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Mensonge et tromperie dans les mazarinades

Patrick REBOLLAR

Professeur à l’Université Nanzan (Nagoya, Japon)

Toute forme de gouvernement produit et revendique de la vérité et du mensonge. Et chacune des instances et décisions du pouvoir en contient. Pour l’époque moderne, Nicolas Machiavel exprime clairement les ressources qu’apporte aux dirigeants une conception pragmatique du vrai et du faux en politique1. Aujourd’hui encore, à tous les niveaux de la société, on juge ou méjuge de la vérité, de son apparence ou de son ostentation ; on y prétend pour soi et on la dénie à l’autre, qui est accusé de tromperie.

L’augmentation du nombre des acteurs prenant part à la vie politique et l’acquisition d’une certaine liberté d’expression, puis de diffusion de cette expression, caractérisent les sociétés européennes qui, après le Moyen Âge, et particulièrement au moment de la Fronde en France, s’affranchissent en partie de la tutelle religieuse, se dirigent vers une certaine forme de démocratie (élections de représentants, décisions parlementaires, tolérance de contre-pouvoirs, etc.) et voient se multiplier, dans le tumulte des événements, toutes sortes de discours sur le pouvoir et sur ceux qui l’exercent – ou devraient l’exercer ou n’en seraient pas dignes, etc. – en relation avec la vérité et le mensonge. Un rapide regard sur n’importe quel recueil de mazarinades permet ainsi de remarquer l’insistance sur ce qui est – ou serait – « véritable » et la dénonciation de ce qui ne le serait pas.

Dans les commentaires ou dans les recherches, de Gabriel Naudé à Christian Jouhaud, en passant par Célestin Moreau et Hubert Carrier2, chacun a traité de certains mensonges, apporté des preuves ou essayé d’en démonter le fonctionnement. Comme Hubert Carrier, nous nous demandons « comment mesurer le degré de sincérité de pamphlétaires dont les mobiles sont si divers3 ? »

À partir de la Bibliographie des Mazarinades et du corpus en ligne du Projet Mazarinades, nous étudierons, dans un but d’abord méthodologique, le discours de vérité dans les titres des pièces puis la présence des mots « tromperie » et « mensonge » dans les textes. L’accès aux textes et à leur compréhension dépendent en effet des choix méthodologiques et épistémologiques effectués par le chercheur, et qui sont conditionnés par les outils informatiques à sa disposition dans ce qui est un nouveau champ de recherche – les mazarinades – au sein d’un espace historiographique déjà défini (le XVIIe siècle) et au croisement de plusieurs disciplines (histoire, littérature, medias et communication imprimée, etc.).

LE VÉRITABLE : DE LA REVENDICATION À L’ABUS

Pendant la Fronde, des titres de nouveaux libelles entraient tous les jours en concurrence, si l’on peut dire. Des mots-clés comme « burlesque », « arrêt » ou « relation », ou « véritable », des noms de personnalités ou d’institutions devaient attirer ou détourner les potentiels lecteurs selon les événements en cours et les centres d’intérêt.

Dans la Bibliographie des Mazarinades, nous avons relevé tous les titres contenant des mots appartenant, d’une part, au domaine sémantique de la vérité, comme « exact », « sincère », mais aussi « miroir » ou « réfutation », et d’autre part, ceux du domaine du mensonge, utilisant « calomnie », « diffamation » ou « trahison », etc.

Dans la liste présentée ci-dessous4, chaque terme est suivi du nombre de titres relevés puis des numéros des pièces dans la Bibliographie de Moreau. Les termes ayant été relevés au fur et à mesure (et non sélectionnés a priori), leur diversité et leur nombre est déjà l’un des résultats de l’enquête. Quinze d’entre eux se situent du côté positif de l’axe vérité-mensonge, tandis que dix-sept sont du côté négatif. Mais cette dichotomie axiale a peu d’intérêt du fait qu’une négation peut facilement inverser le sens d’un terme, et surtout parce que l’objectif discursif est toujours du côté de la vérité – une vérité sans doute plus souvent prétendue que démontrée.

Au total, 654 occurrences des mots recherchés ont été relevées. Comme un titre sur dix environ contient deux ou trois de ces termes, ce sont en fait quelque 590 pièces (654 moins 10 %) qui s’affichent ostensiblement sur l’axe discursif vrai-faux, soit une mazarinade sur sept5. Dans ce sous-ensemble, une large majorité des titres, environ 440, recourt aux termes positifs de cette liste et prétend donc à la vérité. Le quart restant n’use d’ailleurs de mots relatifs à la tromperie et au mensonge que pour les dénoncer. On pourrait montrer que, sans que ce soit affiché dans les titres, un bien plus grand nombre de mazarinades vise à crier ou à maquiller des vérités. Mais, équipés de ces termes explicites, les titres deviennent plus accrocheurs, l’effet slogan en est amplifié et le pamphlet a plus de chances d’être lu et d’influencer des lecteurs, qu’ils soient bourgeois, robins, meneurs de tous bords ou simples gens des rues.

Liste des titres de mazarinades contenant les mots du champ vérité-mensonge :

