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Les dynamiques de publication et la diffusion des pamphlets autour de Marie de Médicis en exil (1631-1642)

Sophie NAWROCKI

Conservateur à la bibliothèque de l’Arsenal, auteur d’une thèse de doctorat intitulée « Les réseaux d’information et la circulation des nouvelles autour de l’exil de Marie de Médicis, 1631-1642 »

La littérature pamphlétaire de la Fronde est héritière d’une longue tradition de contestation polémique envers le gouvernement1. L’un des exemples se situe dans les années 1630, autour des exils de Marie de Médicis et de Gaston d’Orléans. Sous la plume de Mathieu de Morgues (1582-1670), du père Chanteloube2 et épisodiquement de Jacques Le Coigneux (1588-1651), la politique du cardinal de Richelieu est mise en cause depuis les Flandres où se sont réfugiés en 1631 la reine mère et son fils cadet, alors héritier du trône de France. La situation inédite d’une reine, mère du roi, poussée à quitter la France et morte à l’étranger après onze années d’exil, fait l’objet d’une joute oratoire dans la continuité de la littérature pamphlétaire des guerres de religion et des premiers conflits entre Marie de Médicis et son fils Louis XIII. Cependant, l’espace de la circulation de ces écrits se déplace puisque les pamphlets s’organisent à partir de 1630 en chaîne de réponses depuis l’étranger comme le note Roger Chartier3. Marie de Médicis séjourne dans les Flandres, les Provinces-Unies, en Angleterre puis à Cologne, au cœur de réseaux de communication où les informations circulent intensément. Mais elle cumule plusieurs difficultés. Elle ne peut publier en France parce qu’elle est à l’étranger et parce que la censure royale est plus efficace. Elle doit aussi lutter contre les discours et les pamphlets que fait écrire Richelieu ainsi qu’un nouveau type de publication, la Gazette de Renaudot.

Fruit d’une collaboration entre écrivains et artistes évoluant dans un milieu d’intellectuels dont l’horizon dépasse les frontières des pays, cette littérature tente bien sûr d’avoir un impact sur l’opinion en France et à la cour du roi afin d’amener celui-ci à renvoyer Richelieu et à opérer un changement de politique. Les libelles et les pamphlets sont ainsi le pendant littéraire d’une activité diplomatique convergente et s’adressent plus largement aux cours d’Europe susceptibles de se mobiliser autour du sort de Marie de Médicis. Analyser les stratégies de publication mises en œuvre, en mesurer la diffusion et l’écho qu’elles suscitent, peuvent donner des éléments de comparaison et des approches méthodologiques dans l’étude des mazarinades. Nous observerons les usages qui en sont faits par les hommes lors de leur réception au quotidien, par leur transmission orale ou manuscrite et les différents relais utilisés. Car de nombreux obstacles viennent limiter la diffusion et l’impact de ces écrits à l’intérieur du royaume de France. Richelieu avait instauré de solides organes de contrôle, associant à des réseaux personnels une structure administrative se mettant peu à peu en place.

LES DYNAMIQUES DE PUBLICATION DES PAMPHLETS

Pour justifier sa position, Marie de Médicis fait imprimer en exil de nombreuses pièces, dont les discours ont été analysés par plusieurs historiens et dont Donald A. Bailey a dressé une bibliographie précise4. Porteurs d’un discours forgé avec une intention précise, ces pamphlets participent pleinement à l’action politique qui elle-même façonne l’écriture5.

Les premières années d’exil sont décisives. Les pamphlets aident à légitimer la sortie de la reine mère hors de France puis l’organisation d’actions militaires pour renverser le cardinal. Leur publication devient ensuite aléatoire, reflet des difficultés pour Marie de Médicis de se concerter avec Gaston d’Orléans qui rentre en France en 1634. La déclaration de la guerre, ouverte en 1635 entre la France et l’Espagne donne à la reine mère une nouvelle occasion de faire entendre sa voix pour la défense de la paix, étayée par la publication sous forme de recueil des lettres échangées avec la cour pontificale, recueil augmenté de nouveaux pamphlets plaçant la reine mère comme protectrice de l’Europe. En 1637, la publication du recueil de Mathieu de Morgues intitulé Diverses pièces pour la défense de la reine, mère du roy très chrestien Louis XIII, faites et revues par messire Mathieu de Morgues, sieur de Saint Germain, est le symbole d’un tournant. Publié pour aider l’action de la reine qui a l’espoir de réunir une dernière fois autour d’elle les princes, il forme la première synthèse de l’ensemble des libelles publiés depuis 1631 et est orné dans son édition in-folio d’un frontispice la représentant porteuse d’une vérité qui doit être entendue de tous. Cependant, n’ayant pas réussi à organiser une grande ligue, Marie de Médicis quitte les Pays-Bas espagnols, laissant derrière elle ses meilleures plumes, Mathieu de Morgues et le père Chanteloube, qui n’écriront plus qu’à la mort du cardinal de Richelieu.

De nouveaux pamphlets sont alors publiés, analysés par Giuliano Ferretti, qui auront des prolongements jusque pendant la Fronde6. Mathieu de Morgues écrit alors une oraison funèbre de Marie de Médicis aux Pays-Bas devant les Espagnols et la publie en 1643 sous le titre Les deux faces cachées de la vie et de la mort de Marie de Médicis. Il travaille aussi, en 1643 et 1644, à la réédition revue et augmentée du recueil de 1637. Le recueil est publié sous la forme de plusieurs éditions à Anvers, Paris et Rouen7.

Dans le cadre plus large de l’étude d’Hélène Duccini qui couvre tout le premier XVIIe siècle8, l’importance de ces libelles est à nuancer. Face à la masse écrasante des publications durant la Fronde, l’année 1615 marque un pic, quand les années 1633-1640 montrent les plus fortes baisses. Les années 1631-1632 et 1641-1642 connaissent de légers rehauts. Malgré tout, ces écrits sont souvent présents dans les collections patrimoniales actuelles de France et d’Europe, signe du rôle qu’ils ont pu jouer dans un moment historique particulier, où le renforcement du pouvoir royal ne pouvait laisser la même place à la contestation que dans ses périodes de fragilité comme lors d’une minorité. Plusieurs éléments relatifs à leur publication en témoignent.

