Les premières éditions imprimées de l’Institution du Prince de Guillaume Budé : une histoire à réécrire
Christine BÉNÉVENT
CESR, Université de Tours (UMR 723)/IUF
Malcolm WALSBY
Université de Rennes
En 1519 Guillaume Budé, « unanimement salué comme le plus grand humaniste français, reconnu par l’histoire comme l’inspirateur du Collège de France »1, offre à François Ier un recueil d’apophtegmes majoritairement empruntés à Plutarque, qu’il a pris soin de traduire en français et dont il se sert pour démontrer au roi l’utilité des lettres et des lettrés. Bien que l’importance de ce texte ait été rapidement perçue, il n’a pas fait l’objet de recherches approfondies, du moins en ce qui concerne ses différentes versions. L’attention s’est surtout concentrée sur le manuscrit d’apparat, aujourd’hui conservé à la bibliothèque de l’Arsenal, et qui a longtemps été considéré comme le seul texte attribuable de façon sûre à Budé2.
Les recherches menées par Guy Gueudet ont cependant permis d’identifier huit autres manuscrits3 : l’un d’entre eux, le manuscrit « Colbert », présente un texte court presque identique à celui de la copie de présentation, à quelques variantes orthographiques et omissions près, tandis que les sept autres, abondamment enrichis par rapport à la version initiale (qu’ils font plus que doubler), se ressemblent suffisamment pour former une famille au sein de laquelle le manuscrit conservé à Rouen témoigne d’un état intermédiaire entre la version courte et la version longue. Bien qu’on ne puisse imputer avec certitude ces ajouts à Budé4, ces manuscrits sont probablement tous antérieurs à la mort de l’auteur en 1540, et les titres que porte ce dernier dans l’épître dédicatoire incitent à en situer la rédaction en 15225.
Le nombre de copies subsistantes laisse à penser que le texte a beaucoup circulé sous forme manuscrite du vivant de l’auteur, mais que celui-ci n’en a pas souhaité une diffusion imprimée. Ce n’est que plusieurs années après sa mort, en 1547, quand le texte fut enfin imprimé, qu’on lui attribua le « short title » d’Institution du prince, sous lequel il est connu aujourd’hui. Ce titre est trompeur en ce qu’il tend à rapprocher cette œuvre de l’Institutio principis christiani d’Érasme, alors qu’il est en fait davantage comparable aux Apophthegmata, mais il montre combien les éditions imprimées ont pu influencer notre perception du texte. D’ailleurs, jusqu’en 1965, c’est seulement dans ces éditions imprimées (dont plus de 70 exemplaires sont conservés) qu’il est resté accessible au public savant : le manuscrit de l’Arsenal est alors transcrit par Claude Bontems, dans ce qui sert aujourd’hui encore d’édition de référence6. Mais, vieille désormais d’un demi-siècle, cette transcription souffre de présenter nombre de fautes et oublis et d’avoir été modernisée sans principes rigoureux. Plus grave, elle ne tient absolument pas compte des leçons des manuscrits longs, ni de celles des éditions imprimées7.
Ces éditions imprimées méritent pourtant l’attention : non seulement elles ont conditionné la réception du texte au cours des siècles précédents et lui ont attribué le titre sous lequel nous le connaissons, mais surtout elles ont donné accès à ce texte à la plupart des lecteurs du XVIe siècle. De nombreux exemplaires de ces éditions sont, comme nous allons le voir, passés entre les mains de rois, de princes, de membres de l’aristocratie, mais aussi de l’élite de l’Église catholique. Ainsi mesure-t-on mieux combien il importe de reconstituer la genèse exacte de ces éditions, car elle est beaucoup moins évidente qu’on ne pourrait le croire de prime abord. L’enquête dont nous présentons ici les premières conclusions, fondée sur une analyse de bibliographie matérielle, a été menée sur des exemplaires conservés dans les bibliothèques françaises, mais aussi un peu partout dans le monde. Elle nous a permis de découvrir que l’histoire jusqu’alors connue de ces premières éditions mérite d’être corrigée, voire réécrite. Elle nous a aussi conduit à y envisager l’implication, jusqu’alors totalement ignorée, d’une figure emblématique de la Renaissance.
LES ÉDITIONS IMPRIMÉES
La doxa a tendance, au sujet de L’Institution du prince, à présenter une histoire simple : en 1547, trois éditions en ont été publiées, dans trois villes de France différentes, par trois imprimeurs différents. Au début du XXe siècle, dans le livre qu’il consacre à la vie et aux œuvres de Guillaume Budé, Louis Delaruelle consacre un chapitre à l’Institution mais n’accorde que peu d’attention aux éditions imprimées8. Dans un appendice (II, pp. 231-245), il cherche cependant à évaluer l’authenticité de trois manuscrits autres que celui de l’Arsenal, avant de proposer des aperçus sur les trois éditions imprimées. Cette annexe semble avoir eu une grande influence, dans la mesure où ses conclusions ont été reprises par la plupart des chercheurs qui lui ont succédé.
Delaruelle identifie trois éditions du texte produites quasi simultanément à Paris, à Lyon, et dans le monastère de Larrivour, non loin de Troyes. Ces trois éditions, affirme-t-il, ont été imprimées en 1547 à partir de différentes versions manuscrites du texte. Il constate certes quelques anomalies dans les exemplaires qu’il a pu consulter, mais il ne les évoque que de façon succincte. Ainsi note-t-il que le colophon de l’édition lyonnaise porte la date de 1544 au lieu de 1547 (ill. 1). Il s’agirait selon lui d’une « erreur d’impression » commise par le compositeur qui, au moment de placer les caractères typographiques dans la forme, aurait écrit « M.D.XLIIII » au lieu de « M.D.XLVII », confondant simplement le « V » de sa source avec deux « I ». Par ce biais, Delaruelle résout la discordance entre page de titre et colophon, et rétablit la date correcte de 1547.
L’étrange structure du premier cahier de l’édition de Larrivour n’est même pas commentée. Delaruelle ne relève pas – ou du moins n’a pas jugé bon de relever – que, quel que soit l’exemplaire consulté, le premier cahier est toujours incomplet. Or la troisième page du livre porte la signature A4 au lieu de la signature logiquement attendue, A2. La pagination est, elle aussi, étrange : alors que le second cahier (B) commence par une p. 13, les six premières pages du cahier A ne sont pas paginées, et elles sont suivies de deux pages numérotées 15 et 16, ce qui est problématique. Enfin, la dernière page du cahier porte pour titre courant « Epistre. », ce qui est incohérent avec le titre courant de la page suivante, « du prince. » Ces incohérences pouvaient sembler insignifiantes : l’accent est mis sur le fait que ces trois éditions ont été publiées en 1547, le regain d’intérêt pour le texte de Budé coïncidant avec la mort du roi François Ier et l’accession au trône de Henri II. Telle est la date que mettent en avant la plupart des chercheurs lorsqu’ils mentionnent l’Institution de Budé9 : si ce texte est souvent cité, allégué ou analysé dans des articles et des livres, son histoire éditoriale apparaît le plus souvent comment secondaire10. Les « erreurs » relevées dans les éditions de Lyon et de Larrivour sont négligeables, prouvant simplement, peut-être, la piètre qualité du travail d’impression fourni hors de Paris.
Or il n’en est rien. Les imprimeurs impliqués étaient Denis de Harsy à Lyon et Nicole Paris à Troyes, tous deux maîtres typographes bien établis. Les anomalies relevées ne sont nullement anecdotiques, et ne sont pas de simples manifestations d’une pratique peu scrupuleuse. Les écarts observés entre ce que l’on pourrait s’attendre à trouver et ce que l’on trouve effectivement dans les éditions de Lyon et de Larrivour méritent au contraire d’être traités comme des indices forts. Or, si l’on rassemble ce faisceau d’indices et qu’on les réinscrit dans le contexte de production de ces éditions, l’analyse bibliographique peut nous aider à réécrire et réinterpréter l’histoire éditoriale de l’Institution du Prince.
L’ÉDITION LYONNAISE DE DENIS DE HARSY ET DE GUILLAUME GAZEAU
Tesmoignage de || TEMPS, OV ENSEI- || GNEMENS ET ENHOR- || TEMENS POVR L’IN- || STITVTION || D’VN || PRINCE. || [Fleuron] || Composé par Feu maistre Guillaume BVDE’ || Conseiller du Roy, & Maistre des Re- || questes ordinaire de son Hostel. || A LYON, || PAR GVILLAVME GAZEAV. || M. D. XLVII.
Le seul état connu de l’édition lyonnaise nomme l’imprimeur Denis de Harsy au colophon (ill. 1) et le libraire Guillaume Gazeau sur la page de titre (ill. 2)11. Imprimée au format in-octavo, elle a nécessité treize feuilles par exemplaire12. L’existence de cette édition est aujourd’hui attestée par sept exemplaires dispersés à travers l’Europe, à quoi s’ajoute un exemplaire signalé comme détruit dans le catalogue de la British Library13. Tous les exemplaires conservés, à l’exception de celui d’Aberdeen qui est incomplet, arborent une page de titre strictement identique (ill. 2). L’exemplaire conservé à la bibliothèque universitaire de la Sorbonne serait cependant, d’après sa notice en ligne, daté de 1544. Il s’avère à l’examen que la date sur la page de titre a été modifiée : l’encre originale a été grattée, et assez sauvagement remplacée par une date antérieure. À cette intervention près, cependant, l’exemplaire de la Sorbonne est strictement identique à tous les autres et il ne fait aucun doute que la page de titre portait bien à l’origine la date de 1547.
Comme nous l’avons signalé, cette date contredit celle qu’indique le colophon sur le feuillet n8r°, lequel affirme que le livre a été « IMPRIME A LYON, PAR DENYS DE HARSY. M.D.XLIIII ». La suggestion de Delaruelle selon laquelle le compositeur en charge du colophon aurait préparé « M.D.XLIIII » au lieu de « M.D.XLVII » peut sembler à première vue pertinente et séduisante, et elle n’a guère incité les chercheurs à scruter la question de plus près. En faisant ainsi coïncider les dates figurant à la page de titre et au colophon, l’hypothèse de Delaruelle implique qu’il n’y a eu qu’une émission de cette édition : le livre aurait été imprimé intégralement par Denis de Harsy en 1547. Un examen des éléments typographiques présents dans les exemplaires préservés nous conduit cependant à remettre en question cette conclusion.
