future bibliothèque nationale de Strasbourg, à la faveur d’un processus mouvementé de centralisation.

Les bibliothèques de Strasbourg à la veille de la Révolution

Strasbourg disposait à la veille de la Révolution de deux bibliothèques publiques distinctes installées dans un même bâtiment, le Temple-Neuf2. Elles n’avaient pas la même histoire, et n’appartenaient pas aux mêmes instances : église luthérienne d’une part et municipalité de l’autre.

La plus ancienne, bibliothèque de l’université protestante fondée par Jacques Sturm, remontait au début du XVIe siècle3. La seconde, beaucoup plus récente, avait été léguée à la ville par l’éminent professeur Jean Daniel Schoepflin4. Elle comptait alors un peu moins de 12 000 volumes, auxquels venaient de s’ajouter les collections de Jean-André Silberman5.

Il existait également dans la ville de nombreux établissements religieux dotés de bibliothèques. Quand, en 1702, la bibliothèque de l’Université catholique fut transférée de Molsheim à Strasbourg, « elle apporta dans cette ville une bibliothèque qui fut réunie à celle déjà existante dans le collège des jésuites6 ». Cette bibliothèque constitua dès lors, en grande partie, celle du Séminaire épiscopal.

L’idéal révolutionnaire

C’est à l’éducation du peuple que doivent servir les bibliothèques. Danton l’a dit : « Après le pain, l’éducation est le premier besoin du peuple ». Dans cette perspective, la conversion des biens de l’église en biens nationaux fut une formidable opportunité. Des bibliothèques nationales pourraient être ouvertes au public partout en France. Encore fallait-il préalablement rassembler les livres, les trier, garder ceux qui seraient utiles à l’instruction, et vendre les autres afin de renflouer les caisses de l’État. Cet ambitieux et généreux projet en généra un autre : celui d’une Bibliographie universelle de la France. Promu par Lefebvre d’Ormesson, bibliothécaire du Roi, ce projet visait à signaler dans un même catalogue toutes les ressources livresques de la Nation.

De 1789 à 1795, cette période de bouleversement s’organise en trois temps, de 1789 à la chute de la royauté, des débuts de la République à la chute de Robespierre, puis de l’arrivée des Thermidoriens à la fin de la Convention.

DE 1789 À LA CHUTE DE LA ROYAUTÉ

L’annonce de la prise de la Bastille fut connue à Strasbourg le 21 juillet 1789. La fièvre révolutionnaire s’empara immédiatement de la population, qui mit à sac l’Hôtel de ville. Les archives du Magistrat7 furent détruites, parmi lesquelles les documents relatifs à la bibliothèque municipale et son entretien. Puis l’Assemblée Constituante prit deux des mesures les plus radicales de la Révolution : l’abolition des privilèges le 4 août ; la confiscation des biens de l’Église catholique, convertis immédiatement en biens nationaux, le 2 novembre 1789.

Premiers inventaires

Le décret du 14 novembre 1789, sanctionné par le roi le 27 novembre, ordonne à tous les monastères et chapitres dans lesquels existe une bibliothèque, de déposer aux greffes des sièges royaux ou des municipalités voisines, les états et catalogues de leurs livres et manuscrits, d’assurer la garde des collections et de prévenir toute soustraction d’ouvrage.

Les biens de l’Église protestante devaient-ils être confisqués au même titre que ceux de l’Église catholique ? Au célèbre professeur Koch8, jurisconsulte, une assemblée de notables confie la mission de défendre les intérêts de l’église luthérienne devant l’Assemblée nationale. Appuyant son argumentation sur les traités antérieurs, dont celui signé en 1681 lors du rattachement de l’Alsace à la France, Koch obtient l’exemption des confiscations des biens de l’église protestante, à titre provisoire9.

De juillet 1790 à février 1791, un premier document recense dix-huit inventaires de maisons religieuses du district de Strasbourg10. Douze d’entre eux font connaître le nombre de volumes possédés, pour un total de 46 874 ouvrages, dont 488 manuscrits. L’inventaire prend également en compte les liasses ou cartons de titres : plus que les livres, les titres de propriété intéressent les révolutionnaires, qui permettent de connaître l’étendue des droits dont la communauté tire ses bénéfices. Un deuxième relevé daté du 23 février 1791 recense les bibliothèques de 25 maisons religieuses du Bas-Rhin11, distinctes des précédentes, parmi lesquelles les abbayes de Marmoutier et de Neubourg. La Chartreuse de Molsheim est présente dans les deux inventaires, mais le nombre d’ouvrages recensés diffère (4 619 pour le premier, 5 220 pour le second). Dans certains établissements, les bibliothèques sont déclarées « non énumérées ». Mais, qualifiée de « non énumérée » dans un document, la bibliothèque de l’abbaye d’Ebermünster apparaît dans un autre comme étant riche de 9 190 ouvrages, dont 30 manuscrits anciens et 295 récents12.

Les premiers inventaires totalisent environ 75 000 ouvrages, alors que les biens de toutes les maisons religieuses n’ont pas été inspectés dans le détail. En fait, c’est l’ordre de grandeur des bibliothèques religieuses passant « dans la main de la nation » qui retient l’attention.

Les inventaires font l’objet de procès-verbaux dans lesquels figurent bien souvent des descriptions détaillées des lieux et des objets qui s’y trouvent. Dans un cabinet attenant à la bibliothèque du Palais Épiscopal par exemple, le commissaire note :

Cabinet, à gauche de la dite salle de bibliothèque […] : une vieille tapisserie de Brocatelle Verde ; une grande table de bois de chêne à quatre tiroirs garniture en cuivre sur laquelle se trouvent les livres de prix suivants […]13

Suit l’énumération de 34 livres précieux révélateurs de l’éclectisme du cardinal de Rohan14. Évidemment, l’établissement de tels inventaires prend du temps : en l’occurrence, près d’un mois pour le Palais épiscopal, de fin juillet au 26 août 1790.

Les données catalographiques des inventaires sont très dissemblables d’une communauté à l’autre : bien souvent réduites à de simples listes de titres, sans noms d’auteurs, elles rendent difficile l’analyse et l’exploitation bibliographiques. Pour l’abbaye d’Altorff (inventaire de septembre 1790), le rédacteur du catalogue recense très sommairement 1 067 ouvrages précédés du commentaire suivant : « Nous avons laissé à la garde des dits religieux, tous les livres composant la bibliothèque de la maison qui n’est d’aucune valeur, les livres étant tous rongés de poussière15. » C’est à propos de cette même bibliothèque que, deux ans plus tard, la municipalité de Molsheim écrira : « Quant à la bibliothèque d’Altorff, il ne vaut pas la peine d’en parler. Elle consiste en environ 500 volumes, et depuis au-delà de 80 ans, elle n’a pas été plus forte. On n’aimait pas dans cette maison les livres, on y préférait les femmes, le plaisir et le vin, c’est-à-dire la vie monastique16. »

Dans bien des cas, le catalogage des livres est jugé inutile. Ainsi les Récollets de la paroisse Saint-Louis de la Citadelle déclarent que « leur maison ne dispose d’aucune bibliothèque, mais seulement de quelques livres pour servir à l’instruction « 17 ; de même, les 644 ouvrages signalés chez les religieuses de Sainte-Marguerite et Sainte-Agnès sont exclusivement des livres de religion, de prières et de dévotion18.w