Aveugle (ment) (10) : 464, 465, 466, 467, 468, 469, 470, 471, 1112, 2608.
Calomnie(s), etc. (19) : 108, 109, 119, 192, 226, 479, 599, 618, 772, 990, 1025, 1973, 2083, 2373, 3392, 3399, 3429, 3666, 3965.
Désabus (é), etc. (5) : 806, 1410, 1582, 2699, 3654.
Désaveu (2) : 1053, 2074.
Diffama (tion)/(toire)(s), etc. (9) : 109, 189, 504, 673, 675, 2225, 2446, 2760, 3060.
(Qui) dit tout (5) : 611, 612, 856, 1660, 2866.
Erreur, erroné(e) (4) : 1656, 2677, 2752, 3389.
Exact(e)(ment) (7) : 1313, 1703, 2868, 2996, 3634, 3711, 3747.
Fidèle(s)(ment) 6 (21) : 166, 1035, 1113, 1241, 1411, 1391, 1665, 1831, 1879, 2388, 2481, 2848, 2888, 2996, 3170, 3563, 3625, 3628, 3634, 3771, 4011.
Faux (fausse) (21) : 1894, 3424, 3592, 3668, 3801, 3873, 1375, 3392, 1451, 4068, 789, 1374, 695, 1988, 2500, 2749, 2759, 3039, 3262, 3567, 3786.
Fourbe (rie) (13) : 460, 763, 866, 1371, 1405, 1406, 1501, 1519, 1731, 2259, 2925, 3554, 3742.
Illusion (1) : 1676
Impost (-eur)(-ure)(s) (11) : 101, 128, 491, 951, 2574, 3391, 3399, 3404, 3554, 3873, 3986.
Miroir (9) : 1511, 2477, 2478, 2479, 2480, 2481, 2482, 2498, 3562.
828, 830, 1009, 1060, 1108, 1127, 1152, 1153, 1166, 1289, 1304, 1338, 1360, 1397, 1399, 1408, 1410, 1491, 1613, 1644, 1648, 1651, 1652, 1653, 1711, 1712, 1764, 1797, 1828, 1832, 1876, 1898, 2071, 2186, 2210, 2213, 2227, 2241, 2256, 2257, 2258, 2259, 2260, 2282, 2302, 2357, 2372, 2382, 2386, 2404, 2424, 2501, 2513, 2554, 2574, 2599, 2652, 2653, 2680, 2735, 2829, 2886, 2908, 2967, 2997, 2999, 3000, 3001, 3002, 3003, 3004, 3005, 3006, 3007, 3008, 3009, 3010, 3011, 3012, 3013, 3014, 3015, 3016, 3017, 3018, 3019, 3020, 3021, 3022, 3023, 3024, 3025, 3026, 3027, 3028, 3029, 3030, 3031, 3032, 3039, 3058, 3069, 3094, 3174, 3177, 3178, 3179, 3180, 3181, 3182, 3183, 3184, 3185, 3186, 3187, 3188, 3189, 3190, 3191, 3192, 3193, 3194, 3195, 3196, 3197, 3198, 3199, 3200, 3201, 3202, 3203, 3204, 3205, 3206, 3207, 3208, 3209, 3210, 3211, 3212, 3213, 3214, 3215, 3216, 3217, 3218, 3219, 3220, 3221, 3222, 3223, 3224, 3225, 3226, 3227, 3228, 3229, 3230, 3231, 3232, 3233, 3234, 3235, 3236, 3237, 3238, 3239, 3240, 3241, 3242, 3243, 3244, 3245, 3246, 3247, 3248, 3249, 3250, 3251, 3252, 3253, 3254, 3255, 3256, 3257, 3258, 3259, 3260, 3261, 3262, 3263, 3344,
Masque/démasqué (9) : 2419, 3878, 3760, 1375, 1493, 1779, 3887, 3990, 4004.
Mensonge(s) (1) : 1304.
Menteur (1) : 3926.
Prétendu(e)(s) (28) : 153, 325, 375, 669, 1375, 1702, 1941, 2415, 2570, 2582, 2701, 2966, 3039, 3085, 3156, 3235, 3294, 3360, 3369, 3370, 3371, 3522, 3565, 3655, 3795, 3953, 3969, 4077.
Raillerie, railleur (7) : 1066, 1531, 2800, 2958, 2959, 2960, 3346.
Réfutation (18) : 94, 669, 674, 1338, 1781, 2083, 2334, 3072, 618, 3068, 3069, 3071, 3067, 3070, 3391, 3392, 3443, 3924.
Ruse (4) : 1153, 1180, 2925, 3570.
(Ce que l’on ne) sait pas (1) : 4051. Secret(e)(s) (35) : 659, 813, 825, 1006, 3623, 3626, 3629, 3634, 3635, 3636, 3637, 1244, 1245, 1676, 3630, 3963, 3628, 3624, 3631, 3625, 745,
1006, 3632, 3633, 3638, 366, 460, 627, 828, 1884, 2243, 2452, 3053, 3100, 3513. Sincérité, sincère(s) (10) : 3676, 3675, 3599, 3933, 543, 544, 545, 659, 772, 4007 // 546 (de 1655).
Trahison(s) (24) : 1879, 3668, 4027, 3794, 3795, 3791, 3792, 3793, 2934, 2936, 85, 659, 757, 873, 1153, 1931, 1949, 2019, 2105, 2713, 3243, 3244, 3391, 3665.
Traître (2) : 2230, 1319.
Tromperie (1) : 1502.
Véritable(s)(-ment) (287) : 16, 55, 111, 502, 541, 544, 560, 588, 706, 822,
3374, 3392, 3395, 3453, 3524, 3554,3627, 3634, 3649, 3767, 3808, 3916,3917, 3918, 3919, 3920, 3921, 3922,3923, 3924, 3925, 3926, 3927, 3928,3929, 3930, 3931, 3932, 3933, 3934,3935, 3936, 3937, 3938, 3939, 3940,3940bis, 3941, 3942, 3943, 3944,3945, 3946, 3947, 3948, 3949, 3950,3951, 3952, 3953, 3954, 3955, 3956,3957, 3958, 3959, 3960, 3961, 3962,3963, 3964, 3965, 3966, 3967, 3968,3969, 3970, 3971, 3972, 3973, 3974,3975, 3976, 3977, 3978, 3979, 3980,3981, 3982, 3983, 3984, 3990, 4007,4074, 4077.
Vérité(s) (54) : 8, 88, 132, 440, 555, 655, 733, 788, 789, 1283, 1295, 1504, 1637, 1681, 1686, 1775, 1895, 2241, 2259, 2854, 2928, 2929, 2941, 3072, 3878, 3985, 3986, 3987, 3988, 3989, 3990, 3991, 3992, 3993, 3994, 3995, 3996, 3997, 3998, 3999, 4000, 4001, 4002, 4003, 4004, 4005, 4006, 4007, 4008, 4009, 4010, 4011, 4012, 4013.
Vrai(e)(s) (33) : 11, 789, 804, 989, 1134, 3279, 3424, 3599, 3600, 3657, 3728, 4065, 4066, 4067, 4068, 4069, 4070, 4071, 4072, 4073, 4074, 4075, 4076, 4077, 4078, 4079, 4080.
Vraisemblable (2) : 83, 4081.

Dans le corpus de propagande constitué par ces titres, domine l’adjectif « véritable » (287 occurrences), étendard de la prétention à l’honnêteté. Avec le substantif « vérité », singulier ou pluriel, et les formes de l’adjectif « vrai », se dessine un ensemble de 370 occurrences appartenant environ à 350 mazarinades.

Pour aller plus loin, des séries seraient à considérer en vue de recherches approfondies. Ainsi, pour une centaine de pièces dont le titre commence par l’un des mots « véritable », « vérité » et « vrai »(les nos 3917 à 4013 de la Bibliographie des Mazarinades), on constate que la moitié d’entre elles est datée de 1652 : à une période de surenchère dans la désinformation, il est possible que les « équipes de presse au service des différents partis7 » jettent toutes leurs forces discursives dans la fabrication d’une opinion publique factice, espérant ainsi faire pencher les événements de leur côté.

