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Les mazarinades à l’affiche ? Armand d’Artois et la collection de la Bibliothèque Mazarine

Christophe VELLET

Conservateur en chef à la Bibliothèque Mazarine

NdA : Je tiens à exprimer ici ma gratitude à Patrick Latour, conservateur en chef à la Mazarine, qui a libéralement mis à ma disposition le fruit de ses recherches sur Armand d’Artois et Paul Marais, et à MMes Cousson et Herce et M. d’Artois de Bournonville, arrière-petits-enfants d’Armand d’Artois, pour les informations qu’ils m’ont communiquées, ainsi que pour le don, comprenant plusieurs manuscrits d’œuvres théâtrales et littéraires de d’Artois, fait à la Bibliothèque Mazarine en 2015.

RENCONTRE D’UNE COLLECTION EN FRICHE ET D’UN BIBLIOTHÉCAIRE RÉVÉLÉ SUR LE TARD

Arrivé à la Bibliothèque Mazarine en qualité de « surnuméraire » en 1856, Alfred Franklin avait alors vu dans deux pièces de l’entresol un ensemble présenté par Sylvestre de Sacy, le directeur de l’époque, comme environ deux mille recueils factices « de querelle religieuse », dernier élément des fonds encore non catalogué, qui provenait en réalité des prélèvements opérés soixante ans auparavant dans les dépôts littéraires sous l’administration révolutionnaire de l’abbé Leblond. Tout au long de la première moitié du XIXe siècle, on n’avait osé « infliger à personne l’ennui d’inventorier un pareil fatras », selon les mots mêmes de Sylvestre de Sacy rapportés par Franklin1.

Devenu à son tour administrateur de la Mazarine à partir de 1885, celui-ci affirma être retourné examiner de plus près ce corpus délaissé par ses prédécesseurs et y avoir constaté la présence de recueils relatifs à la Fronde, outre ceux de controverse religieuse. À la fin de l’année 1887, il décida de confier le traitement des recueils de mazarinades à un conservateur, Armand d’Artois.

Descendant d’une famille de la noblesse picarde d’Ancien régime2, apparenté à de célèbres auteurs de théâtre sous la Restauration et la monarchie de Juillet, Jules François Armand d’Artois de Bournonville, né à Paris le 19 janvier 1845, se retrouva très jeune orphelin de son père avocat. Il dut alors renoncer à son rêve d’intégrer l’École polytechnique et, pour subvenir aux besoins de la famille, intégra à 16 ans le bureau de la comptabilité au ministère de l’Instruction publique3. Il tenta cependant de perpétuer la tradition familiale récente en se lançant dans la vie littéraire parisienne4. Il progressa dans la hiérarchie administrative et, trentenaire, fut promu sous-chef du bureau de l’enseignement primaire (1878). Marié en 1880 à une jeune veuve aisée5, il donna peu après une nouvelle orientation à sa carrière administrative, qui devait aussi faciliter l’évolution de sa carrière littéraire6 : le 21 juin 1881 il fut nommé conservateur de la bibliothèque des sociétés savantes7. Ce fonds, directement rattaché au ministère et intimement lié au Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS), avait été récemment confié en dépôt à la Bibliothèque Mazarine (arrêté du 30 octobre 1879). Armand d’Artois entra dans ses nouvelles fonctions en octobre 1881, mais par décision ministérielle du 19 décembre 1884, il rejoignit à part entière le personnel de la Bibliothèque Mazarine dont il devenait l’un des trois conservateurs, et y disposait d’un logement de fonction8. Son remplacement par Eugène Lefèvre-Pontalis, jeune archiviste-paléographe élève de Robert de Lasteyrie, l’un des dirigeants du CTHS avec Léopold Delisle, correspondait à la volonté de ceux-ci de faire de la bibliothèque des sociétés savantes le support d’un recensement bibliographique de l’activité historiographique française9. Au sein de la Bibliothèque Mazarine, Armand d’Artois prit sa part du service en salle de lecture, contribua aux acquisitions, et travailla à la refonte du catalogue, notamment, avec Paul Marais, pour les ouvrages anciens d’histoire, de littérature et de philosophie entrés durant la Révolution. En décembre 1887, fut jouée avec un certain succès L’Affaire Clémenceau, adaptation d’après Alexandre Dumas père coécrite par d’Artois et Alexandre Dumas fils : c’est à cette époque qu’il accepta la proposition d’Alfred Franklin de classer et cataloguer les mazarinades de la Bibliothèque Mazarine.

UN REGAIN D’INTÉRÊT RÉCENT POUR LES MAZARINADES : LA BIBLIOGRAPHIE DE CÉLESTIN MOREAU, BASE DU TRAVAIL D’ARMAND D’ARTOIS

Célestin Moreau, journaliste catholique légitimiste et chroniqueur littéraire, ne semblait a priori guère plus destiné qu’Armand d’Artois à s’intéresser de près aux libelles de la Fronde. Cependant, c’est probablement par le profond intérêt qu’il éprouvait pour le « siècle » de Louis XIV d’une part10, et à l’instigation du bibliothécaire érudit Paulin Pâris, d’autre part, qu’il entreprit le repérage, le recensement, la description et l’analyse des mazarinades dans les années 184011. Moreau, aidé dans cette tâche de grande ampleur par bibliographes et conservateurs, historiens et érudits locaux, en publia le produit dans la collection de la Société de l’histoire de France sous la forme de trois volumes (1850-1851). Lui-même a essentiellement travaillé sur les principales collections alors signalées et accessibles à Paris : la Bibliothèque royale, l’Arsenal, Sainte-Geneviève12, de sorte que l’ouvrage qui demeure la référence universelle aujourd’hui s’est donc fait, pour les raisons évoquées plus haut, sans le recours à celle de la Bibliothèque Mazarine. Les quelque 4 200 notices cumulées selon l’ordre alphabétique de leur titre ont été complétées par plusieurs suppléments, d’abord dus à Moreau lui-même dès la fin du tome 3 (1851) de la Bibliographie, soit 229 numéros de plus, puis dans deux articles du Bulletin du bibliophile et du bibliothécaire (1862 et 1869), suivis de la publication de Socard fondée sur la collection de Troyes ; Philippe Van der Haeghen avait pour sa part livré en 1859 dans le Bulletin du bibliophile belge le résultat de son exploration des collections du royaume de Belgique. Tels sont les outils spécifiques de travail qu’Armand d’Artois a pu avoir à sa disposition pour accomplir la mission qui lui incombait.