La majeure partie de l’ouvrage est typographiquement cohérente. À partir du cahier b, l’imprimeur a mis au point son édition en recourant à un ensemble modeste de caractères et de lettres ornées. Cette uniformité dans la mise en page et dans les choix typographiques s’applique à la plus grande partie du prologue et à tout le texte de l’Institution, ici divisé en chapitres qui présentent les principaux apophtegmes en fonction de leur auteur, et suivi d’un court index. Dans toute cette partie, l’imprimeur a utilisé un petit caractère correspondant, dans la nomenclature française du temps, à un Cicéro romain de 82 mm / 20 lignes14. Le choix de ce caractère petit et dense permet d’utiliser une quantité réduite de papier pour chaque exemplaire, ce qui ne veut pas dire que le livre a été produit sans soin. L’imprimeur a employé un éventail de lettres ornées, il a intégré des caractères grecs et inclus de nombreuses marginalia pour faciliter le repérage du lecteur dans le texte. Les fins de chapitres sont, en outre, soigneusement disposées en triangle (en cul-de-lampe), de façon à remplir la fin de page et à s’assurer que le chapitre suivant commence en haut de la page suivante15.
Le premier cahier est très différent. L’épître dédicatoire (f. a2-a6) est imprimée dans un corps beaucoup plus gros que celui qui est utilisé dans le reste du volume : l’imprimeur a choisi un Gros-romain qui couvre 116 mm / 20 lignes, ce qui crée un contraste assez fort avec la densité du texte principal. Même dans les quatre pages suivantes (f. a7 et a8), qui correspondent au début du prologue, le caractère utilisé s’avère différent de celui auquel on a recouru par la suite. On a cette fois affaire à un Cicéro de 90 mm / 20 lignes. Ce type, légèrement plus large que celui employé à partir du cahier b, ne permet pas de respecter strictement le même nombre de lignes par page : les quatre premières pages du prologue contiennent 30 lignes de texte, alors que les suivantes en comportent 32. Cette perte a été compensée par la largeur de la colonne dédiée au texte : elle est, dans le cahier a, de 3 mm plus longue que celle du cahier b16.
Dans le prologue, l’inévitable juxtaposition des caractères utilisés aux feuillets a8v° et b1r° rend ainsi le changement de typographie et de mise en page évident à l’œil nu (ill. 3). Une autre différence entre le premier cahier et le reste du volume réside dans le choix des lettres ornées, toutes blanches sur fond noir. Les lettrines utilisées à partir du cahier b sont des gravures sur bois, dans lesquelles seules les parties en relief ont été encrées. À l’inverse, les deux lettres ornées qui apparaissent dans le premier cahier résultent d’un autre procédé : la gravure sur métal à fond criblé (ill. 4).
Le premier cahier n’est donc, de toute évidence, pas conforme au reste du volume. Il est sans doute postérieur aux cahiers b-n : celui qui l’a imprimé a manifestement tenté d’imiter la mise en page, les caractères et les lettrines utilisés dans le volume original. Mais il ne disposait pas du même matériel que le premier imprimeur, ce qui rend sa tentative un peu vaine et laisse des hétérogénéités suffisantes pour alerter le bibliographe. Ce premier constat est corroboré par la modification de texture du papier. Bien que le format du livre rende l’identification de son fabricant impossible, on a clairement affaire à des rames issues de moulins différents17 : le papier utilisé pour l’impression du premier cahier est plus doux et moins rigide que celui employé dans le reste du volume.
Les matériaux utilisés prouvent donc de façon irréfutable que les deux parties du livre n’ont pas été imprimées en même temps. Mais les habitudes de composition ont, elles aussi, laissé des traces, et les formes ont été préparées de façon bien différente : dans le tirage initial, le compositeur n’a recouru aux réclames qu’au bas de la dernière page de chaque cahier ; le second compositeur, plus enthousiaste, en a inséré à chaque page. De même, le premier compositeur a plus volontiers recouru aux abréviations que le second. La comparaison entre les manchettes est également révélatrice : dans le premier cahier, elles sont dans le même corps que le texte principal, tandis que dans le reste du volume elles sont nettement plus petites. Enfin, comme nous l’avons noté, le premier compositeur a adopté la forme d’un triangle (cul-de-lampe) pour disposer ses fins de chapitre. Dans le premier cahier en revanche, on a opté pour une disposition en sablier à la fin de l’épître liminaire – la seule occurrence de cette forme dans le volume.
Le premier cahier a donc été imprimé après le reste du volume et dans un atelier différent. On peut déduire de ces évidences matérielles que la majeure partie du texte, à partir du cahier b, a bien été imprimée par Denis de Harsy en 154418 : les lettrines utilisées à partir du cahier b se retrouvent dans les autres éditions sorties de ses presses19. En revanche, le premier cahier a été refait pour le libraire lyonnais Guillaume Gazeau trois ans plus tard, par un autre imprimeur. Mais lequel ? Ici encore, l’analyse du matériel utilisé et la prise en compte des habitudes d’atelier nous livrent une piste solide pour identifier celui qui a pris en charge les seize nouvelles pages dont Gazeau avait besoin pour commercialiser le texte de Budé sous son propre nom.
L’indice le plus manifeste vient des deux lettrines. Les gravures sur métal H et S, qui apparaissent respectivement sur les feuillets a7r° et a2r°, appartiennent à des séries alphabétiques taillées pour l’imprimeur lyonnais Jean I de Tournes (1504-1564) (ill. 4)20. La série à fond criblé comprend trois tailles différentes (57 × 57, 41 × 41 et 26 × 26 mm), nos initiales appartenant à la plus petite des trois21. Cette identification est cohérente avec la date qui figure en page de titre : les mêmes lettrines ont été utilisées par Jean I de Tournes dans d’autres volumes imprimés au cours de la même période. Le H se retrouve dans son édition des Memoriae nostrae de Claude Paradin et le S dans la traduction de l’Oneirocritica d’Artémidore, par Charles Fontaine22.
Cette attribution coïncide aussi avec ce que nous savons par ailleurs de l’imprimeur et du libraire. La carrière de Jean I de Tournes a commencé en 1542 à Lyon où, au cours des décennies suivantes, il a géré une des entreprises d’imprimerie les plus rentables de la seconde moitié du XVIe siècle. Guillaume Gazeau, de son côté, est connu principalement comme éditeur et libraire. Sa carrière a commencé en 1547, après qu’il est devenu le gendre de Jean I de Tournes grâce au mariage contracté avec sa fille Nicole le 7 mars 1545, et a été dominée par le partenariat avec l’atelier de Tournes, qui compte pour plus de 90 % de sa production23. Il a travaillé occasionnellement avec d’autres imprimeurs mais ces collaborations sont l’exception plutôt que la règle24. Ces informations corroborent nos conclusions précédentes, mais apportent aussi un élément supplémentaire : Guillaume Gazeau n’a pas pu être impliqué dans l’édition originale de 1544. À cette date il n’était pas actif comme libraire. Il a sans doute simplement acheté le stock trois ans plus tard, et Jean I de Tournes a imprimé un nouveau premier cahier de façon à mettre les exemplaires sur le marché comme s’il s’agissait d’une nouvelle édition.
Il faut donc supposer que Denis de Harsy a entrepris l’impression pour un autre libraire, a priori difficile à identifier. Harsy était un imprimeur prolifique et, entre 1522 et 1555, il est connu pour avoir été impliqué dans plus de 200 éditions. Au cours de ces trois décennies, il a produit à la fois de gros volumes latins à usage scolaire et des textes vernaculaires plus littéraires25. L’importance et la variété de sa production signifient qu’il était susceptible de travailler avec un large éventail de libraires différents ; il n’a que très occasionnellement essayé de commercialiser directement les volumes qu’il imprimait. En 1544, année où il imprime le texte de Budé, il a fourni des livres pour Jean et François Frellon (1 titre), Antoine Vincent (4 titres), Michel Parmentier et Jean-François de Gabiano (3 titres). Il s’agissait exclusivement de textes religieux ou juridiques en latin, les seules autres impressions vernaculaires cette année-là étant deux histoires de Troie qu’Harsy a produites pour son propre compte26.
Denis de Harsy peut-il avoir envisagé de mettre lui-même sur le marché le texte de Budé ? Il semble peu probable que, après avoir imprimé le texte pour lui-même, il ait décidé ensuite de vendre son stock sans le commercialiser, et n’ait pas proposé d’imprimer un nouveau premier cahier pour Guillaume Gazeau. On peut donc supposer qu’il a travaillé pour quelqu’un d’autre, peut-être le principal partenaire pour lequel il travaillait quand il imprimait en français : le libraire Romain Morin. Ce dernier a surtout servi de facteur et de relais pour le libraire parisien à succès Galliot du Pré, mais il a aussi eu une modeste carrière en tant que libraire, qui a commencé en 151627. Durant les trois décennies suivantes, il a été associé à la production d’environ 70 éditions. À partir de 1531, il a travaillé exclusivement avec Denis de Harsy et n’a commandité que des œuvres en français. Quant à Harsy, il a travaillé pour Morin plus que pour aucun autre libraire quand il imprimait en français, même si leur production totale reste relativement modeste. Leurs liens ont dépassé ceux que partagent un imprimeur et un libraire puisque Harsy a vécu dans une maison dont Morin était propriétaire28.
Les publications produites dans le cadre de ce partenariat partagent certaines caractéristiques physiques avec l’édition de l’Institution du Prince. Les livres étaient imprimés en format in-8° et contenaient à peu près le même nombre de cahiers29. Cependant, à la différence de l’Institution, ces éditions étaient richement illustrées de gravures sur bois30. L’hypothèse est d’autant plus tentante que Romain Morin semble avoir cessé son activité en 1547. Bien qu’il ne meure qu’en 1560, cette cessation permettrait d’expliquer la réutilisation des cahiers b à n par Guillaume Gazeau cette année-là : il a pu acheter les feuilles au libraire. Toutefois, rien dans la production de Morin n’est véritablement comparable à l’Institution et le partenariat avec Harsy s’est surtout traduit par des publications plus précoces. Il est donc, au final, peu probable que Morin ait été le principal instigateur du choix et du travail éditorial sur ce texte.