Mais dès 1649, il y aurait lieu de s’interroger sur l’invocation du « véritable », sur le sens qu’il convient de lui attribuer, sur les intentions des auteurs et sur l’effet des titres sur les lecteurs. Pourtant, le tri par année de parution, tout important qu’il soit pour le catalogage et la contextualisation historique, ne peut suffire à la compréhension du texte. Il serait fort utile, à l’échelle d’un corpus de plusieurs milliers de pièces, de disposer de métadonnées génériques. Si l’on considère, par exemple, la pièce intitulée Agréable et véritable récit de ce qvi s’est passé, devant et depvis l’enlèvement dv Roy, hors la ville de Paris, par le conseil de Iule Mazarin. En vers bvrlesqves8, il ne serait pas raisonnable de se contenter du genre « vers burlesques » auto-attribué il y a plus de trois siècles et qui ne répond à aucun critère scientifique. Le titre (ni le texte) ne pouvant être catégorisé par un terme unique, comme « poème » ou « récit », il conviendrait de proposer un groupement de termes génériques, à condition que les chercheurs fixent9 d’abord cette taxinomie scientifique. Pour l’Agréable et véritable récit…, ce pourrait être : « pièce en vers », « style burlesque », « satire », « récit », « relation historique ».

Disposant de ces métadonnées génériques, que ce soit dans le corpus en ligne du Projet Mazarinades10 ou dans une future édition en ligne de la Bibliographie des mazarinades de Moreau, nous pourrions « prendre au sérieux la diversité des écritures que l’appellation mazarinades recouvre », comme le propose Christian Jouhaud dans un article récent11.

En 1985, lui-même considérait que les mazarinades « ne peuvent que très mal servir à l’écriture d’une histoire des idées politiques ». Admettons. Dans ce cadre, il ajoutait que « les analyses lexicologiques ou lexicométriques […] sont vaines », et quelques lignes plus bas :

Contrairement à d’autres corpus, tels les cahiers de doléances, les mazarinades ne se prêtent pas aux études sérielles. Il est impossible de les mettre bout à bout, en les considérant comme une collection d’énoncés homologues, c’est-à-dire, en dernière analyse, comme un vaste énoncé12.

Dans la situation de 1985, Jouhaud avait raison : la méthodologie linguistique qui sous-tendait les corpus et les programmes informatiques de lexicométrie ne permettait pas de répondre aux questionnements qui nécessitaient de tenir compte de l’hétérogénéité des textes. Or, depuis trente ans, c’est grâce au traitement informatique des métadonnées13 que la situation a grandement changé : il permet d’éviter le « bout à bout », il remédie au danger de l’homologie et, in fine, il est en grande partie responsable du changement de paradigme auquel nous assistons dans la recherche sur les mazarinades. Nous allons en montrer quelques exemples.

MENSONGE ET TROMPERIE DANS LES TEXTES DU PROJET MAZARINADES

Recherche d’occurrences :

Les requêtes envoyées au moteur de recherche lexicale et présentées ci-dessous nous permettent de faire comprendre les outils d’interrogation du corpus en ligne et de suivre les raisonnements auxquels les résultats nous amènent – sachant que tous les commentaires tirés de données chiffrées et d’extraits textuels sont en principe discutables.

Commençons par le mot « mensonge » : il a 169 occurrences parmi les 2 709 pièces du Projet Mazarinades14. Pour chaque occurrence, la page de résultats du Projet Mazarinades affiche un extrait textuel d’une centaine de mots, précédé des références, et suivi d’un premier lien hypertextuel pour afficher la page du document puis d’un second lien vers la notice de la pièce dans le catalogue en ligne. Voici l’exemple de la première occurrence (le titre est abrégé) :

Occurrence 1. Anonyme. CONTRE LES ENNEMIS DE LA CONFERENCE ET DE LA… (1649) chez [s. n.] à Paris, 10 pages. Langue : français. Référence RIM : M0_785 ; cote locale : C_7_75. le 2012-05-20 15 : 23 : 29.

Accord

forcé, n’a de durée que le temps de sa violence, &

qu’vn captif qui promet tout à son corsaire parmy

les fers & les supplices, acquitte sa parole en quittant

ses chaisnes ? Aussi estoit-il de la prudence de

nos Sages, d’opposer au triomphe du mensonge,

la presence de la verité, & de ietter ces articles médisans

dãs les tenebres d’où ils sõt sortis, en mettãt

auiour les veritables, où le plus critique treuuera

peu de matiere à sa censure, beaucoup d’auantage

au Senat, & de honte à ses

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Au pluriel, « mensonges » est attesté 82 fois15, ce qui est moitié moins qu’au singulier.

Les deux formes peuvent être regroupées16 en cherchant la forme « menson.* » (275 occ., total supérieur à 169 + 82 du fait des formes adjectivées).Chaque chercheur, selon ses motivations et hypothèses de travail, doit juger s’il est pertinent de rechercher chaque forme l’une après l’autre, pour étude spécifique, ou préférable d’en grouper plusieurs par une requête idoine, en vue d’une étude thématique, stylistique, etc. La page du moteur de recherche lexicale contient aussi des champs destinés à limiter les recherches à un sous-corpus : par année, par nom de lieu, d’imprimeur, par mot du titre, etc. Sauf cas particulier, on doit affiner les requêtes pour obtenir des résultats exploitables de quelques dizaines ou centaines d’occurrences textuelles – plutôt que des milliers, dont la lecture s’avère fastidieuse et l’analyse hasardeuse.

Bien sûr, ayant obtenu ces occurrences, le chercheur ne fait que commencer son travail : il doit étudier ces contextes, les différencier ou les regrouper selon les thèmes à l’étude et les hypothèses du projet, ou limiter cette recherche de « menson.* » à une année particulière17 : 132 occ. pour l’année 164918, 32 occ. pour 165019, 18 occ. pour 165120, 85 occ. pour 165221, enfin 4 occ. sans date22. À ce stade, nous pouvons seulement dire que ces quantités respectent proportionnellement le nombre de pièces par année dans le corpus en ligne comme dans l’ensemble des mazarinades23.Une telle répartition uniforme correspond à la langue commune plutôt qu’au lexique particulier d’une période ou d’un événement.

D’autres critères permettent d’effectuer des recherches : titre (entier ou partiel), lieu d’édition, nom d’imprimeur, nom d’auteur, langue, etc. La recherche d’auteurs connus pourrait-elle nous servir ? Quelques requêtes nous apportent les résultats suivants : deux occurrences seulement de « menson.* » dans la vingtaine de pièces attribuées au cardinal de Retz24, huit dans les cinq pièces de François Davenne25, une dans un des libelles attribués à Jean-François Sarasin26, trois dans un des pamphlets attribués à Cyrano de Bergerac27, qui peut ainsi résumer (et clore ?) notre problématique :

Mais quoique la vérité et le mensonge soient directement opposés, ils se déguisent avec tant d’artifice et se copient si bien l’un l’autre que les hommes ne sont pas assez fins pour les distinguer28.