Les écrivains au service de la reine mère travaillent certes depuis l’étranger, mais ils peuvent utiliser le réseau réputé des imprimeurs libraires de Bruxelles et d’Anvers. Les pamphlets sont, pour beaucoup, imprimés chez les Plantin, en ont de temps en temps la marque officielle, dégageant ainsi l’impression d’une force morale indiscutée contrairement à des pamphlets anonymes, imprimés furtivement et à la hâte9. À leur côté, circulent des relations imprimées des cérémonies d’accueil données en l’honneur de Marie de Médicis lors de son entrée dans les villes qu’elle traverse, et, même si ces grands recueils in-folio illustrés ne s’adressent pas au même public10, il existe des liens étroits entre eux : le recueil de Mathieu de Morgues de 1637 est orné d’un frontispice réalisé par Rubens en collaboration avec les Moretus qui font réaliser d’autres frontispices pour l’entrée de la reine mère dans les Pays-Bas11. Écho des échanges culturels au sein de la République des lettres, ces publications unissent autour de sa défense écrivains, artistes, imprimeurs, et se complètent dans leur discours au sein même des œuvres12.

Nous n’avons malheureusement que peu d’archives sur les tirages de ces publications. Le recueil de Mathieu de Morgues de 1637 a été tiré à près de 1 000 exemplaires ce qui est considérable13. Dans les collections patrimoniales actuelles, ces pamphlets sont conservés à plus de huit exemplaires, chiffre important quand on sait que seulement 8 % des libelles de ce premier XVIIe siècle ont été conservés en plus de sept exemplaires14. On peut en déduire qu’ils ont sans doute bénéficié d’une large publication.

La diffusion de ces imprimés répond à plusieurs stratégies pour contrôler leur impact et soutenir une action politique. L’impression et la circulation de ces pièces sont très étroitement surveillées, mais elles ne sont pas forcément interdites, d’autant que leur interception n’est pas aisée. Le pouvoir royal est très attentif à leur circulation et aux bénéfices éventuels qu’il peut en tirer.

Lorsque Marie de Médicis quitte le royaume de France, elle écrit au roi une lettre datée du 21 juillet 1631 pour justifier son acte. Celle-ci est aussitôt imprimée à Paris, avec privilège du roi15, par Sébastien Cramoisy, l’un des plus puissants imprimeurs parisiens16. Cette pièce, qui pourrait être dangereuse pour le roi, vu sa teneur, est suivie de la réponse de Louis XIII et peut, au contraire, être utilisée à l’avantage du roi, car le ton emporté de la reine mère joue en sa défaveur :

La lettre de la reine mère ne peut que nous estre advantageuse en chaleur la blasmant et rien de ce costé ne peut plus faire mal dedans Paris et croi que pour ceste année il ni aura point de guerre17.

Autoriser la circulation de telles pièces, mais suivies d’autres qui en dénoncent la teneur et légitiment au contraire l’action royale est sans doute beaucoup plus efficace que les intercepter. En 1640, alors que des rumeurs courent que Mathieu de Morgues serait prêt à faire imprimer de nouveaux sermons, on propose au cardinal de Richelieu d’en autoriser l’impression avec celle de livres écrits des années auparavant en son honneur :

De Londres, le 23 février 1640. Le père Soufren a receu nouvelles que Saint Germain faisoit imprimer quatre sermons en l’honneur de la compagnie pour effacer la mémoire de son meschant livre contre les jésuites. Il seroit à propos de faire imprimer ce livre et autres livres qu’il a faict autrefois à la louange de Monseigneur le cardinal pour le faire enrager et faire cognoistre l’esprit la langue et la plume double de cest escrivain18.

L’ultime subterfuge est la publication de faux manifeste ou fausse lettre sous le nom d’une personne pour jouer en défaveur de la reine mère. En 1638, Théophraste Renaudot publie en effet dans la Gazette de France une déclaration qui explique les raisons du départ de Flandres de la reine mère. Il y développe des arguments inventés pour la discréditer et la déshonorer. Marie de Médicis fait preuve de promptitude en faisant écrire un démenti par Mathieu de Morgues. Elle le fait publier d’Angleterre à la fois en français et en hollandais pour toucher un plus large public19. D’autres exemples peuvent être cités, comme une fausse lettre imprimée en 1631 sous le nom du nonce de France qui met en cause Marie de Médicis. Plusieurs échanges ont lieu entre Rome, Paris et Bruxelles, le nonce de France rappelant « l’extrême licence de la presse française » pour se dédouaner20. Marie de Médicis doit démentir la lettre mais une fausse réponse est encore publiée à la suite21.

LA CIRCULATION DES PUBLICATIONS

Les pamphlets, une fois édités, sont en général placardés, lus, criés dans les lieux publics, jetés par paquets dans les rues et maisons, comme Hubert Carrier l’a décrit pour les mazarinades22. Nous savons que Marie de Médicis recourt à des hommes de main ou des serviteurs fidèles restés à Paris qui se chargent de les faire passer en France et de les y afficher. Claude Du Venant, sieur de Molinfroid, anciennement garde de la reine mère, est décapité pour avoir affiché des placards contre le roi23. Accompagné de Jean Gouallard, laquais du père Chanteloube, il avait :

apporté de Bruxelles en cette ville de Paris, publié, fait semer et jeter de nuict par les places publicques, rues et maisons d’icelle jusques au nombre de six a sept cens desd. placartz tendant a soublever les peuples et les exciter a prendre les armes contre l’auctorité du Roy et repos de son estat24.

Plusieurs membres de la famille de Mathieu de Morgues ont été aussi arrêtés pour avoir fait circuler ses écrits et jugés par la Chambre de l’Arsenal. Citons Pierre Le Tonnelier, chargé plus particulièrement de trouver un libraire assuré pour distribuer les livres imprimés à Anvers25.

La diffusion de ces pièces grâce au travail des colporteurs reste cependant tributaire de fortes inégalités géographiques et sociologiques26. Le goût pour l’histoire et l’actualité s’accentue dans un éventail plus large de catégories sociales et, pour illustrer ce propos, Henri-Jean Martin cite entre autres les œuvres de Mathieu de Morgues qu’on retrouve dans un grand nombre de bibliothèques de particuliers27. Beaucoup d’exemplaires conservés dans les collections françaises viennent aussi d’institutions religieuses qui en garnissaient les rayons de leur bibliothèque. Enfin, ces pamphlets ont été édités plusieurs fois, en forme de recueil, indice de leur succès, ils ont été résumés dans les gazettes, la Gazette de France mais aussi les gazettes néerlandaises. Jusqu’à Cologne, les dépêches d’espions signalent l’impression de placards, gazettes et autres feuilles volantes qui défendent la reine mère ou critiquent le pouvoir royal28. Autant de signes d’une diffusion, non seulement en France, mais aussi en Europe, qui s’insère dans un ensemble plus vaste d’écrits et de nouvelles.