Les premiers travaux réalisés jusqu’alors donnent une idée de l’ampleur des confiscations. Toutefois, les catalogues produits – quand ils existent – sont trop sommaires ou approximatifs pour être exploitables, en particulier pour le projet de Bibliographie universelle de la France, qui suppose uniformité et cohérence du signalement19. C’est la raison pour laquelle les Comités réunis20 sollicitèrent l’aide de la Commission des Quatre-Nations : « Quelques districts demandent dans quelle forme on pourrait procéder en détail aux catalogues des livres que les instructions prescrivent. Nous vous prions, Messieurs, de nous adresser au plus tôt un projet d’instruction à cet égard21. »

Quelles qu’aient été les consignes antérieures, c’est l’instruction du 15 mai 1791 qui constitue la directive essentielle, véritable manuel de catalogage22. Chaque ouvrage devait être décrit sur une carte à jouer utilisée comme fiche, sur laquelle seraient notés les nom de l’auteur, titre de l’ouvrage, lieu et année d’édition, format, tomaison, particularités éventuelles dont la reliure. D’autres cartes découpées devaient servir de fichets, insérés dans les volumes. La méthodologie était fort détaillée : « [Les personnes en charge du catalogue] commenceront le travail par la première tablette ou armoire à gauche, et elles finiront par la dernière, qui est à droite : elles prendront un de ces morceaux ou bandes de cartes que nous avons appelé fichets, et écriront au haut le numéro premier, puis elles l’inséreront dans le premier volume de la première planche, etc. ».

Dans le courant du mois de juin 1791, quelques semaines après la diffusion de l’instruction, un nouveau catalogue fut entrepris pour l’abbaye de Neubourg, le précédent étant inutilisable. Quand le travail commence, le commissaire qui en a la charge se montre atterré par le désordre et la confusion régnant parmi les livres. Il dut commencer par les trier et les regrouper par grandes catégories (classiques, livres de prières, etc.), puis rassembler les « […] livres qui nous paraissaient mériter rang dans une bibliothèque, ce qu’ayant fait et opéré, nous aurions procédé à la confection dudit catalogue suivant et au désir de l’instruction des Comités réunis […]23 ».

Pour cette bibliothèque, « la plus considérable et sans doute la plus précieuse du canton24 », le nouveau catalogue répondait-il aux préconisations de l’instruction ? Les cartes avaient-elles été rédigées ? Les documents figurant aux archives ne permettent pas de répondre à la question.

À la fin de l’année 1791, les changements institutionnels, liés à la fin de la Constituante et au début de l’Assemblée législative, ne mirent pas fin aux travaux bibliographiques. Le travail devait se poursuivre. C’est ce qu’explique le ministre de l’Intérieur, dans une lettre adressée le 14 janvier 1792 aux directoires des départements : « [L’Assemblée nationale législative] ayant pris connaissance du travail relatif aux bibliothèques entrepris par les Comités réunis, a reconnu son utilité et son importance, ainsi que la nécessité de pourvoir promptement à sa continuation25. »

Et d’informer du décret pris par l’Assemblée nationale :

Art. 1er – Les administrateurs de district feront continuer sans interruption les travaux ordonnés pour la confection des catalogues et cartes indicatives des livres provenant des maisons religieuses et autres établissements supprimés. […]26.

Mais il ne suffit pas d’un décret et d’une circulaire ministérielle pour emporter l’adhésion27. L’utilité des catalogues n’est pas perçue par tous, la tâche est lourde, onéreuse, et paraît à beaucoup secondaire et inutile. C’est ce qu’indiquèrent les administrateurs du district de Wissembourg, écrivant le 1er février 1792 au département :

En vous adressant l’état des frais occasionnés pour la confection du catalogue des livres de la bibliothèque des ci-devant Pères Augustins de Landau […], nous devons vous rendre compte de l’état des autres bibliothèques de notre district : il s’en trouve à la vérité dans Wissembourg aux ci-devant couvents des Augustins et Capucins quelques amas de livres ; mais le désordre et la confusion qui y règnent et le peu de mérite et de valeur que les ouvrages dépareillés qui s’y trouvent paraissent avoir, ont rebuté les commissaires que nous avions nommés pour procéder à la rédaction des catalogues […] l’objet ne valait pas la dépense, ni la peine que ce travail entraînerait. […] si le dépôt devait en être conservé plus longtemps, les frais de garde même en absorberaient au-delà de la valeur28.

Néanmoins, le catalogue de la bibliothèque du couvent des Augustins de Landau est dressé. Il semble même particulièrement riche puisqu’il comporte 63 pages répertoriant plus de 1 200 ouvrages, parmi lesquels quelques dizaines d’incunables. Soulignons que le relevé des bibliothèques effectué en février 1791 signalait à son propos « plusieurs milliers de livres tout à fait hors d’usage » !

L’instruction pour procéder à la confection des catalogues ayant été largement diffusée, les catalogues réalisés dès lors auraient dû être conformes à ses prescriptions. Dans bien des cas il n’en fut rien. Ainsi, le 24 mai 1792, quand le catalogue de la Chartreuse de Molsheim est remis au directoire du district, Oberlin, qui en prend connaissance, le trouve tellement mal fait qu’il estime qu’il ne peut servir en l’état et doit être refait. Il propose alors de montrer à un étudiant « la manière dont il faut s’y prendre, conformément à l’instruction de l’Assemblée nationale29 ». De même, dans le courant du mois d’octobre 1792, Oberlin est amené à rédiger le catalogue de la bibliothèque de la chancellerie du Palais Épiscopal, « faute de trouver une note en règle desdits livres « 30. Les circonstances qui l’amenèrent à cette initiative méritent d’être relatées. Le 25 août 1792, l’évêque constitutionnel Brendel avait demandé accès à la pièce du séminaire catholique, dite chancellerie, étant intéressé par les livres théologiques qu’elle contenait. Les administrateurs du directoire se posèrent alors la question de savoir si les bibliothèques des ci-devant séminaires de l’église catholique romaine pouvaient être transmises à ceux du culte catholique constitutionnel. Ils considérèrent que Brendel n’avait en la matière aucun droit. Cependant, « pour donner à M. l’Évêque du Bas-Rhin des marques particulières d’estime à ce bon citoyen », le directeur des domaines31 émit l’avis suivant :

1) il sera incessamment dressé un catalogue de la même bibliothèque, qui sera déposé aux archives nationales ;

2) cette bibliothèque sera mise provisoirement à la disposition de M. l’Évêque, sans préjuger de sa propriété, à charge pour lui de la représenter lorsque serait mise en œuvre la réunion des bibliothèques du département dans un même local.

DES DÉBUTS DE LA RÉPUBLIQUE À LA CHUTE DE ROBESPIERRE

Une déferlante de livres

C’est à Strasbourg, chef-lieu du département, que sont progressivement rassemblés tous les livres confisqués dans la région. Ils arrivent par centaines et finissent par s’accumuler par milliers. Or, dès l’année 1792, les confiscations des bibliothèques d’émigrés s’ajoutent aux religieuses32. Elles se poursuivent ensuite, les biens des victimes du tribunal révolutionnaire s’ajoutant à ceux des émigrés. Les difficultés engendrées par cette abondance sont multiples : affectation de locaux d’entrepôt, ampleur du catalogage, sécurité des biens confisqués. C’est l’augmentation de l’émigration qui amène l’Assemblée nationale à prendre des mesures draconiennes. « Les décrets des 27 juillet et 2 septembre 1792 prononcèrent la confiscation générale et la vente au profit de la nation de tous les biens mobiliers et immobiliers de ceux qui s’y trouvaient engagés33. » Comme le rappelle D. Varry34, le manifeste de Brunswick35 et les événements du 10 août 179236 précipitent les choses.