Recherche de co-occurrences :

Cette proximité textuelle de « vérité » et « mensonge » trouvée chez Cyrano de Bergerac nous oriente vers d’autres possibles co-occurrences de ces deux mots, à rechercher dans le corpus par une requête les associant, simplement séparés par un espace. Le corpus contient 147 cas de phrases dans lesquelles cette co-occurrence se produit29. On peut tout de suite en déduire que dans plus de la moitié des phrases contenant le mot « mensonge » et ses dérivés (275 occ., voir ci-dessus), se trouve également le mot « vérité » ! Les extraits textuels parcourus contiennent le plus souvent un discours binaire stéréotypé sur les êtres humains et les apparences trompeuses, plus proche de l’argutie inutile que du propos métacritique. En constatant que les termes recherchés sont en majorité au singulier et précédés d’un article défini, favorisant le sens abstrait au détriment de celui de l’exemple ou de l’événement, nous pouvons postuler que ces co-occurrences appartiennent à une sorte de langue de bois qui se prétend parfois discours moral ou philosophique. Les proportions annuelles des co-occurrences sont d’ailleurs proches de celles de « menson.* » indiquées ci-dessus, confortant l’hypothèse de leur banalité : 78 en 1649, 11 en 1650 comme en 1651, enfin 46 en 165230.

Comme il s’agit de mazarinades et que le nom du ministre a été aperçu plusieurs fois dans les co-occurrences parcourues, voyons quelle présence a le mot « mensonge » dans le contexte de « Mazarin ». Nous en trouvons 37 occurrences31, dont cette expression prêtée à Mazarin selon laquelle « l’honnête homme n’est point esclave de sa parole32 », précepte machiavélien assez éloigné de l’honneur (antique ? prémoderne ?) associé à la parole donnée ou de l’équivalence actuelle entre honnêteté et respect de la parole.

La co-occurrence des mots « esclave » et « parole » attire notre attention ; nous la recherchons : les deux mots sont associés à vingt occasions qui reprennent le même propos33, dont celui d’un poète burlesque qui ironise sur la parole que le duc de Lorraine entendait respecter après le siège d’Étampes :

Falloit-il prendre tant de soin / De mener icy ton armée, / Pour n’auoir qu’vn peu de fumée, / Qu’vne promesse faite en l’air, / Dont Iules a sceu t’aueugler, / Luy qui deffend dans son escole / D’estre esclaue de sa parole34 ?

Puis c’est le cardinal de Retz qui, pour une parole « rétractée », est accusé d’imiter le « corrupteur » Mazarin ; au contraire d’eux, la « conscience chrétienne » (de ceux qui ne sont pas corrompus) est décrite comme « désintéressée du mensonge et de la fourberie35 ».

La leçon de ces deux recherches de co-occurrences est que les mots-thèmes (hypéronymes) peuvent être moins présents dans les textes ou moins signifiants que des mots plus simples dont l’association appartient au même thème (hyponymes). D’où la nécessité d’étudier en détail le lexique des contextes, d’élargir le champ sémantique des recherches et de multiplier les requêtes dont les résultats, par sérendipité, incitent souvent le chercheur à réévaluer et renouveler ses hypothèses initiales, comme le montrent les recherches qui suivent.

Les 49 co-occurrences36 des termes « mensonge » et « roi » sont syntaxiquement ou sémantiquement liées par des formes négatives, le roi étant le plus souvent victime du mensonge, sur le mode : « La Maiesté des Roys ne doit pas mesme souffrir de simples mensonges37 ».

La co-occurrence de « mensonge » et « reine » n’a que 11 occurrences38, dans des contextes distendus (termes assez éloignés l’un de l’autre dans le texte). On retiendra néanmoins que la reine serait « cette belle ennemie du mensonge », sous la plume probable de François Davenne39, tandis qu’elle est plus souvent considérée comme la « pauvre reine » (22 occurrences40)…

Pour le cardinal de Retz, nous devons utiliser une fonction de regroupement des termes, au moyen de la barre verticale, dans la requête : « coad.*|gondy|retz| corinth.* » (sans espace entre les éléments). Or parmi les 1 113 occurrences41 ainsi rassemblées, la co-occurrence avec « mensonge » ne se produit que 7 fois42, contre 120 co-occurrences43 avec « vérité » ! La lecture des contextes révélera toutefois la même confusion entre mensonge et vérité que dans la plupart des autres cas. Autrement dit, comme nous le pressentions, les hypéronymes « mensonge » et « vérité » appartiennent le plus souvent à des formes banales du discours ou participent à des joutes rhétoriques. L’intérêt principal d’une succession de requêtes concernant des auteurs sera, dans ce cas particulier, non pas d’obtenir une cartographie différentielle de la valeur du mot « mensonge », mais de repérer des mazarinades présentant un intérêt particulier (nombre d’occurrences élevé, expressions originales, contexte événementiel, etc.) pour constituer une sélection destinée à une lecture approfondie.

Chemin faisant, nous avons remarqué la concomitance des mots « flatterie » et « mensonge ». Or, avec 1 160 occurrences44 dans le corpus en ligne, « flatter » (et ses dérivés) est bien plus présent que « mentir » et « mensonge » (623 occurrences45). Serait-ce parce que la flatterie est plus perceptible (visible ou audible) que le mensonge ? Les deux séries lemmatisées sont en co-occurrence à 22 occasions46, avec, le plus souvent, une focalisation discursive sur… Mazarin. Nous pouvons alors considérer le sous-corpus formé des 14 mazarinades d’où sont tirées ces co-occurrences comme l’aboutissement d’une recherche préliminaire :

1. La conference dv cardinal Mazarin avec le gazetier, iouxte la coppie imprimée à Bruxelles47, [s. l.], [s. n.], 1649, 39 p.

2. La clef dv temple de Ianvs. Presenté av roy. Par CM. P. P. P. P.48, Paris, veuve de Claude Maret, 1652 [ ?], 28 p.

3. Le fidele empiriqve ov le pvissant hellebore d’vn anti-Machiavel : pour contenter les mal-contens de l’estat, & affermir la liberté des peuples49, Paris, [s. n.], 1652, 24 p.

4. L’avthorité des roys, des princes, des repvbliqves, et des parlemens. Presenté au Roy dans la Ville de Pontoise par vn grand Prelat 50, Paris, [s. n.], 1652, 31 p.