L’ÉDITION DE LARRIVOUR PAR NICOLE PARIS
[Encadrement gravé] || DE || Linstitution du || Prince || Liure contenant plusieurs Histoires, En- || seignements, & saiges Dicts des Anciens || tant Grecs que Latins : || Faict & composé par Maistre Guil- || laume Budé, lors Secretaire & mai- || stre de la Librairie, & depuis Maistre || des Requestes, et Conseiller du Roy. || Reueu, enrichy d’Arguments, diuisé par || Chapitres, & augmenté de Scholies & An- || notations, Par hault & puissant Seigneur, || Missire Iean de Luxembourg, Abbé d’Iury || Imprimé à l’Arriuour Abbaye dudict Seigneur, || Par Maistre Nicole Paris. || 1547 || Auec priuilege du Roy, pour cinq ans. (ill. 5)
L’édition de l’Institution donnée par Nicole Paris est, à bien des égards, très différente de celle imprimée par Denis de Harsy. Cette dernière reste proche de la version courte, tandis que Jean de Luxembourg, qui s’est sans doute appuyé sur une version longue, a pris d’impressionnantes libertés avec les formulations de Budé. Delaruelle a livré sur cette édition de Larivour un jugement sévère et n’a consacré que quelques pages à son analyse31. Pourtant, à l’aune de la réception du texte, c’est une erreur : quels que soient ses mérites littéraires, l’édition de Nicole Paris a été bien plus influente que toutes les autres. Elle a un taux de conservation bien supérieur à celui de ses impressions contemporaines : nous avons pu repérer pas moins de 47 exemplaires en collections publiques. En outre, l’analyse des provenances démontre que c’était l’édition la plus souvent possédée (et peut-être la plus lue) par les personnalités politiques les plus influentes de l’Europe moderne.
On peut mesurer son importance relative à la vitesse à laquelle elle est entrée en possession d’un individu aussi puissant que le roi d’Angleterre : un exemplaire conservé à la British Library est protégé par une très belle reliure polychrome de la Renaissance exécutée pour Edouard VI32. Son importance s’est maintenue au XVIIe siècle comme on le voit, par exemple, sur l’exemplaire relié pour le second fils d’Henri IV, Gaston d’Orléans : aujourd’hui conservé dans les collections de la BnF, il porte les armes du duc et a sans doute rejoint la collection royale assez rapidement, dans les années 166033. Une autre copie, désormais en mains privées, était à l’origine en possession de Louis XIII, comme l’atteste la reliure, qui porte les armes du roi et celles de sa mère, Marie de Médicis34. La date de la reliure, estimée à 1620-1630, de même que la présence des armes du roi et de sa mère, laissent à penser que le livre a été acheté pour les années de formation du roi et peut avoir été utilisé pour son éducation. Autre figure majeure du XVIIe siècle à avoir possédé le texte : le cardinal Mazarin, dont l’exemplaire n’a pas quitté sa bibliothèque35. D’autres copies sont passées entre les mains de l’aristocratie et de l’élite ecclésiastique de l’Europe moderne, comme on le voit par les exemplaires possédés à la fin du XVIe siècle par Edouard Seymour, comte d’Hertford (1539-1621), Arthur Throckmorton (-1626), conseiller d’Elisabeth Ire, ou le cardinal Girolamo Della Rovere (1528-1592)36.
Si les éditions de Lyon et de Larrivour offrent des textes différents et ont connu des fortunes variées, tant quantitativement (en termes d’exemplaires conservés) que qualitativement (eu égard aux marques de provenances), elles ont cependant un point commun : l’histoire de leur publication est étonnamment complexe. Pourtant, si l’on regarde la littérature scientifique concernant l’édition de Larrivour, cette histoire semble, à nouveau, très simple : on ne connaissait jusqu’alors qu’une version de l’édition de Larrivour, datée de 154737. Or, au cours de la recherche entreprise en vue de la publication de la bibliographie French Vernacular Books, une variante a été identifiée à la Bibliothèque de l’Université de Leyde : la page de titre, différente des autres, y porte la date de 154638. Des recherches complémentaires ont depuis permis l’identification d’un second exemplaire à Turin, rigoureusement identique au premier39 (ill. 6) :
DE || LINSTITVTION || DV PRINCE, || Liure Contenant plusieurs Histoires tant Grecques || que Latins : Ensemble plusieurs enseignemens, & || saiges dicts des Anciens : || Faict & composé par Maistre Guillaume || Budé, Secretaire & Maistre de la Librairie || du Roy, Et reueu, & diuisé par Chapitres, & || augmenté d’Annotations, Par hault & || puissant Seigneur, Missire Iean de Luxem- || bourg, Abbé d’Iury, de la Riuou, & de || Salmoisy. || [devise : ASCENDAM, ET APPRAEHENDAM FRVCTVS EIVS.] || A LA RIVOV, || Par le commandement dudict Seigneur. || 1546
Le colophon et le texte principal des exemplaires datés de 1546 et 1547 sont les mêmes, seuls les préliminaires présentent des différences. Toutefois, contrairement à l’édition de Harsy et Gazeau, un seul imprimeur est impliqué dans les émissions de Larrivour : toutes les feuilles contenues dans ces versions ont été imprimées par Nicole Paris. Le confirment non seulement la cohérence dans les caractères utilisés et la mise en page, mais aussi, pour l’émission de 1546, l’utilisation de la marque de Nicole Paris sur la page de titre. Dans l’émission de 1547, la lettrine H sur le feuillet A1v° et le bandeau supérieur de l’encadrement en page de titre peuvent ainsi être retrouvés dans son Antiphonaire de 154540.
Les libraires peinant à écouler un stock avaient coutume au XVIe siècle de remettre en vente l’édition sous une date de publication plus récente, de façon à relancer une demande défaillante. Dans le cas de l’édition de Larrivour cependant, tel n’est pas le raisonnement qui a conduit à la création de ces émissions différentes. Tout d’abord, les taux de survie ne sont pas congruents à une telle pratique : si le livre avait simplement fait l’objet d’une nouvelle émission, la publication initiale se serait davantage vendue (et donc aurait été mieux conservée) que la seconde émission. De toute évidence, ce n’est pas le cas ici : deux exemplaires datés de 1546 contre 45 datés de 1547. Ensuite, les différences ne se limitent pas à un changement de date sur la page de titre. Si la majeure partie du texte est identique (du cahier B au cahier S), le premier cahier de 1547 contient un poème préliminaire (ill. 7) absent de l’émission de 1546 (ill. 8) ; les deux dernières pages de l’épître préliminaire ont été complètement refaites, de même que la page de titre ; enfin, le verso de la page de titre, blanc dans l’émission de 1546, contient un privilège royal obtenu par l’imprimeur dans celle de 1547 (ill. 9 et 10). L’émission de 1547 résulte manifestement d’un effort conscient pour modifier le contenu et la présentation du cahier initial, et non d’une simple tentative pour écouler une édition qui aurait échoué à trouver son public.
Dans de telles circonstances, le cahier A requiert un examen attentif41. Le premier point qui frappe le bibliographe moderne est la structure irrégulière du cahier. Dans tous les exemplaires conservés, il ne comprend que quatre feuillets, en dépit du fait que le registre imprimé au-dessus du colophon indique qu’il devrait en comporter six42. La succession des signatures [A1], A4, [A5], [A6] laisse à penser qu’il aurait dû y avoir deux feuillets supplémentaires insérés entre la page de titre et le feuillet A4. Cette hypothèse est confirmée par la pagination, qui débute au f. B1 recto par « 13 », comme l’on pourrait s’y attendre après un cahier de six, et non de quatre feuillets. Autrement dit, deux feuillets signés A2 et A3 ont probablement été supprimés de tous les exemplaires. Cela impliquerait qu’il existait un état initial comportant six feuillets et que, par conséquent, l’émission de 1546 ne serait, au mieux, qu’une seconde émission.
L’énigme devient encore plus complexe si l’on examine la couture de ce cahier. Dans les exemplaires consultés, il est clair que les feuillets signés A4 et [A5], conjoints, résultent du pliage d’une même feuille (ill. 11). Cette feuille faisait partie de la toute première émission, et elle a été réutilisée dans celles de 1546 et 1547, même si la signature apparaissant sur la première page devenait ainsi erronée. Ce seraient les seules pages survivantes d’une version antérieure, qui devait contenir les pièces préliminaires43. Or le fait qu’il s’agit des deux moitiés d’une même feuille pose problème : dans un livre in-folio, un ternion aurait dû comporter trois feuilles, contenant respectivement le premier et le dernier, le second et le cinquième, le troisième et le quatrième feuillets. On ne peut trouver sur une même feuille les feuillets numérotés 4 et 5 que dans un quaternion comportant huit feuillets, et non dans un ternion en comptant six (graphique ill. 12).
Faut-il en déduire que la première version du cahier initial comportait six feuillets (comme indiqué dans le colophon), que la seconde en comportait huit, et celles de 1546 et 1547 quatre ? Si l’on suit cette logique, ce sont deux versions des préliminaires qui ont disparu. Les pratiques d’atelier au XVIe siècle permettent cependant de suggérer une autre hypothèse. Les préliminaires étant traditionnellement mis sous presse en dernier, il arrivait qu’on imprimât l’intégralité du volume non seulement sans avoir imprimé les parties préliminaires, mais avant même que le texte du (ou des) premier(s) cahier(s) fût prêt44. On se contentait d’estimer le nombre de pages susceptibles d’être occupées par les préliminaires, si bien que des erreurs de calibrage pouvaient être commises45.