En effet, ces pamphlets circulent sans doute le plus souvent sous forme manuscrite au sein d’une grande variété de documents. Ils sont lus, recopiés, parfois traduits dans une autre langue, envoyés à d’autres destinataires, puis recopiés à nouveau. Les diplomates sont à l’affût de ces pièces et ont l’habitude de joindre à leurs dépêches des copies manuscrites29. Chaque écrit, quels que soient sa forme (lettre, écrit littéraire) et son support (manuscrit, imprimé), peut être utilisé pour susciter une prise de conscience, un engagement politique, rendant plus flous les contours du pamphlet au sens strict du terme. Ainsi, les lettres échangées entre Marie de Médicis et le roi de France sont amenées à être lues en public, à circuler largement, ce que les nombreuses copies manuscrites que l’on trouve dans les correspondances des ambassadeurs attestent. Elles ont, dès leur écriture, vocation à être publiques et non secrètes.

Dans cette diffusion, Marie de Médicis est pleinement actrice. Elle informe officiellement les princes de ses différentes négociations pour expliquer et justifier ses actions. Elle leur donne elle-même « les pièces à conviction », c’est-à-dire, les différents imprimés, ainsi que des copies des lettres écrites au roi, au cardinal. Ses échanges avec le pape, par l’intermédiaire des nonces, montrent l’importance pour elle de faire circuler à Rome ces pamphlets en plus de ses lettres pour gagner à sa cause le souverain pontife, père de la Chrétienté, acteur privilégié de la réconciliation et de la paix30. Les lettres, privées ou officielles, les libelles et placards, imprimés ou manuscrits, participent donc d’un même processus de la circulation d’informations et de nouvelles, quel que soit le support, qui finalement compte peu.

Le cas de Mathieu de Morgues, à la marge des réseaux proprement politiques, nous donne la matière pour comprendre comment ces nouvelles circulent au quotidien autour de Marie de Médicis. Cet homme de plume, pleinement intégré dans les milieux intellectuels et artistiques flamands, suit avec vigilance tous les événements politiques importants qu’il peut rassembler. De 1632 à 1656, il entretient une correspondance suivie avec son ami, Philippe Chifflet, abbé de Balerne, conseiller auprès de l’infante puis du cardinal-infant31. Tous deux partagent une culture commune et une même conception politique du monde ; l’amitié profonde qui les unit garantit la sûreté des informations données32. L’abbé de Saint-Germain s’appuie sur les courriers ordinaires en provenance de différents pays, Allemagne, Italie, Angleterre. Il possède aussi quelques relais particuliers et a surtout la confiance de la reine mère et d’un certain nombre de ses serviteurs. Il collecte aussi les nouvelles des différents résidents de la reine mère dans les autres pays, ainsi que les envoyés des princes auprès d’elle. Toutes ces informations viennent enrichir les écrits de Mathieu de Morgues qui peut mettre sa plume acerbe au service de la reine mère en se fondant sur des évènements et sur une situation politique qu’il connaît parfaitement.

Ses idées et ses réflexions se nourrissent aussi de la correspondance qu’il tient avec Philippe Chifflet dont l’avis est très important. Ils s’échangent leurs brouillons, se relisent, commentent les divers écrits qui circulent.

Je croy que Monsieur Nardy vostre voisin fait imprimer la remonstrance a Monsieur. Je vous conjure de le voir pour faire corriger ce qui me regarde33.

Leur correspondance étroite avec l’imprimeur Moretus, lui-même très proche de Rubens, donne des résonances directes à la diffusion de ces nouvelles politiques et militaires dans le monde artistique et intellectuel. Balthazar Moretus en personne est souvent un relais dans l’échange des courriers, témoin de cette amitié qui s’inscrit à tous les niveaux de la chaîne de la circulation des nouvelles34. Pour ces hommes, nourrissant le culte de « l’humanitas » entendue comme la générosité à l’égard d’autrui, le devoir de communiquer est conçu comme l’aboutissement et l’âme même de l’activité intellectuelle. La lettre, véhicule de l’information scientifique par excellence, est l’outil premier pour faire aboutir des recherches individuelles35. Cette activité s’inscrit dans le quotidien même du lettré : aller aux nouvelles, les confronter, les analyser, les coucher par écrit, mais aussi les retransmettre, suivre les courriers, trouver des modalités de communication sûres, occupent la plus grande partie de ses journées de travail. Ainsi, la quête de l’information suppose l’accomplissement de deux tâches principales, suivre l’arrivée du courrier et aller aux nouvelles à la cour. Le courrier apporte en effet les lettres pour diverses personnes, ce qui est en soit une information qu’il faut connaître, et peut aussi porter des nouvelles oralement. La cour est ensuite le lieu de rencontre privilégié pour une plus large circulation des nouvelles. La complétude des nouvelles, la recherche de l’exhaustivité, mais aussi leur analyse prouvent la recherche de méthodes pour collecter, classer et organiser les connaissances, qui caractérise les milieux intellectuels de cette Europe en pleine mutation36.

Après la mort de Marie de Médicis, cette correspondance se poursuit. Mathieu de Morgues est rentré en France à Paris. Il écrit un pamphlet en 1650 pour la défense de Mazarin37, peut-être pour retrouver ses bénéfices38. Mazarin, prudent, a cherché à se l’attacher, restant cependant méfiant sur les bonnes dispositions de l’abbé et sondant la reine régente à ce propos lorsque l’occasion se présente39. Gabriel Naudé, qui fréquente Mathieu de Morgues, y est favorable40, mais ce dernier semble être resté en retrait. Les lettres que l’abbé continue d’envoyer à son ami de Flandres font part de sa grande désolation des conflits qui déchirent son royaume pendant la Fronde ; et c’est plein d’espoir qu’il évoque l’entrée dans Paris des princes et l’exil de Mazarin en février 1651 :

Je suis tellement en repos de ce costé-là que je ne vous demande ny recommande rien et n’escris ceste cy que pour me resjouir avec vous des bonnes dispositions que dieu produict en France pour la paix générale celuy qui l’empeschoit estant esloigné et ceux qui prenoient en pretexte pour la continuer estants sur le point d’estre mis en sureté ? et en volonté de se rendre solliciteurs d’un si grand bien41.