5. L’estroite alliance Ou la ionction du Parlement de Bretaigne & des trois Estats de la Prouince auec le Parlement de Paris51, Paris, [s. n.], 1649, 11 p.

6. L’officier de ce temps de la maison royale, Voyageant par la France pendant le temps present ; qui apprend les miseres & desordres qui se sont commis & commettent dans les Prouinces, Seigneuries & Terres du Royaume, etc.52, Paris, [s. n.], 1652, 40 p.

7. Gondi, Jean-François Paul, cardinal de Retz [faux], Harangve faite av Roy par Monseignevr le Cardinal de Retz, en presence de Monseigneur le Nonce du Pape, assisté de Messieurs du Clergé, pour la paix generale. Faite à Compiegne le onziesme septembre 165253, Paris, Antoine Langevin, 1652, 15 p.

8. Le veritable contre le mentevr 54, Paris, [s. n.], 1652, 32 p.

9. Manvel dv bon citoyen, ovBovclierdedefenselegitime, Contre les assauts de l’Ennemy55, Paris, Robert Sara, 1649, 24 p.

10. Remede avx mal-hevrs de l’estat av sviet de la qvestion [ :] Si la voix dv pevple est la voix de Dieu56, Paris, [s. n.], 1652, 30 p.

11. Cyrano de Bergerac [ ?], La Sybille moderne, ov L’oracle dv Temps57, Paris, Jean Brunet, 1649, 15 p.

12. Pierre de La Mère de Dieu (dit Abraham Bertius), Les Vertvs royales d’vn ievne Prince, etc.58, Paris, Mathurin Henault, 1647, 290 p.

13. V. Mercier [signé], Panegyriqve a l’honnevr dv Roy. Presenté a sa Maiesté 59, Paris, veuve Théodore Pépingué et Estienne Maucroy, 1649, 15 p.

14. Procez bvrlesqve entre Mr le Prince et Madame la dvchesse d’Esgvillon, avec les plaidoyers. par le S. D. S. M.60, Paris, veuve Théodore Pépingué et Estienne Maucroy, 1649, 38 p.

La plupart des mazarinades comportant de 4 à 8 pages, il apparaît que les pièces de ce sous-corpus sont d’un volume nettement supérieur à la moyenne61. De leur lecture rapide, nous retirons principalement que les occurrences de « mensonge » (et dérivés) se répartissent en deux groupes thématiques : 1. la condamnation morale du mensonge (incluant les cas où l’auteur se défend de mentir) ; 2. l’accusation de mensonge (de Mazarin, le plus souvent). La condamnation morale n’exclut pas chez certains la compréhension d’une utilité politique du mensonge ; c’est l’apport de Machiavel. Mais le résultat le plus important est que, malgré toutes ces accusations, on constate une absence totale de preuves. Autrement dit, il s’agit presque toujours de diffamation (selon la définition actuelle) basée sur des reproches, des injures ou des rumeurs, sans que les Réponses…, quand il y en a, ne mentionnent cette absence de preuves. C’est comme si le lectorat de la Fronde n’attendait pas que des accusations imprimées soient circonstanciées et réellement incriminantes. C’est peut-être aussi l’une des raisons pour lesquelles Mazarin n’a pas fait réprimer sérieusement les libelles : ils n’apportaient aucune preuve de ce qu’ils avançaient ; quand les faire réprimer aurait au contraire entretenu l’idée qu’ils disaient vrai.

La recherche de « tromperie » :

« Tromperie », seul et au singulier, a 51 occurrences réparties dans une quarantaine de pièces du corpus du Projet Mazarinades. « Tromperies », au pluriel, est également attesté 51 fois, et dans d’autres pièces. Celui qui emploie l’un n’emploie pas l’autre, comme si les deux mots, discursivement, s’excluaient. Comme avec « mensonge », il s’agit le plus souvent, pour les deux mots, d’un discours de calomnie, dont on peut dire qu’il doit raisonnablement être plus vague au pluriel qu’au singulier. Par la lecture des contextes62, on retrouve deux groupes thématiques : l’accusation nominative (Mazarin, le plus souvent), et la tromperie en général, dans un cadre moral ou prétendument philosophique. Pour mieux comprendre ce phénomène, nous avons effectué une concordance63 des deux mots avec un tri sur le contexte gauche. En voici les dix premières lignes :

C_9_19 (bib : p.9) la verité, pour obuier aux abus tromperies, imitans leur Souuerain Roy, lequel entend l

C_1_23 (bib : p.5) aire passé, y li aura vne belle tromperie de Cornets de piphres de tambourins, y varra

C_5_69 (bib : p.6) s n’estoient pas exempts de ces tromperie, sur tout il l’a rendoittres-celebre dans

A_8_34 (bib : p.5) vous laissés surprendre à cette tromperie ? estoit-ce pour vous rendre plus agreables à

C_6_80 (bib : p.3) té. Mais Pluton fasché de cette tromperie pour en empescher de pareilles, a ordonné qu

B_13_64 (bib : p.5) nne est basse, rauallée. Cette tromperie ne te reüssit pas mal ; car donnant vne for

B_16_46 (bib : p.14) Princes à son seruice : cette tromperie est claire se découure d’elle-mesme ; Tan

B_13_8 (bib : p.5) re de si lasches si dangereuses tromperies ; puis qu’elles sont notoires à tout le mo

C_9_19 (bib : p.38), grandes maisons, beaucoup de tromperies se glissent, sans que les Gouuerneurs, Seign

B_4_8 (bib : p.34) eins d’ambition, sa conduite de tromperie, ses mœurs de dereglement, ses actions parti

Si l’on voulait trouver les traces de véritables tromperies ou en apporter des preuves, il serait raisonnable de consulter un texte qui contient l’expression « cette tromperie » plutôt que celui qui parle de « la tromperie des Mazarins » ou de « beaucoup de tromperies », expressions vagues. Plus loin dans notre concordance, l’expression « les tromperies de ce monde » serait sans doute moins intéressante qu’une phrase commençant par : « Vous verrez maintenant les tromperies que le Cardinal Mazarin employa […]64 », et en effet suivie de détails d’une tractation sur la restitution du duché de Lorraine, en rapport avec les négociations de la paix qui aboutirent au traité de Münster (octobre 1648).