En gardant cette réalité à l’esprit, en dépit de ce que suggère le registre, on peut supposer que le cahier initial n’a jamais comporté six feuillets – la première version en comportant d’emblée huit. Cette hypothèse semble confirmée par le fait que le f. [A6/8] est paginé « 15 » et « 16 » alors que les premiers feuillets ne sont pas numérotés.
Il est difficile de déterminer la date de la version originale de l’édition de Larrivour. La publication de l’émission de 1546 nous donne un terminus ante quem défini, mais approximatif. Pour une datation plus fine, il faut se tourner vers les indices qui restent des activités de Nicole Paris et de Jean de Luxembourg. Après avoir étudié à l’Université de Paris, Nicole Paris a effectué toute sa carrière d’imprimeur à Troyes46. Actif à partir de 1542, il a d’abord concentré sa production sur des œuvres connues, avant d’étendre son répertoire et d’intégrer des textes nouveaux. Paris a su saisir des opportunités locales, en collaborant en particulier avec des membres de la hiérarchie ecclésiastique pour imprimer un bréviaire à l’usage de Troyes et des textes pour la province de Sens47. Il a également travaillé pour les Cisterciens en produisant un impressionnant antiphonaire commandité par l’abbé de Clairvaux en 1545 – un épais volume rubriqué48. Sa proximité avec l’ordre cistercien et la qualité de sa production ont pu lui permettre d’entrer en relation avec Jean de Luxembourg. Celui-ci était abbé du monastère cistercien de Larrivour, près de Troyes. Homme ambitieux, il avait des prétentions d’auteur et parvint à attacher Paris à sa cause.
On trouve les premiers signes tangibles de ce partenariat dans le colophon d’un livre publié en 1546, dans lequel Paris se décrivait comme étant récemment devenu l’imprimeur officiel de Luxembourg49. Ce dernier avait un tel intérêt pour l’imprimerie qu’il parvint à convaincre Paris d’installer sa presse dans son monastère : des pages de titre et colophons indiquent que l’imprimeur a fait au moins un séjour prolongé chez l’abbé au cours des mois qui ont suivi50. On a pu suggérer que cette adresse n’était qu’une complaisance de la part de Paris, et que les livres en question avaient en réalité été imprimés à Troyes51. Rien ne corrobore une telle affirmation, pourtant souvent reprise, qui semble fondée sur une compréhension anachronique de leur relation : le fait que Paris ait aussi produit pour Luxembourg des œuvres dans lesquelles il indique qu’elles ont été imprimées à Troyes suffirait à l’affaiblir52. Paris a très bien pu passer la majeure partie de l’année 1546 à Larrivour, avant de retourner à Troyes, où il a continué son activité d’imprimeur l’année suivante.
Le moment où Paris a fait ce déplacement est très important à déterminer pour cette étude car l’Institution de Budé a été imprimée à Larrivour, indication qui pourrait nous aider à dater la première émission. Nous savons que Nicole Paris a achevé d’imprimer l’antiphonaire cistercien en avril 1545. En 1546, il s’est rendu à l’abbaye de Larrivour à l’invitation de Luxembourg, mais nous ignorons la date exacte de ce séjour. Seuls les comptes couvrant la période qui va d’octobre 1546 à octobre 1547 ont été conservés53. Ils offrent une impressionnante coupe transversale sur les initiatives de l’abbé dans le monastère. Ils incluent même des dépenses insignifiantes, comme la réparation d’une cheminée dans la chambre de Luxembourg (cinq sous) ou des investissements banals comme des travaux d’amélioration sur les fenêtres et les portes de son bureau54. Ils mentionnent aussi des dépenses ne concernant pas directement l’abbaye, comme la dette contractée auprès d’un marchand tanneur de Troyes55, mais on n’y trouve rien à propos d’une impression. Or l’arrivée d’une presse dans l’abbaye aurait généré des coûts suffisamment importants pour être consignés dans le registre. Cela tendrait à indiquer que la presse était active dès avant octobre 1546, ce qui concorde avec le fait que toutes les impressions conservées situées à Larrivour sont datées de 154656. Deux autres livres également imprimés pour Luxembourg en 1546 ont cependant été réalisés à Troyes et peuvent aisément avoir été publiés après que l’imprimeur a quitté Larrivour.
Comment expliquer l’existence de ces différentes émissions ? Les raisons n’en sont pas aisées à cerner. Un premier indice réside peut-être dans les variations qui affectent la partie préliminaire : dans certains exemplaires, [A6/8] recto comporte une manchette disant « La Langue Grecque introduicte en France, par le Roy Francois premier de ce nom » (ill. 13), alors qu’elle est absente dans d’autres exemplaires. La suppression de cette mention marginale mérite qu’on s’y attarde : a-t-elle pu être perçue comme sujet d’une controverse potentielle ou digne d’une attention particulière ? Il est notable que le texte a été enlevé, et non pas ajouté, par le compositeur au cours du processus d’impression. On en a la preuve par les blancs insérés pour combler l’espace auparavant occupé par la note. Le compositeur a choisi des blocs qui dépassent légèrement et sont dès lors visibles sur certains exemplaires – parfois légèrement encrés, parfois en impression aveugle57. La note est présente dans les deux exemplaires de l’émission de 1546, preuve supplémentaire qu’il y a eu suppression.
Cette note entre en cohérence avec le contenu de la dédicace à François Ier, qui célèbre sa réputation de roi humaniste en lui attribuant l’initiative d’avoir introduit la langue grecque dans son royaume. Ce n’est pas tout à fait juste : Budé a appris cette langue avant l’accession au trône du roi, lequel a plutôt aidé à son enseignement en créant le Collège royal et en encourageant l’imprimeur Robert Estienne à acquérir les caractères nécessaires. En outre, l’émission de 1547 a été publiée après la mort de François Ier (le privilège est daté du 9 mai 1547) et l’on peut supposer que des compliments trop appuyés pour son père auraient paru irrespectueux pour le nouveau monarque Henri II. Mais l’explication la plus convaincante réside dans la perception d’une connexion entre ceux qui étudiaient le grec et les hérétiques58. Dans ce cas, la mort d’un roi traditionnellement perçu comme généreux pour les lettrés humanistes et l’accession au trône d’un monarque moins lettré ont pu encourager à atténuer cet aspect.
Si cela peut expliquer la disparition de la manchette, l’apparition d’un dizain dans l’émission de 1547 pose un autre problème (ill. 7). Ces vers encouragent le lecteur à lire toute l’œuvre (« veoy-le au long ») plutôt que de juger trop rapidement. Pourquoi fallait-il défendre la publication du livre ? C’est d’autant plus surprenant que, si l’on compare les émissions de 1546 et 1547, c’est clairement celle de 1547 qui a été le plus diffusée. On peut le déduire non seulement des taux de conservation, mais aussi des références contemporaines.
À l’entrée Jean de Luxembourg, les bibliographes La Croix du Maine et Antoine du Verdier ne mentionnent que l’existence de l’émission de 154759. On peut en conclure que la version initiale a été perçue comme problématique, mais pas celle de 1547. Dans de telles circonstances, au moins une partie du problème devait provenir du contenu manquant : les pages préliminaires supprimées ont dû être considérées comme trop compromettantes pour être maintenues.
Après la publication de ces émissions, Nicole Paris et Jean de Luxembourg ont tous deux disparu. Après avoir été nommé évêque de Pamiers, Luxembourg est mort en faisant route pour Rome en 154860. La disparition de Nicole Paris a également été rapide. Son activité en 1547 est la dernière dont nous ayons témoignage et, contrairement aux autres imprimeurs et libraires, il n’est pas mentionné dans le registre des taxes de Troyes en 154861. Le dernier document sur lequel son nom est mentionné est un nouveau privilège obtenu par Nicole Paris pour l’Institution du prince en septembre 1547 mais, bizarrement, ce privilège concerne une édition produite non pas sur ses presses, mais à Paris pour Jean Foucher. C’est sur cette édition que nous allons désormais nous pencher.
L’ÉDITION PARISIENNE DE JEAN FOUCHER
LE LIVRE DE || L’INSTITVTION DV || Prince, au Roy de France treschrestien || Francoys premier de ce nom, faict & || composé par M. Guillaume Bu- || dé son secretaire & maistre || de sa librairie || [marque de Jean Foucher] || Auec Priuilege du Roy pour cinq ans. || A PARIS, || Chez Iehan Foucher, a l’escu de Florẽ- || ce, en la rue Sainct Iacques. || 1547. || (ill. 14)
L’édition parisienne de Jean Foucher est la plus proche des leçons des manuscrits longs. Imprimé par le maître imprimeur à succès Jacques Bogard pour Foucher, le texte est présenté dans un format in-octavo – comme c’était déjà le cas pour l’édition lyonnaise, mais avec un titre proche de celui de l’édition de Larrivour62. Ce volume visait un marché différent de celui de la luxueuse édition de Larrivour, mais les divergences ne sont pas seulement commerciales : le texte lui-même est très différent de celui réécrit par Jean de Luxembourg. L’éditeur, Richard Le Blanc, raconte que le texte lui a été transmis par Jean Foucher, mais qu’il avait été « copié de quelque ignorante personne en sorte qu’il n’y avoit aucune observation d’orthographe, ny forme de distinction, par quoy l’on peust cognoistre le sens, et sentence du texte »63.
Le Blanc fait-il référence à l’édition de Larrivour ? Il en avait certainement connaissance : non seulement il a gardé presque le même titre et suivi de près le découpage en chapitres, mais sur le verso de la page de titre apparaît le privilège obtenu par Nicole Paris. Ce n’est pas le privilège original obtenu en mai 1547, mais un second privilège, demandé quelques mois plus tard et daté du 13 septembre 1547. Ce double privilège peut sembler surprenant. La durée des privilèges est la même, tous deux sont signés par Robillart. La seule différence notable concerne la formulation à l’égard de l’objet du privilège. Dans le premier cas, les lettres semblent désigner seulement l’impression précise que Paris a déjà réalisée (« qu’il a puis nagueres faict imprimer »), tandis que la seconde adopte un libellé plus englobant, référant à ses droits sur le texte (« faculté et pouvoir d’imprimer »). Ce privilège prouve en tout cas que, contrairement à ce que supposait Delaruelle, l’édition parisienne n’a pas été diffusée avant septembre 1547 et qu’elle est, par conséquent, la dernière des trois éditions64.