Parce que le département est germanophone et qu’il n’y a qu’à traverser le Rhin pour échapper à la vindicte révolutionnaire, le Bas-Rhin connaît le taux d’émigration le plus élevé de France37. Généralement, les bibliothèques des émigrés se différenciaient des bibliothèques religieuses par la nature de leur contenu, plus récent et davantage profane38, suscitant de ce fait un grand intérêt des amateurs. Le 24 octobre 1793, Oberlin adresse au directoire du département un rapport dans lequel il récapitule les bibliothèques confisquées dans le département du Bas-Rhin auprès des maisons religieuses et des émigrés39. Il y indique les bâtiments dans lesquels sont entreposés provisoirement les livres, donne quelques informations relatives à l’avancement du catalogage, et présente l’état des dépenses afférentes. Pressentait-il l’imminence de son arrestation ?

Parmi les particuliers cités par Oberlin dont les bibliothèques ont été saisies, figurent quelques personnages éminents, parmi lesquels Philippe-Frédéric de Dietrich40 ancien maire de Strasbourg, et François-Joseph Louis Klinglin, baron d’Essert, ancien lieutenant du Roi41.

L’année suivante, la Commission temporaire des arts, dans sa séance du 20 germinal an II (9 avril 1794), prévoit d’écrire au département du Bas-Rhin « Pour accuser la réception de 70 procès-verbaux d’enlèvement des livres faits dans les différentes maisons d’émigrés par le citoyen Poincot et qu’il a déposés aux ci-devant Cordeliers. La section de Bibliographie est chargée d’en faire l’examen et la vérification42 ».

Peut-on estimer le nombre de livres confisqués chez les particuliers, émigrés et condamnés ? Sans doute s’agit-il de quelques milliers qui s’ajoutent à la centaine de milliers provenant des bibliothèques religieuses.

Compte tenu du désordre général touchant la gestion des biens confisqués43, sans qu’il soit fait référence aux livres, le directoire du département est amené à prendre un arrêté, le 22 ventôse an II (12 mars 1794), ainsi motivé :

Les administrateurs du département du Bas-Rhin étant informés que différents effets, chariots provenant des fuyards émigrés de différents districts, notamment de ceux de Haguenau et de Wissembourg, ont été conduits dans les magasins militaires du haras de la Madeleine et autres, sans que les directeurs, gardes-magasins ou autres employés et préposés en ayent averti l’administration, ni envoyé les procès-verbaux et inventaires.

Considérant que c’est à tort que les effets provenant des émigrés ont été conduits dans les magasins militaires de cette ville, au lieu de les faire transporter dans la maison du dépôt du département, et qu’en tout cas les directeurs, gardes-magasins ou autres employés, auraient dû en adresser au Directoire du département les inventaires et procès-verbaux44.

Le premier décret sur la mise sous séquestre des biens des émigrés (9 février 1792) avait amené les administrateurs du département à s’interroger sur ce qu’il convenait de faire vis-à-vis des princes possessionnés. Le 27 septembre 1792, dans les premiers jours de la République, Roland, alors ministre de l’Intérieur, leur dicta la conduite à tenir :

Vous me demandez, Messieurs, par votre lettre du 19 de ce mois, si vous pouvez appliquer au Prince de Darmstadt les lois concernant les émigrés, et adopter la proposition faite par le District de Strasbourg de mettre les scellés sur tous les titres et papiers qui se trouvent dans les maisons de cette famille, et de séquestrer au profit de la Nation, toutes ses propriétés mobilières et immobilières.

Il n’y a pas à balancer, Messieurs, sur l’exécution de ces mesures. La France ne doit rien à ses ennemis, […] le Prince de Darmstadt, ligué contre nous avec tous les despotes du nom, […] Je vous invite donc à mettre très incessamment tous ces biens sous la main de la Nation45.

Au sein de ce considérable amas de livres, tous ne présentaient pas le même intérêt. C’est la raison pour laquelle, dès le 28 octobre 1790, les administrateurs de districts avaient été invités par décret à distinguer les ouvrages qui paraissaient mériter d’être conservés de ceux qui pouvaient être vendus46. Au vu de ce décret, certains officiers municipaux s’étaient autorisés à faire vendre ceux qui leur semblaient sans intérêt47. À quoi pouvaient bien servir tous ces livres de piété et de liturgie pour la constitution de bibliothèques publiques ? Oberlin faisait le même constat pour les bibliothèques de quatre couvents de religieuses à Strasbourg :

[…] dans le nombre de [livres] qui reviennent à la nation, il s’en trouve beaucoup qui ne méritent pas d’être conservés. Plusieurs de ces livres ne valent pas l’honneur de figurer dans un catalogue, ni la peine d’être regardés. Je prends la liberté, citoyens, qu’il serait à désirer qu’on en fit un triage, de même que ceux venus de la Chartreuse de Molsheim et des Récollets d’ici, pour mettre de côté tous les bouquins qui n’ont aucun prix réel, et les vendre en bloc48.

D’ailleurs, la Commission des monuments avait diffusé une instruction à ce sujet :

Les commissaires de la Commission en procédant à l’examen des feuilles bibliographiques envoyées par le Comité d’Instruction publique, ont cru devoir poser quelques bases principales pour l’uniformité de jugement à porter sur chaque ouvrage, et qui doit être marqué par un G pour les livres à garder et par un V pour les livres à vendre49.

Ce qui n’empêcha pas que, dans bien des cas, la vente se soit poursuivie, vente au poids notamment, comme le déplore l’abbé Grégoire dans son mémoire sur la bibliographie50.

La Terreur

Dès la deuxième moitié de l’année 1792 Strasbourg s’apprête à vivre ses heures les plus sombres. Les principaux événements nationaux – déclaration de guerre, révolution du 10 août et proclamation de la République – sont reçus dans la ville avec quelques jours de décalage51. Les Jacobins s’emparent des instances dirigeantes bas-rhinoises et le 21 janvier 1793 François-Pierre Monet, jeune-homme de 25 ans, est nommé maire de Strasbourg, qu’il administrera pendant plus de dix-huit mois. La Terreur s’installe progressivement dans la vie quotidienne des Strasbourgeois52. Les arrestations se multiplient. Sur la liste des suspects dressée par la société populaire figure la presque totalité des professeurs de théologie et des pasteurs qui n’avaient pas donné leur démission53. Arrive le tour des professeurs bibliothécaires : Oberlin, Lorentz et Koch.

Arrêté le 8 novembre 1793, Oberlin est déporté à Metz où il est incarcéré. Dès le lendemain de son arrestation, Léopold Keil professeur d’histoire au collège national, est nommé bibliothécaire à sa place54. Ce même jour, le 9 novembre, on ordonne la cessation de tous les cultes dans le département. Les temples comme les églises sont transformés en magasins, dépôts de paille ou étables. Le 15 décembre 1793, le maire fait fermer le Temple-Neuf. Les bancs et la chaire sont retirés, le bâtiment est transformé en magasin à fourrages avant d’accueillir une porcherie, sans que les livres soient déplacés55. Les scellés sont apposés sur les archives et la bibliothèque de l’Université, les clefs déposées au greffe de la municipalité56. La fermeture de la bibliothèque protestante entraîne de facto celle de la ville, puisque les deux bibliothèques partageaient les mêmes locaux57.