LE TRAITEMENT DES RECUEILS DE MAZARINADES, UNE OPÉRATION INÉDITE ET SOLITAIRE ?

À la Bibliothèque Mazarine même, quelques dizaines de volumes entrés au XVIIIe siècle avaient été dépouillés à la pièce dans le catalogue initié par Pierre Desmarais, « garde » de 1722 à 176013. Ce signalement détaillé se retrouve également sous la forme de fiches réutilisant le verso blanc des cartes à jouer de l’époque. Nous avons constaté à cet égard l’absence, parmi les milliers de cartes à jouer classées dans l’ordre des cotes et rangées ensuite dans des cassetins de bois, d’une importante série de fiches correspondant à ce dépouillement : évidemment plus pratiques à manipuler que les volumineux et lourds registres du catalogue de Desmarais, n’auraient-elles pas pu avoir été prélevées par celui qui traitait les mazarinades et, résidant sur place, avait toute latitude de poursuivre le travail à domicile ? Malheureusement, nous n’avons pas à ce jour repéré la moindre trace de ce paquet de cartes distrait du reste du fichier.

Par ailleurs il semble, d’après leur cotation, que certains recueils aient été rangés avec les nouveautés sur les étagères de la bibliothèque bien avant 1887 : 36 provenant des princes de Condé14 et faisant partie d’une série commençant aux guerres de religion, une cinquantaine issus de bibliothèques de différents établissements ecclésiastiques parisiens, probablement cotés à la fin des années 1860 ou au début de la décennie suivante15. Franklin serait-il derrière ces opérations ? La documentation reste muette à ce sujet. Quant au processus de travail d’Armand d’Artois tel qu’il peut nous apparaître, lui aussi pose question.

Dans les recueils factices, souvent simplement foliotés à la plume par ou pour les anciens possesseurs, les différentes pièces les composant ont été numérotées et leur nombre total porté en tête du volume, d’une main différente de celle que l’on est en mesure d’attribuer à d’Artois par comparaison avec des courriers ou autres documents autographes conservés dans les archives de la bibliothèque ou aux Archives nationales. D’autre part, d’Artois travailla principalement à partir d’un exemplaire interfolié de la Bibliographie de Célestin Moreau16, où une autre main a indiqué la cote des différents exemplaires de chaque mazarinade repérée dans le noyau ancien, les séries cotées environ vingt ans auparavant, et les recueils non traités jusque-là17. La forme de l’écriture fait penser à une période antérieure à la fin du XIXe siècle ou à tout le moins à une personne d’une génération formée à l’écriture longtemps auparavant. Ici non plus, l’enquête documentaire n’a pas apporté d’élément de réponse.

Néanmoins, l’essentiel du travail « scientifique » est bien le fait d’Armand d’Artois. Le produit en fut reporté sur un autre exemplaire interfolié de la Bibliographie de Moreau18. Armand d’Artois annota abondamment cet exemplaire. Il corrigea et compléta les notices de Moreau et quelques ajouts des suppléments, à 780 reprises19, soit moins de 20 %, n’en exclut en bloc qu’une quinzaine20 et en supprima quelques-unes par rapprochement ou regroupement21. En se fondant sur les différents suppléments mais avant tout sur son examen des collections de la Mazarine, il précisa plus de 1 060 variantes imprimées, éditions provinciales et copies manuscrites22, dont moins de cinquante jugées non pertinentes par Hubert Carrier. Il inséra les mazarinades signalées par les différents suppléments à la Bibliographie, mentionna des pièces d’autres bibliothèques, Orléans, Sainte-Geneviève, Carnavalet (précédant la Bibliothèque historique de la ville de Paris) 23 ; pour la Bibliothèque nationale, la référence est celle des notices du Catalogue de l’histoire de France, non directement la cote24. Ainsi, autant d’Artois manifesta une grande prudence à remettre radicalement en cause l’œuvre de Moreau25, autant fit-il preuve d’enthousiasme à proposer de nouveaux textes repérés dans les recueils factices de la Mazarine, et mentionna en outre des titres de pièces d’après des catalogues de libraires ou de ventes, ou directement vues par lui en librairie, mais malheureusement sans préciser dans quel catalogue ni chez quel marchand26. Si l’on cumule, on arrive à plus de 1 750 titres nouveaux par rapport à ceux de Moreau, soit près de 42 % d’augmentation ! Ce relatif excès de zèle d’Armand d’Artois a été mis en exergue plus récemment par les analyses critiques de Hubert Carrier. Celui-ci a écarté 42 % des ajouts faits par d’Artois, suppléments au Moreau compris, ce qui en chiffres absolus en conserve tout de même environ 1 020, soit un accroissement du corpus de 24 %27. Les « mazarinades refusées » sont de faux inédits, des textes antérieurs ou postérieurs à la Fronde, notamment liés au cardinal de Retz, des extraits de la Gazette28, des pièces contemporaines de la Fronde mais dont le contenu, littéraire, anecdotique, administratif ou judiciaire, est sans rapport réel avec elle29. Hubert Carrier a également rejeté plus de 130 mazarinades référencées à l’origine par Moreau, et s’interrogeait sur la nature de 36 autres textes, issus de Moreau ou de d’Artois, n’ayant pu déterminer s’il s’agissait ou non de mazarinades à son sens. D’Artois demeura prudent quant aux tentatives d’attribution pour les mazarinades anonymes, à peine plus d’une cinquantaine, concernant principalement Cyrano de Bergerac ou Louis Machon30 ; il se lança plus ou moins adroitement dans de rares notes personnelles31. Il se montra encore plus circonspect pour avancer des datations32. Nombre de remarques révèlent qu’il lisait, analysait, comparait les pièces, ce qui lui permit de mettre au jour certaines pratiques de recyclage ou de captation33, en dehors des confusions commises par Moreau34. Enfin, dans une bien moindre mesure que celui-ci, d’Artois s’est laissé aller de loin en loin à un – sévère – jugement littéraire35.

Les exemplaires annotés du Moreau portent également la trace du travail bibliographique effectué par Armand d’Artois au-delà du corpus des mazarinades proprement dites : il signale environ 120 titres, qui sont des réimpressions ou fac-similés de mazarinades, comme des éditions d’autres sources liées à la Fronde36, tant à Paris que dans les provinces, de la fin du XVIIe siècle jusqu’à sa propre époque. Certains d’entre eux ont été agrégés directement à la collection37.

