Le réseau des bibliothèques Eucor
Avènement, développement, prolongements
Yves LEHMANN
Université de Strasbourg
Assez paradoxalement, la convention fondatrice de la Confédération européenne des universités du Rhin supérieur (EUCOR) – adoptée à Bâle le 19 octobre 1989 aux fins d’approfondissement de la coopération transfrontalière dans tous les domaines de l’enseignement et de la recherche universitaires : utilisation réciproque des savoirs constitués et des expériences acquises ; échange d’enseignants, de chercheurs et d’étudiants, ainsi que de personnels techniques et administratifs ; validation mutuelle des acquis correspondant aux études effectuées ; mise en place de cycles d’études communs ; réalisation de projets scientifiques communs, création et mise en réseau de banques de données pour la recherche ; organisation de programmes interuniversitaires de formation continue ; coordination transfrontalière des relations extérieures – ne comporte aucun article spécifique sur les bibliothèques EUCOR, ni sur leur finalité instrumentale et synergique au service de la diffusion des connaissances (sous ses formes tant livresque que numérique) dans l’espace universitaire rhénan. Et pourtant, parmi les missions explicitement assignées à la Confédération EUCOR figure l’encouragement de la mobilité étudiante déclinée selon trois aspects institutionnels : la mobilité obligatoire (afférente à l’accomplissement de cursus bi-ou tri-nationaux), la mobilité recommandée (notamment au niveau Master, qui est aussi celui de la formation à la recherche en équipe) et la mobilité libre (pratiquée surtout dans le cadre des études doctorales, où la consultation des ressources documentaires représente un impératif catégorique).
Le principe de la libre circulation des doctorants entre les universités de Bâle, de Fribourg-en-Brisgau, de Karlsruhe, de Mulhouse et de Strasbourg, retiendra ici tout particulièrement l’attention – tant il est vrai que, en vue de la facilitation des déplacements pour raisons scientifiques ou pédagogiques, a été établie une carte d’étudiant commune aux universités du Rhin supérieur et dont les titulaires bénéficient dans les autres universités EUCOR des mêmes avantages accordés à chaque étudiant par son université d’inscription. Or, l’accès aux bibliothèques des cinq universités EUCOR, à leurs fonds de livres anciens et modernes, à leurs réserves d’ouvrages rares et précieux consultables seulement avec une autorisation spéciale, constitue pour les jeunes chercheurs (comme du reste pour les chercheurs confirmés) un enjeu cognitif et informatif de tout premier plan. En tout état de cause, le réseau de bibliothèques permet aux étudiants et collaborateurs des cinq universités d’accéder aux fonds et ressources bibliographiques (virtuelles comme réelles) des sept bibliothèques partenaires. Plus de 14 millions de volumes sont ainsi mis à leur disposition. Avec près de 14 millions de monographies, un fonds riche et varié, à certains égards unique, les sept bibliothèques EUCOR proposent aux étudiants et chercheurs des cinq universités l’accès à un outil dont l’ampleur et la qualité lui permettent de figurer dans le peloton de tête des grandes bibliothèques mondiales dépassant les 10 millions de volumes. La mention de quelques données statistiques1 s’impose ici :
– 160 259 utilisateurs inscrits ;
– 4 134 368 documents empruntés ;
– 13 888 682 monographies ;
– 197 554 revues en ligne ;
– 565 094 documents numériques ;
– 163 390 livres achetés ;
– 21 672 035 budget des acquisitions (en euro/an).
Dans la continuité de cet exposé liminaire sur la Confédération européenne des universités du Rhin supérieur (EUCOR), son histoire, son potentiel actuellement disponible et les axes de son développement ultérieur en matière de formation comme de recherche, il convient d’évoquer succinctement quelques aspects saillants de la politique documentaire d’EUCOR. À cet effet, on rappellera que la coopération pédagogique et scientifique (à la base du réseau) s’est rapidement étendue à des groupes de travail bi-ou tri-nationaux, de même qu’à certains services de documentation, qui ont ainsi eu l’occasion de faire l’apprentissage de la dimension transfrontalière de la coopération. De ce point de vue, les bibliothèques EUCOR représentent un exemple significatif2. On ne manquera pas de signaler d’entrée que sur le site EUCOR, qui a été totalement refondu ces dernières années, il est possible désormais d’accéder aux informations sur la coopération interbibliothèque à la rubrique coopération > réseaux tri-nationaux > bibliothèques3. Tant il est vrai que les bibliothèques tiennent une place privilégiée dans le fonctionnement même des échanges coopératifs tri-nationaux. De fait, les bibliothèques du réseau universitaire EUCOR travaillent ensemble depuis 1989. Elles ont renforcé leur coopération dans les années 1990 avec la mise en place d’une réunion biennale des directeurs (-trices) et, à partir de 1992, la publication d’un magazine d’information d’excellente tenue. Voici, pour une bonne connaissance du dossier, la liste des sept bibliothèques qui participent à cette coopération :
– la Bibliothèque de l’Université de Bâle (Universitätsbibliothek Basel) ;
– la Bibliothèque de l’Université de Fribourg-en-Brisgau (Universitätsbibliothek Freiburg) ;
– la Bibliothèque régionale du Pays de Bade à Karlsruhe (Badische Landes-bibliothek Karlsruhe) ;
– la Bibliothèque de l’Université de Karlsruhe (Universitätsbibliothek Karlsruhe) ;
– le SCD de l’Université de Haute Alsace/Mulhouse ;
– la Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg ;
– le SCD de l’Université de Strasbourg.