La fin des troubles dans son pays semble possible grâce à l’éloignement de Mazarin et le renouvellement du conseil :

Nostre reyne qui agit a present selon ses mouvemens a grande inclination a une réconciliation les gardes de paris sont levées et l’auteur des troubles hors d’esperence de retour. Toutes les portes luy estant fermées pour jamais. La personne trompée a cogneu ses artifices avec sa lacheté qui a ruiné l’authorité royale, et l’aversion que ses passions et interests luy ont donné pour la paix42.

La paix avec l’Espagne, contre laquelle se bat toujours la France depuis de longues années et que nos deux amis appellent de leurs vœux, peut aussi être envisagée :

Si nos mutins ont traicté quelque chose avec vos gens vous attendrez ce que nos troubles pourront produire a votre advantage mais si vostre deste du repos de la Chrestienté vous conseille, vous vous servirez de l’occasion pour conclure brusquement un traicté duquel on ne s’esloigneroit pas icy. L’intérest général des monarchies catholiques doivt estre considéré en premier, ce qui s’est passé en Angleterre nous doibt reconcilier : s’il ne le faict Dieu qui jusques a présent nous a frappez d’aveuglement veult changer tout le gouvernement de l’Europe s’il est résolu dans le ciel suivans cet ordre, en gémissant, pour tant d’années qui se perdront dans le changement de relligion qui suivra celuy des estats. Je vous confesse que ceste appréhension me tourmente plus que mes desplaisirs domestiques43.

Mathieu de Morgues et Philippe Chifflet partagent une même vision de l’équilibre de la Chrétienté que seule peut garantir l’union des deux royaumes catholiques, la France et l’Espagne. La révolution d’Angleterre, évoquée brièvement avec effroi dans cette lettre, ne la rend que plus urgente. Mais la paix s’éloigne inexorablement et l’abbé dresse un tableau très sombre de la France en 1652 :

Nos maux courent aux extremités qui les doibvent faire cesser ; estant certain que nous ne serons sages que lorsque nous ne pourrons plus estre fols. Nous n’avons point besoing d’ennemis estrangers pour estre chasties nous deschirons nos entrailles apres avoir arraché les cheveux à nos voisins. Les desgals que nos gens de guerre font au tour de paris sont espouvantables et rien ne touche ceux quy peuvent apporter du remède44.

LE CONTRÔLE DES IMPRIMÉS

Les pamphlets écrits contre le pouvoir royal sont très surveillés à l’époque, traduisant l’impact qu’ils peuvent avoir. En 1618, un règlement organise la censure royale autour d’un système structuré, effectif surtout à partir de 163045. La surveillance des publications diffusées depuis l’étranger s’insère dans un système plus large, s’étendant à la surveillance de la circulation des courriers et des personnes susceptibles de fomenter des complots. En France, le développement et la centralisation de l’administration postale donnent les moyens au roi et au cardinal de contrôler les correspondances suspectes sous Arnoul de Nouveau, surintendant des postes à partir de 1633, en étroite collaboration avec les services de police du Châtelet46. Le chevalier du guet y est une pièce maîtresse pour le maintien de l’ordre dans la ville et le contrôle des courriers. C’est un officier à la tête des archers à pied et à cheval préposés pour la sûreté publique, dont la charge est détenue pendant près d’un siècle par la famille Testu.

Dans les années 1630, le chevalier du guet surveille particulièrement les paquets venant ou allant à Bruxelles47 avec une attention particulière pour les correspondances des gens de Marie de Médicis et de Gaston d’Orléans avec leur famille ou amis restés en France, normalement interdites48. Il intercepte les imprimés suspects, ouvre les courriers et vérifie s’il n’y a pas des informations importantes pour l’État.

Je travaille tousjours le plus qu’il est possible pour descouvrir les choses qui peuvent concerner le service du roi et pour les choses qui peuvent concerner les imprimés qu’on fait à Bruxelles49.

C’est ainsi que la correspondance du père Chanteloube avec André Le Clercq, résident de l’infante à Paris, est interceptée, décryptée et analysée50. Le chevalier du guet est aussi amené à vérifier des renseignements donnés par des informateurs occasionnels, à mener des interrogatoires et à rendre des mémoires sur des complots découverts51. Il est en étroite relation avec le garde des sceaux, Bullion52, qui transmet ses rapports à Richelieu.

Sur l’advis de Monsieur de Dorat, je donne ordre au chevalier du guet d’arester un homme de Chanteloup comme il a faict. Je vous envoie son interrogatoire et la lettre dont il c’est trouvé chargé que vous me revoirez s’il vous plaist avec ledit interrogatoire53.

Ainsi, aux archives du ministère des Affaires étrangères, on trouve ces « journaux de lettres interceptées54 ». Ils se présentent souvent sous la même forme. Les destinataires, les adresses, les chiffres, sont mentionnés avec beaucoup de soin, tandis que le contenu des nouvelles est résumé. Selon les cas, le courrier est définitivement enlevé de la circulation ou au contraire soigneusement recacheté afin de ne pas éveiller les soupçons et pouvoir continuer la filature55.

L’une des difficultés pour le chevalier du guet réside dans la complexité des réseaux postaux favorisant la multiplicité des voies de circulation au bénéfice des exilés :

Il y en a entre autre une damoiselle Louvain femme d’un argentier de la royne qui en recoipt souvent et beaucoup pour distribuer ainsi que j’ay recogneu et mesme l’on dit qu’elle en recoipt de la royne par d’autre voy ce qui ce peult facillement quand ce ne seroit que par l’ordinaire d’Espagne qui passe icy duquel l’on ne peult voir les lettres, et mesmes il arriva hier et apporta grande quantité de ces livres des deux derniers qui ont esté faicts à Bruxelles lesquels j’ay entre les mains ; celui mesme qui les a receu me les ayant apporté56.

Afin de surveiller les publications dangereuses pour l’État, Testu cherche aussi ses propres informateurs. Il a notamment réussi à se concilier les bons services d’un imprimeur de Bruxelles qui l’avertit de toute publication suspecte. Il vérifie ensuite luimême les paquets pour juger du caractère subversif ou non des imprimés.