Les registres de prêts d’ouvrages de la Mazarine n’en gardent aucune trace, mais les archives ont livré un cachet personnel que d’Artois s’était certainement fait fabriquer pour matérialiser temporairement, par un fantôme à son nom, les prélèvements en rayon d’ouvrages dont il avait besoin : il disposait sur place d’une grande partie de la bibliographie relative à la Fronde et aux mazarinades et, sans qu’on ait poussé l’enquête jusqu’à le vérifier sur pièces, on imagine qu’il avait tout loisir d’aller la compléter dans l’une des autres grandes bibliothèques parisiennes.

L’impressionnant travail de repérage et d’analyse accompli par Armand d’Artois dans les recueils factices de la Mazarine déboucha sur une décision que l’on jugera rétrospectivement étrange ou regrettable, mais qui correspondait sans doute, dans l’esprit, à un objectif de « valorisation » du fonds des mazarinades : la sélection, par démembrement dans les recueils d’origine, d’un exemplaire de chaque édition, en vue de la formation d’une collection « idéale » qui ferait autorité par son degré de complétude et au sein de laquelle chaque mazarinade serait mise en lumière et distinguée par son signalement, sa conservation et sa mise à disposition individualisées.

UNE ÉTRANGE INITIATIVE : LA CONSTITUTION D’UNE COLLECTION DE RÉFÉRENCE DES MAZARINADES

Est-ce une idée déjà présente dans l’esprit d’Alfred Franklin, une suggestion d’Armand d’Artois à son supérieur, ou le fruit d’un projet mûri en commun ? On ne sait. Cependant il semble qu’assez tôt dans l’opération d’inventaire, il ait été envisagé de prélever dans les recueils factices un exemplaire de chaque mazarinade repérée afin de constituer une collection de référence dont chaque élément serait relié et conservé individuellement. Dans son courrier de février 1890, donc à peine plus de deux ans après le début de l’entreprise, Alfred Franklin évoquait d’autant plus clairement la constitution d’un ensemble de référence sous reliures identiques que le document était en fait destiné à solliciter auprès du ministère de l’Instruction publique des crédits supplémentaires afin de réaliser l’opération, pour un montant de 4 000 francs38, d’ailleurs refusés dès le 10 mars 189039.

Comment Armand d’Artois a-t-il procédé ? Au contreplat des recueils, il listait le numéro des pièces qu’il prélevait pour la collection de référence40, sans plus de précision (titre), sinon ponctuelle, indiquant telle mazarinade estimée rarissime à l’époque, comme La custode de la Reyne ou encore La pure vérité cachée41, telle autre incomplète42, une mazarinade sous forme de placard, matérialisée par un petit rectangle blanc sous le numéro dans la liste43, une pièce manuscrite44. Il manifeste de temps en temps une approche globale du recueil, sur la dominante stylistique45, la période couverte46, les pertes anciennes de pièces qui faussent le piéçage47. La sélection n’a pas été rectiligne, car certains numéros des listes de prélèvements sont biffés et l’on retrouve la pièce en question réinsérée dans son recueil d’origine48, tandis que des prélèvements supplémentaires semblent avoir été effectués dans un recueil déjà mis à contribution49. À la marge, quelques monographies intégrées au corpus sans relever de la typologie des mazarinades furent distraites du fonds général et conservées dans leur reliure d’origine quel que fût leur format50. Comme l’immense majorité était des pièces in-quarto, format représenté depuis Desmarais par les cotes 10 000 à 19 999, on cota les mazarinades de la nouvelle collection à partir du nombre 10 000 précédé de la lettre M.

Si l’on en croit les archives comptables, les opérations de reliure débutèrent fin 1892, commandées au relieur Petitot, installé non loin de là, au 21 rue de Seine, et en affaire avec la bibliothèque depuis l’année précédente51. Au gré des crédits disponibles52, elles se poursuivirent année après année jusqu’en 1900 en lots d’importance variable, financées soit, lorsqu’ils n’étaient pas dédiés à un autre chantier, par les revenus du capital issu d’un legs (le legs Prater, confié à la gestion de la Caisse des dépôts et consignations), soit par des reliquats budgétaires53. Un dernier lot notable de 210 mazarinades cotées à la fin de la collection (M 15054 à M 15263) fut relié en 1904, puis les quelques pièces intégrées en dernier, en 1906 (M 15312 à M 15365 et 16131 à 16134), 1907 (M 15368 à 15384) et 1910 (M 15397 à M 15413).

La collection ainsi constituée, de 5 565 éléments, est censée suivre l’ordre alphabétique des titres, mais elle semble se scinder au moins en deux grands ensembles comme si elle avait été mise en place en plusieurs étapes : une première série couvre les cotes M 10000 à 12420, puis une seconde repart de la lettre A (M 12421) jusqu’à la pièce cotée M 14106 ; la dernière partie ne suit plus l’ordre alphabétique et forme un sous-ensemble composite qui juxtapose des actes officiels (édits, arrêts des parlements à Paris et en province) 54, des « périodiques », des recueils éditoriaux, des pièces acquises durant l’activité d’Armand d’Artois en original ou en copie, et, pour finir, des manuscrits, cotés à partir de M 16001. Il semble que la collection ait été disposée, en magasin, à la place de la bibliothèque des sociétés savantes, transférée à la Bibliothèque nationale en 188855. Armand d’Artois reporta donc l’ensemble de ces cotes sur l’exemplaire déjà annoté par lui seul du répertoire de Célestin Moreau.

Parmi les annotations présentes dans des documents de travail, répertoires et catalogues qu’il a utilisés, figure un X cantonné de quatre points, matérialisant les lacunes qu’il avait pu relever dans la collection de la bibliothèque. En effet, le traitement bibliothéconomique des mazarinades s’accompagna du recensement de ces lacunes56 sur la base des sources et outils disponibles, qui préfigurait une nouvelle phase importante du chantier : combler ces lacunes afin de conforter le caractère de référence de la collection.

COMPLÉTER LA COLLECTION : UN ÉCHEC ?