L’édition Foucher existe dans deux versions différentes, l’une portant sur la page de titre la date de 1547, la seconde celle de 1548 (ill. 15). Un examen attentif d’exemplaires appartenant à l’une et l’autre variantes démontre qu’il s’agit de deux émissions issues de la même édition : les caractères sont disposés exactement de la même manière dans les deux cas, et une page de la première émission est parfaitement superposable à la page correspondante de l’autre émission. En outre, les pages de titre elles-mêmes montrent que l’émission de 1548 a été préparée et imprimée en même temps que celle de 1547 : le tirage est certainement le même, le chiffre 8 remplaçant simplement le chiffre 7. Dans ce cas, la motivation de l’imprimeur semble simplement commerciale, et parfaitement conforme à des pratiques courantes dans le monde du livre parisien. Les imprimeurs intégraient de telles stratégies commerciales dans leurs tirages : ils composaient d’emblée des pages de titre différentes, pourvues d’une autre date au titre ou en laissant en blanc le dernier chiffre de la date, de façon à pouvoir le compléter plus tard65.
Comme le privilège obtenu par Nicole Paris est daté de septembre 1547, l’édition a dû être publiée dans les derniers mois de l’année. Il était donc peu probable que tous les exemplaires produits pour Jean Foucher fussent vendus avant la fin de l’année calendaire. Dans de telles circonstances, la production d’une variante datée de 1548 obéit à une stratégie commerciale avisée. En produisant simultanément des pages de titre datées de 1547 et 1548, l’imprimeur réduisait ses coûts.
Ainsi se résume la chronologie désormais établie des trois éditions (graphique ill. 16) :
INTERPRÉTER LES RÉSULTATS
Cette nouvelle chronologie jette un éclairage inédit sur la publication de l’Institution du prince de Budé. Elle révèle que, loin d’être les protagonistes d’une affaire simple, ceux qui ont essayé de rendre ce texte plus largement accessible ont dû affronter de nombreux obstacles. C’est d’autant plus intéressant que les éditions de Lyon et de Larrivour témoignent de problèmes similaires, bien que, si l’on en croit le privilège, l’édition de Larrivour ait été produite dans l’ignorance de l’édition lyonnaise de 1544, puisqu’il est indiqué que l’œuvre n’avait pas encore été imprimée (« qui par cy devant n’avoit esté mis en lumiere »). Pourtant, dans les deux cas, du texte a sans aucun doute été supprimé. Dans l’édition de Lyon, la fonte plus large utilisée pour la dédicace pouvait constituer une manière, malgré la moindre quantité de texte, de couvrir une plus grande surface, de façon à remplir un cahier entier. Dans l’édition de Larrivour, des pages entières ont été supprimées. La clef pour comprendre ces similarités se trouve sans doute dans les circonstances entourant la publication de ces éditions.
Nous savons maintenant de façon certaine que l’édition lyonnaise a été imprimée dès 1544, et que l’édition de Larrivour a été réalisée au plus tard en 1546 : le contexte de leur publication en est radicalement modifié. La mort de François Ier le 31 mars 1547 ne suffit plus à expliquer pourquoi le texte a été imprimé. Il faut désormais tenir compte de l’atmosphère qui assombrit les dernières années de son règne – une période marquée par la maladie du roi et par la montée en puissance des factions, surtout après 154466. À l’intérieur du royaume, la lutte contre l’hérésie devient de plus en plus violente et affecte directement le monde du livre. À la suite des 25 Articles de Foi promulgués par la Faculté de Théologie de la Sorbonne en 1543, deux éditions de l’index des livres prohibés sont publiées en 1544 et 154567. Les dangers encourus par les libraires et les imprimeurs dans les dernières années du règne sont symbolisés par l’arrestation de Dolet, son procès et son exécution. Peut-on établir un lien entre ces temps difficiles et le sort qu’ont connu les éditions de 1544 et 1546 ?
La première édition sortit des presses lyonnaises en 1544, la seconde fut produite près de Troyes en 1546, et la troisième à Paris en 1547. Un nom vient alors à l’esprit, celui d’un homme qui a suivi le même itinéraire, à peu près au même moment : c’est celui d’Étienne Dolet. Auteur et imprimeur controversé, il avait, en 1544, déjà été emprisonné à plusieurs reprises, pendant cinq mois en 1542 et dix mois en 154368. C’est à l’intervention personnelle du Roi qu’il dut à chaque fois son salut. Alors que son procès devait se tenir à Paris, Dolet parvint à s’évader de Lyon en janvier 1544, et trouva refuge dans le Piémont. Au cours des mois suivants, il y écrivit les épîtres qui allaient nourrir le Second Enfer. En mai, il décida de rentrer en France dans les fourgons de l’armée d’Italie, rappelée pour repousser l’invasion de la Champagne par Charles Quint. Si l’on en croit le Second Enfer, il passa par Lyon, le temps d’embrasser les siens et – peut-être – d’imprimer ses textes. Mais il ne resta pas longtemps dans la cité rhodanienne et se rendit rapidement à Troyes, vraisemblablement pour rencontrer le roi. C’est là qu’il fit imprimer, dans une version beaucoup plus soignée que l’édition lyonnaise, son Second Enfer. Or celui auquel il s’adressa alors n’est autre que l’imprimeur de l’Institution du Prince, Nicole Paris69. Son escapade ne dura cependant pas longtemps : Jacques de Vaulx, arrivé à Troyes fin août, fit aussitôt enfermer le fugitif. Il le transféra rapidement à Paris : emprisonné à la Conciergerie pendant près de deux ans, Étienne Dolet fut finalement brûlé place Maubert, le 3 août 154670.
Les similarités entre les routes suivies par le texte de Budé et par Dolet, la connexion qui existe entre l’imprimeur lyonnais et Nicole Paris, et la coïncidence entre le moment où Dolet commence son voyage et la suppression de l’édition Harsy sont tous intrigants et méritent un examen plus attentif. La première impression lyonnaise ne date pas seulement de l’année où Dolet s’évada de sa prison lyonnaise, mais aussi de celle où le Parlement de Paris ordonna à nouveau que certains livres imprimés par Dolet et condamnés par la Sorbonne fussent brûlés (14 février)71. L’édition de Larrivour fut imprimée en 1546, au moment où Dolet fut exécuté. Ces censures offraient des raisons suffisantes de ne pas diffuser ces éditions si elles faisaient référence à Dolet. Les trois éditions semblent n’avoir été largement distribuées qu’en 1547 : on ne trouve aucune référence à un exemplaire portant la date de 1544 en page de titre pour l’édition de Harsy, et 1547 est la date à laquelle apparaît l’édition de Nicole Paris à la Foire de Francfort72. En outre, les privilèges des éditions troyenne et parisienne sont respectivement datés de mai et de septembre, et donc tous deux postérieurs à la mort du roi François Ier. Ces coïncidences circonstancielles, pour troublantes qu’elles soient, ne peuvent cependant suffire à établir de façon sûre l’implication de Dolet dans les premières éditions de l’Institution du Prince.
Mais il existe des indices plus décisifs en faveur de cette hypothèse. Le premier est l’admiration manifeste que Dolet éprouvait à l’égard de Budé, et les liens intellectuels avérés entre les deux hommes. On trouve, dès le recueil d’Epistolae adjoint aux Orationes duae in Tholosam, un échange entre Dolet et Budé, mais aussi une pièce de vers adressée à Budé, dont Dolet se faisait par ailleurs le champion dans son Dialogus De imitatione ciceroniana adversus Desiderium Erasmum publié en 153573. L’amitié entre les deux hommes n’a pas été seulement épistolaire : si l’on en croit Dolet, ils se sont rencontrés au moins une fois, lors du banquet de réjouissances offert à Dolet après le pardon du Roi dans l’affaire Compaing, en février 1537, que l’Orléanais raconte en détail dans le long poème qui ouvre le livre II des Carmina. De façon plus déterminante encore, dans les deux tomes des Commentarii linguae Latinae, respectivement publiés en 1536 et 1538, Dolet entend mettre ses pas dans ceux de Budé74. Leur titre, leur méthode, l’ambition qu’ils affichent sont superposables à ceux de Budé. Chacun des tomes est précédé d’une lettre et d’un poème adressés à l’auteur du De Asse, et l’on dénombre dans ces Commentarii nombre de plagiats avérés des Annotations aux Pandectes75. Dans ces deux préfaces, Dolet réclame surtout la caution et le soutien de Budé pour son projet de devenir historiographe du roi, projet dont l’ambition et la teneur tissent d’étroits jeux d’échos avec les préoccupations qu’exprime Budé dans l’Institution76. En outre, à partir de 1540 (et peut-être dès avant), Dolet s’emploie à promouvoir le français et « met en scène une sorte de tournant de sa production, de conversion au vulgaire »77, particulièrement visible dans la préface, adressée à Guillaume Du Bellay, aux trois traités qui devaient s’inscrire dans un ensemble plus large, intitulé L’Orateur françoys : La Maniere de bien traduire d’une langue en aultre, Les accents de la langue françoyse et La punctuation de la langue françoyse. Il y cite Budé parmi les auteurs qu’il entend imiter en illustrant sa langue maternelle78.
Mais la preuve la plus convaincante du lien entre Dolet et l’Institution se trouve dans le texte de l’édition lyonnaise : ses spécificités graphiques sont particulièrement révélatrices. Sur le plan de la ponctuation tout d’abord, on est frappé par la surabondance des virgules, présentes avant toutes les occurrences de « qui » ou « que » (pronom relatif ou conjonction de subordination) et des conjonctions de coordination « et », « ou », « ne ». En second lieu, les choix orthographiques sont particuliers : terminaison des participes passés masculins pluriels en « -és » ; désinences de 2e personne du pluriel en « ez » ; restitution quasi systématique des consonnes finales morphologiques du singulier au pluriel (« touts », « gents », participes présents en « ants », etc.) ; graphies archaïsantes ou prétendument étymologiques, lisibles dans « aultre », « memoyre », « authorité », etc. Tous ces éléments coïncident parfaitement avec les choix faits par Dolet dans ses propres impressions, et ils sont d’autant plus intéressants qu’ils ne sont pas suivis dans le premier cahier, celui qui n’a pas été imprimé par Harsy.