Je travaille tousjours le plus qu’il est possible pour descouvrir les choses qui peuvent concerner le service du roi et pour les choses qui peuvent concerner les imprimés qu’on fait à Bruxelles ; je me suis advisé de dire à cest imprimeur de ceste ville duquel je me sers il y a long temps qu’il tascheat s’il avoit quelque cognaissance d’un de son mestier à Bruxelles d’avoir quelque correspondance avec luy affin de pouvoir avoir advis par ce moyen là estre adverty s’il ce faisoit quelque chose de nouveau en ce pais là pour envoyé icy ce qu’il a fait de sorte qu’aujourd’hui il est arrivé un gros pacquet desdites livres qu’il m’a luy mesme apporté lequel j’ay ouvert est y ay trouvé grande quantité d’imprimés [… ] J’ay esté en mesme chez l’ordinaire de Flandres visiter les pacquets pour voir si je n’en trouverois pour d’autre mais je n’y en ay point trouvé, et continueray l’autre voyage57.

Grâce à ses intermédiaires, Testu est informé très tôt de la publication de l’ouvrage de Puget de La Serre concernant les entrées royales de Marie de Médicis en Flandres58. Il cherche alors à en découvrir l’auteur, l’imprimeur, les conditions de sa publication et de sa diffusion à tous les niveaux de la chaîne, ainsi que le rôle de la reine mère. Il apprend très vite que l’ouvrage n’est pas de Mathieu de Morgues et, si l’auteur lui est encore inconnu, il sait qui contacter pour avoir le renseignement. Il obtient un exemplaire fraîchement sorti des presses ; sa circulation est encore très limitée et en France, du moins, personne ne semble en avoir connaissance. L’auteur a reçu l’aval de la reine mère pour le diffuser car il lui a lu le livre et elle n’en a pas interdit la publication. Avant de continuer plus avant ses recherches pour juger de la dangerosité de la publication, le chevalier du guet en rend compte et attend les consignes nécessaires. Car, tout imprimé ou placard jugé suspect est envoyé à Bullion pour contrôle, tout en tenant informé le cardinal de Richelieu :

Il a esté jetté ce matin en ceste ville quelques placarts dont il m’en est tombé un entre les mains lequel j’ay à l’instant porté à monsieur Bullion qui en avoit aussi un semblable ; j’espère avoir quelque cognaissance de cela par le moyen de l’homme qui a conduit l’affaire de la dame de Villeray ; je luy ay désjà donné des pistoles59.

Pendant la fronde, le rôle du chevalier du guet pour maintenir l’ordre dans la ville de Paris est particulièrement crucial. Si nous n’avons pas trouvé de sources étoffées décrivant précisément les procédures de police, plusieurs documents prouvent cette fonction. C’est lui qui est, en général, chargé de l’arrestation des personnes impliquées dans les troubles ou complots. Il les fait enfermer à la Bastille ou les fait sortir de Paris60. Il joue sans doute aussi un rôle dans la surveillance de la circulation des libelles, même si les sources que nous avons trouvées jusqu’à présent mentionnent surtout le lieutenant civil.

Si les services du chevalier du guet semblent très efficaces, ils ne sont pas les seuls à contrôler ces imprimés. Dans le contexte de l’exil de Marie de Médicis, les pamphlets sont écrits de l’étranger ; ambassadeurs et résidents viennent donc compléter le dispositif de surveillance et envoient régulièrement les placards qu’ils trouvent importants. Eux-mêmes profitent des filières d’information et d’espionnage qu’ils ont mis en place, et ont leur propre contact parmi les imprimeurs61.

Parallèlement aux réseaux des diplomates, le cardinal de Richelieu instaure autour de Marie de Médicis des réseaux personnels lui permettant de suivre tout au long de son exil ses faits et gestes62. Ces espions, comme Jean Riolan (1580-1657), médecin de la reine mère, ont aussi une place essentielle dans le contrôle de ces écrits. Dans les dépêches conservées de ces échanges secrets, de nombreux libelles sont signalés63. Le père Carré64, qui envoie ensuite au cardinal ces lettres et ces imprimés reçus du médecin, les décrit, parfois les retranscrit ou traduit65, identifie leur auteur lorsque c’est possible et signale ceux qu’il juge les plus dangereux :

Je viens de recevoir ce livre que l’homme de Flandres m’a faict rendre enveloppé dans ce papier suscript de sa main que j’ay ouvert ne scachant ce que c’estoit incontinent que j’ay veu ceste planche j’ay sceu estre obligé de l’envoyer à votre éminence afin qu’elle remédie selon la prudence ordinaire à ce quy en pourroit arriver. Je ne l’ay voulu lire parce que son autheur n’est de vos serviteurs. Voicy ce que dict l’homme de Londres. L’ayant parcouru à la haste je treuve que c’est la composition d’un malitieux moyne prédicateur ennemy des françois et partisan de la maison d’Autriche, comme il en parle en ses termes et je devine que c’est le père Courvoisier minime quy l’a faict. Je cognois son style et sa facon d’escrire et l’affection qu’il tesmoigne en ses discours et prédications à la maison d’Autriche. C’est un très pernicieux livre quy menace le roy d’assassinat comme le feu son père, pour avoir volu attaquer la maison d’Autriche. Vous y trouverez une figure en taille douce ou il représente au roy de Suède estendu mort sur son lict de parade pour avoir volu ruiner la maison d’Autriche. Il y a des injures atroces contre le cardinal. Ledict père Courvoisier est un des espions et donneurs d’advis au président Rose avec Saint Germain son grand amy. Il est bourguignon, il a esté confesseur de Monsieur de Bellegarde et a esté longtemps demeurant et préchant à Dijon. Il pourra semer de ses livres dans le duché et dans Paris par l’entremise des minimes, c’est à quoy il faut prendre garde ce moine endiablé est ennemy juré du roy et du cardinal, ce que j’ay adjouté ce ne sont que certaines notes sur quelques lieux du livret que je vous envoiray au prochain voyage66.

Ces mêmes espions se font aussi parfois écrivains, les réponses offensives à des pamphlets dont on ne peut contrôler parfaitement la circulation ayant un impact tout aussi utile. Ainsi, Riolan écrit une satire de la vie de Mathieu de Morgues que le père Carré trouve fort à propos de publier :

J’advertis Votre Eminence que Mr Poré gendre de Mr Riolan m’a rendu l’original et la copie bien escrite de sa main de la vie du sieur de Morgues dict de Saint Germain composée fort en long par Mr Riolan. C’est une belle pièce, elle pourra servir à quelque bonne plume67.

Inséré dans les milieux religieux, intellectuels et curiaux, capable de reconnaître certaines plumes, sensible aux diverses voies de circulation des pamphlets, le père Carré joue donc un rôle complémentaire à celui du chevalier du guet.