Il convient également d’insister sur une des particularités majeures de cette coopération tri-nationale. Car l’originalité d’EUCOR est que, depuis la signature de la convention fondatrice en 1989, l’ensemble des étudiants des universités membres bénéficie, par le biais de la carte d’étudiant EUCOR, de l’accès gracieux aux fonds des bibliothèques des universités EUCOR. L’accès direct au site de chacune des bibliothèques peut se faire en cliquant sur la même adresse : http://biblio.eucor-uni.org. C’est ainsi que les étudiants immatriculés dans les universités EUCOR, tout comme les collaborateurs, peuvent bénéficier d’un accès transfrontalier gratuit aux ressources des bibliothèques susmentionnées. De même que pour les étudiants de l’université partenaire concernée, la gratuité ne s’étend évidemment pas aux prestations payantes qui leur sont propres. Cet accord entre les bibliothèques EUCOR induit en particulier la quasi-gratuité du prêt entre bibliothèques (PEB). Faut-il préciser, à cet égard, qu’en plus des grandes bibliothèques centrales des universités EUCOR un certain nombre d’annexes décentralisées du système bibliothécaire des universités EUCOR est ouvert à leurs étudiants et collaborateurs. Le système EUCOR-Opac propose, de surcroît, un accès virtuel centralisé aux fonds et collections des bibliothèques EUCOR.
S’agissant plus particulièrement des modes de coopération mis en place depuis 1989 entre les sept (aujourd’hui cinq) universités du Rhin supérieur, on se doit de souligner que les représentants des bibliothèques du réseau se réunissent régulièrement chaque année (généralement deux fois) pour s’informer mutuellement de l’évolution de la politique documentaire dans leurs universités et dans leurs espaces nationaux respectifs. Ces réunions débouchent sur la publication bisannuelle d’une brochure commune. Depuis la page Web mentionnée supra on peut également accéder, par la colonne de droite, aux brochures d’information EUCOR dûment répertoriées depuis 1993. On peut ainsi prendre connaissance, dans l’ordre chronologique, des préoccupations successives dont témoignent les acteurs des politiques documentaires allemande, suisse et française au sein d’EUCOR, et des évolutions envisagées et réalisées avec le souci permanent de trouver, en dépit du poids des contraintes locales respectives, un dénominateur commun tri-national : http://www.ub. uni-freiburg.de/eucor/infos/. Enfin, il importe de fournir quelques témoignages concrets de coopération inter-bibliothèques. En matière de réalisations communes, on citera par exemple deux projets hautement gratifiants : il s’agit de l’accès au catalogue EUCOR-Opac (http://www.ubka.uni-karlsruhe.de/kvk/ eucor\_fr.htlm), et de l’entreprise de numérisation des fonds de cartes anciennes afférentes à la rectification du Rhin par Tulla4.
Ce projet de numérisation de fonds cartographiques anciens concernant la région du cours moyen du Rhin a pour thématique principale la rectification du fleuve réalisée tout au long du XIXe siècle par l’ingénieur et directeur des « ponts et chaussées » Johann Gottfried Tulla (1770-1828). La parution de nombreuses cartes et atlas entre 1800 à 1890 permet de suivre pas à pas l’histoire de cette rectification. La mise en ligne de ces ensembles cartographiques contribue à mettre en valeur la richesse du travail des cartographes de cette époque, ainsi que l’évolution du chantier et des usages : interprétations différenciées des frontières entre les États, appellations divergentes des noms de lieux en allemand et en français, etc. Des textes contemporains et des documents d’archives qui permettent d’en savoir plus sur les phases successives des travaux accompagnent ces cartes. Les étapes ultérieures du projet pourraient consister en un référencement géographique des cartes et en la création d’un moteur de recherche permettant une interrogation par les coordonnées géographiques et par les toponymes. L’élargissement à des documents issus d’époques plus reculées est aussi envisagé.