Si nous n’avons pas de preuve que Dolet a été le commanditaire de l’impression et qu’il a demandé à Harsy d’imprimer le livre, nous pouvons supposer qu’il en a préparé la copie. L’implication de Dolet donnerait sens aux anomalies bibliographiques identifiées dans les éditions de Lyon et de Larrivour : dans les deux cas, les imprimeurs ont pu utiliser des textes de louange écrits par Dolet en hommage à Budé. La valeur d’une telle clef est en outre corroborée par un contexte attestant de pratiques éditoriales où le nom de Dolet a volontairement été effacé79, parfois par réfection du cahier initial. C’est le cas pour les Questions tusculanes : Guillaume Berthon a pu démontrer que les deux versions publiées sous les noms de Dolet (en 1543) et Sabon (sans date, ou avec la date de 1549) sont en fait une même édition. Les cahiers b à p sont communs aux deux ouvrages, seul le cahier a étant intégralement différent : dans les exemplaires au nom de Dolet, le cahier contient l’épître en forme de plaidoyer que l’auteur adresse au roi ; dans les exemplaires au nom de Sabon et Constantin, le même cahier ne contient qu’une table détaillée de l’ouvrage80. En d’autres termes, Sabon et Constantin semblent avoir usé de la même stratégie que Gazeau.
Un ultime élément de preuve vient du fait que l’on sait que Dolet a délégué l’impression de certains de ses titres à d’autres imprimeurs durant les dernières années troublées de son existence lyonnaise. C’est d’autant plus intéressant que les recherches récentes tendent à confirmer que l’imprimeur qui a remplacé le premier cahier de l’édition lyonnaise de 1547, Jean de Tournes, a été impliqué dans ce processus81. Jean de Tournes est connu pour s’être engouffré dans la brèche ouverte par l’arrestation, la condamnation et l’exécution de Dolet, et pour avoir publié nombre de textes déjà parus chez Dolet. La seule différence réside dans le fait que « les livres de de Tournes ne nomment jamais Dolet et suppriment systématiquement les pièces liminaires signées par ce dernier »82.
Les anomalies bibliographiques relevées dans les premières éditions de l’Institution du Prince de Guillaume Budé nous ont conduits à renouveler l’approche de ces premières impressions. Le texte a d’abord été imprimé à Lyon en 1544, et non en 1547 comme le croyaient auparavant les chercheurs. En outre, la plus influente de ces éditions, celle de Larrivour, n’a pas été imprimée pour la première fois en 1547, mais en 1546 au plus tard. Dans les deux cas, certains des textes préliminaires qui accompagnaient à l’origine ces éditions ont été supprimés par les imprimeurs – probablement parce qu’ils contenaient des éléments susceptibles d’attirer l’attention des autorités. Dans un cas, ces suppressions ont entraîné un remaniement complet du premier cahier ; dans l’autre, elles se traduisent par la disparition de certains feuillets, et par un mixage des feuilles originales avec des feuilles réimprimées. Dans cette perspective, l’édition parisienne publiée par Jean Foucher constitue une tentative plus tardive pour offrir une version améliorée de l’Institution, dans un contexte politique et intellectuel différent de celui des éditions de Lyon et Larrivour.
La chronologie ainsi reconstituée de la publication de l’œuvre, les spécificités orthotypographiques de l’édition lyonnaise et la manière dont ses ouvrages ont été publiés après son arrestation cristallisent l’attention sur Étienne Dolet comme l’origine probable des textes supprimés, qu’il en soit l’auteur ou l’objet. La proximité de Dolet avec Nicole Paris, son séjour à Troyes à peine quelques mois avant la date présumée de la première édition de Larrivour et la suppression concordante de textes liminaires dans les éditions de Lyon et de Larrivour constituent autant d’évidences particulièrement suggestives. La disgrâce de cet homme, imprimeur, libraire, auteur, éditeur et traducteur renommé de textes humanistes, eut une influence profonde sur le monde du livre français du XVIe siècle ; et l’autocensure exercée par plusieurs éditeurs contemporains de Dolet est un phénomène reconnu, mais qui reste particulièrement difficile à identifier. En l’occurrence, une analyse bibliographique attentive nous a permis non seulement de rééchelonner complètement la chronologie de ces éditions, mais aussi d’établir le rôle joué dans la diffusion de ce traité par une figure majeure de l’imprimerie française de la Renaissance.
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1 Marie-Madeleine de La Garanderie, « Budé (Guillaume) (1468-1540) », Centuriae Latinae, Genève, Droz, 1997, p. 221.
2 Louis Delaruelle, Guillaume Budé. Les origines, les débuts, les idées maîtresses, Paris, Champion, 1907 (reprint Slatkine, 1970), chap. VI : « Le Recueil d’Apophtegmes offert à François Ier », p. 199-220.
3 Voir surtout Guy Gueudet, « Guillaume Budé, parrain d’“Encyclopédie”, ou le vrai texte de L’Institution du prince », dans Le Génie de la forme, mélanges de langue et littérature offerts à Jean Mourot, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1982, p. 87-96.
4 G. Gueudet et M.-M. de la Garanderie (« Ce que la culture peut espérer du pouvoir. À propos de l’Institution du Prince de Guillaume Budé » dans Guillaume Budé, philosophe de la culture, édition posthume établie par Luigi-Alberto Sanchi, Paris, Classiques Garnier, 2010, p. 205-219) estiment, contrairement à L. Delaruelle, que les ajouts sont attribuables à Budé.
5 Budé est présenté comme « secrétaire du roi » et « maistre de sa librairie », poste auquel il a été nommé au début de l’année 1522. En revanche, il n’y porte pas le titre de « maistre des requestes », ce qu’il est devenu en août 1522 et restera jusqu’à sa mort. Voir Delaruelle, Guillaume Budé, ouvr. cité, p. 232.
6 Publié dans Le Prince dans la France des XVIe et XVIIe siècles, Paris, PUF, 1965.
7 On signalera une édition partielle procurée par Maxim Marin (Le livre de l’institution du prince (Kap. I-XX) : nach der Ausgabe von Paris 1548 herausgegeben, mit den Ausgaben von l’Arrivour und Lyon (1547) verglichen, übersetzt und kommentiert, Francfort-sur-le-Main, P. Lang, 1983), qui confronte les versions imprimées, mais selon des présupposés discutables. Bruno Petey-Girard s’appuie sur l’édition parisienne de Richard Le Blanc dans son article « Libéralité humaniste – mérite humaniste », Le Verger, 2 (juin 2012) [en ligne]. http://cornucopia16.com/blog/series/le-verger-bouquet-ii-la-liberalite-au-xvie-siecle/ (page consultée le 27 février 2014).
8 Delaruelle, Guillaume Budé, ouvr. cité.
9 Ainsi Jeanne Veyrin-Forrer, dans l’aperçu qu’elle donne (avec Pierre Gasnault) des travaux de Budé pour l’exposition réalisée en 1968, indique-t-elle que le livre a été publié pour la première fois, dans trois éditions simultanées, en 1547 : Guillaume Budé, Paris, Bibliothèque nationale, 1968, p. X et pp. 20-21.
10 Voir p. ex. M.-M. de la Garanderie, « Guillaume Budé, prosateur français », art. cité ; Mireille Huchon, « Rabelais, les universités et la mobilité : les phantasmes du Pantagruel à des fins de propagande », dans Les échanges entre universités européennes à la Renaissance, Genève, Droz, 2003, pp. 143-158 (plusieurs articles de M. Huchon font référence à ce texte) : l’anomalie est généralement relevée, mais non commentée.
11 Universal Short Title Catalogue (http://www.ustc.ac.uk, désormais abrégé en USTC) n° 306 et Andrew Pettegree, Malcolm Walsby et Alexander Wilkinson, FB : French Vernacular Books. A Bibliography of Books Published in the French Language Before 1601, Leyde, Brill, 2007, n° 7814.
12 Les signatures des cahiers comprenant chacun 8 feuillets vont de a à n, et le livre est folioté de 2 à 103 avec un feuillet blanc à la fin.
13 Aberdeen University Library : Drummond 816. Bayerische Staatsbibliothek (Munich) : Pol g 139. Bibliothèque nationale de France (Paris) : Rés. P F 21. Bibliothèque de l’Arsenal (Paris) : 8° S 3873. Bibliothèque de l’École normale supérieure, Lettres Ulm (Paris) : Rés. XV-X S G ip 414 12°. Bibliothèque municipale de Reims : Rés. P 312. Österreichische Nationalbibliothek (Vienne) : *35 S 125. British Library (Londres) : 8009 a 39.
14 Sur les caractères typographiques et leurs mesures, voir les travaux de Hendrik D. L. Vervliet, French Renaissance Printing Types. A Conspectus, London, Bibliographical Society, 2010, et The Palaeotypography of the French Renaissance : Selected Papers on Sixteenth-century Typefaces, Leyde, Brill, 2008.
15 Voir, par exemple, la dernière page du prologue en d3v°, ou la fin du chapitre consacré à Philippe de Macédoine (f5r°) ou celui qui concerne Antiochus, roi de Syrie (h2r°). On relève en tout 13 occurrences de cette disposition en V.
16 Elles mesurent respectivement 77 et 74 mm.
17 Le filigrane aurait pu fournir une information concernant le fabricant et le lieu de production du papier. Malheureusement, le format du livre étant l’in-8°, le filigrane se trouvait pris dans la reliure, au coin du papier plié, et il a sans doute été coupé lors du rognage. C’est un problème classique pour ce type de format : voir Philip Gaskell, A New Introduction to Bibliography, Oxford, Clarendon Press, 1972, p. 106.