Alfred Franklin a-t-il tant forcé le chiffre que cela lorsqu’il annonçait 25 000 exemplaires de mazarinades dans sa demande de crédits extraordinaires en février 1890 ? Quoi qu’il en soit Armand d’Artois avait pu lui démontrer la disponibilité massive d’exemplaires multiples dans une majorité de cas57. Franklin estimait dans le même document le déficit de leur collection à 200 pièces, essentiellement des impressions provinciales des villes parlementaires (Bordeaux, Aix-en-Provence, Dijon, Toulouse, Rouen) et de Lyon, et se proposait de préciser les échanges informels qu’il avait déjà pu avoir avec les collègues, notamment à Dijon et Bordeaux, au sujet de possibles échanges, moyen on ne peut plus économique d’acquérir pour compléter, mais susceptible de présenter d’autres difficultés. Franklin missionna Auguste Duviard, l’un des agents de la Mazarine, qui avait établi une liste de mazarinades manquant à la bibliothèque et d’incunables potentiellement « échangeables », pour se rendre dans celles de Lyon, Aix et Marseille et y examiner leurs collections : il ne put même pas achever le dépouillement des fonds lyonnais à la fermeture estivale de l’établissement, estimant qu’il faudrait un mois supplémentaire de travail pour y parvenir. Il affirmait avoir listé dix mazarinades manquant de façon certaine à la Mazarine, en attendant de pouvoir vérifier à Paris l’absence d’un certain nombre d’autres qu’il avait notées « sur le catalogue de M. d’Artois », et sollicitait une prolongation de sa mission du 15 septembre au 1er octobre afin de visiter les bibliothèques d’Aix et Marseille, également fermées en août. Le décès de sa mère et la succession à régler détournèrent quelque peu Duviard de la mission, même s’il s’efforça d’achever les dépouillements à Lyon et se rendit à Aix en septembre. Le 6 novembre, Franklin transmit au ministère le rapport de Duviard qui avait finalement circonscrit dix-huit pièces absentes à la Mazarine58. S’il faut en croire Paul Marais, Pol Neveux, autre membre du personnel de la Mazarine, aurait pris le relais de Duviard, en vain, car Franklin aurait essuyé un refus de la bibliothèque de Lyon59.

Cependant, au gré des parutions et des acquisitions de la Mazarine, Armand d’Artois faisait l’état comparatif des collections décrites avec celle dont il avait la charge. S’il ne se permettait pas d’une façon générale d’annoter les documents, il fit quelques exceptions sur plusieurs catalogues imprimés de bibliothèques de province parus durant la seconde moitié du XIXe : il a ainsi annoté celui du fonds Provence de la bibliothèque de Marseille (1890) 60, le premier tome du legs Godefroy de Ménilglaise à celle de Lille (1893) 61, le volume consacré à l’histoire à la bibliothèque d’Orléans (1905) 62, pointant les mazarinades déjà vues et surtout les pièces sans exemplaire correspondant à la Mazarine, en particulier celles dont les collègues conservaient au moins un double63. Il examina également en détail dans le Catalogue de l’histoire de France la cote Lb37 de la Bibliothèque nationale, qui correspond au règne de Louis XIV, pour la partie concernant la Fronde, mais en établit la synthèse à part64.

Au tournant du siècle, Alfred Franklin réorienta la stratégie d’échanges vers les bibliothèques parisiennes dans la même position statutaire que la Mazarine, c’est-à-dire dépendant directement du ministère de l’Instruction publique : Bibliothèque nationale, Sainte-Geneviève, Université de Paris (Sorbonne). Il le fit visiblement à l’instigation de son collaborateur : une sorte de note de la main d’Armand d’Artois malheureusement non datée fournit un état des lieux de la collection où il conclut à un manque de 300 mazarinades au regard des répertoires existants, et suggère des échanges avec les bibliothèques parisiennes. Franklin est autorisé par le ministre à négocier, sous réserve de son approbation de tout accord (14 juin 1899). Très rapidement (17 juin) un échange, sans doute bien préparé en amont des deux côtés, est mis au point avec la Bibliothèque Sainte-Geneviève, et officiellement approuvé deux mois plus tard (17 août) par la tutelle, les documents en question, 30 du quai de Conti, 6 de la place du Panthéon, se croisant mi-novembre de la même année65. Peut-être encouragé par cette transaction, l’administrateur de la Mazarine sollicita du ministre la faculté de négocier des échanges, toujours sous réserve de son approbation, à un exemplaire acquis contre cinq cédés, avec d’autres bibliothèques, y compris étrangères, des libraires, des collectionneurs, afin de récupérer les mazarinades faisant défaut à son fonds, qu’il estimait cette fois à 500 unités ; il exprima dans cette perspective d’élargissement de l’opération la nécessité de disposer d’une liste imprimée à diffuser. Le tout fut approuvé, de sorte qu’Armand d’Artois fut chargé d’élaborer et de fournir la liste des « desiderata » de la Mazarine, dont l’impression, mille exemplaires d’une brochure in-octavo non couverte de 464 articles décrivant 568 pièces, fut confiée à l’Imprimerie nationale dans un souci d’en maîtriser le coût et réalisée en mars 190166.

En attendant, un nouvel échange parisien était finalisé en mars 1900 avec la bibliothèque de l’Université de Paris pour 23 pièces dont 15 ne figuraient pas chez Moreau et, en mars-avril 1901, c’est L’adieu des provinciaux à la ville de Paris, après l’entrée de leurs Majestez (1649), coté Yc 1819 à la Bibliothèque nationale, qui était cédé contre un ouvrage de la Mazarine67. Par ailleurs, sur la base du recensement qu’il fit dans les fonds de la bibliothèque Carnavalet, il lista 34 mazarinades intéressantes, mais la « pétition » adressée par son supérieur fut rejetée lors de la séance du conseil municipal de Paris du 13 juillet 1900, les édiles ne voulant pas se défaire de pièces conservées en un seul exemplaire, même contre un nombre quintuple68.