Un texte anonyme du 5 février 1794 caractérise l’état d’esprit des révolutionnaires extrémistes :

Non, tant que les bibliothèques saintes subsisteront, la révolution n’est point faite. […] Législateurs, faites donc faire une bonne visite chez tous les libraires de la République, ordonnez à votre comité d’instruction publique de se faire représenter leurs catalogues de livres et qu’on fasse un bel autodafé, ou du bon papier neuf ou de bonnes bourres de canon… Prononcez des peines contre ceux qui imprimeraient encore des livres de piété dans des langues qu’on veut faire oublier au moyen des instituteurs de langue française que vous venez d’établir dans les communes où le français n’est presque pas connu… Je vous dénonce aussi les livres et gravures indécentes, la prostitution du burin [sic] ; il est important de sévériser les mœurs quand on songe à républicaniser les hommes58.

Ce texte est particulièrement intéressant par les problématiques qu’il agite : la perversion qu’entraînent les croyances religieuses, le danger que représentent crédulité et superstition pour la cause révolutionnaire, la question des langues régionales, la censure, l’appel à la rigueur.

En ce qui concerne l’aspect linguistique, les révolutionnaires redoutaient en effet que la langue ne favorise le rapprochement avec les ennemis de la France, en Alsace particulièrement avec les Prussiens et les Autrichiens. C’est ce qui motive l’arrêté pris par le corps municipal de Strasbourg le 29 mai 1794 (10 prairial an II) :

[le corps municipal arrêta à l’unanimité] 1° qu’invariablement uni à la convention nationale, il fera tous ses efforts pour détruire l’hydre du germanisme et toutes les institutions qui lui assurent encore une existence ; en conséquence de ces principes, et conformément à la loi du 24 août 1793 (vieux style) les biens de l’Université de cette ville seront mis, comme biens nationaux, sous la surveillance de l’administration du district59

L’« esprit germanique » de la population est une préoccupation constante de la municipalité jacobine. La lettre écrite le 5 thermidor an II (23 juillet 1794) par ses édiles aux administrateurs du district de Strasbourg est révélatrice :

Le désir que nous avons, Citoyens, de relever l’esprit de nos concitoyens, nous a porté à réorganiser provisoirement le collège national, et pour ne laisser aucune trace à l’esprit germanique, nous avons pensé qu’il fallait détruire le ci-devant Gymnase et faire un amalgame de ces deux établissements60.

Quand cette lettre est rédigée, les Jacobins n’en ont plus pour longtemps à faire régner la terreur. La municipalité n’a pas le temps de mettre à exécution son projet de destruction du Gymnase. Des temps nouveaux s’annoncent.

DE L’ARRIVÉE DES THERMIDORIENS À LA FIN DE LA CONVENTION

Le 9 thermidor An II (27 juillet 1794), la chute de Robespierre met un coup d’arrêt au régime de Terreur qui régnait sur Strasbourg depuis de longs mois. Discrètement, dans son numéro du 14 thermidor, la Gazette de Strasbourg annonce : « Robespierre et les siens sont hors la loi ; demain ils auront vécu61 ! » Une Strasbourgeoise note alors dans son Journal : « Enfin je respire, je verrai des heureux ! Clémence, douceur, humanité, vous êtes à l’ordre du jour62 ! ». Dès lors, les jours de la municipalité jacobine sont comptés : le maire Monet est suspendu le 22 fructidor (8 septembre 1794).

Néanmoins, pendant la Terreur, les travaux de catalogage avaient été poursuivis. À l’issue de l’arrestation d’Oberlin, deux nouveaux bibliothécaires avaient été nommés et assignés à la tâche. Le premier, Léopold Érasme Keil, professeur d’histoire au collège de Strasbourg, nommé le 19 brumaire an II (9 novembre 1793) 63 ; et cinq mois plus tard, Pierre François Monnet, homonyme du maire.

L’arrivée des Thermidoriens donna une impulsion nouvelle au projet bibliographique. En quelques mois furent publiés trois nouveaux décrets visant à protéger les livres placés trop souvent dans des lieux inappropriés à leur conservation :

– décret du 14 fructidor an II (31 août 1794) recommandant à la surveillance de tous les bons citoyens les bibliothèques et tous les autres monuments des sciences et des arts ;

– décret du 8 brumaire an III (29 octobre 1794) déclarant les agents nationaux et administrateurs de district responsables des destructions et dégradations commises dans leur arrondissement respectif sur les livres ;

– décret du 9 frimaire an III (29 décembre 1794) interdisant l’établissement d’atelier d’armes, de salpêtre, ou magasin de fourrages… dans les bâtiments où se trouvent des bibliothèques64.

Permanence des difficultés

Si le départ de la municipalité jacobine soulage la ville, rien n’est encore résolu pour la gestion des livres. Les difficultés demeurent : choix des bâtiments susceptibles d’accueillir des dépôts littéraires, salubrité des lieux d’entrepôt, arrivages incessants de livres et déplacements de collections, ampleur du catalogage… Qui aurait pu prévoir une telle déferlante de livres sur Strasbourg ? Où les entreposer ? La préoccupation se fit jour dès 1791. Le directoire du district, logé dans la même maison que celui du département, souhaitait y entreposer 14 000 volumes provenant de couvents et abbayes. Le département l’invita à chercher ailleurs65. Les déménagements successifs s’enchaînèrent. Chaque fois qu’un bâtiment était choisi comme dépôt littéraire, il était réquisitionné peu de temps après pour un autre usage : l’Hôtel de la Noblesse (Ritterhaus) 66, le Séminaire épiscopal, l’ancien collège royal… À chaque déménagement, les édiles recherchaient un bâtiment susceptible de recevoir les collections, et qui puisse convenir « par son site, par la solidité de sa construction et le moins exposé aux accidents du feu67 ». Ainsi, de site en site, ce n’est que sous le Consulat, en 1803, que le préfet du Bas-Rhin, après enquête, proposa au Consistoire général de la Confession d’Augsbourg de rapatrier les collections dans le Temple-Neuf68, enrichissant de plus de 100 000 volumes les bibliothèques qui s’y trouvaient déjà. Comme l’a écrit R. Reuss, durant la période révolutionnaire « les volumes menèrent pendant quelques années une vie passablement aventureuse et plus d’un manuscrit y périt ou du moins disparut par un coupable larcin69 ».

Les conditions dans lesquelles les livres sont entreposés sont souvent désastreuses. Les comités réunis avaient pourtant publié une instruction sur les précautions à prendre. Elle mettait en garde les gestionnaires contre les détériorations dues à la poussière, l’humidité, les insectes ou les rongeurs. Mais elle ne fut guère suivie. Les bibliothécaires s’en désolaient. Oberlin alerta notamment sur les risques encourus, dans l’Hôtel de la Noblesse, par les bibliothèques entreposées sur le sol70. Quelque temps plus tard, Keil demanda à l’administration qu’elle lui assigne un local convenable pour établir un second dépôt pour les bibliothèques provenant des émigrés et des ci-devant corps ecclésiastiques. Le directoire du district entendit sa demande et décida de mettre la chapelle du séminaire de Strasbourg à sa disposition71.