La publication et la diffusion d’un libelle répond à une stratégie de défense d’une position politique qui doit tenir compte des conditions matérielles de sa circulation et des obstacles qui s’y opposent. Les quelques exemples cités rappellent l’imbrication des supports sous lesquels circule l’information politique, imprimé, manuscrit, oral, leurs nombreuses interférences et leurs différents relais dans le processus de la circulation des nouvelles à cette époque. Dix ans à peine avant la Fronde, les libelles publiés pendant l’exil de Marie de Médicis offrent un champ d’étude pour comprendre les conditions de leur publication et leurs modalités de diffusion et d’interception au quotidien. Les ressorts sont assez semblables pour les mazarinades mais le contexte d’émeutes intensifie alors le nombre de publications, leurs modes de diffusion et, pour les autorités, la difficulté à les contrôler. Citons l’été 1650, où la situation est très tendue à Paris, alors que les troupes royales tentent de venir à bout d’insurrections en province. Condé, Conti et Longueville ont été emprisonnés à Vincennes au début de l’année et de nombreuses personnes sont enfermées à la Bastille par le chevalier du guet. Le travail des services de police se complexifie. Il faut arracher le jour les pamphlets placardés la nuit, il faut surveiller les correspondances des princes et des parlementaires frondeurs, alors même que celles des prisonniers de la Bastille et de Vincennes sont difficiles à intercepter, enfin, l’application des sentences rendues à l’issue des procès est problématique. Le peuple se mobilise parfois pour sauver des imprimeurs et des colporteurs amenés à la potence :

L’impunité est si grande que j’ay peur que l’exécution de leur jugement ne se trouve bien difficile. Un nommé Morlot, qui avoit esté condamné pour avoir imprimé un libelle et rechapté du gibet par la violence du peuple a esté repris et remis aux prisons du Chastellet… Il y a plus de douze tant imprimeurs que colporteurs, qui sont en prisons au Chastellet. On n’ose pas procéder contre eux, ny les appliquer à la question pour leur faire déclarer les autheurs des libelles qu’ils connoissent fort bien, et ces prisonniers ne voudroient pas estre en liberté pour ce qu’on leur porte tous les jours et des vivres et de l’argent pour se nourrir dans les prisons mieux qu’il ne seroient dans leurs logis68.

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1 Le Pamphlet en France au XVIe siècle, Cahiers V.-L. Saulnier, no 1, Paris, 1983. Christian Jouhaud. Mazarinades : la Fronde des mots, Paris, Aubier, 1985. Hubert Carrier, Les Mazarinades (16431653) : contribution à l’étude des idées, Paris, éd. de La Sorbonne, 1986. Denis Pallier, « Les réponses catholiques », dans Histoire de l’édition française, éd. Roger Chartier et Henri-Jean Martin, Paris, Fayard, Cercle de la Librairie, 1989, p. 327-347. Jeffrey K. Sawyer, Printed Poison. Pamphlet Propaganda, Faction Politics, and the Public Sphere in Early Seventeenth-Century France, Berkeley, Los Angeles, Oxford, University of California press, 1990. Hélène Duccini, Concini : grandeur et misère du favori de Marie de Médicis, Paris, A. Michel, 1991. Sharon Kettering, Power and reputation at the court of Louis XIII : the career of Charles d’Albert, duc de Luynes, Manchester, Manchester University Press, 2008.

2 Jacques d’Apchon, seigneur de Chanteloube (?-1641).

3 Roger Chartier, op. cit., p. 410.

4 Donald A. Bailey, « Les pamphlets des associés polémistes de Mathieu de Morgues : une bibliographie des fonds des bibliothèques de Paris et des États-Unis », Revue française d’histoire du livre, Paris, 1980, p. 229-271. Claude Perroud, « Essai sur la vie et les œuvres de Mathieu de Morgues abbé de Saint Germain (1582-1670) », Annales de la Société d’agriculture, sciences, arts et commerce du Puy, Le Puy, 1826, p. 205-383. Caroline Maillet-rao, La pensée politique des dévots. Mathieu de Morgues et Michel de Marillac : une opposition au ministériat du cardinal de Richelieu, Paris, H. Champion, 2015.

5 « La littérature pamphlétaire à l’âge classique », XVIIIe siècle, Paris, 1997, no 195. Voir notamment les articles de Christian Jouhaud, « Les libelles en France dans le premier XVIIe siècle : lecteurs, auteurs, commanditaires, historiens », p. 203-218, de Claire Gheeraert-Grafeuille. « Satire et diffusion des idées dans la littérature pamphlétaire à l’aube de la guerre civile anglaise, 1640-1642 », p. 281-296, et d’Hubert Carrier, « Le pamphlet et la vulgarisation de la culture au xviie siècle », p. 297-304. Id., Le labyrinthe de l’État : essai sur le débat politique en France au temps de la Fronde, 1648-1653, Paris, H. Champion, 2004.

6 Giuliano Ferretti, « Élites et peuple à Paris, 1642-1650. La naissance de l’historiographie sur Richelieu », Nouvelles de la République des Lettres, 1997, p. 103-130.

7 On trouve une édition in-8o, sans nom de lieu ni d’imprimeur en 1643, une autre plus complète, in-8o imprimée à Anvers en 1643, et ornée du frontispice de 1637 (mais inversé), enfin, un gros in-folio, recueil en deux parties qui rassemble l’ensemble des pièces défendant la reine mère, publié à Anvers en 1644 et orné pour certains exemplaires du même frontispice de 1637 inversé.

8 Hélène Duccini, « Regard sur la littérature pamphlétaire en France au XVIIe s. », Revue historique, 1978, p. 313-340.

9 Maximin Deloche, Autour de la plume du cardinal de Richelieu, Paris, Société française d’imprimerie et de librairie, 1920, p. 487-488.

10 Pascal Lardellier, Les miroirs du paon : rites et rhétoriques politiques dans la France de l’Ancien régime, Paris, H. Champion, 2003, p. 190.

11 Mathieu de Morgues, Diverses pièces pour la défense de la Reine, mère du Roi Très Chrétien Louis XIII, s. l. s. n. s. d. Pierre-Paul Rubens, Correspondance et documents épistolaires concernant sa vie et ses œuvres, éd. Max ROOSES et Charles Ruelens, Anvers, 1887-1909, p. 190-191. La correspondance entre Moretus, Mathieu de Morgues, Du Verdier et Cornelis Galle, relative au frontispice a été publié dans : Corpus Rubenianum 21, Book illustrations and title-pages, éd. J. Richard Judson, Carl Van De Velde et Ludwig Burchard, Bruxelles, Arcade press, 1978, II, p. 387-389, 410-412, 422-425.