L’année suivante, la large diffusion des desiderata s’accompagna d’une opération de communication par voie de presse à Paris comme en province à l’attention des bibliothèques, des libraires, des particuliers, après la publication de deux articles dans le Bulletin du Bibliophile et la sollicitation du Journal officiel pour l’insertion d’une note pendant quelques jours fin janvier début février69. D’Artois s’efforça de prospecter les collections publiques et privées, notant les 3 275 mazarinades, dont 222 non répertoriées, conservées à Grenoble, le recueil Guichenon à la faculté de médecine de Montpellier, le nom de Paul Huet, ingénieur parisien et collectionneur, ou encore les milles pièces de « l’institut taylorien » à l’université d’Oxford70. Il fit estimer par des professionnels des volumes potentiellement échangeables71. Il entretint une correspondance avec les interlocuteurs bordelais, tant les bibliothèques72, sociétés savantes73 que le bibliophile Labadie qui lui transmit volontiers ses notes. Il synthétisa les dépouillements sur la bibliothèque municipale, celle du grand séminaire et la collection personnelle de Labadie dans un exemplaire des desiderata annoté en marge74. Il s’enquit également d’éventuelles éditions ou fac-similés, notamment auprès des sociétés savantes et bibliophiliques normandes. La bibliothèque du Havre envoya une mazarinade relative à la Normandie75. Il corrigea et mit à jour la liste des desiderata au cours de l’année 1901, en juillet et en octobre : la bibliothèque de Caen avait ainsi proposé en mai La requeste des trois Etats presentée a messieurs du Parlement, 1649, n° 397 des desiderata, mais la Mazarine l’avait eue entre-temps… Les archives de la bibliothèque conservent une série de courriers répondant aux appels diffusés dans les journaux76, de conservateurs de province (Auch, Marseille, Reims, Abbeville, Orléans, Saint-Germain-en-Laye), de l’étranger (Madrid, Liège, Dresde), de libraires parisiens ou provinciaux, de particuliers, de tiers affirmant connaître des détenteurs de recueils. Les bibliothèques provinciales se positionnèrent généralement à l’instar de la municipalité parisienne sur un refus d’aliéner des éléments de leurs collections, y compris doubles, même à un « taux » très avantageux. Les autres propositions se révélèrent soit sans perspective positive soit trop peu pertinentes, ou les bibliothèques n’avaient pas la possibilité de faire une recherche documentaire spécifique sur les mazarinades77. Des mazarinades de Bordeaux furent néanmoins expédiées à Paris sous forme de copies dactylographiées78.

Les rares acquisitions onéreuses faites durant les vingt-cinq années pendant lesquelles Armand d’Artois s’occupa des mazarinades ne compensèrent pas le bilan mitigé de la politique d’échange : en 1896, une pièce relative au prince de Conti et un Mascurat de Naudé étaient achetés au libraire Claudin ; l’année suivante, le même vendait cinq libelles puis le Recueil des maximes veritables de Claude Joly et, en 1898, la Conférence agreable de deux paisans de Saint Ouen. 1900 fut une année un peu plus riche en entrées de recueils entiers ou de pièces à l’unité, trouvées auprès de libraires de proximité, Gougy, quai de Conti, Foucault, rue Mazarine, Claudin encore. 76 pièces relatives au cardinal de Retz provinrent en revanche de Paul et Guillemin, libraires de la Bibliothèque nationale, installés rue des Bons Enfants. Un nouveau recueil fut acheté chez Fischbacher, rue de Seine en 1905, huit pièces en 1906 chez Lucien Dorbon, autre libraire de la rue de Seine79.

Cependant ces diverses entrées étaient loin de combler les lacunes de la collection, d’autant moins au regard de l’énergie déployée, de l’argent dépensé, du temps passé : c’est là l’un des bémols du bilan de l’entreprise consacrée aux mazarinades.

ARMAND D’ARTOIS ET LES MAZARINADES : BILAN MITIGÉ ET AVANCÉE DÉCISIVE

Dans ses souvenirs personnels, Paul Marais, archiviste-paléographe entré à la bibliothèque comme surnuméraire peu après son jeune confrère chartiste Lefèvre-Pontalis et donc dans le même temps où Armand d’Artois y était transféré (fin 1884), relativisait le degré d’avancement du chantier de traitement des mazarinades tel qu’il était présenté par Alfred Franklin en 1890 : il avait vu d’Artois poursuivre l’examen et l’analyse des mazarinades pendant des années jusqu’en 191180.

Armand d’Artois décéda le 13 décembre 1912 sans avoir mené à son terme la publication d’un véritable catalogue des mazarinades de la Bibliothèque Mazarine : c’est dès lors l’exemplaire du répertoire de Moreau portant la cote ajoutée par lui des exemplaires de la collection de référence qui tint lieu de catalogue local, les exemplaires supplémentaires étant très minoritairement signalés dans les catalogues généraux mis à la disposition du public en salle de lecture81. D’Artois avait bien achevé le dépouillement, notant à la suite des autres la cote des pièces des dernières séries de recueils dans l’exemplaire de travail interfolié de la Bibliographie de Célestin Moreau. Son œuvre reste surtout matérialisée dans la collection de référence, ses petites plaquettes caractéristiques et sa cotation particulière, même si les normes actuelles de conservation n’autoriseraient pas le procédé qui a présidé à sa constitution, avec des conséquences fâcheuses pour l’intégrité des recueils d’origine et l’histoire générale de ces fonds82. S’il a composé avec l’existant normatif de description bibliographique, il a tout de même fait faire un certain saut qualitatif à celle des mazarinades et en a surtout considérablement étoffé le corpus. Devenu bibliothécaire sur le tard et formé « sur le tas », Armand d’Artois s’est honorablement acquitté de sa tâche eu égard au contexte dans lequel elle était accomplie et aux problèmes qu’elle posait, ne fût-ce que par l’ampleur du fonds, à comparer avec les manuscrits ou encore les incunables de la Mazarine dont les catalogues parurent à cette époque, en 1885-1892 et 1893-1898.

C’est sur la base de ce travail que les chercheurs du XXe siècle, Hubert Carrier au premier chef dans sa thèse puis dans son projet d’une nouvelle bibliographie des mazarinades, Christian Jouhaud, puis leurs élèves ont prospecté leurs sources, synthétisé le produit des travaux scientifiques parus depuis, pour apporter leur contribution en redéfinissant les contours du corpus, en épurant d’une part et en complétant d’autre part grâce à une critique textuelle et matérielle plus serrée, en proposant de nouvelles identifications d’auteurs, une chronologie relative et absolue des éditions précisée, des interprétations riches et parfois contradictoires.

Pol Neveux, qui avait côtoyé Armand d’Artois à la Mazarine entre 1888 et 1895, fut chargé d’inspecter la bibliothèque pour le ministère à la fin de l’année 1906. Redoutant par ailleurs le départ non remplacé d’Armand d’Artois, si sûr dans l’orientation documentaire des chercheurs quel que fût le domaine concerné, il écrivait au sujet des acquisitions :

les preferences pour l’erudition de M. Marais y sont heureusement temperées par les preferences litteraires de M. D’Artois. Et j’ai pu, à ce propos, me rendre compte combien etait indispensable à la Mazarine la presence d’un homme de lettres, de gout cultivé et renseigné… à condition bien entendu que cet homme de lettres soit en même temps, comme l’est M. d’Artois, un bibliothécaire veritable, serieux et travailleur83.