Même questionnement, par une autre voie : la co-occurrence éventuelle des mots de la famille de « preuve » (1 148 occ.) dans le voisinage des mots regroupés de deux familles : « tromperie » (888 occ.) et « mensonge » (623 occ.), soit la requête suivante, avec un espace avant « preu[u-v]e », qui obtient 29 résultats :

« mentir.*|mente.*|menson.*|tromp.[e-s].*|tromp.[u-z].*|dEtromp.* preu[u-v]e.*| prou[u-v].* »

À la lecture des contextes fournis par cette requête, nous ne découvrons qu’un seul cas d’apport de preuve, dans la première occurrence, qui avance des chiffres peut-être vérifiables à l’époque (et proposés comme tels). Deux autres textes promettent des preuves sans dire ni où ni quand (les occurrences 3 et 6).

CONCLUSION

Trois siècles après la Fronde, le « déluge » des mazarinades65 était devenu, dans les bibliothèques, un marécage presque abandonné66. Depuis plus de cinquante ans, les chercheurs n’osaient s’aventurer qu’où il y avait pied (Retz, Cyrano, Scarron, etc.) ou en suivant les cordes tenues par des ouvrages de référence (Moreau, Carrier, Jouhaud).

Depuis 2010, les outils que le Projet Mazarinades a mis en place pour l’étude du corpus en ligne offrent les fonctions d’un drone : ils permettent au chercheur de survoler et de cartographier lui-même ce vaste marécage jusqu’à repérer les emplacements à analyser et les textes à lire en détail.

Le mensonge et la tromperie, dont nous avons montré le flou référentiel, la diversité discursive et la ductilité dans la langue, nous ont servi de fil rouge, ou de guide, pour découvrir en quelques étapes méthodologiques le domaine textuel et hypertextuel du Projet Mazarinades.

Bien sûr, il convient aussi de se méfier de certains discours sur la facilité de l’étude dans les humanités numériques, ou de la promesse de millions de textes libres de droit (qui répondent en fait à des critères d’établissement très divers). Ajoutons enfin que, dans cette épistémologie de la profusion et de la vitesse au sein de corpus textuels si possible fiables, les méthodologies nouvelles doivent certes mettre à profit la multiplicité des accès aux données, mais ne peuvent remplacer les lectures complètes qu’un chercheur doit faire pour être en mesure de poser les bonnes questions et d’en retirer les informations pertinentes.

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1 Voir par exemple : « Le prince devant donc agir en bête, tâchera d’être tout à la fois renard et lion : car, s’il n’est que lion, il n’apercevra point les pièges ; s’il n’est que renard, il ne se défendra point contre les loups ; et il a également besoin d’être renard pour connaître les pièges, et lion pour épouvanter les loups. Ceux qui s’en tiennent tout simplement à être lions sont très malhabiles. Un prince bien avisé ne doit point accomplir sa promesse lorsque cet accomplissement lui serait nuisible, et que les raisons qui l’ont déterminé à promettre n’existent plus : tel est le précepte à donner. Il ne serait pas bon sans doute, si les hommes étaient tous gens de bien ; mais comme ils sont méchants, et qu’assurément ils ne vous tiendraient point leur parole, pourquoi devriez-vous leur tenir la vôtre ? Et d’ailleurs, un prince peut-il manquer de raisons légitimes pour colorer l’inexécution de ce qu’il a promis ? À ce propos on peut citer une infinité d’exemples modernes, et alléguer un très grand nombre de traités de paix, d’accords de toute espèce, devenus vains et inutiles par l’infidélité des princes qui les avaient conclus. On peut faire voir que ceux qui ont su le mieux agir en renard sont ceux qui ont le plus prospéré. Mais pour cela, ce qui est absolument nécessaire, c’est de savoir bien déguiser cette nature de renard, et de posséder parfaitement l’art et de simuler et de dissimuler. Les hommes sont si aveugles, si entraînés par le besoin du moment, qu’un trompeur trouve toujours quelqu’un qui se laisse tromper. » (Nicolas MACHIAVEL, Le prince, chapitre XVIII, p. 70 de l’édition Paris : U. G. E., 1962, 190 pages, voir édition en ligne : https://fr.wikisource.org/wiki/Le_Prince/Chapitre_18 [consulté le 23 septembre 2015]).

2 G. Naudé, Jugement de tout ce qui a été imprimé contre le cardinal Mazarin : depuis le sixième janvier, jusques à la déclaration du premier avril mil neuf cens quarante-neuf, 1650, référence Moreau : [M0_1769], plus connu sous le titre de Mascurat ; C. Moreau, Bibliographie des Mazarinades, publiée pour la Société de l’histoire de France, Paris, J. Renouard, 1850-1851, 3 vol. ; C. Jouhaud, Mazarinades. La fronde des mots, Paris, Aubier, 1985 et H. Carrier, La presse de la Fronde (1648-1653), Genève, Droz ; Paris, Champion, 1989-1991, 2 vol. ; Id., Les muses guerrières, Paris, Klincksieck, 1996 et Le labyrinthe de l’État, Paris, Champion, 2004.

3 Carrier souligne ainsi l’attitude mercenaire des auteurs de pamphlets, prêts à écrire tout et son contraire : « Mais comment mesurer le degré de sincérité de pamphlétaires dont les mobiles sont si divers ? L’auteur de L’Antisatire du temps [M0_96], qui prend en mai 1649 la défense de ses confrères contre les attaques de La Chasse aux satires du temps [M0_690], prétend, non sans logique, que puisqu’ils ne visent qu’à vivre de leur plume, on ne doit pas chercher de réelle conviction politique dans leurs écrits : « Pour les Autheurs […], il leur est indifférent de loüer ou de blasmer, de noircir ou de blanchir la vie d’vn homme, de iustifier ou de condamner ses actions, de faire son Satyrique ou son Apologie, de le mettre au rang des Saincts ou des Demons : de mesme qu’vn Peintre ne se soucie pas de representer vn Soleil ou vne nuict, vn homme vivant ou vn qui est mort. […] De croire en outre que les Autheurs, au moins la pluspart, épousent quelque party & n’escriuent qu’auec dessein, c’est vne tromperie manifeste : ils ayment autant faire descendre Mazarin de la plus Noble famille d’Italie que de celle des plus infames roturiers. » [L’Antisatyre, ou la justification des auteurs] » (H. CARRIER, La presse de la Fronde…, op. cit., t. 2, p. 8-9).

4 Liste également publiée en ligne, avec liens aux notices des pièces disponibles dans le corpus du Projet Mazarinades : http://www.mazarinades.org/2015/06/mtmda/ [cette page, comme toute les suivantes, a été consultée pour vérification le 1er octobre 2015]

5 La Bibliographie des Mazarinades présente 4 078 notices et un supplément de 229 titres, soit un total de 4 307 entrées. Le ratio des titres concernés par notre enquête est donc de 13,7 %, soit 1 pièce sur 7,3, ce que nous arrondissons à 7.