12 Sophie Nawrocki, « J’appelleray toute la Chrétienté au secours de mon innocence : l’action internationale de Marie de Médicis en exil, 1631-1642 », dans L’Europe de Marie de Médicis, colloque international, Bordeaux, 8-9 novembre 2012, dir. Géraud Poumarède, à paraître.

13 Il semble que Marie de Médicis acheta presque tous les exemplaires pour 12 000 guilders : Corpus Rubenianum 21, op. cit., p. 310-313 et appendices.

14 C’est l’un des critères donnés par H. Duccini pour mesurer la diffusion d’un imprimé à cette époque, op. cit., p. 67.

15 Lettre de la Reyne mère au Roy. Avec la response de Sa Majesté, Paris, Sébastien Cramoisy, 1631.

16 Henri-Jean Martin, Livre, pouvoirs et société à Paris, au XVIIe siècle : 1598-1701, Genève, Droz, 1969, p. 339.

17 MAE, MD 799, f. 62, lettre de Chasteauneuf au roi, 20 juillet 1631.

18 MAE, MD 835, f. 54-55, lettre du père Carré à Richelieu, février 1640.

19 Déclaration de la Reyne Mère du Roy tres-Crestien, contenant les raisons de sa sortie des pais-bas, Et le désaveu d’un Manifeste qui cour soubs son Nom, sur le mesme Subject, Londres, George Thompson, 1638.

20 Fabio Lagonissa, Correspondance du nonce Fabio de Lagonissa, archevêque de Conza (1627-1634), éd. Lucienne Van Meerbeeck, Bruxelles ; Rome, 1966 (Analecta Vaticano-Belgica, deuxième série, Nonciature de Flandre, XI), p. 307, lettre de Lagonissa à Barberini, Bruxelles ; Rome, 22 novembre 1631. L’expression « extrême licence de la presse française » est la traduction donnée d’après l’original conservé au Vatican par Lucienne Van Meerbeeck.

21 Ibid., p. 311, lettre de Lagonissa à Barberini, Bruxelles, 6 décembre 1631, p. 311, lettre de Barberini à Lagonissa, Rome, 13 décembre 1631.

22 Hubert Carrier, op. cit., p. 172-186.

23 Gazette de France, Paris, Bureau d’adresse, 9 août 1632, p. 30.

24 Hélène Fernandez-Lacote, op. cit., p. 255.

25 Ibid., p. 258-260. Jean de Morgues, son frère, Marguerite Buyer, sa belle-sœur, Marie d’Estournel, dame de Gravelle, Pierre Le Tonnelier, prêtre de la paroisse Saint-André-Des-Arts.

26 Laurence Fontaine, Histoire du colportage en Europe, xve-xixe siècle, Paris, A. Michel, 1993, p. 229-252, Hubert Carrier, op. cit., p. 161-171.

27 Henri-Jean Martin, op. cit., p. 510-511.

28 MAE, CP, Cologne, tome 1, f. 221, lettre du père Carré à Richelieu, 24 juin 1642.

29 Florence, Archivio di Stato, Fondo Mediceo del Principato, Francia no 4644, f. 44, 12 janvier 1632. En 1635, l’ambassadeur de Venise à La Haye signale un pamphlet écrit pour défendre la reine mère (Venise, Archivio di Stato, Signori Stati, Olanda, Filza 32, no 88, Francesco Michiel, La Haye, 28 juin 1635).

30 Fabio Lagonissa, op. cit., p. 364, lettre de Lagonissa à Barberini, Bruxelles, 17 août 1632 : « Le nonce lui transmet un livre contenant l’exposé des raisons pour lesquelles la Reine mère a quitté la France. L’ouvrage lui a été confié de la part de la Reine par M. de Saint-Germain. Il l’envoie par Ferrare, en même temps que les modèles de moulins demandés pour le cardinal Pallotto. » BM de Besançon, ms. Chifflet 112, lettre de Mathieu de Morgues à Philippe Chifflet, no 35, d’Anvers, 18 août 1635 : « Votre gazette [celle de Philippe Chifflet] est admirable. Sa Majesté la leue avec plaisir et a commendé qu’on l’envoya à Rome où vous en debvez faire passer quelques coppies. Je [Mathieu de Morgues] vous fourniray deux articles excellents pour la suivante. »

31 Philippe Chifflet (1597-1663 ?), abbé de Balerne, prieur de Bellefontaine, doyen des chapelains de la cour de Bruxelles. Mathieu de Morgues lui écrit lorsque Marie de Médicis va à Gand en 1633 et à Anvers en 1635 et 1636, puis lorsqu’il réside à Harlebeck après le départ de la reine mère des Pays-Bas espagnols en 1638, enfin lorsqu’il rentre en France en 1643. BM de Besançon, ms. Chifflet 112-114. Quelques lettres ont été publiées dans : Auguste Castan et Paul Henrard, Mathieu de Morgues et Philippe Chifflet, Bruxelles, impr. de F. Hayez, 1885.

32 L’amitié est l’un des ressorts fondamentaux des liens qui unissent les érudits de la République des lettres. Robert Mandrou, Histoire de la pensée européenne : des humanistes aux hommes de science, Paris, Le Seuil, 1973, p. 155.

33 BM de Besançon, ms. Chifflet 112, lettre no 36, d’Anvers, 22 août 1635.

34 Ibid., lettre no 75, d’Anvers, 29 mai 1636 et lettre no 83, d’Harlebeck, 26 juin 1638.

35 Hans Bots et Françoise Waquet, La République des lettres, Paris, Belin, 1997, p. 14-18, 117 et 126.

36 Robert Mandrou, op. cit., p. 151-155.

37 Moreau 594, Bons advis sur plusieurs mauvais advis, s. l. s. n. s. d., Bibl. de l’Arsenal 8o H 7795 (23) et 8o H 7683 (30). Gabriel Naudé, Naudaeana et Patiniana, Paris, F. et P. Delaulne, 1701, p. 107.

38 Claude Perroud, op. cit., p. 369.

39 MAE, MD 871, f. 295 : lettre de Le Tellier à Mazarin, 9 août 1650.

40 Gabriel Naudé, La correspondance entre Gabriel Naudé et le cardinal Mazarin, éd. Kathryn Willis Wolfe et Phillip J. Wolfe, Paris, Seattle, Tübingen, 1991, lettres de Naudé à Mazarin, p. 42, 15 juillet 1651 et p. 54, 15 août 1651, p. 52, lettre de Mazarin à Naudé, 25 juillet 1651.