Le dramaturge à succès et dirigeant actif de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, très impliqué dans la vie littéraire parisienne de la Belle époque, avait pu, grâce aussi à un accès et des conditions de travail facilités par un logement sur place, faire la part de ses deux carrières et consacrer efficacement du temps au traitement du plus important et plus complet fonds de mazarinades au monde. Un dimanche de décembre 1896, il écrivit ce billet à son supérieur hiérarchique, Alfred Franklin : « Mon cher administrateur et ami, demain lundi je redeviens un conservateur et un classeur de mazarinades unique84 » …

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1 Ce récit figure dans un courrier adressé en février 1890 au ministre de l’Instruction publique Armand Fallières. La minute en est conservée à la Bibliothèque Mazarine (désormais BM), archives, 1890, n° 14. Franklin l’a également cité dans la deuxième édition de son Histoire de la Bibliothèque Mazarine et du Palais de l’Institut (Paris, Welter, 1901).

2 De la région de Noyon, en Vermandois. Gustave Chaix D’est-Ange, Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle, Paris, 1983, t. 1, p. 362.

3 Les informations jalonnant la carrière professionnelle d’Armand d’Artois et données à partir d’ici proviennent, sauf mention contraire, de son dossier administratif conservé aux Archives nationales, F17 25670 A.

4 Voir par exemple Maurice Dreyfous, Ce que je tiens à dire : un demi-siècle de choses vues et entendues. 1862-1872, Paris, Ollendorff, 1912, p. 199-201, 208, 281.

5 Le 3 février à la mairie du IIe arrondissement, Archives de Paris, V4E 2663.

6 Une note rétrospective de 1905, présente dans son dossier personnel, éclaire les circonstances et les motivations de ce changement : Armand d’Artois bénéficia de l’appui ministériel de Jules Ferry en récompense de son action en faveur de la laïcité et choisit l’une des bibliothèques où le service hebdomadaire était de trois jours, afin de disposer de temps pour ses activités littéraires et théâtrales. Il s’en tint à ce régime lorsqu’un décret du 7 avril 1887 demanda aux fonctionnaires de la Mazarine d’opter ou non pour un service quotidien pendant cinq jours, lié à une revalorisation des traitements. Au demeurant, son dossier contient, parmi des appréciations toujours élogieuses, quelques remarques sur son implication dans le théâtre « parfois même un peu aux dépens de la bibliothèque » ; fin septembre 1885, Alfred Franklin dut signaler au ministère une absence non autorisée de plus de trois semaines après avoir demandé des explications et reçu en réponse un courrier dans lequel d’Artois narrait les vicissitudes du montage de sa pièce et indiquait s’être arrangé avec un collègue pour le suppléer dans sa prise de service le matin à la bibliothèque.

7 Sur l’histoire de cette bibliothèque, voir Arnaud Dhermy, « La bibliothèque des sociétés savantes (1838-1936) », Revue de la BNF, n° 41, 2012/2, p. 61-69.

8 Archives nationales, F17 14583.

9 Arnaud Dhermy, « La bibliothèque des sociétés savantes… », art. cit., p. 63-64.

10 Patrick Manificat, Pierre Célestin Moreau (1805-1888), un aristarque du Grand Siècle, s. l., circa 2000, p. 58-59.

11 Parmi les papiers et la correspondance de Moreau donnés en 2009 à la Bibliothèque Mazarine par l’association des amis d’Alexandre Vattemare, figurent des dossiers (ms. 4645, 4650) et lettres (ms. 4652) relatifs à l’élaboration de la Bibliographie.

12 Introduction de la Bibliographie, p. LXIII. Un manuscrit de cette introduction est conservé dans les papiers Moreau (BM, ms 4645-1).

13 BM, ms. 4622, p. 1036-1075, entrée « Mazarin », où une note en préambule précise que le présent dépouillement n’est pas exhaustif, et renvoie à celui porté au catalogue spécifique à l’histoire, autre œuvre de Desmarais, classé par format (in-4° en l’occurrence) : il s’agit, dans le t. 3 de cet ensemble contenant l’histoire de France (BM, ms. 4124), des p. 2729-2745 (de nombreux versos sont blancs). C’est la source la plus complète car elle donne l’accès à plusieurs recueils factices « isolés » (4° 10885, 13982, 16033 par exemple) en plus de la tranche spécifiquement couverte par les mazarinades (4° 17605 à 17660). L’entrée « Mazarin » réoriente également vers l’entrée « barricades » (sic), c’est-à-dire BM, ms. 4602, p. 323, qui ne fournit d’abord que deux pièces du recueil 4° 17648, puis, d’une main postérieure, la série des « Mémoires des barricades » (titre manuscrit au dos des volumes, 4° 17608-1 à 34, en réalité 22 recueils seulement, provenant du couvent des barnabites de Saint-Éloi à Paris). Enfin le catalogue général par cote contenait également le dépouillement des recueils de mazarinades, qui fut complété pour le recueil 4° 17648 et pour de nouveaux recueils entrés dans la collection au xviiie siècle, et cotés respectivement 4° 17638 A, 17648 A et B (ms 4117, non folioté).

14 BM, 4° 18824 A-27 à 62.

15 BM, 4° 19042-19069 et 4° 19100-19128. Par ailleurs les recueils dont la racine de cote est 4° 17646 ont été examinés dans les années 1860, notamment le 4° 17646 P (septembre 1864).

16 BM 8° 35835-35837 (= Doc I 3-3/1 à 3).

17 La « première main » liste les recueils cotés de 4° 17608 à 17655 (99 vol.), 18922 (6 vol.), 19042 à 19069 et 19100 à 19128. D’Artois ajoute 4° A 10666, A 10970-71, vingt recueils dans la tranche A 11016-11054, puis A 11109, A 11244-45, A 11267, A 11440-41, A 11468, et l’intégralité des tranches A 11286-11308 et A 11501-11600. Une autre annotation par d’Artois mentionne la tranche 4° A 13901 à 13910. Cependant les cotes suivantes (à partir de A 13911), vraisemblablement traitées dans un second temps, de toute façon en dernier, apparaissent dans les trois volumes parmi les exemplaires de pièces listés en regard ou en glose des notices de Moreau.