18 Nous considérons donc qu’il a existé une première émission en 1544, avec un cahier a « originel » – différent de celui des exemplaires connus – et une page de titre datée de 1544. Elle a fait l’objet d’une notice à part dans l’USTC sous le n° 79980 (voir également Pettegree, Walsby et Wilkinson, FB : French Vernacular Book, n° 7809). C’est aussi le cas dans Yvonne de la Perrière, Supplément provisoire à la bibliographie lyonnaise du président Baudrier, fasc. I, Paris, Bibliothèque nationale, n° 65, p. 19 et dans Sybille von Gültlingen, Bibliographie des livres imprimés à Lyon au seizième siècle (Baden-Baden : V. Koerner, 1992-2012) : Harsy, nos 124 et 137.
19 Voir par exemple la lettrine A, sur les f. E6r° et F3r°, que l’on retrouve dans Josse Clicthove, Introductiones artificiales in logicam collectae, ac familiari commentatio declaratae (Lyon, Denis de Harsy pour les héritiers de Simon Vincent, 1538 : USTC 157252) au f. e3r°, ou la lettrine C au f. k3v°, également visible dans Nicolas de Bohier, Prima pars aurearum decisionum in sacro Burdegalensium Senatu seu Regio parlamento olim discussarum ac promulgatarum quae diligentia et opera nuper recognitae, summariis quoque et indice (Lyon, Denis de Harsy pour Michel Parmentier et Jean-François de Gabiano, 1544 : USTC 149233) au f. c5r°.
20 Cette identification a été rendue possible par la consultation de la base BaTyR, élaborée par Rémi Jimenes et hébergée sur le site des « Bibliothèques Virtuelles Humanistes » (CESR, Université François-Rabelais de Tours) : la recherche sur le S orné a permis d’en trouver une occurrence dans l’édition des Chroniques de Jean Froissart imprimées par Jean I de Tournes, éditées en plusieurs volumes entre 1559 et 1561 (USTC 1171).
21 Alfred Cartier, Bibliographie des éditions des de Tournes, imprimeurs lyonnais, Paris, Bibliothèque nationale, 1937-1938, I, p. 58-59.
22 Claude Paradin, Memoriae nostrae libri quatuor, Lyon, Jean I de Tournes, 1548 (USTC 150083) et Epitome des trois premiers livres d’Artemidore traictant des songes, ibid., 1546 (USTC 39229).
23 À propos du mariage (dont Harsy était témoin), voir Cartier, Bibliographie..., ouvr. cité, I-8.
24 Nous n’avons pu en repérer que huit occurrences dans l’USTC (6771, 37878, 79597, 130013, 150622, 151062, 154723 et 199838).
25 Pour un aperçu sur la diversité de la production de Denis de Harsy, voir Clément Brot, « Quand la “presse” écrit : l’officine lyonnaise de Denys de Harsy, imprimeur libraire à la marque de Dédale », dans Les Arrière-boutiques de la littérature. Auteurs et imprimeurs-libraires aux XVIe et XVIIe siècles, éd. Edwige Keller-Rahbe, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2010, pp. 23-36.
26 La destruction de Troye la grande et Le recueil des histoires de Troye (USTC 40379 et 24288). Les deux pages de titre sont explicites : « On les vend à Lyon chez Denys de Harsy ».
27 Lucien Febvre, « Une histoire obscure, la publication du Cymbalum Mundi », Revue du seizième siècle, XVII (1930), pp. 1-41.
28 D’après les registres des possessions des habitants de Lyon, AM Lyon, CC 24 (cité dans Paul Ducourtieux, Les Barbou imprimeurs, Lyon-Limoges-Paris (1524-1820), Limoges, Ducourtieux, 1896, p. 71). Romain Morin a acquitté la somme considérable de 100 livres de taxe en 1545, quand la cité avait besoin de rassembler 48 000 livres, AM Lyon, CC 40.
29 En moyenne, ces éditions utilisent un peu moins de 15 feuilles – on a vu que l’édition du Tesmoignage en avait nécessité 13.
30 La plupart de ces éditions sont analysées dans William Kemp, « Les petits livres français illustrés de Romain Morin (1530-1532) et leurs dérivés immédiats » dans Il Rinascimento a Lione. Atti del Congresso Internazionale de Macerata, 6-11 maggio 1985, éd. Antonia Possenti et Giulia Mastrangelo, Rome, Edizione dell’Ateneo, 1988, I, pp. 465-525.
31 Il estime qu’une telle édition devrait « être rejetée dans l’ombre » : Delaruelle, Guillaume Budé..., ouvr. cité, p. 245.
32 Ce volume, coté C 81 i 11, présente aussi des provenances moins prestigieuses (merci à David Shaw de nous avoir communiqué une description bibliographique détaillée). Edouard est mort en 1553.
33 BnF, E*47.
34 Description et reproduction de la reliure dans le catalogue de la Vente Pierre Berès. 80 ans de passion. 4e vente : Le cabinet des livres. Mardi 20 juin 2006, Paris, Drouot Richelieu, 2006, pp. 28-30.
35 Bibliothèque Mazarine, 2° 3713 (1).
36 Respectivement Emmanuel College Library, Cambridge (302 5 12), Magdalen College Library, Oxford (Arch B III 3 12) et Bibliothèque universitaire de Turin (Scienze Giuridiche ’Patetta’, 36 B 05).
37 Bayle, dans son Dictionnaire historique, et Clément, dans sa Bibliothèque curieuse, signalaient toutefois l’existence d’une édition datée de 1546, ce que relève en note Delaruelle (p. 234).
38 FB 7811. Leyde, Universiteitsbibliotheek : 20643 B 19 (2).
39 Cité supra note 36.
40 Voir respectivement les folios 22r° et 78r° dans son Antiphonarium de tempore, Troyes, N. Paris, 1545 (USTC 111175).
41 Les particularités de l’édition de Larrivour sont si nombreuses qu’elles excèdent largement le cadre de cette étude et feront l’objet d’une publication à venir.
42 Au f. S6v°, le registre liste tous les cahiers avant d’indiquer qu’ils sont « Touts Ternes » (ou ternions), c’est-à-dire qu’ils sont constitués de trois feuilles encartées les unes dans les autres, équivalant à 6 feuillets ou 12 pages, dans un format in-folio.
43 Tous les exemplaires consultés présentent deux filigranes en alternance, l’un aux Armes de Troyes (écu au chef à trois fleurs de lys et à une bande chargée de cotices potencées et contrepotencées, cf. Briquet 1038-1055), qui apparaît aux cahiers A-K, puis Q-S, et l’autre constitué d’un pot couronné à une anse et surmonté d’une fleur de lys et d’un quadrifeuille, que l’on trouve dans les cahiers K-P (proche Briquet 12789), mais aussi sur les feuillets A1 ou A6/8 des deux exemplaires datés de 1546. Dans les exemplaires datés de 1547, le filigrane des feuillets A1 et A6/8 est un cartouche au nom de J. Nivelle, surmonté d’une fleur de lys (Briquet 7079), en usage à Troyes en 1547-1551.
44 C’est le cas, par exemple, pour l’Histoire de Bretaigne de Bertrand d’Argentré : quand les censeurs en ont interrompu l’impression, l’édition avait été entièrement imprimée, à l’exception des cahiers préliminaires (Malcolm Walsby, The Printed Book in Brittany, 1484-1600, Leyde, Brill, 2011, pp. 117 et 132-133).
45 Voir par exemple la première édition des Poemata de Scévole de Sainte-Marthe (Poitiers, Jean Blanchet, 1596 : USTC 110484). La pagination commence avec un chiffre 9 alors qu’il y a douze pages non paginées (*4 **2) de pièces préliminaires. Cela indique que l’imprimeur pensait initialement ne devoir remplir que huit pages de texte.
46 Voir la notice « Paris » dans Georges Lepreux, Gallia typographica ou répertoire biographique et chronologique de tous les imprimeurs de France depuis les origines de l’imprimerie jusqu’à la Révolution, tome II, Provinces de Champagne et de Barrois, Paris, H. Champion, 1911, p. 185.
47 Breviarium Trecense, Troyes, Nicole Paris, 1543 (USTC 111172) ; Decreta provincialis concilii Senonensis, Troyes, Nicole Paris, 1546 (USTC 111176).
48 Antiphonarium de tempore et de sanctis per totum anni circulum : secundum usum Cisterciensis ordinis, Troyes, Nicole Paris, 1545 (USTC 111175).
49 « Imprimeur à present de hault et puissant seigneur, missire Jean de Luxembourg », dans Jean de La Roche, La vie, et actes triumphans d’une illustre, et renommée damoiselle, nommé Catherine des Bas Souhaiz, femme d’un riche conseiller, au Parlement de Bordeaulx, Troyes, Nicole Paris, 1546 (USTC 57218).
50 Voir par exemple Jean de Luxembourg, L’oraison et remonstrance de haulte et puissante Dame, Dame Marie de Cleves, Larrivour, Nicole Paris, 1546 (USTC 27342).
51 Alexis Socard, Promenades à la bibliothèque de Troyes, Troyes, 1869.
52 Voir par exemple la Nouvelle d’un reverend pere en Dieu et bon prelat de nostre mere saincte Eglise demorant en Avignon, et le moyen comme il resuscita de mort à vie, Troyes, Nicole Paris, 1546, publiée sous le nom de Colin Royer mais qui a souvent été attribuée à Jean de Luxembourg. Voir Corrard de Breban, Recherches sur l’établissement et l’exercice de l’imprimerie à Troyes, Paris, Chossonnery, 1873, pp. 163-164. Mireille Huchon conserve cette attribution dans son article « Pour une histoire du genre de la nouvelle. La vie et actes triumphants de Catherine des Bas Souhaiz et La Nouvelle d’un reverend pere en Dieu de Jean de Luxembourg (1546) », dans Esculape et Dionysos. Mélanges en l’honneur de Jean Céard, Genève, Droz, 2008, pp. 1013-1028. Cette attribution repose en partie sur une note manuscrite portée dans l’exemplaire conservé à la BnF (Rés. Y2 799).
53 « Compte des receptes et mises du revenu de l’eglise et abbaye nostre dame de Larrivour, ordre de Cisteaulx faictes par frere Claude Bourbon religieux et receveur d’icelle abbaye pour hault et puissant seigneur monseigneur Jehan de Luxambourg », 1er octobre 1546-1er octobre 1547, Archives départementales de l’Aube, 1 J 832.