Par ailleurs, paradoxalement, les scellés représentaient un risque supplémentaire. L’administrateur provisoire des domaines nationaux – Laumond – en donne l’explication :

Il a été apposé des scellés […] pour empêcher qu’on ne détournât aucune partie du mobilier […] cette formalité conservatoire, indistinctement employée a produit […] des effets funestes pour l’entretien des objets qui exigent des soins. […] Elle n’a pas permis de nettoyer les livres, les tableaux, les productions diverses […] qui sont restés ainsi exposés aux ravages résultant de l’humidité, des insectes et d’autres accidents imprévus72

L’administrateur termine sa lettre en précisant que les observations éventuelles à ce sujet doivent être adressées à la Commission temporaire des Arts73.

Oberlin avait déjà averti que plusieurs bibliothèques n’étaient pas « en lieu de sûreté », dont « la bibliothèque de la Commanderie de Saint-Jean ; celle de Dietrich qui est à charge au citoyen Wappler, possesseur actuel de la maison que Dietrich occupait, et celle de Klinglin d’Essert placée encore dans la maison qu’il habitait et qui doit être vendue74 ». La bibliothèque de la Commanderie de Saint-Jean offrira pour sa part à la Bibliothèque nationale un ensemble de 2 000 incunables et 1 200 manuscrits75.

À propos des mauvaises conditions de stockage et détériorations d’ouvrages, Grégoire met en cause la négligence des administrateurs : les dépôts littéraires n’ont pas été convenablement surveillés76. De son côté, le maire de Strasbourg avait fait poser les scellés sur les bibliothèques de la ville, bibliothèques du Temple-Neuf et dépôts littéraires. Quelques mois plus tard, les Jacobins n’étant plus aux commandes, on apprend par un échange de correspondance entre Grégoire et Oberlin, que « le troupeau de cochons amassé par le directeur des vivres au Temple-Neuf avait, par ses exhalaisons, infecté la salle de la bibliothèque et le passage qui y mène77… ». C’est bien de négligence que le directoire du district est accusé devant l’Assemblée nationale par Rühl, représentant du peuple. Il lui reproche d’avoir laissé la superbe bibliothèque de la Commanderie de Malte exposée à des événements funestes par la nature des établissements qui l’environnent, ce dont le directoire, indigné, proteste78.

Quoi qu’il en soit, c’est parce que les ouvrages sont trop souvent exposés aux risques de détérioration que les Thermidoriens édictent les décrets relatifs à la sécurité des bibliothèques. L’incendie survenu accidentellement le 2 fructidor an II (19 août 1794) à la bibliothèque de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés à Paris79, catastrophe de vaste ampleur, marque profondément les esprits et amène les pouvoirs publics à interdire la présence d’ateliers d’armes ou de salpêtre, ainsi que celle de magasins de fourrages dans les bâtiments où sont entreposés livres et autres documents précieux80. D’après le registre des Notes et arrêtés de la Commission temporaire des Arts, on apprend qu’en novembre 1794, à Strasbourg, le Directeur des vivres a été sommé d’évacuer sans délai la bibliothèque et ses environs, et que le battage du blé dans le temple Saint-Thomas a été interdit81. Un autre témoignage accablant concerne le couvent des Récollets de Saverne :

Au départ desdits ci-devant Récollets, ce couvent fut tout à fait abandonné jusqu’à la vente d’icelui, de manière que toutes les serrures et autres ferrures furent enlevées ainsi qu’à la porte de cette bibliothèque ; qu’on avait logé audit couvent par différentes fois des bataillons entiers, qui ont fait travailler dans la bibliothèque leurs tailleurs et cordonniers ; qu’après le départ desdits gens de guerre les enchérisseurs de ce couvent ont fait faire une serrure à la porte de cette bibliothèque, qui l’ont tenu fermée jusqu’au jour de l’apposition du scellé, […] dans l’état où elle était alors, les livres en partie foulés à terre et les autres les uns parmi les autres. […] Tous les livres qui se trouvent dans la dite bibliothèque sont mal liés en parchemin et la plupart sans titres, ni marques des lieux où ils ont été imprimés82.

L’arrivée de collections nouvelles ne fait que renforcer les difficultés de stockage. Les administrateurs sont amenés à les gérer au coup par coup. Ainsi en est-il de l’arrivage de 30 caisses de livres en provenance du Palatinat, restées en souffrance à la douane de Landau. Le commissaire ordonnateur de l’armée du Rhin – Prieur – demande à la Commission d’Instruction publique ce qu’il doit faire pour « disposer de cette capture faite sur l’ennemi83 ». Trois jours après, les administrateurs du département écrivent à leur tour à la Commission parisienne, disant qu’ils ignorent de quels ordres relève cette capture, qu’il n’en existe aucun inventaire et qu’il est à craindre que les collections n’aient été l’objet de coupables dilapidations84.

Avec les Thermidoriens, une complication nouvelle apparaît : il s’agit des restitutions d’ouvrages. En effet, depuis 1792 les bibliothèques appartenant à des personnes arrêtées ont été saisies et assimilées à des biens nationaux. Or les Thermidoriens décident de les restituer à ceux qu’ils libèrent. Une circulaire de la Commission exécutive de l’Instruction publique envoyée aux districts rappelle la situation et indique ce qu’il faut faire désormais :

Les commissaires chargés de la confection des catalogues, considérant ces bibliothèques comme nationales, lorsqu’elles n’étaient tout au plus que séquestrées, en ont fait l’inventaire et nous ont envoyé les cartes avec celles des bibliothèques qui appartenaient réellement à la Nation. Pour rectifier cette erreur et en prévenir les conséquences, nous vous invitons : 1°) à nous faire parvenir un état exact des livres ou bibliothèques qui auraient été rendues aux propriétaires, mais dont les cartes auraient été envoyées dans nos bureaux ; 2°) à enjoindre à vos commissaires de retirer des envois de cartes à nous faire celles qui seraient relatives à ces bibliothèques85.

La formule finale de la circulaire illustre les changements intervenus dans la politique des bibliothèques : « Nous vous invitons personnellement à vous hâter de faire restituer à ceux auxquels la loi a rendu la liberté, les bibliothèques que vous auriez pu mettre en séquestre. Le respect des propriétés est le Palladium de la liberté86… ». Le bibliothécaire Keil aurait-il été plus perspicace que les autres ? Voici ce qu’il écrit :

Comme je croyais à quelques revenants [sic], je pensais qu’il ne fallait pas précipiter l’envoi des catalogues de ces bibliothèques, qu’on devait tôt ou tard réclamer avec justice ; vous pouvez assurer la Commission… qu’on ne lui a fait passer d’autres catalogues que ceux des abbayes, des couvents, des émigrés et des suppliciés87

Des prisonniers libérés, la mesure est étendue aux héritiers des suppliciés88. Sous réserve d’accomplir les formalités nécessaires, les livres et autres objets qui existaient dans les dépôts peuvent dès lors être restitués aux familles. Bien entendu, la restitution reste inapplicable aux familles d’émigrés déchus de leurs droits89.