6 Pour la fidélité considérée dans le domaine du discours : le récit, la relation ou la traduction fidèle.

7 H. Carrier, Le labyrinthe…, op. cit., p. 14.

8 Pamphlet n° 55 dans la Bibliographie des Mazarinades. Disponible dans le corpus en ligne du Projet Mazarinades avec la référence normalisée M0_55, à la cote C_8_43 dans la collection de la bibliothèque de l’Université de Tokyo.

9 L’information générique à l’échelle d’un corpus nécessite une normalisation préalable qui ne peut être produite que par un collectif de spécialistes. Après quoi, chaque pièce peut être caractérisée selon cette liste normalisée dans un champ de métadonnées approprié (champ déjà prévu par l’équipe du Projet Mazarinades). Une campagne de réflexion sur la question générique dans les mazarinades a été ouverte en 2015 ; à suivre en ligne dans la page : http://www.mazarinades.org/ 2015/07/vers-normalisation-des-genres-de-mazarinades/

10 Le Projet Mazarinades (voir la contribution de Tadako Ichimaru au présent volume) propose l’accès et l’interrogation en ligne de l’intégralité des textes et des images des pages de la collection des mazarinades de l’Université de Tokyo. Ce corpus en ligne d’un volume actuel d’environ 15 millions de mots ne prétend pas représenter la totalité des mazarinades (estimée entre 5 000 et 6 000 pièces), mais il en est un échantillon fiable.

11 C. Jouhaud, « Frontières des mazarinades : l’Inconnu et l’événement », Eidôlon, n° 116, 2015, p. 18.

12 C. Jouhaud, Mazarinades. La fronde des mots…, op. cit., p. 38. Dans la même page, il écrivait également que « ce serait prendre le calcul pour de la spontanéité, les stéréotypes de la disqualification pour une opinion, revenir une fois encore à la question de la sincérité, et de la plus mauvaise manière : en la considérant par avance comme résolue ». Bien au contraire, nous considérons toujours la question de la sincérité comme une problématique ouverte, et d’autant plus ouverte qu’elle sera mise en relation avec d’autres domaines : la loyauté, l’action politique, l’écriture mémorielle, le discours historien ou universitaire, etc.

13 Pour ce qui concerne le corpus en ligne du Projet Mazarinades, le balisage XML-TEI permet à la fois d’associer à chaque texte les métadonnées qui le caractérisent (bibliographiques, génériques, historiques, stylistiques, etc.) et de proposer des outils d’interrogation et de sélection des textes du corpus ainsi que des restitutions et organisations de résultats.

14 Voir la liste des occurrences de la forme « mensonge », en effectuant la recherche (ou requête) du mot à l’adresse [http://www.mazarinades.org/recherche] puis en cliquant sur le bouton « Lancer la recherche ». Sauf mention différente, toutes les requêtes suivantes se font à partir de la même page.

15 Voir la requête de la forme « mensonges ».

16 Tous les éléments syntaxiques de l’interrogation du corpus du Projet Mazarinades sont détaillés dans la page : http://www.mazarinades.org/pistes-pour-la-recherche/#rech

17 L’ensemble des années disponibles étant plutôt réduit (du fait de la période historiquement limitée des mazarinades), il est probable que ce genre de recherche n’aura qu’un intérêt limité ; il est néanmoins techniquement possible.

18 Voir la requête « menson.* », avec « 1649 » dans le champ de date de publication.

19 Voir la requête « menson.* », avec « 1650 » dans le champ de date de publication.

20 Voir la requête « menson.* », avec « 1651 » dans le champ de date de publication.

21 Voir la requête « menson.* », avec « 1652 » dans le champ de date de publication.

22 Voir la requête « menson.* », avec « s. d. » dans le champ de date de publication.

23 Hubert Carrier recense 50 pièces en 1648, 1975 pièces en 1649, 725 pièces en 1650, 800 pièces en 1651 et 1600 pièces en 1652. Voir H. CARRIER, La presse de la Fronde (1648-1653) : les Mazarinades. La conquête de l’opinion, vol. 2, Genève, Librairie Droz, 1989, p. 84, et P. REBOLLAR, « Bordeaux dans les mazarinades en ligne, approches méthodologiques », [Revue] Eidôlon, Presses universitaires de Bordeaux, n° 116, 2015, p. 76.

24 Voir la requête « menson.* », avec « Gondi » dans le champ d’auteur.

25 Voir la requête « menson.* », avec « Davenne » dans le champ d’auteur.

26 Voir la requête « menson.* », avec « Sar » (si l’on hésite sur l’orthographe) dans le champ d’auteur.

27 Voir la requête « menson.* », avec « Bergerac » dans le champ d’auteur.

28 B. D. [signé] / Cyrano de Bergerac, Savinien de [ ?] [1649], Lettre de consolation envoyee a madame la dvchesse de Rohan, svr la mort de fevmonsievr le dvc de Rohan son fils, svrnommé Tancrede. Page 5, ligne 12. Référence RIM : M0_1922. Cote locale : C_3_70.

29 Voir la requête « menson.* vErit.* », « termes dans la même phrase ». Le « E » majuscule permet de regrouper les formes avec et sans accent.

30 Nous omettons volontairement les références de ces résultats du fait que nous ne les exploitons pas ici. Les recherches peuvent toutefois être effectuées dans le corpus selon la méthode déjà indiquée.

31 Voir la requête « menson.* mazar.* », « termes dans la même phrase ».

32 Extraict des registres dv parlement, contenant ce qui s’est passé pour l’esloignement du cardinal Mazarin, Paris, Les imprimeurs et libraires ordinaires du roi, 1652, p. 20, ligne 34. Référence RIM : M0_1351. Cote locale : B_11_29.

33 Voir la requête « escla[u-v].* parol.* », « termes séparés par 10 mots maximum ». Les crochets droits permettent de rechercher à cette place du mot, après « escla », n’importe quelle lettre entre les deux qui figurent dans les crochets droits, séparées par un tiret ; ici, donc, seulement les lettres « u » et « v ».

34 Le tour burlesque du duc Charles, [s. l.], [s. n.], 1652, p. 8, ligne 6-12. Référence RIM : M0_3788. Cote locale : B_8_60.

35 La véritable fronde des Parisiens, frondant Jean-François Paul de Gondi…, Paris, [s. n.], 1652, p. 14 et 16. Référence RIM : M0_3934. Cote locale : B_10_11.

36 Voir la requête « menson.* roy », « dans la même phrase ».

37 La harangve des provinciavx faite a la Reine povr le prochain retour du Roy en sa bonne ville de Paris, Paris, [s. n.], 1649, p. 9. Référence RIM : M0_1557. Cote locale : A_4_19.