18 BM, 4° 40523-21/1 à 3 [Res] (original ; reproduction : Public J 94-1/1, -1/2, -2/1, -2/2 et -3).

19 35 seulement ont été contestées par Hubert Carrier. Il nous a en effet paru intéressant d’examiner le « Moreau » annoté par d’Artois dans une copie elle-même annotée par Hubert Carrier, base de son projet d’une nouvelle bibliographie générale qui fait partie du fonds donné en 2011 par sa famille à la Bibliothèque Mazarine (ms. 4682-1 à 6). Parfois Armand d’Artois corrige Moreau alors que la correction a déjà été donnée dans l’un des suppléments (ms. 4682-5, f. 197v, Moreau 3454 et 1er supplément de Moreau 215). Il considérait la mazarinade classée n° 1758 par Moreau comme la 12e partie du n° 1740, mais H. Carrier en fait pour sa part une publication concurrente (ms. 4682-3 f. 118v). D’Artois a rectifié mainte collation erronée, tel le n° 3359 (ms. 4682-5, f. 164v), a complété des adresses (n° 3090, ms. 4682-5, f. 63v), des titres (nos 3088, 3089, 3372, ms. 4682-5, f. 63v et 169v), voire des textes (la mazarinade n° 389 est incomplète), mais il n’est pas revenu sur la modernisation systématique par Moreau de certaines graphies dans les titres, comme « avis » pour « advis », qui avait influé sur l’ordonnancement du répertoire.

20 Ainsi le n° 1308 de Moreau n’a selon lui « aucun rapport avec la Fronde » (ms. 4682-2, f. 310v).

21 Moreau 2566 et 2574 (ms. 4682-4, f. 106v). D’Artois corrige également les erreurs des suppléments : il établit que le n° 28 de Socard est la même mazarinade que le n° 2600 de Moreau (ms. 4682-4, f. 121v), et que le n° 195 du 2e supplément de Moreau n’est que le n° 1673 de Moreau, mais décrit au titre de départ d’après un exemplaire privé de sa page de titre (ms. 4682-5, f. 294v).

22 D’Artois a trouvé pour le n° 3473 de Moreau une copie manuscrite « du temps » et une édition imprimée différente (ms. 4682-5, f. 202v). Il indique aussi par exemple des éditions bordelaises de mazarinades parisiennes (ms. 4682-5, f. 89v) mais sans la référence au travail du bibliophile Bordelais Ernest Labadie, paru en 1904, envoyé par l’auteur à la Mazarine et entré dans le fonds en mars 1906 (no d’entrée 36284 don, cote 63304) : peut-être un indice que d’Artois n’est pas revenu sur son travail à cette époque, fût-ce pour une mise à jour bibliographique ?

23 Ms. 4682-1, f. 211v : à la bibliothèque Carnavalet se trouvait une pièce intitulée « Arrêt notable de la cour des muses donné en faveur des poètes pour le rabais du pain, avec le bannissement de plusieurs boulangers et boulangères du Mont de Parnasse de cette ville. S. l. [1649] 4 pages. En vers. Vu par la Cour des muses ». Le catalogue imprimé de la bibliothèque d’Orléans n’est paru qu’en 1905 (Mazarine 8° 63306).

24 Mazarine 2° 7218. Le tome 2 paru en 1854 contient les ouvrages relatifs à la Fronde (p. 2 à 12), complété par les tomes 4, paru en 1857 (gazettes, p. 346-349), et 11, paru en 1879 (supplément).

25 Il a ainsi conservé au final dans le périmètre des mazarinades un texte dont il écrit lui-même : « Obscène et bête. Aucun rapport avec la Fronde »… (ms. 4682-3, f. 167v, Moreau 1857, BM M 10171). Ailleurs, il doute fortement de l’existence de la pièce Moreau 602 sous le titre indiqué, qu’il n’a trouvé nulle part (ms. 4682-2, f. 17v). À propos du n° 3838*, il se contente d’écrire « ce doit être le n° 3338 sans la feuille de titre » alors que c’est absolument évident et confirmé plus tard par H. Carrier (ms. 4682-5, f. 333v).

26 « Récit du combat de Brives, commandé par le comte de Harcour. Titre trouvé dans un catalogue » (ms. 4682-5, f. 15v). En réalité ce titre figure dans le Catalogue des livres de la bibliothèque de Nismes, rédigé par I.-E.-Thomas de Lavernède, Nîmes, 1836, t. II, p. 298 (BM, 8° 59246-2).

27 Parmi ces compléments d’Artois signale quelques versions en langue étrangère, comme celle en italien du n° 3653 de Moreau (ms. 4682-5, f. 259v).

28 Non seulement Armand d’Artois ne les a pas écartés, mais il lui arriva d’en confirmer, telle la pièce cotée M 11414, qui correspond au n° 129 du 2e supplément de Moreau (ms. 4682-3 f. 275v).

29 Ms. 4682-5, f. 255v : d’Artois a effectué six ajouts, H. Carrier en rejette cinq, trois pièces postérieures et les deux autres sans rapport avec la Fronde quoique contemporaines.

30 BM, ms. 4682-1 f. 1v, Moreau 1, attribuée à Louis Machon, mais sans référence ni démonstration.

31 Son attribution personnelle de la mazarinade Moreau 3541 à Scarron a été réfutée par H. Carrier (ms. 4862-5, f. 224v).

32 Il fait une tentative sur le n° 3207, ponctuée d’un point d’interrogation et sans argumentaire (ms. 4682-5, f. 110v). En revanche une autre, celle du n° 3413, est confirmée par H. Carrier qui cite le journal de Dubuisson-Aubenay (ms. 4682-5, f. 184v).

33 Ici, il constate que Moreau 24 est le même texte que le n° 643 mais sous un titre différent (ms. 4682-2 f. 26v) ; là, il reconnaît le titre d’un libelle de 1614 réutilisé en tête d’un texte complètement différent au n° 644 (ms. 4682-2, f. 32v) ; plus loin, il identifie dans le n° 2755 la reprise cette fois du texte d’une pièce de 1614 (Ms 4682-4, f. 185v).

34 Il voit à l’examen des textes que le n° 3815 de Moreau n’est pas une mazarinade à part entière mais simplement la dernière partie du n° 194 (Ms 4682-5, f. 327).

35 Les Triolets du prince de Condé sont « exécrables » (Moreau 3858, ms. 4682-5, f. 345v).

36 Histoire des troubles civils de la Fronde (1649-1653), tirés des mémoires du cardinal de Retz, Bar-le-Duc, C. Laguerre, 1878 (ms. 4682-3, f. 76v). L’Ormée à Bordeaux d’après le journal inédit de J. de Filhot, éd. A. Communay, Bordeaux, Féret & fils, 1887 : d’Artois indique la cote de l’exemplaire de la Mazarine, 8° 60657 (ms. 4682-4, f. 143v).