Autre difficulté dans le district de Wissembourg, le catalogage sur cartes a été fait, mais le catalogue associé n’existe pas et les livres ont été mis dans un ordre différent de celui des cartes90. Si les richesses bibliographiques demeurent immenses en dépit des pertes encourues, encore faut-il discerner les livres utiles des autres, ceux qu’il faut garder de ceux qu’il est préférable de vendre. Aussi, à ces immenses richesses correspond un immense travail : catalogage, tri et répartition. Si Strasbourg bénéficie de bibliothécaires de talent, ils ne suffisent pas à satisfaire la besogne, a fortiori compte tenu de l’impatience parisienne. Dans son rapport du 24 octobre 179391, Oberlin explique que, faute d’ouvriers, deux catalogues achevés n’ont pu être délivrés au district, parce qu’ils ne sont pas encore copiés. Il joint les états des dépenses engagées pour ces travaux, du 1er mars au 28 septembre 1793. Quand Keil remplace Oberlin, il réclame à son tour le remboursement de ses frais, dont ceux qui correspondent au paiement de « différents ouvriers employés au dit triage et confection de catalogues depuis le 10 novembre 1793 (vieux stile) jusqu’au 12 pluviôse courant » (31 janvier 1794) 92. Sept mois plus tard, il produit les quittances correspondant au travail de dix-huit copistes et autres personnes employées à la confection des catalogues et cartes ainsi qu’au transport des livres. Sont également compris dans les frais : la fourniture de cartes, la construction des caisses et armoires ainsi que le transport93. Les demandes de remboursement sont à adresser au district de Strasbourg.

Les bibliothécaires ont à faire face à la fois au nombre de livres à cataloguer, au désordre des dépôts et à l’inanité de certains inventaires. Situation que Blessig94 dépeint à Grégoire :

Le rassemblement des bibliothèques, leur triage, leur classification, leur description méthodique, la moitié des messages, tout cela se trouve dans le désordre le plus complet dans plusieurs endroits de notre département. Vous n’en serez pas étonné, quand je vous [aurai fait remarquer] qu’on a employé des éclusiers et autres lettrés de ce genre pour faire le relevé de plusieurs bibliothèques d’abbayes dans le département du Rhin et des Vosges95.

À partir de 1794, on constate néanmoins une augmentation des envois de cartes et catalogues à Paris. À la fin de cette même année, les bibliothécaires incarcérés sous la Terreur sont libérés, et ceux qui les avaient remplacés, Keil et Monnet, restent en place. D’autres hommes de talent viennent les épauler, tels Blessig, auteur de la lettre à Grégoire évoquée ci-dessus, et Haffner96. Ils sont assistés par des copistes et des aides. C’est avec les équipes ainsi constituées que les travaux peuvent avancer efficacement.

Des avancées significatives

Le travail de fond commence réellement sous la Convention thermidorienne. Comme l’a souligné Dominique Varry, les catalogues rédigés dans le cadre de la Bibliographie universelle de la France donnent le plus souvent des descriptions extrêmement précises des livres, mais postérieures de plusieurs années aux confiscations97. Oberlin avait initié le mouvement. Dans son rapport, abondamment cité, il fait un point précis des catalogues terminés et envoyés, ceux qui sont en cours et ceux qui ne sont pas encore commencés. Il rappelle dans quelles conditions les catalogues doivent être expédiés, conformément à l’instruction de l’Assemblée nationale : « Ces catalogues étant écrits sur des cartes, seront envoyés à Paris dans des boîtes bien garnies de toile cirée en-dedans et en-dehors, mais qu’auparavant ils seront copiés sur papier, et que ces copies seront conservées au district98. » Oberlin joint à son rapport deux états : celui des bibliothèques des couvents et celui des bibliothèques d’émigrés. Il indique l’endroit où se trouve entreposée chacune d’elles au moment où il écrit : Hôtel de la Noblesse, Séminaire épiscopal ou maison particulière.

Sans attendre la libération d’Oberlin, Koch et Lorentz, dès le mois de mai 1794 les envois de cartes s’accélèrent. La voiture publique sert au transport : 1er mai 1794, 13 mai, 31 mai, 5 juillet, 23 septembre, 3 octobre, 17 octobre ; puis 4 janvier 1795, 10 janvier, 20 janvier. Sans être exhaustifs, ces envois sont révélateurs du travail accompli. Le nom des propriétaires des bibliothèques correspondant aux cartes expédiées est toujours mentionné. Par exemple, le 4 janvier 1795, l’envoi concerne la bibliothèque d’Euloge Schneider99 ainsi que celle du prince de Darmstadt ; le 10 janvier, ce sont huit bibliothèques qui sont envoyées, dont celle du cardinal de Rohan100. Ainsi, le travail réalisé par les bibliothécaires strasbourgeois recueille-t-il les satisfecit de la Commission de l’Instruction publique.

POUR CONCLURE

Il est impossible de connaître avec précision le nombre d’ouvrages confisqués qui, à Strasbourg, de 1789 à 1795, ont enrichi le patrimoine national. Rodolphe Reuss évoque un ordre de grandeur de 100 000 volumes imprimés ou manuscrits provenant de maisons religieuses ou de particuliers.

Le département du Bas-Rhin, et plus particulièrement le district de Strasbourg, se sont loyalement acquittés de la tâche immense que leur ont imposée les gouvernements révolutionnaires. Au moment où la Convention prend fin, les richesses bibliographiques de Strasbourg sont à peu près connues, même si tous les livres n’ont pas trouvé place sur les rayonnages. Sous la conduite de ses savants bibliothécaires, les équipes strasbourgeoises ont accompli un travail remarquable.

Pourtant, à la fin de l’année 1795, bien des problèmes subsistent. Le projet révolutionnaire d’une Bibliographie universelle de la France n’est pas réalisé et demeure une utopie. Le catalogage des bibliothèques de Strasbourg a été effectué pour l’essentiel, conformément à l’instruction parisienne. Toutefois, Strasbourg ne dispose toujours pas de bibliothèque nationale. Ce n’est qu’en 1803 que le maire – J. Hermann – signera avec le président du Consistoire – Kern – une convention101 par laquelle il sera convenu que les livres constituant la Bibliothèque nationale iront rejoindre dans le chœur du Temple-Neuf les bibliothèques qui s’y trouvaient sous l’Ancien Régime : bibliothèque de l’Université protestante et bibliothèque de la ville. L’accord prévoit également que les trois bibliothèques – nationale, protestante et municipale – tout en restant distinctes, seront néanmoins ouvertes les mêmes jours, aux mêmes heures, et qu’à terme elles auront un bibliothécaire commun102.

Ainsi, dès le Consulat, le Temple-Neuf abrite les trois fonds, soit quelque 140 000 volumes, faisant de Strasbourg l’une des candidates au rang de deuxième ville de France après Paris pour sa richesse bibliographique. Bilan positif de prime abord, mais qui ne saurait occulter des destructions et des pertes, peut-être importantes mais impossibles à quantifier.

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1 Décret du 15 janvier 1790.

2 Nom donné à l’ancienne église des Dominicains après le rattachement de l’Alsace à la France en 1681.

3 Jacques Sturm (1489-1553), réformateur protestant, humaniste, Stettmeister de Strasbourg, fonda en 1531 la bibliothèque publique de l’université protestante.

4 Jean Daniel Schoepflin (1694-1771), historiographe et archéologue, créa une école d’histoire et de droit public qui attira des élèves de toute l’Europe. En 1765 il légua ses collections à la ville de Strasbourg.