38 Voir la requête « menson.* reyne », « dans la même phrase ».

39 François Davenne, Lettre particvliere de cachet envoyée par la Reyne regente a Messievrs dv parlement…, [s. l.], [s. n.], 1650, p. 29. Référence RIM : M0_2250. Cote locale : C_3_9.

40 Voir la requête « pauure reyne », « dans une même expression ».

41 Chacun de ces termes pourrait être recherché séparément dans le cadre d’une étude différentielle des nominations du cardinal de Retz. Ici, c’est leur regroupement qui nous est utile.

42 Voir la requête « coad.*|gondy|retz|corinth.* menson.* » (avec espace avant le dernier terme), « dans la même phrase ».

43 Voir la requête « vErit.* coad.*|retz|gondy|corinth.* »(espace après le premier terme), « dans la même phrase ». La position des deux éléments séparés par un espace n’est pas déterminante.

44 Voir la requête « flatt.*|flat.* » qui regroupe différentes orthographes des mots de la même famille (lemmatisation).

45 Voir la requête « mentir.*|mente.*|menson.* », incluant également un petit nombre de formes latines.

46 Voir la requête « flatt.*|flat.* mentir.*|mente.*|menson.* » (espace après les deux premiers termes), avec les « termes séparés par 15 mots maximum ».

47 Référence RIM : M0_742. Cote locale : C_1_19 (ce renvoi et les suivants peuvent être retrouvés dans le catalogue en ligne du Projet Mazarinades, à l’adresse : http://www.mazarinades.org/ corpus/). En bref : Mazarin, inquiet de son impopularité croissante, a besoin de la plume de Renaudot qui s’avoue auteur de pièces « secrètes » mais se défend d’être flatteur ou menteur.

48 Référence RIM : M0_703. Cote locale : B_2_31. En bref : c’est une lettre bienveillante et érudite adressée au roi pour le mettre en garde contre « C. M. ». Le temple de Janus, sur le forum de Rome, était fermé en temps de paix ; en donner la clé, c’est suggérer de l’ouvrir et donc de faire la guerre.

49 Référence RIM : M0_1387. Cote locale : B_18_33. Pamphlet royaliste, bien fait, selon Moreau (voir sa notice en commentaire dans le catalogue en ligne).

50 Référence RIM : M0_434. Cote locale : B_15_27. En bref : c’est une harangue pédagogique et œcuménique adressée au roi, au sujet de la justice divine.

51 Référence RIM : M0_1309. Cote locale : A_3_25. Voir la notice Moreau en ligne.

52 Référence RIM : M0_2585. Cote locale : B_3_25. Voir la notice Moreau en ligne.

53 Référence RIM : M0_1594. Cote locale : B_16_64. Moreau signale que c’est un faux publié par les frondeurs et cite Guy Joly (voir la notice en ligne). Selon Myriam Tsimbidy (courrier privé du 28/10/2012), cette pièce ne peut en effet pas être de Retz.

54 Référence RIM : M0_3926. Cote locale : B_10_8. Contre Mazarin, réponse aux Considérations désintéressées sur la conduite du cardinal Mazarin (Paris, 1652, 32 pages, M0_767). Outre les crimes habituels, Mazarin est accusé d’avoir introduit en France les maximes de Machiavel (par ailleurs, voir la requête « machia.* » et ses 120 occ. dans le corpus en ligne). Détail budgétaire (p. 21) : le montant perçu des impôts aurait été de 144 millions (quand ?) alors que la dépense de l’État se montait à 36 millions ; sous-entendu : où sont passés les 108 millions restants ?

55 Référence RIM : M0_2406. Cote locale : A_6_7. Voir dans le catalogue en ligne la longue notice de Moreau.

56 Référence RIM : M0_3270. Cote locale : B_20_43.

57 Référence RIM : M0_3738. Cote locale : A_7_29. Diatribe contre Mazarin et les partisans. Madeleine Alcover juge improbable l’attribution de cette pièce à Cyrano de Bergerac (M. Alcover, Cyrano relu et corrigé, Genève, Droz, 1990, p. 93-98 et 108).

58 Référence RIM : Mx ; cote locale : B_1_1. Cette pièce de près de 300 pages ouvre la sous-collection B de la collection de l’Université de Tokyo mais, datée de 1647, elle ne figure pas dans la Bibliographie des Mazarinades de Célestin Moreau. Nous l’avons gardée dans cette sélection parce qu’elle témoigne d’un des enjeux de notre entreprise sur le long terme : la méthodologie de définition des mazarinades et les frontières du domaine.

59 Référence RIM : M0_2660. Cote locale : A_6_57.

60 Référence RIM : M0_2884. Cote locale : C_8_37.

61 Ces 14 pièces totalisent 632 pages, soit une moyenne de 45 pages par pièce. Même en retirant la pièce n° 12, la moyenne est de 26 pages par pièce.

62 Ils peuvent être rassemblés par la requête « tromperie|tromperies » : 102 occurrences.

63 Une concordance est un traitement informatique qui rassemble ligne par ligne toutes les occurrences du terme demandé : la forme recherchée est centrée et en gras, précédée et suivie de quelques mots, les références étant abrégées et en début de ligne. Une concordance peut être indexée dans l’ordre des références (titre, page, auteur, date, etc.) ou dans l’ordre textuel, par exemple en triant les lignes par l’ordre alphabétique du mot qui précède la forme recherchée (tri sur contexte gauche), ou du mot qui suit la forme recherchée (tri sur contexte droit). D’autres traitements, notamment statistiques, sont disponibles selon l’outil informatique utilisé. La concordance entière de « tromperie(s) » peut être consultée dans notre document annexe : http://www.mazarinades.org/2015/06/mtmda/

64 Voir l’Apologie povr Messievrs les Princes, envoyee par Madame de Longveville a Messievrs dv Parlement de Paris, [s. l.], [s. n.], 1650 [ ?], 87 p. RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48. La citation est à la page 78, ou en ligne par la recherche de « tromperies », avec « Longueville » comme nom (supposé) d’auteur (occurrence n° 2).

65 Le mot, repris d’une mazarinade, est utilisé par Hubert Carrier au titre d’un chapitre de La presse de la Fronde…, op. cit., t. 2, p. 55.

66 Aujourd’hui encore, de nombreuses bibliothèques municipales françaises sont dans l’incapacité de fournir un catalogue des mazarinades qu’elles conservent. Voir aussi notre page de géolocalisation des collections : http://www.mazarinades.org/geolocalisation-des-mazarinades-fonds-collections-catalogues-etc/