Un troisième projet, particulièrement ambitieux, vient d’émerger. Il concerne plus spécialement la numérisation et l’archivage des ressources bibliographiques en scandinavistique. En effet, les recherches sur l’Europe du Nord, spécialité traditionnelle des Universités de Strasbourg, de Bâle et de Fribourg/Brisgau depuis le XIXe siècle doivent être réactualisées et repensées dans le cadre d’une coopération trilatérale. D’où la nécessité d’un catalogage raisonné du fonds documentaire de l’Université de Strasbourg, de l’organisation de cours communs de niveau Master, de la création d’une université d’été à l’intention des étudiants de la région du Rhin supérieur, enfin de l’élaboration de trois monographies spécialisées et d’articles de revue tous relatifs au thème de réflexion choisi. Car la finalité visée est le renforcement du potentiel universitaire rhénan en scandinavistique et de son optimisation comme centre d’excellence international. D’où la transmission (intervenue récemment) de cet ambitieux projet piloté par le Département d’études scandinaves de l’Université de Strasbourg – avec la participation de l’Abteilung für vergl. germ. Philologie und Skandinavistik de l’Université de Fribourg ainsi que de la Nordische Abteilung de l’Université de Tübingen (membre associé) – au service compétent de la Région Alsace. Il s’avère donc que les relations transfrontalières privilégiées qu’entretiennent les universités du réseau EUCOR – et qui concernent tant les formations d’excellence (avec une attention particulière pour les « petites » voire les « petitissimes disciplines ») que la recherche de pointe – ne sauraient se passer d’un maillage inter-bibliothèque dense et serré, performant et adapté aux besoins toujours nouveaux des usagers (étudiants avancés, post-doctorants notamment) tout comme des enseignants-chercheurs confirmés5.
Par-delà cette présentation de la question des bibliothèques EUCOR à l’ère de la « troisième révolution du livre », il n’est pas interdit d’esquisser une réflexion prospective sur l’avenir proche voire plus lointain de ces organismes scientifiques en fonction des nouveaux médias, dont l’émergence au cours des dernières décennies a transformé radicalement tant la conservation que la consultation des textes, et bouleversé les modalités même de leur transmission6. D’où l’ardente obligation de reconsidérer, dans l’espace académique rhénan, le rôle des bibliothèques EUCOR – sous l’angle du prodigieux essor des nouveaux médias et d’Internet. À cet égard, il convient de favoriser en priorité le recours à l’hypertexte – un procédé qui permet d’accéder aux informations liées à un mot affiché à l’écran de l’ordinateur en cliquant simplement sur ce mot. Et de fait, les années 2000 ont été celles de l’extension d’Internet et de la généralisation de la mise en ligne. Qu’il s’agisse de la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg et des autres établissements EUCOR développant des bibliothèques virtuelles, ou qu’il s’agisse de Google Books, un nombre croissant de volumes est aujourd’hui disponible gratuitement sur Internet. Dernier en date, mais riche de potentialités, le mouvement dit des open archiv (« archives ouvertes »), qui permet de diffuser des ressources documentaires en libre accès sans avoir à les coder, s’inscrit dans la même logique. Dans ces conditions, il n’est plus indispensable de se rendre à la bibliothèque pour avoir accès au texte et à l’information7. Tout montre en effet, note avec pertinence Frédéric Barbier, que
la bibliothèque, qui fonctionnait selon une logique de stock (conserver les imprimés et autres supports), doit aujourd’hui passer pour partie à une logique de flux, soit en reversant dans les nouveaux supports les contenus préexistants (c’est le principe de la digitalisation et des bibliothèques virtuelles), soit en créant directement en ligne des contenus eux-mêmes nouveaux. La définition de l’institution comme désignant un lieu où l’information est tenue à disposition devient problématique dès lors que celle-ci n’est plus disponible par le seul biais de l’écrit et du livre, mais aussi par l’informatique8.