5 Jean-André Silberman (1712-1783), facteur d’orgues et archéologue.

6 André Jung, Notice sur l’origine des bibliothèques publiques dans la ville de Strasbourg, Strasbourg, impr. de F. C. Heitz, 1844, p. 6, note 1.

7 Le « Magistrat » est le nom donné, sous l’Ancien Régime, aux instances dirigeantes de la ville de Strasbourg (trois conseils, un Anmestre et quatre Stettmestres).

8 Christian-Guillaume Koch (1737-1813) avait succédé à Schoepflin à la chaire de droit de Strasbourg.

9 Georges Livet, L’Université de Strasbourg : de la Révolution française à la guerre de 1870, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 1996, 527 p. 28-29.

10 Arch. dép. du Bas-Rhin (désormais ADBR), Q4339.

11 Département du Bas-Rhin. Relevé des bibliothèques des religieux fait sur les inventaires des municipalités, Archives nationales (désormais AN), F17 1167.

12 Inventaire de l’abbaye d’Ebermünster, 2 juillet 1790 (ADBR, Q 4468).

13 Inventaire des biens du Palais épiscopal (ADBR, Q 4340).

14 Ibid.

15 ADBR, Q 4462.

16 Ibid. En date du 24 mai 1792.

17 Inventaire du 21 avril 1790 (ADBR, Q 4347).

18 Inventaire du 14 août 1790 (ADBR, Q 4349).

19 Lefèvre d’Ormesson, bibliothécaire du Roi et membre des Comités réunis, avait fait approuver son projet de « Bibliographie universelle de la France » par l’Assemblée le 2 décembre 1790, l’objectif étant de réunir dans un même catalogue tous les ouvrages détenus par la nation.

20 Les « Comités réunis » désignent la commission mixte réunissant des membres du « Comité d’aliénation des biens nationaux » d’une part, du « Comité d’administration ecclésiastique » d’autre part, comités créés par l’Assemblée Constituante en octobre 1790. Les Comités réunis firent appel aux compétences de savants et d’artistes, réunis généralement au Collège des Quatre-Nations, d’où le nom de « Commission des Quatre-Nations ».

21 Lettre signée La Rochefoucauld et d’Ormesson, 11 avril 1791 (AN, F17 1035, dossier 5, Commission des Monuments, pièce 33).

22 Instruction pour procéder à la confection des catalogues des bibliothèques sur lesquelles les directoires ont dû ou doivent incessamment apposer les scellés [15 mai 1791], Paris, Imprimerie nationale, 1791. Voir De l’argile au nuage : une archéologie des catalogues (2e millénaire av. J.-C.-XXe siècle) [Exposition. Paris, Bibliothèque Mazarine ; Genève, Bibliothèque de Genève, mars-mai, septembre-novembre 2015], dir. Frédéric Barbier, Thierry Dubois et Yann Sordet, Paris, Bibliothèque Mazarine ; Éditions des Cendres, 2015, p. 365-367.

23 Procès-verbal concernant l’abbaye de Neubourg, juin 1791 (ADBR Q 4462).

24 Dominique Varry et Claude Muller, Hommes de Dieu et révolution en Alsace, Paris, Brepols, 1993, p. 123.

25 Circulaire du 14 janvier 1792 (AN F17 1035, pièce 16).

26 Décret du 2 janvier 1792. Cf. Ulysse Robert, Recueil de lois, décrets, ordonnances, arrêtés, circulaires, etc. concernant les Bibliothèques publiques, communales, universitaires, scolaires et populaires, Paris, Champion, 1888.

27 Pierre Riberette, Les bibliothèques françaises pendant la Révolution (1789-1795) : recherches sur un essai de catalogue collectif, Paris, Bibliothèque nationale, 1970, p. 24 et suiv.

28 Lettre des administrateurs du directoire du district de Wissembourg, 1er février 1792, adressée au bureau des domaines (ADBR, Q 4461).

29 Lettre de Jérémie Jacques Oberlin du 11 juillet 1792, ADBR, Q 4462 (Chartreux de Molsheim).

30 J. J. Oberlin, Procès-verbal relatif à la confection du catalogue de la bibliothèque de la chancellerie du Palais épiscopal, 16 octobre 1792 (ADBR, Q 4463).

31 Thomassin, directeur de la régie nationale de l’enregistrement des domaines et droits réunis, ibid.

32 Le décret du 9 février 1792 place les biens des émigrés « sous la main de la nation ».

33 Jean-Baptiste Labiche, Notice sur les dépôts littéraires et la révolution bibliographique de la fin du dernier siècle, d’après les manuscrits de la Bibliothèque de l’Arsenal, Paris, A. Parent, 1880, p. 22-23.

34 Dominique Varry, dans Histoire des bibliothèques françaises. Les bibliothèques de la Révolution et du XIXe siècle : 1789-1914, Paris, Éditions du Cercle de la librairie, 2009, p. 8.

35 25 juillet 1792, ultimatum prussien adressé aux révolutionnaires, assorti de menaces de représailles s’ils venaient à s’en prendre à la personne du roi.

36 10 août 1792, insurrection parisienne. Le château des Tuileries est envahi et la famille royale arrêtée.

37 Sylvie Gueth, La constitution des bibliothèques publiques dans le département du Bas-Rhin, 1789-1803, mémoire d’étude, Villeurbanne, ENSSIB, 1991, p. 43, donne le nombre de 20 510 émigrés représentant 21 % du total des émigrés français.

38 Pierre Riberette, Les bibliothèques françaises…, op. cit., p. 40-41.

39 J. J. Oberlin, Rapport du 3 brumaire an II (24 octobre 1793), ADBR, Q 4460.

40 Philippe-Frédéric Dietrich (1748-1793) fut maire de Strasbourg de 1790 à 1791. Émigré en 1792, il se livra aux autorités et fut guillotiné à Paris en 1793.

41 François-Joseph-Louis de Klinglin, baron d’Essert, (1739-18. ?), maréchal de camp et commandant de Strasbourg, accusé de complicité lors de la fuite du roi en juin 1791, émigré, se mit au service de l’empereur d’Autriche.

42 Notes et arrêtés de la Commission temporaire des Arts, séance du 20 germinal an II (9 avril 1794), AN, F17*7.

43 Pierre Riberette, Les bibliothèques françaises…, op. cit., p. 49-50.

44 Arrêté du département du Bas-Rhin du 22 ventôse an II (12 mars 1794), ADBR, Q 4457.

45 Lettre de Jean-Marie Roland de La Platière, ministre de l’intérieur, aux administrateurs du département de Bas-Rhin, concernant la séquestration des biens du landgrave de Darmstadt, 27 septembre 1792 (ADBR, Q 4455).

46 Pierre Riberette, Le conseil de conservation et la formation des bibliothèques françaises. Extrait des Actes du 90e Congrès national des sociétés savantes, Nice, 1965, Section d’histoire moderne et contemporaine, Paris, Bibliothèque nationale, 1966, t. II, p. 228.

47 Pierre Riberette, Les bibliothèques françaises…, op. cit., p. 10.

48 Lettre d’Oberlin aux directeurs (des districts ou des départements ?), 4 octobre 1792 (ADBR, Q 4460).

49 Triage des bibliothèques des 83 départements, 16 août 1792 (AN, F17 1036 A, dossier 5, pièce 40).

50 Henri Grégoire, Rapport sur la bibliographie présenté à la convention nationale le 22 germinal an II, BnF, 8-LE38-757 (C).