41 BM de Besançon, ms. Chifflet 114, lettre no 628 (Paris, 2 février 1651).

42 Ibid., lettre no 631 (Paris, 1er avril 1651). Voir aussi les lettres 630 et 632 (mars 1651).

43 Ibid., lettre n° 648 (Paris, 23 septembre 1651).

44 Ibid., lettre n° 52 (Paris, 2 mai 1652). Voir aussi lettre n° 650 (20 janvier 1652).

45 Henri-Jean Martin, op. cit., p. 440 et suivantes. Richelieu tente ainsi de contrôler les publications dangereuses. William Farr Church, Richelieu and Reason of State, Princeton, Princeton University Press, 1972, John H. Elliot, Richelieu et Olivares, Paris, Presses universitaires de France, 1991. Bernard Barbiche, « Le régime de l’édition » dans Histoire de l’édition française, op. cit., p. 36777.

46 Eugène Vaillé, Le cabinet noir, Paris, Presses universitaires de France, 1950, p. 4668.

47 BnF, mss italiens 1803, no 435, p. 40, lettre de Contarini, Paris, 16 mars 1632. « L’istesso Mons. si dice, che habbi fatto arestar l’ordine ultimo, che andarà in Fiandra, et levatoli tutte le lettere : alcuni però dubitano, che sia un colpo doppio della corte, laquale habbi essa fatto levare le lettere per vedere le corripondenze, che possero esser con Mons. et suoi seguaci. »

48 MAE, MD 802, f. 47, lettre de Testu, 23 février 1632 : « Quasi par touts les ordinaires de Bruxelles tous ceux qui sont auprès de la royne escrivent à leurs parans et amis ainsi que j’ay recogneu par les pacquets que j’ay veu dont j’en ay ouvert beaucoup. » Laurent Testu, chevalier du guet et gouverneur de la Bastille, époux de Guillemette Colin avec qui il a deux fils : Louis, sieur de Villiers-Adam et de Frouville, chevalier du guet en 1658 et Charles, lieutenant capitaine du guet puis chevalier du guet de 1637 à 1680.

49 MAE, MD 802, f. 19-20, lettre de Testu, 17 janvier 1632.

50 MAE, CP, Pays-Bas espagnols 9, f. 357-472.

51 MAE, MD 808, f. 251, Mémoire du chevalier du guet sur la dénonciation du sieur de La Rivière, 1633 et no 813, f. 107-108, Mémoire donné par le chevalier du guet sur les desseins des sieurs Montpensier, Coudray et Vieuxpont, sur la personne du roy, 4 mars 1635.

52 Claude Bullion (1569-1640), surintendant des finances.

53 MAE, MD 802, f. 232, lettre du garde des sceaux au cardinal, novembre 1632.

54 MAE, CP, Espagne, no 18, f. 208, sur la correspondance du comte de Maure, représentant à Madrid de Marie de Médicis, qui fait l’objet d’une surveillance particulière.

55 MAE, CP, Pays-Bas espagnols 9, f. 260-261, lettre de Bruxelles, 22 mai 1632.

56 MAE, MD 802, f. 47, lettre de Testu à Richelieu, 23 février 1632 : « Il y a aussi une femme du sieur Briçonet maistre d’hostel de la royne qui escrit souvent en ceste ville et mesme je vous en envoye une de ces lettres il y a quelques temps Monseigneur. »

57 Ibid., f. 19-20, lettre de Testu, 17 janvier 1632.

58 Ibid., f. 21, lettre de Testu, 20 janvier 1632.

59 MAE, MD 802, f. 239, lettre de Testu, 24 juin 1632. Voir aussi les lettres de Testu du 2 avril 1632, f. 84, et du 2 juillet 1632, f. 253.

60 MAE, MD 871, f. 80, copie d’une lettre de Testu : « Ce jourd’huy dixseptième de mai 1650, j’ay commandé au sieur de Fontrailles de la part du Roy et de la Royne Régente de sortir de Paris dans vingtquatre heures Ainsy qui me fut ordonné hier au soir par leurs majestés et de s’en aller en Guyenne faict ce dixseptième may 1650, signé Testu, chevalier du guet. » Nous avons ainsi trouvé diverses sources concernant l’arrestation des enfants du duc de Bouillon, des domestiques du cardinal de Retz, des vagabonds et gens de guerre ou l’arrestation de Bertault et Duchesne condamnés pour troubles publics et conspiration avec les ennemis du roi en septembre 1653.

61 MAE, CP, Pays-Bas espagnols 9, f. 82, lettre de Berruyer (résident du roi de France à Bruxelles de juillet 1631 à décembre 1633), de Bruxelles, 30 août 1631 : « J’avois fait quelque instance vers Son Altesse pour empescher l’impression de ceste remonstrance que j’envoie à Monsieur Bouthillier, dont j’avois en advis par le libraire [… ], mais jugeoit qu’on la feroit imprimer ailleurs et que c’estoit la faire désirer davantage je n’en ay parlé, elle sera achevée lundy ou mardy restant encores trois ou quatre feuilles que j’envoyeray aussitost. »

62 Sophie Nawrocki, « Une reine en exil : diplomatie et réseaux d’information autour de Marie de Médicis », Revue d’Histoire diplomatique, 2008, no 3, p. 243-266.

63 MAE, MD 836, f. 124, lettre du père Carré à Richelieu, 16 octobre 1640 : « Voicy sa seconde lettre par laquelle il lui dit qu’il revient à Paris ; est chargé de quantité de mauvais livres composés contre le roy et Richelieu ; a aussi des écrits de Saint Germain. »

64 Jean-Baptiste Carré (1593-1653).

65 MAE, MD 835, f. 54-55, lettre du père Carré à Richelieu, février 1640.

66 Ibid., f. 264-265, lettre du père Carré à Richelieu, 11 juillet 1640.

67 Ibid., f. 238-239, lettre du père Carré à Richelieu, juin 1640.

68 MAE, MD 871, f. 382, lettre de Le Tellier à Mazarin, 21 août 1650. Claude Morlot (1579 ?-165. ?), imprimeur de nombreuses mazarinades, avait été arrêté le 17 juillet 1649 et condamné à être pendu, mais il avait été libéré par des émeutiers.