Ces changements qui affectent la mission même des bibliothèques modernes s’inscrivent dans le prolongement du Manifeste sur la bibliothèque publique édité par l’UNESCO en 1972 et qui stipule que la bibliothèque doit fonctionner comme un espace public partagé – assurant l’accessibilité, en principe gratuite, aux ressources documentaires de tous types. Tant il est vrai que le recours à la micro-informatique et à Internet s’est systématisé, en particulier chez les doctorants et les chercheurs avancés, à qui rien de ce qui concerne les usages du numérique n’est désormais étranger. Force est donc pour les bibliothèques EUCOR de rendre – en matière de démocratisation de l’accès à l’information et à la science – des services d’autant plus méritoires que la situation économique est plus aléatoire.
À cause de la conjonction de deux décisions administratives récentes – d’une part la sortie des bibliothèques universitaires du périmètre de la Direction des bibliothèques du ministère de l’Éducation nationale, de l’autre le désengagement progressif de l’État –, le service des bibliothèques est de plus en plus pris en charge par les collectivités territoriales : villes, communautés urbaines, syndicats intercommunaux, départements ou encore régions9. De ce point de vue, le financement décentralisé des bibliothèques universitaires du Rhin supérieur par leurs autorités de tutelle – l’État français et la Région Alsace, les cantons de Bâle-ville et de Bâle-campagne, le Land de Bade-Wurtemberg – apparaît comme une formule novatrice, dont l’exemplarité ne manquera pas de s’imposer au sein de la future Europe des régions métropolitaines.
À un niveau plus conceptuel, la bibliothèque post-moderne du Rhin supérieur se caractérise aussi par l’élaboration de métadonnées visant à enrichir les informations contenues dans le média : veille documentaire, choix raisonné des acquisitions, base de classement, méthode de catalogage, normes de description, sérialisation, création d’outils de travail adaptés à l’objet des différentes recherches entreprises10. D’ailleurs, cette dimension résolument opérative de la bibliothèque de demain se trouve renforcée, en raison de la surabondance de la production imprimée, du matraquage de l’information dans la vie quotidienne et surtout de la difficulté des usagers à évaluer la pertinence des données fournies par les nouveaux médias. Car le principal danger pour le public (constitué d’étudiants aussi bien que de professionnels des métiers de l’enseignement) réside dans l’idée – complètement fausse – que tout est disponible immédiatement sur Internet, et que les informations qu’on y recueille méritent créance a priori. Dans une telle perspective, la bibliothèque EUCOR idéale – en tant que lieu réel ou que ressource virtuelle – représentera un espace privilégié d’organisation et d’appropriation des savoirs par rapport à un encyclopédisme multimédia ondoyant et foisonnant, où il convient d’introduire un ordre intelligible.
Un dernier point mais non le moindre concerne la bibliothèque EUCOR comme « pôle d’apprentissage et de rencontre » 11. Le modèle d’excellence de la bibliothèque publique française contemporaine (on pense évidemment à la nouvelle Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg) associe en effet une ambitieuse fonction didactique – l’initiation à une approche critique des divers supports d’information – et un rôle connexe de forum joué par le bâtiment lui-même qui l’abrite. Dans le cas de la BnuS – soumise à une rénovation et à une restructuration complètes –, l’usager éprouve le sentiment de pénétrer dans un édifice quasi magique qui, dès l’aula, s’apparente à un vaste cône de lumière et à un puits vertical de connaissances – aussi bien profanes que sacrées et dûment étagées, hiérarchisées, inventoriées. Tant il est vrai que le média de l’architecture contribue fortement à la transformation de cette bibliothèque prestigieuse – par tradition, lieu de retraite et d’études – en un espace d’échanges intellectuels toujours recommencés, de discussions hautement érudites entre savants, d’entretiens préparatoires à la conception d’ouvrages généraux, de monographies spécialisées voire de traités techniques. On ne saurait trop insister ici sur l’importance du décor culturel, de l’environnement esthétique de travail, du climat psychologique et moral, tant pour le jaillissement des idées que pour l’élaboration des grandes synthèses qui révolutionnent les perspectives12. Pour autant, la vocation de la bibliothèque EUCOR type ne saurait se limiter à celle d’une structure qui favorise la tenue de colloques singuliers entre universitaires, mais consiste aussi en la promotion de colloques pluriels adossés soit à des équipes de recherche extérieures soit à un centre d’étude sur l’histoire du livre et des médias intégré dans l’établissement. Car le but assigné à ses « espaces publics de la connaissance » 13 est de proposer une vision diachronique des médias qui rende compte de l’articulation entre leur passé et leur présent : dans beaucoup de bibliothèques du Rhin supérieur conservant des collections anciennes et où celles-ci ne sont guère consultées, il appartient à l’institution de les valoriser et de les vulgariser à travers notamment des expositions. On citera, à titre d’exemple, l’excellent travail effectué par Élodie Cuissard dans le cadre du projet INTERREG « Patrimoine humaniste du Rhin supérieur » et qui portait à la fois sur une sélection d’ouvrages du XVIe siècle en vue du programme de numérisation de la Bnu, et sur l’organisation de l’exposition Ottmar Nachtgall : quand Strasbourg chantait l’humanisme. De fait, on se gardera de méconnaître le fait que la pensée occidentale est liée au livre depuis plusieurs millénaires déjà : tout engage à s’approprier cette longue tradition culturelle pour comprendre les changements en cours, qui ressortissent à l’évolution des rapports interpersonnels (sous l’effet des réseaux sociaux) et à la montée en puissance irrésistible de l’individualisme.