51 Strasbourg est informé des événements aux dates suivantes : 25 avril 1792 pour la déclaration de guerre, 14 août pour l’arrestation du roi, 25 septembre pour la proclamation de la République.

52 Rodolphe Reuss, Les églises protestantes d’Alsace pendant la Révolution (1789-1802), Paris, Librairie Fischbacher, 1906, p. 139.

53 Ibid., p. 162.

54 Délibération de la Commission provisoire du département du Bas-Rhin du 19 brumaire an II, portant nomination de Léopold Keil pour la confection des inventaires des bibliothèques, en remplacement du citoyen Oberlin (AN, F17 1187 B).

55 Rodolphe Reuss, Les églises protestantes…, op. cit., p. 141-142.

56 F. Blumstein, La bibliothèque municipale de Strasbourg et son histoire, Rixheim, F. Sutter, 1900, p. 13.

57 André Jung, « Les bibliothèques publiques de Strasbourg », Revue d’Alsace, 1836, p. 202.

58 AN, F17 1079 : document cité par Sylvie Gueth, La constitution…, op. cit., p. 59-60.

59 F. Blumstein, La bibliothèque municipale de Strasbourg et son histoire, op. cit., p. 13.

60 Lettre des officiers municipaux de la Commune de Strasbourg aux administrateurs du district de Strasbourg, 5 Thermidor an II (23 juillet 1794), ADBR, Q 4016.

61 Rodolphe Reuss, Histoire d’Alsace, Paris, Boivin & Cie, ancienne librairie Furne, 1912, p. 279.

62 Ibid., p. 280.

63 AN, F17 1179 A.

64 Ulysse Robert, Recueil de lois, décrets, ordonnances, arrêtés, circulaires, etc. concernant les Bibliothèques publiques, communales, universitaires, scolaires et populaires, Paris, H. Champion, libraire, 1888, p. 37-39.

65 ADBR Q 4460.

66 L’Hôtel de la Noblesse avait été choisi comme dépôt littéraire dans le courant de l’été 1792.

67 Délibération du directoire du district de Strasbourg, à propos du bâtiment de la place d’Armes, 9 fructidor an II (26 août 1794) : d’après cette délibération, le bâtiment de la place d’armes semblait faire l’affaire, mais il faut croire qu’il y eut un empêchement puisque deux mois plus tard, la recherche d’un bâtiment convenable se poursuivait, ADBR, Q 4016.

68 André Jung, Notice sur l’origine des bibliothèques…, op. cit., p. 23 ; F. Blumstein, La bibliothèque municipale…, op. cit., p. 20.

69 Rodolphe Reuss, Les bibliothèques publiques de Strasbourg incendiées dans la nuit du 24 août 1870. Lettre à M. Paul Meyer, l’un des directeurs de la Revue critique d’histoire et de littérature, Paris, Librairie Fischbacher, 1871, p. 6.

70 J. J. Oberlin, Rapport du 3 brumaire an II (24 octobre 1793), op. cit.

71 La demande de Keil date du 24 pluviôse an II (12 février 1794), ADBR Q 4463.

72 Lettre de Laumond, administrateur provisoire des Domaines nationaux, au Directoire du département du Bas-Rhin, 18 nivôse an II (7 janvier 1794), ADBR, Q 4460.

73 La Commission temporaire des Arts, créée début 1794, fait suite à la Commission des monuments, supprimée le 18 décembre 1793.

74 J. J. Oberlin, Rapport du 3 brumaire an II (24 octobre 1793), op. cit.

75 Rodolphe Reuss, Les bibliothèques publiques de Strasbourg incendiées…, op. cit., p. 6.

76 Henri Grégoire, Rapport sur la bibliographie présenté à la convention nationale le 22 germinal an II, op. cit.

77 Échange de correspondance cité par Sylvie Gueth, La constitution…, op. cit., p. 65-66.

78 Lettre des administrateurs du directoire du district de Strasbourg au Citoyen Président de la Convention nationale, 25 fructidor an II (11 septembre 1794), AN, F17 1187 B.

79 « Incendie de la bibliothèque de Saint-Germain-des-Prés en 1794 », Bibliothèque de l’école des chartes, tome 88, 1927, p. 387. La bibliothèque de Saint-Germain-des-Prés était alors la seule bibliothèque parisienne ouverte tous les jours, cf. document relatant la lecture du 16 août 1791 du mémoire adressé à la compagnie des bibliothécaires de Saint-Germain par Mercier de Saint-Léger (AN, F17 1079, dossier 3).

80 Journal des Débats et des décrets, n° 798, séance du 10 frimaire, an III (30 novembre 1794), p. 1001 ; deuxième rapport fait par Thibaudeau au nom du Comité d’instruction publique (ADBR, 1 L 415).

81 Notes et arrêtés de la Commission temporaire des Arts, 17 brumaire an III (7 novembre 1794), AN, F17* 9.

82 Procès-verbal de l’inventaire de la bibliothèque du couvent des ci-devant Récollets de Saverne, 18 floréal an IV (7 mai 1796), ADBR, Q 4462.

83 Lettre de Prieur aux membres de la Commission d’instruction publique, 25 brumaire an III (15 novembre 1794), AN, F17 1187 B.

84 Lettre des administrateurs du département du Bas-Rhin à la Commission d’instruction publique, 28 brumaire an III (18 novembre 1794), ibid.

85 Circulaire de la Commission Exécutive de l’Instruction publique aux Administrateurs de District, signée Garat, Guinguené, Clément de Ris, 23 pluviôse an III (11 février 1795), ADBR, Q 4460.

86 Ibid.

87 Extrait de la lettre de Keil aux administrateurs du district de Strasbourg, 6 ventôse an III (24 février 1795), AN, F17 1187 B.

88 Loi du 21 prairial an III (9 juin 1795) et arrêté du 23 prairial.

89 Pierre Riberette, Le Conseil de conservation…, op. cit., p. 270.

90 Procès-verbal concernant Wissembourg, 7 nivôse an IV (28 décembre 1795), ADBR, Q 4464.

91 J. J. Oberlin, Rapport du 3 brumaire an II (24 octobre 1793), op. cit.

92 ADBR, Q 4463.

93 Ibid.

94 Jean-Laurent Blessig (1747-1816), professeur de philosophie (1778) et de théologie (1783), prédicateur au Temple-Neuf.

95 Billet daté de brumaire an III (octobre-novembre 1794), faisant mention de l’expédition d’une lettre du citoyen Blessig au citoyen Grégoire (AN, F17 1187 B).

96 Isaac Haffner (1751-1831), prédicateur protestant, doyen de la faculté protestante, pédagogue et bibliophile, avait constitué une bibliothèque personnelle de plusieurs milliers de volumes.

97 Dominique Varry, Histoire des bibliothèques…, op. cit., p. 10.

98 J. J. Oberlin, Rapport du 3 brumaire an II (24 octobre 1793), op. cit.

99 Euloge Schneider (1756-1794), moine franciscain, prêtre constitutionnel, fut accusateur public à Strasbourg d’octobre à décembre 1793.

100 L’administration du district de Strasbourg au Comité d’Instruction publique, 15 nivôse an III (AN, F17 1187 B).

101 6 vendémiaire an XII, (29 septembre 1803).

102 André Jung, Notice sur l’origine…, op. cit, p. 22.