54 Ibid. , f. 93r°-v°.
55 Ibid. , f. 100r°.
56 La Croix du Maine mentionnait dans sa Bibliothèque (p. 239) l’existence d’un livre attribué à Jean de Luxembourg et intitulé Oraison funebre contenant les louanges de Henri II du nom très chrestien roi de France, qui aurait été également imprimé par Nicole Paris, mais cette fois en 1547 (voir USTC 40574). Tant qu’un exemplaire n’en aura pas été examiné, il faut traiter les détails fournis par La Croix du Maine avec circonspection.
57 C’est le cas, par exemple, dans les exemplaires conservés à la Médiathèque Louis-Aragon au Mans (SA fol 893), la Bibliothèque Sainte-Geneviève (Fol R 207 Inv. 225 Rés.) et la Bibliothèque Mazarine à Paris (3713 (2)). Merci à Yann Sordet d’avoir attiré notre attention sur ce point.
58 Voir sur ce point Jean-Christophe Saladin, La Bataille du grec à la Renaissance, Paris, Les Belles Lettres, 2000 et, parmi plusieurs témoignages possibles, celui du De Studio Literarum de Budé : M.-M. de la Garanderie (trad.), L’Étude des lettres : principes pour sa juste et bonne institution, Paris, Les Belles lettres, 1988, p. 56.
59 François Grudé, seigneur de La Croix du Maine, Premier volume de la bibliotheque, Paris, Abel L’Angelier, 1584, p. 239 ; Antoine du Verdier, La bibliotheque, Lyon, Barthélemy Honorat, 1585, p. 716-717.
60 Verdun-Louis Saulnier, « Quel poète pour le Grand-Maître ? Jean de Luxembourg et Montmorency », Bulletin de l’Association Guillaume Budé, 1976, n° 4, pp. 386-400.
61 Archives municipales de Troyes, F 232.
62 Voir la section consacrée à Bogard dans Sylvie Postel-Lecocq et Marie-Josèphe Beaud, Imprimeurs et libraires parisiens du XVIe siècle. Tome V, Bocard-Bonamy, Paris, Service des travaux historiques de la ville de Paris, 1991. L’attribution de l’impression à Bogard est faite par l’équipe Renouard de la Bibliothèque nationale de France d’après le matériel utilisé. Nous remercions Geneviève Guilleminot de nous avoir donné cette information.
63 R. Le Blanc, « Dédicace à Claude de Lorraine, duc de Guise ». La citation se trouve au f. ã 2v°.
64 Delaruelle suppose que cette édition est antérieure à celle de Larrivour, sur la foi notamment des têtes de chapitres.
65 Cette stratégie était monnaie courante dans le monde du livre parisien : Guillaume Cavallat a publié des éditions pourvues d’une date incomplète, à indiquer plus tard. Voir Imprimeurs et libraires parisiens du XVIe siècle. Fascicule Cavellat, Marnef et Cavellat, éd. Isabelle Pantin, Paris, Service des travaux historiques de la ville de Paris, 1986, p. 161, n° 191.
66 Voir Nathanaël Weiss, La Chambre ardente, Paris, Fischbacher, 1889 (qui évoque les sept dernières années du règne) ; Robert J. Knecht, Un prince de la Renaissance. François Ier et son royaume, Paris, Fayard, 1998, en particulier le chapitre 25 (« Les années sombres (1544-1547) »), pp. 495-519.
67 N. Weiss, La Chambre ardente, ouvr. cité, et « La Sorbonne, le Parlement de Paris et les livres hérétiques », Bulletin de la Société d’Histoire du Protestantisme français, n° 34 (1885), pp. 19-28 ; Francis Higman, Censorship and the Sorbonne, a bibliographical study of books in french censured by the Faculty of Theology of the University of Paris, 1520-1551, Genève, Droz, 1979, ch. IV ; Jésus-Martinez de Bujanda, Index de l’Université de Paris 1544, 1545, 1547, 1548, 1551, 1556, Toronto-Genève, Univ. de Sherbrooke-Droz, 1985 ; R. Knecht, Un prince de la Renaissance..., ouvr. cité, pp. 508 et suiv.
68 Sur Dolet, voir surtout les travaux de Claude Longeon et, plus récemment, Étienne Dolet, 1509-2009, éd. Michèle Clément, Genève, Droz, 2012.
69 Sur les quatre exemplaires repérés de cette édition, les uns comportent, à la suite du texte de Dolet, l’Hipparque et l’Axiochus, de même que l’édition lyonnaise ; d’autres présentent des pièces hétérogènes, dont certaines sont relatives à l’exil de Marot. Ces deux états sont signalés comme « Imprimé[s] à Troyes par Nicole Paris ». Toutefois un exemplaire en mains privées comporte en page de titre la seule mention « Lyon », alors qu’il est issu de la même composition typographique, malgré quelques corrections sous presse. Cl. Longeon, Bibliographie des œuvres d’Étienne Dolet, Genève, Droz, 1980, nos 250 à 253 (qui signale une mention faite par L. Potier d’un exemplaire conforme à celui que décrivent G. Berthon et A. Jammes) ; André Jammes, « À propos de l’édition originale ( ?) du Second Enfer d’Étienne Dolet », dans Theatrum orbis Librorum Liber amicorum Presented to Nico Israël on the Occasion of His Seventieth Birthday, Utrecht, HES Publishers, 1989, pp. 224-229 ; Guillaume Berthon, « Quelques nouveautés bibliographiques autour d’Étienne Dolet et Jean de Tournes : les Psaumes de Marot et le Benefice de Jesuchrist traduit par Claude Le Maistre (1544-1545) », Bulletin de la Société de l’histoire du Protestantisme français, 2012, tome 158, p. 676 et n. 22.
70 D’après Claude Longeon, introduction au Second Enfer de Dolet, édition critique, Genève, Droz, 1978.
71 Registres criminels du Parlement de Paris, 14 février 1544, Paris, Archives nationales X2a96, f. 455v°-456v° (cf. Weiss, « La Sorbonne... » art. cit. ; Longeon, Documents d’archives sur Étienne Dolet, Saint-Étienne, 1977, pp. 59 et suiv.). Un premier édit en date du 13 octobre 1543 listait déjà ces livres. Voir F. H. Higman, Censorship and the Sorbonne, ouvr. cité, p. 96-99.
72 Bibliotheca exotica, sive Catalogus officinalis librorum peregrinis linguis usualibus scriptorum, videlicet Gallica, Italica, Hispanica, Belgica, Anglica, Danica, Bohemica, Ungarica, etc. omnium, quotquot in officinis bibliopolarum indagari potuerunt, et in nundinis Francofurtensibus prostant, ac venales habentur, Francfort-sur-le-Main, Peter Kopf, 1610, p. 85.
73 Pour la pièce de vers, voir les Orationes, Lyon, S. Gryphe, 1534, I, XXXVII (USTC 146636 et 146784) ; repris dans les Carminum libri quatuor, Lyon, S. Gryphe, 1538 (USTC 147356), édition critique par Catherine Langlois-Pézeret, Carmina (1538), Genève, Droz, 2009. Dialogus, de imitatione Ciceroniana, adversus desiderium Erasmum Roterodamum, pro Christophoro Longolio, Lyon, S. Gryphe, 1535 (USTC 146891).
74 Commentariorum linguae Latinae tomus primus [-secundus], Lyon, S. Gryphe, 1536 et 1538 (USTC 147027 et 147360).
75 Catherine Pézeret, « Etienne Dolet lecteur des Verrines dans l’article Institutum des Commentaires de la langue latine », Camenae, n° 6, juin 2009 [en ligne]. http://www.paris-sorbonne.fr/IMG/ pdf/Pezeret.pdf (page consultée le 17 avril 2015).
76 Pour une analyse détaillée de ces textes et des convergences de vues entre Budé et Dolet, voir Christine Bénévent, Gwladys Brizard et alii, édition critique de l’Institution du Prince, Classiques Garnier, à paraître.
77 Michel Jourde, « Étienne Dolet et Jean de Tournes », Étienne Dolet..., ouvr. cité, p. 298.
78 Claude Longeon se demande en note si Dolet « fait allusion au recueil d’apophtegmes de Budé, encore à l’état de manuscrit en 1540, dont on tira en 1547 l’Institution du Prince » (E. Dolet, Préfaces françaises, éd. établie par Claude Longeon, Genève, Droz, 1979, p. 88, n. 5).
79 Ainsi l’Exhortation à la lecture de la saincte escripture (Lyon, Dolet, 1542) est-elle réimprimée sans la préface de Dolet (Lyon, B. Arnoullet, 1544) ; de même que Les prieres et oraisons de la Bible (Lyon, Dolet, 1542), reproduite par Jean de Tournes en 1543 (et 1544, mais aucun exemplaire survivant), sans la préface.
80 Voir Guillaume Berthon, « Sulpice Sabon, Clément Marot et l’enseigne du Rocher (Lyon, 1542-1544) : découvertes, énigmes, enjeux », à paraître. Nous remercions vivement l’auteur de nous avoir fait part de son texte avant publication et de nous avoir autorisés à en utiliser certains éléments.
81 Voir, à la suite de l’hypothèse fondatrice de Maurice Escoffier (Autour d’une supercherie de librairie. Clément Marot, Étienne Dolet, Heluyn Dulin, Trévoux, [1965]), les récentes études de Gérard Morisse, « Dolet et son entreprise d’édition », Étienne Dolet..., ouvr. cité, pp. 395-396 ; G. Berthon, « « Quelques nouveautés bibliographiques autour d’Étienne Dolet et Jean de Tournes », art. cit. ; M. Jourde, « Étienne Dolet et Jean de Tournes », art. cit., pp. 303-306.
82 M. Jourde, art. cit., p. 303. Contrairement à Claude Longeon, qui interprète le procédé comme une forme de concurrence agressive à l’égard de Dolet, M. Jourde préfère y voir le signe d’une continuité, voire d’une coopération.