Au terme du panorama ainsi tracé de la stratégie documentaire d’EUCOR, on se plaira à souligner que les bibliothèques qui se situent dans le périmètre de la Confédération tendent à se transformer radicalement – en raison même de leurs fonctions inédites de symbolisation et de socialisation. D’abord, ces hauts lieux du savoir seront amenés à représenter l’idéal d’une société fondée sur le droit naturel, c’est-à-dire sur des principes immuables (tels que l’égalité) et supérieurs à la loi. Ensuite, il s’agira pour ces établissements dédiés à la préservation, à la diffusion et même à l’élaboration des connaissances, d’offrir au public concerné un cadre de vie intellectuel, un espace dialogique adapté aux intérêts des uns et des autres. Vaste programme, dont la mise en œuvre nécessite une volonté politique sans faille et des convictions européennes très affirmées.
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1 Chiffres de 2010 qui ont été communiqués à l’auteur par l’ancien secrétaire général d’Eucor, M. Jacques Sparfel – artisan inlassable de la coopération universitaire transfrontalière et fervent humaniste.
2 C’est ainsi qu’une nouvelle dénomination du réseau des bibliothèques EUCOR (Eucor Biblio) a été proposée par le Secrétariat permanent d’EUCOR le 7 octobre 2011 ; de même, l’intégration dans ce site du moteur de recherche Opac a été vivement approuvée.
3 L’acces direct se fait par l’adresse suivante : http://biblio.eucor-uni.org.
4 http://www.eucor-uni.org/site/Cartographie-ancienne-507.htlm, avec l’élaboration de la base de données correspondantes : http://www.ub.uni-freiburg.de/eucor/karten.
5 On rappellera à cet égard que les cinq universités EUCOR comptent aujourd’hui ensemble plus de 10 000 doctorants. Il s’agit d’un public au premier chef intéressé par l’usage des bibliothèques, du fait même des travaux de recherche entrepris. La stratégie EUCOR « horizon 2019 » ayant décidé de mettre l’accent sur la promotion transfrontalière des études doctorales, il paraît hautement souhaitable de sensibiliser les doctorants au potentiel d’exception que leur offre le réseau des bibliothèques EUCOR.
6 Au sujet des tensions que subissent les bibliothèques au tournant du IIIe millénaire, on se reportera à l’ouvrage – désormais classique – de Frédéric Barbier : Histoire des Bibliothèques, d’Alexandrie aux bibliothèques virtuelles, Armand Colin, Paris, 2013 (coll. « U »), et en particulier à la dernière partie de sa conclusion intitulée « La post-modernité, ou les métamorphoses du IIIe millénaire » (pp. 287-290).
7 Élément de progrès technique qui suffit à expliquer la baisse de fréquentation observée dans les grandes bibliothèques depuis quelques années : cf. F. Barbier, ouvr. cité, p. 288.
8 Ibidem.
9 Tendance accentuée encore par deux phénomènes concomitants : 1) la multiplication des difficultés imputables à la grave crise financière du début du XXIe siècle ; 2) la marchandisation de la culture, notamment dans le domaine des droits (droits d’auteur, droits d’image, etc.).
100 Tous modèles de métadonnées propres aux bibliothèques du réseau EUCOR telles qu’elles fonctionnent aujourd’hui.
111 Pour reprendre une formule particulièrement heureuse de Frédéric Barbier, ouvr. cité, p. 289.
122 On se reportera, sur ce point, à la belle étude d’Anne-Marie Bertrand et d’Anne Kupiec : Ouvrages et volumes (Architecture et bibliothèques), Paris, 1997 (« Bibliothèques »).
133 Définition hautement pertinente empruntée à Patrick Bazin.