37 BM, M 15311 : Note historique sur Charles Antoine de Ferrières, marquis de Sauvebœuf…, éd. Paul Huet et Paul de Chabot, Abbeville, Lafosse, 1903.

38 À titre indicatif, le budget annuel de la bibliothèque est alors de 47 400 francs, dont 32 500 pour le personnel (BM, ms. 4592, f. 106).

39 BM, archives, 1890, n° 29.

40 Quand elle figurait dans le « Moreau » interfolié, la cote de l’exemplaire sélectionné pour la collection de référence était en général encadrée.

41 BM, 4° A 11548, 11556, 11569, 12817.

42 4° 17646 A-43bis et -44, 4° 19064-20.

43 4° A 11592-65, 4° A 12833.

44 4° 19064-32, 4° A 11587-22 et -23.

45 Le recueil coté 4° A 11515 est constitué de pièces « en prose ».

46 4° A 11569, 12809.

47 4° A 11556.

48 4° A 11305.

49 4° A 11515.

50 C’est le cas du Mascurat de Gabriel Naudé.

51 BM, archives, comptabilité 1891, n° 25. Voir aussi Julien Fléty, Dictionnaire des relieurs français ayant exercé de 1800 à nos jours, Paris, Technorama, 1988, p. 143.

52 La bibliothèque menait de front plusieurs projets de signalement : la fusion des catalogues en un seul qui passait par le catalogage du « nouveau fonds » ; le catalogue des incunables (par Paul Marais) après celui des manuscrits (par Auguste Molinier).

53 D’après les archives comptables, 225 pièces sont reliées en 1892, 157 en 1893, 203 et 400 en 1894, 343, 400 et 500 en 1895, 214 en 1896, 86 et 800 en 1897, 57 et 456 en 1898, 82 en 1899, 16 et 172 en 1900.

54 C’est sans doute là le résultat des très nombreux ajouts opérés par d’Artois pour des textes de cette forme, soit par ses repérages, soit par les apports de la bibliographie.

55 Les archives comptables de la Mazarine (1890, n° 38 ; 1891, n° 5) attestent des travaux de menuiserie effectués dans la « salle des sociétés savantes » au rez-de-chaussée ; d’autre part les rayonnages de la pièce qui semble correspondre portent de nos jours encore ici et là des vestiges de la signalétique des cotes des mazarinades reliées par Petitot.

56 Il mentionne pour Moreau 3937 trois éditions provinciales à Lyon, Bordeaux et Grenoble, mais la Mazarine n’en conserve aucun exemplaire (ms. 4682-5, f. 372v).

57 Dans les recueils examinés ou mis en place en dernier (4° 18824 A-27 à 62, 4° A 13901 à 13999), d’Artois, tout en faisant encore ôter des pièces, mentionne régulièrement la quasi absence de « nouveautés », les exemplaires doubles, triples, quadruples de mazarinades déjà bien repérées.

58 Archives nationales, F17 3489

59 BM, ms. 4592, f. 125. Les archives de la Mazarine (1890, n° 110) laissent penser que Neveux devait se rendre à Lyon – aussi ou surtout ? – au sujet d’incunables.

60 BM, Doc Vh 55, p. 138.

61 BM, 8° 57112, p. 448-497, 550 articles, dépouillés dans dix recueils, annoté en particulier p. 458 et 467-470.

62 BM, 8° 63306, p. 248-340. Les p. 248-250 référencent des pièces relatives au cardinal de Retz, la suite, les mazarinades stricto sensu. Une correction de la main d’Armand d’Artois figure p. 264.

63 Un cahier d’écolier où Armand d’Artois a effectué ce pointage sur les fonds de la bibliothèque de Lille m’a été récemment signalé par Victoire Pinchon, employée au classement et à l’inventaire des archives de la Mazarine (cotation en cours).

64 BM, archives, dossier « Mazarinades » à classer.

65 BM, archives, 1899, nos 80, 81, 94 à 97.

66 Le titre exact est : Bibliothèque Mazarine. Collection des mazarinades. liste des desiderata. Mars 1901. BM, archives, comptabilité, 1901, n° 15.

67 BM, archives, 1901, nos 45 et 46.

68 BM, archives, dossier « Mazarinades », classement en cours.

69 Archives nationales, F17 13516. Dans ce dossier ministériel relatif aux dons et échanges en faveur de la Mazarine, la partie traitant des échanges de mazarinades contient quelques autres coupures, telle celle de L’éclair du 31 janvier 1901, ou celle de La République du 5 février suivant. Une autre, tirée de L’écho de Paris du 24 juillet, est conservée dans le dossier coté F17 3489.

70 BM, archives, dossier « Mazarinades », à classer. Comme pour la bibliothèque de Lille, il consigna dans un cahier d’écolier le pointage de collections d’autres bibliothèques.

71 BM, archives, 1901, n° 71.

72 D’Artois rédige le courrier à l’abbé Bertrand, bibliothécaire du grand séminaire de Bordeaux (6 juillet 1901), sollicitant l’achat ou l’échange d’un recueil dont la Mazarine n’avait quasiment aucune pièce. BM, archives, dossier « Mazarinades ».

73 Le secrétaire général de l’académie nationale des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux, ayant lu un article dans L’écho de Paris, expédia deux « volumes » à la Mazarine le 14 janvier 1901 (BM, archives, 1901, n° 5).

74 BM, archives, dossier « Mazarinades ».

75 BM : M 15170 bis. Courrier du 13 août 1901 (ibidem).

76 Un marchand de « curiosités » de Clermont-Ferrand a joint à son courrier proposant ses mazarinades un encart du Moniteur du Puy-de-Dôme du 3 janvier 1901 (ibid.)

77 Ibid.

78 BM : M 15501 à 15520.

79 BM, archives, comptabilité, à l’année d’achat correspondante.

80 BM : ms. 4592, f. 117.

81 Les documents produits à l’occasion de la consultation des ouvrages sur place n’ont pas été archivés en tant que tels ; la première mention d’un prêt de mazarinades de la nouvelle collection, consenti sous la responsabilité d’Armand d’Artois, date de mars 1901 (BM, archives, registre des prêts, 1893-1902, lettre M).

82 D’une part, le prélèvement a fragilisé les recueils factices, car leur reliure est devenue trop ample pour les pièces restantes ; d’autre part, Armand d’Artois n’a pas systématiquement indiqué de façon claire dans le premier « Moreau » interfolié quel était l’exemplaire choisi pour la collection de référence.

83 Archives nationales, F17 3496, décembre 1906.

84 BM, archives, 1896, n° 112.